News Corp. préfère Apple (fermé) au Web (ouvert)

En fait. Le 2 février, le groupe de médias News Corp. annonce tout à la fois le lancement de The Daily, un premier quotidien payant créé dans un premier temps pour l’iPad, et, par ailleurs, la mise en vente de son réseau social en perte de vitesse MySpace, six ans après l’avoir acheté au prix fort.

En clair. Le magnat australien Rupert Murdoch est plus à l’aise dans un monde payant que dans un univers gratuit. Son groupe est un véritable conglomérat des médias (Dow Jones/Wall Street Journal, The Times/SundayTimes, Fox, Twentieth Century Fox, The Sun, MySpace, HarperCollins, Sky, BSkyB à 39 %, Hulu à 32 %, …) aux 32,8 milliards
de dollars de chiffre d’affaires, pour un bénéfice net de 2,5 milliards et quelque 50.000 employés dans le monde (1). Mais le PDG fondateur, qui va fêter ses 80 ans le 11 mars prochain, n’a pas eu de chance avec Internet qu’il a eu du mal à adopter. Il a fallu que
son plus jeune fils, James Murdoch (2), entre dans le groupe en 1997 et insiste pour l’intéresser enfin au Web… juste avant l’éclatement de la bulle. Plus de dix ans plus tard, voici que le « papa » milliardaire doit se rendre à l’évidence : MySpace, le réseau social qu’il a acquis près de 600 millions de dollars en 2005 (c’était très cher pour alors deux ans d’existence), a été laminé par Facebook. Il s’agit maintenant de trouver un repreneur. Face à la baisse de la publicité sur le réseau social, dont la fréquentation a diminué faute d’avoir su convaincre les fans de musique, il a fallu déprécier, supprimer la moitié des effectifs (500 postes), restructurer Digital Media Group. Même la femme du PDG, Wendi Murdoch, fut appelée à la rescousse en mai dernier pour « apporter des conseils stratégiques pour le développement de MySpace en Chine ». Cela n’a pas suffit. MySpace a contribué à faire perdre 156 millions de dollars au groupe (3), malgré ses 100 millions d’utilisateurs.
Rupert Murdoch a déjà tourné la page : il investit 30 millions de dollars dans un nouveau quotidien en ligne, The Daily, pour lequel ont été recrutées une centaine de personnes.
Il s’agit du second journal – après le mensuel The Project de Richard Branson – à n’être produit que pour l’iPad (avant d’être décliné sur d’autres tablettes). Cette fois, ce n’est pas du gratuit financé par de la publicité mais un modèle payant (14 cents/jour, 99 cents/semaine ou 39,99 dollars/an) dans l’environnement fermé d’Apple. En avril 2010,
le magnat de la presse avait dit que l’iPad « pourrait être le salut des journaux » et que The Daily allait « se vendre à des dizaines de millions d’exemplaires dans le monde ». Depuis qu’il a acquis le Wall Street Journal mi-2007, Murdoch est devenu un militant de
la presse online payante. The Times et The Sunday Times ont aussi abandonné la gratuité l’été dernier. @

Alcatel-Lucent, Orange, la neutralité et les contenus

En fait. Le 8 février, se sont tenues à la Maison de la Chimie les 2e Rencontres parlementaires sur l’économie numérique – organisées et présidées par le député Jean Dionis. Thème majeur : la neutralité de l’Internet. Parmi les intervenants : l’équipementier Alcatel-Lucent et l’opérateur France Télécom.

En clair. Gabrielle Gauthey, directrice des relations institutionnelles d’Alcatel-Lucent,
et Pierre Louette, directeur exécutif et secrétaire général de France Télécom, étaient
sur la même longueur d’onde. Tous les deux ont prôné la « nécessité d’investir » dans
les réseaux fixes et mobiles pour « éviter la congestion » face à l’« explosion de la vidéo sur Internet ». Pour celle qui fut membre de l’Arcep, il faut trouver « un équilibre entre investissement et gestion du trafic » mais « ne pas trop légiférer » en matière de neutralité du Net – d’autant que, affirme-t-elle, « rare sont les pays qui ont légiféré ». Il s’agit donc pour elle de « définir les gestions de trafic acceptables » et même « réfléchir à une discrimination intelligente » pour optimiser la gestion des réseaux, de façon à ne pas se retrouver dans une situation de « saturation » où AT&T s’est retrouvé l’an dernier.
Le groupe franco-américain Alcatel-Lucent est l’un de 15 membres du bureau du Bitag (Broadband Internet Technical Advisory Group), où l’on retrouve Cisco, Time Warner, Disney, News Corp., Verizon, AT&T, Intel, Microsoft, Comcast ou encore Google.
Le Bitag, qui tiendra sa première réunion (1) les 23 et 24 février, s’est fixé comme
« mission de trouver un consensus sur les pratiques de management des réseaux haut débit ou autres techniques qui peuvent affecter l’expérience Internet des utilisateurs,
y compris sur les applications, les contenus et les terminaux connectés ». France Télécom n’en est pas membre mais partage les mêmes objectifs qu’Alcatel-Lucent,
l’un de ses principaux fournisseurs. « Les services gérés tels que la TV sur IP et la téléphonie sur IP doivent continuer. Il y a deux pistes de travail : la terminaison d’appel “data” qui serait payée par le fournisseurs de contenus ; la contribution des producteurs de contenus au financement du réseau », explique Pierre Louette. La terminaison d’appel Internet reviendra à généraliser le peering payant (2) entre les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) pour prendre en compte l’« asymétrie croissante des flux ». Lors de ces rencontres et au moment où le Parlement discute de la transposition du Paquet télécom et de la neutralité du Net, le ministre de l’Economie numérique, Eric Besson, a indiqué qu’un groupe de travail sera constitué pour « réfléchir aux modalités permettant de faire contribuer les fournisseurs de services Internet au déploiement des réseaux et à la création culturelle ». L’APC (cinéma) et la Sacem (musique) ont été les premiers à s’en féliciter. @

Bientôt la 5G !

