TF1 et Bouygues Telecom : convergence accrue

En fait. Le 29 mars, le PDG du groupe TF1, Nonce Paolini, a déposé le document
de référence pour l’exercice 2009, dont le rapport annuel, auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Quant à l’assemblée générale des actionnaires, elle se tiendra le 15 avril.

En clair. « 2009 a été l’année la plus complexe de l’histoire de TF1 privatisée. […]
Nous avons connu des réussites, qui contribuent à maintenir nos audiences à des niveaux que beaucoup nous envient. […] En 2009, dans un univers plus fragmenté,
TF1 reste largement leader […] dans l’ensemble des téléspectateurs avec 26,1 % de
part d’audience », déclare Nonce Paolini, PDG du groupe TF1, dans le document de référence 2009 remis à l’AMF. Mais ils sont loins les 31,8 % de part d’audience de 2004. Dans « les risques liées à l’environnement concurrentiel », la télévision numérique terrestre (TNT) et l’Internet sont mis en avant : « Cette situation [concurrentielle] s’est quelque peu accéléré », notamment avec « la lente évolution
des comportement du média Internet, dont les recettes devraient progresser dans les années à venir […]. Dans ce contexte […], la part d’audience de TF1 diminue mécaniquement ». Face à cette tendance, la filiale du groupe Bouygues a accéléré
en 2009 sa diversification dans le numérique et a réfléchi à la convergence.
Nonce Paolini a perçu, l’an dernier, 145.000 euros pour « une mission supplémentaire » confiée par Martin Bouygues « à partir du 1er juillet » pour « mener une réflexion approfondie sur la convergence (entre l’Internet, l’activité des médias et celle de la téléphonie fixe ou mobile) » et « élaborer des stratégies et des propositions d’organisation pour réussir cette convergence ». Fort du succès de son offre quadruple play Internet-TV-téléphone- mobile (EM@9 p. 5), Bouygues Telecom multiplie les offres avec TF1.
En novembre, le portail MyTF1 est lancé sur la « BBox » de l’opérateur mobile. Parallèlement, LCI.fr – site web de la chaîne d’information en continue – est transformé
en TF1 News, accessible sur téléphones Nokia et Android (Google). LCI est aussi déclinée en webradio, LCI Radio, en attendant la RNT. Autre innovation, celle de TF1 Player lancé sur l’iPhone en juillet pour suivre TF1 en direct ou en télévision de
rattrapage : 36.000 téléchargements au 31 décembre 2009. Les autres sites (TF1.fr, Wat.tv, Overblog, plurielles.fr) place TF1 en « huitième groupe de l’Internet en France ». Quant à l’offre de VOD/Catch up, TF1 vision (1), elle est diffusée via le portail éponyme
et chez les principaux fournisseurs d’accès à Internet (2). TF1 table aussi sur le téléviseur connecté, avecc un accord sur trois ans avec Samsung. @

TV : déclin de l’antenne au profit du différé ?

En fait. Le 18 mars, Eurodata TV Worldwide – organisme créé par Médiamétrie,
en lien avec les différents instituts de mesure d’audience – a publié une étude
sur le temps passé devant la télévision dans 89 pays : 3 heures et 12 minutes
en moyenne par jour en 2009, soit 3 minutes de mieux sur un an.

En clair. La catch up TV, ou télévision de rattrapage, l’enregistrement numérique pour regarder plus tard, le timeshifting pour voir juste après, ainsi que la télévision sur mobile, favorisent l’émergence de la télévision vue en différée, c’est-à-dire délinéarisée et émancipée de ses grilles de programmes. Alors que l’on disait l’audience de la télévision en déclin face à la poussée du Web et des autres écrans en ligne, voilà qu’elle continue de progresser de… 3 petites minutes en un an. Cette durée d’écoute par individu a même battu un record depuis 2004, les années mesurées précédemment montrant une faible augmentation de 1 à 2 minutes. Sans doute faut-il trouver la raison dans le différé que l’étude d’Eurodata TV Worldwide (1) prend en compte dans seulement 8 pays (2) sur les 89 mesurés pour 3 milliards de téléspectateurs et 2.000 chaînes. Au Danemark, en Finlande, en Norvège et en Allemagne, pays que l’étude prend en exemple pour montrer l’évolution des audiences « après intégration du différé dans le système de mesure d’audience », on constate que l’audience de l’antenne seule est à chaque fois en déclin avant la prise en compte du différé. Dès lors que le catch up TV, le time-shifting grâce aux magnétoscopes numériques (PVR et DVD-R avec disque dur) ou la télévision sur mobile sont mesurées, l’audience de la télévision reprend des couleurs. Comme le dit Jacques Braun, vice-président d’Eurodata TV Worldwide, « le différé fait toute la différence ! ». Cette année, 9 autres pays intégreront le différé dans leurs mesures. En France, où Médiamétrie ne mesurera cependant pas le différé avant janvier 2011, la télévision s’en sort quand même de justesse avec un gain d’une petite minute en 2009, à 3 heures et 25 minutes, par rapport à l’année précédente. De quoi, pour l’instant, oublier le recul de 3 minutes par téléspectateur de l’audience annuelle moyenne des télévisions françaises entre 2007 et 2008. C’est ce qu’a montré Médiamétrie dans son étude « L’année TV 2009 en France » présentées fin février. Le succès de la TNT gratuite (+ 4,1 points d’audience) a contribué à la croissance de l’audience. Qu’en sera-t-il en 2010 ? Sans le différé, l’audience de l’antenne pourrait souffrir, malgré les Jeux Olympiques de Vancouver en février dernier ou la Coupe du Monde en Afrique du Sud attendue en juin prochain. @

