Chronologie des médias : aller plus loin dans la réforme ?

La chronologie des médias a été réaménagée par l’accord du 6 juillet 2009,
afin notamment de favoriser l’offre légale. Face aux modifications des modes
de consommations des films, la question est de savoir s’il faut poursuivre
– et jusqu’où – sa réforme.

Par Christophe Clarenc (photo) et Renaud Christol, avocats, cabinet Latham & Watkins

L’apparition de la télévision, divertissement concurrent
mais également nouveau vecteur de diffusion du cinéma,
a été perçue comme une ombre sur la prospérité des
salles obscures (1). La menace s’est renforcée avec
le développement des cassettes VHS.
Les pouvoirs publics français et communautaires ont alors décidé d’intervenir en prévoyant des délais obligatoires entre la délivrance du visa d’exploitation d’un film (visa qui permet sa sortie en salle) et sa diffusion en vidéo ou à la télévision. La chronologie des médias était née.

Directive SMA : régulation du CSA bientôt élargie

En fait. Le 19 décembre, la directive européenne sur les services de médias audiovisuels (SMA), adoptée il y a deux ans, devra avoir été transposée dans chacun des 27 Etats membres. Ce texte étend le respect d’obligations aux services dits « non linéaires ».

En clair. La télévision de rattrapage et la vidéo à la demande sont concernées au premier chef par cette nouvelle régulation jusqu’alors applicable aux seules chaînes de télévision. Tout comme la télévision classique qui est linéaire, ces services audiovisuels non linéaires doivent préserver la diversité culturelle, protéger les enfants et les consommateurs, assurer le pluralisme des médias, interdire l’incitation à la haine, faciliter l’accès aux déficients visuels ou auditifs, promouvoir les œuvres européennes ou encore respecter des règles de publicité et de placement de produits. A compter du 19 décembre, la Commission européenne vérifiera que cette directive « SMA » datée du 11 décembre 2007 a bien été transposée par tous les pays membres. En France,
la loi « Communication audiovisuelle et nouveau service public de télévision » datée
du 5 mars 2009 a déjà modifié le paysage audiovisuel français (PAF) dans ce sens en parlant de « tout service de communication au public par voie électronique permettant le visionnage de programmes au moment choisi par l’utilisateur et sur sa demande, à partir d’un catalogue de programmes dont la sélection et l’organisation sont contrôlées par l’éditeur de ce service ».

Exclusivités sur les réseaux : un sujet embarrassant pour tout le monde

Les conflits sur les exclusivités se sont accumulés ces derniers mois. L’exclusivité iPhone- Orange a été suspendue, tandis que le modèle de double exclusivité Orange-France Télévisions et Orange Sport a été autorisé. La mission Hagelsteen prémunira-t-elle contre d’autres litiges ?

Par Katia Duhamel, avocate, cabinet Bird & Bird

Bâtis sur le sacro-saint principe de l’interopérabilité et de la neutralité, les télécommunications étaient jusqu’à présent ouvertes vis-à-vis des contenus. A l’inverse les médias – soutenues par une réglementation qui cloisonne l’exploitation des œuvres dans le temps et selon leur support de diffusion (chronologie des médias) – ont construit un modèle d’accès discriminant permettant de financer la création des œuvres et dont la valeur réside largement dans des exclusivités de distribution. Ces pratiques se heurtent aujourd’hui à l’évolution des technologies qui permet une personnalisation et une nomadisation croissantes des modes de consommation, de plus en plus indépendants des terminaux et des plateformes (catch-up TV; vidéo à la demande; télévision mobile, etc.). Par ailleurs, la banalisation des flux de communication contraint les opérateurs télécoms à se différencier par les contenus offerts sur leurs réseaux, comme ils le font déjà en offrant des terminaux mobiles subventionnés, packagés dans leurs offres.

L’après-Hadopi : le rôle des fournisseurs d’accès à l’Internet reste à clarifier

La loi « Hadopi » est relativement claire sur ce que les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) doivent faire. Mais elle l’est beaucoup moins sur ce qu’ils peuvent faire pour contribuer au développement de l’offre légale et à la lutte contre le piratage en ligne.

Par Winston Maxwell, avocat associé, cabinet Hogan & Hartson.

La loi « Création et Internet » donne plusieurs rôles bien définis aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI). Ils (1) doivent communiquer à la Commission de protection des droits de l’Hadopi – Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet – l’identité de l’abonné dont l’adresse IP a été relevée par des agents assermentés du CNC, le Centre national du cinéma et de l’image animée, des sociétés de gestion collective ou des organismes de défense professionnelle.

La mission « Création et Internet » est impossible… ou presque

Taxe « triple play », crédit d’impôt, financement de films, taxe sur la pub, licence globale, taxe de terminaux, TVA à 5,5 %… La mission « Zelnik » croule sous les doléances, dont celles du cinéma.

Prise de court, la mission « Création et Internet » – lancée le 3 septembre par le ministre de la Culture et de la Communication, Frédéric Mitterrand, entre les promulgations des lois « Hadopi 1 » le 13 juin et « Hadopi 2 » le 29 octobre – deviendrait-elle impossible ? Les quelques 200 questionnaires et leurs neuf interrogations envoyés aux professionnels des télécoms, de l’Internet, des médias et des industries culturelles – complétés par des « auditions sélectives » – ont déclenché un afflux de propositions pour « améliorer l’offre légale sur Internet et la rémunération des artistes et de tous ceux qui concourent à la création de ces œuvres ».