Nos rapports avec nos équipements et services mobiles ont beaucoup changé depuis dix ans. En ces temps de transition avancée, nous avons vu rapidement évoluer nos pratiques. C’est finalement moins la performance de nos nouveaux terminaux LTE (Long Term Evolution) qui nous étonne
qu’une nouvelle manière de nous approprier un véritable écosystème de services accessibles via un ensemble d’équipements proposant des services en continu. A domicile, dans la rue, dans
les transports en commun, en voiture ou au bureau, la promesse depuis longtemps annoncée du « Anything, everywhere at anytime » est tenue. Finalement, ce changement d’un réseau mobile à l’autre s’est fait à la fois très progressivement mais aussi très différemment des deux précédents passages. L’arrivée de la 2G et le succès surprise du GSM, dont le premier réseau fut inauguré en Finlande en 1991, nous fit découvrir le vrai potentiel de ce nouveau moyen de communication individuel.

« La promesse depuis longtemps annoncée du “Anything, everywhere at anytime” est tenue. »

Salon CES : le tout-connecté nuira-t-il à l’Internet ?

En fait. Le 9 janvier, se sont refermées les portes de la grande foire internationale de Las Vegas de l’électronique grand public et du tout-connecté à l’Internet.
Les mobiles, les tablettes, les téléviseurs, les gadgets, la maison, les objets,
… Il y aura vraiment de plus en plus de monde sur la ligne.

En clair. C’est à se demander si les réseaux de communications électroniques pourront supporter tous ces terminaux et objets connectés, tant ce fut une débauche d’innovations technologiques au Consumer Electronics Show (CES). Mais à Las Vegas, la question de l’explosion des flux sur Internet ne se pose jamais. Et la question du
« Qui finance le réseau ? » sur fond de débat sur la Net Neutrality encore moins ! Même si les tablettes multimédias ne représenteront pas les volumes qu’atteignent
les smartphones dans le monde, elles ont tenu la vedette au salon international des technologies grand public (Xoom de Motorola, Sliding de Samsung, Streak 7 de Dell, LePad de Lenovo, PlayBook de RIM, Iconia d’Acer, …). Par leur puissance multifonction, elles ont même relégué au second plan les liseuses (Kindle d’Amazon, Nook de Barnes & Noble, …) qui avaient fait l’affiche du précédent CES. Les contenus multimédias des tablettes laissent ainsi présager une augmentation dans l’utilisation de la bande passante de l’Internet déjà bien sollicité. Les fabricants de téléviseurs connectés, ou « Smart TV » (LG, Samsung, …) rivalisent pour offrir – Over The Top (1) – du contenu Web innovant et attractif. Sony par exemple a présenté Qriocity, un service de diffusion de films en streaming (flux continu) sur ses téléviseurs connectés Bravia. Cela promet là aussi des flux continus supplémentaires sur les réseaux, même si Apple TV a encore brillé par son absence à Las Vegas (2) et si Google TV a retardé la disponibilité de son offre. Les smartphones, eux, montent en puissance (microprocesseur « double cœur » chez Motorola et LG) et promettent d’être plus gourmant en capacités réseaux sur l’Internet mobile. A cela s’ajoute la maison qui se raccorde elle aussi au réseau des réseaux avec des appareils dits « intelligents » dans toutes les pièces (électroménager, surveillance, gestion d’énergies, robots ménagers, …). Bref, ça se bouscule au portillon. En 2010, dans le monde, il s’est vendu 260 millions de smartphones, 30 millions de TV connectées et 20 millions de tablettes. Après un crû CES 2011 encore exceptionnel en appareils en tout genre raccordables au Net, le risque de saturation des réseaux face à l’explosion du trafic devrait monter encore d’un cran. De quoi apporter de l’eau au moulin des opérateurs télécoms qui veulent instaurer plus de péages sur leurs infrastructures. @

Vers une « exception culturelle » fiscale pour les œuvres vendues en ligne en Europe ?

La Commission européenne a lancé une consultation – jusqu’au 31 mai 2011 – en vue de réformer la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). La question est notamment de savoir s’il faut un taux réduit sur tous les biens culturels, livres et presse compris, vendus sur Internet.

« Distorsion de concurrence », « obsolescence d’un droit communautaire qui n’a pas pris en compte les effets de la révolution numérique », « situation préoccupante »,
« frein au développement de la nouvelle économie », « concurrence aiguë de la part d’entreprises globales non européennes », « retards ». C’est en ces termes que le président Nicolas Sarkozy, fustige la « fiscalité culturelle » en Europe.