RNT : les grandes radios face aux opérateurs mobile

En fait. Le 15 mars s’est tenue une réunion du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) pour faire la synthèse des travaux sur la radio numérique terrestre (RNT). TDF en a profité pour rendre publique, juste avant, son étude sur « l’évolution numérique du média radio » sur les réseaux mobile 3G et LTE.

En clair. La RNT pourra-t-elle enfin être allumée à cet été ou à l’automne, du moins à Paris, Marseille et Nice ? Réponse : le 8 avril lors de la prochaine assemblée plénière du collège du CSA qui doit « discuter sur la délivrance ou non des autorisations en
RNT ». Les grandes stations restent toujours réticentes à financer un « réseau dédié » pour la radio numérique terrestre qu’elles jugent trop coûteux et dépourvu – selon elles – de modèle économique. Faut-il alors se contenter des réseaux mobiles des opérateurs 3G et bientôt 4G/LTE (Long Term Evolution) ? Télédiffusion de France (TDF) a publié, juste avant la réunion du 15 mars, une étude déjà dévoilée par Jacques Donat-Bouillud, directeur de la division radio de TDF, lors d’un colloque sur l’avenir de la radio au  Sénat mi-janvier. Elle conclut à la nécessité de développer « un réseau dédié à la  radio numérique ».
Les réseaux des opérateurs mobiles sont juste vus comme un « complément » ou un
« support d’accompagnement » à la RNT. Motif : la 3G ou la 4G/LTE reviendrait chère pour les grandes radios : « Le coût envisagé pour une station majeure serait de 3,7 millions d’euros par an pour l’ensemble des réseaux des [opérateurs de réseaux mobile] », avance l’étude, un opérateur mobile investissant en moyenne 34 millions d’euros par an pour supporter le transport de la radio numérique (1). Résultat : pour la vingtaine de stations et les quatre groupes (Radio France, RTL Group, NRJ Group et Lagardère/Europe 1), qui cumulent 80 % de l’écoute en France, la facture totale annuelle atteindrait 74 millions d’euros. C’est coûteux pour une audience de 22 % attendue sur les réseaux 3G/LTE d’ici à 2018 et « qui reste faible » car elle représenterait seulement 12 % de l’audience totale d’une radio. L’étude relève surtout les préoccupations des éditeurs, qui « souhaitent conserver la maîtrise de leur réseau principal de diffusion (couverture, qualité des services,…) sur le futur réseau de radio numérique ; et aussi d’éviter tout risque de perte de la valeur créée par l’auditeur, au travers de la création d’un lien direct entre l’auditeur et l’opérateur mobile ». Autrement dit, les grands groupes de radio ne souhaiteront pas être dépendants des opérateurs mobiles, notamment en termes de débits alloués et de monétisation de l’audience :
« Les opérateurs mobiles, pourraient venir capter une partie de la valeur crée par la radio ». @

eEurope : – 4,5 millions d’« emplois » d’ici à 2015 ?

En fait. Le 17 mars, la Chambre internationale de commerce (ICC) a publié une étude intitulée « Promouvoir l’économie numérique ». Elle a calculé que les industries créatives en Europe pourraient perdre, rien que cette année, jusqu’à
17 milliards d’euros et 345.000 emplois à cause du piratage en ligne.

En clair. Depuis qu’elle a créé en 2005 une instance, baptisée BASCAP (Business Action to Stop Counterfeiting and Piracy) pour « appeler les gouvernements à s’engager plus dans l’application et la protection des droits de propriété intellectuelle », la Chambre internationale de commerce s’est fixée comme objectif de « rendre le public conscient de l’ampleur de la contrefaçon et du piratage et des dommages liés ». Selon son étude commandée au du cabinet de conseil parisien Tera Consultants et rendue publique à Bruxelles, « le piratage numérique, qui recouvre les diverses formes du piratage en ligne, dont l’échange de fichiers (peer to peer – P2P), est le responsable
de la majeure partie des pertes économiques des industries créatives ». Résultat : le manque à gagner total des industries créatives au sens large – musique, cinéma, télévision, édition, publicité, services en ligne de distribution de contenus ou encore logiciels – risque de s’élever à un total cumulé de 217 milliards d’euros de 2010 à 2015 dans l’Union européenne « si la politique actuelle ne change pas » (1). Et selon nos informations, cela provoquerait une perte totale et cumulée supérieure à 4,5 millions
de « pleins temps annuels » sur ces cinq ans, dont 1,2 million d’emplois en 2015. Car, si les médias n’ont retenu que ce dernier chiffre « cumulatif », l’impact social du piratage numérique pourrait être bien plus négatif.
« Le piratage numérique pourrait provoquer entre 2010 et 2015 la perte d’environ
4.5 millions de pleins temps annuels, si l’on prend cette unité de mesure et non pas
la notion d’emploi stricto sensu », indique à Edition Multimédi@ Patrice Geoffron,
directeur de l’étude et professeur à l’Université Paris-Dauphine. C’est beaucoup
au regard des quelque 14 millions d’emplois actuels en Europe dans les industries créatives. Cette hypothèse haute de destruction de valeur et d’emplois s’appuie sur
le scénario le plus sombre avancé par Tera Consultants, à savoir une croissance du piratage numérique sur Internet qui prend en compte non seulement les échanges
de fichiers via les réseaux P2P, mais aussi le streaming. Alors que dans le scénario
le moins sombre, où seuls les échanges de fichiers sont considérés (mais pas toutes communications effectuées via le protocole IP), les dégâts s’élèvent à 144 milliards entre 2010 et 2015, et un total d’un peu plus de 2,7 millions de pleins temps annuels. @

Presse en ligne versus kiosques à journaux

En fait. Le 15 mars, la directrice générale de « La Tribune », Valérie Descamps,
a indiqué à l’AFP que le quotidien économique racheté en février 2008 par Alain Weill à Bernard Arnault (devenu propriétaire des « Echos ») pourrait ne plus être distribué en kiosque « d’ici la fin de l’année ».

En clair. Internet aura-t-il raison des kiosques ? Les 30.000 vendeurs de journaux, indépendants pour la plupart, rémunérés à moins de 20 % du prix de vente, seront-ils les premiers à faire les frais de la destruction créatrice numérique qui touche aussi de plein fouet la presse écrite ? « Nos ventes en kiosque représentent environ 4.000 exemplaires et, compte-tenu des coûts liés à leur diffusion, ce n’est guère intéressant », a expliqué Valérie Descamps, directrice générale de La Tribune, tout en faisant état d’une disparition possible du quotidien des kiosques « d’ici la fin de l’année » pour privilégier l’abonnement papier et la version numérique.
Bien que la direction ait ensuite « exclu de disparaître des kiosques d’ici à la fin de
l’année », cette hypothèse a marqué les esprits. Ironie de l’histoire, France-Soir a lancé
le 17 mars sa nouvelle formule de la dernière chance avec… 500.000 exemplaires mis
en kiosques. Qu’à cela ne tienne: tous les grands quotidiens nationaux, dont la diffusion payée en France a chuté en moyenne de près de 4 % en 2009 selon l’OJD, sont ou seront amenés à se poser la question de leurs ventes en kiosque au regard de la montée en puissance de leur site web à de coûts de diffusion numérique inférieurs
d’au moins 35 % par rapport au support papier. La chute des recettes publicitaires
sur l’édition imprimée (d’environ 20 % pour les quotidiens nationaux), condamne les éditeurs à plus d’économies. Le kiosque des NMPP – rebaptisées en décembre dernier Presstalis (1) – est le symbole du malaise de la presse française. De plus, à l’heure du profiling en ligne et de la publicité ciblée, voire personnalisée sur le Web, le kiosque ayant pignon sur rue ne permet pas de connaître le client-lecteur. Or les annonceurs sont de plus en plus exigeants vis-à-vis des éditeurs de journaux, notamment en matière de segmentation de clientèle et de retour sur investissement publicitaire.
Au moment où Bruno Mettling (inspecteur des Finances) rend (le 30 mars) son rapport au Premier ministre sur la réforme des NMPP, la décision d’Alain Weill, propriétaire de La Tribune et PDG du groupe NextRadioTV, est un signal négatif pour les kiosquiers. Le concurrent des Echos a déjà supprimé son édition papier du samedi pour la vendre uniquement sur le Web. Depuis le début de l’année, Alain Weill table sur le potentiel offert par l’iPhone . En attendant, l’arrivée de l’iPad en avril… @