Orange Studio critique la chronologie des médias

En fait. Le 14 novembre, David Kessler, DG d’Orange Studio et ancien conseiller
« culture et média » de François Hollande à l’Elysée, a critiqué « le facteur bloquant » qu’est la chronologie des médias au détriment de la VOD et de la SVOD. A Edition Multimédi@, il indique son intérêt pour le e-cinéma.

Opérateurs télécoms et plateformes vidéo fustigent les taxes pour financer l’audiovisuel et le cinéma

Opérateurs télécoms et acteurs du Net sont vent debout contre les politiques qui tentent de les faire payer plus pour financer respectivement l’audiovisuel public (hausse de taux) et le cinéma (nouvelle taxe). Les deux mesures ont été rejetées lors des débats en cours sur le projet de loi de Finances 2017.

Les opérateurs télécoms et les plateformes vidéo ne seraient-ils pas devenus les vaches à lait des industries audiovisuelles et cinématographiques ? C’est à se le demander au vu des taxes qui ont été proposées dans le cadre du projet de loi de Finances 2017, lequel est débattu à l’Assemblée national jusqu’au 4 novembre.

Taxe « YouTube » et taxe « Copé »
Pour les plateformes vidéo, « qu’elles soient établies en France ou hors de France », la commission des Finances de l’Assemblée nationale avait adopté le 12 octobre dernier une « taxe YouTube » de 2 % sur les revenus publicitaires et de vidéo la demande (VOD) de ces acteurs du Net. La taxe était même portée à 10 % pour les œuvres pornographique ou incitant à la violence. Le CNC (1), dont la présidente Frédérique Bredin milite depuis longtemps pour cette taxe (2), devait recevoir 70 millions d’euros de cette taxe, le restant allant au budget de l’Etat. Pour les opérateurs télécoms, la même commission des finances avait décidé d’augmenter la taxe « Copé » prélevée sur leur chiffre d’affaires pour financer l’audiovisuel public, passant ainsi de 1,3 % à
1,4 % pour rapporter l’an prochain environ 355 millions d’euros (contre 320 millions en 2016). Cette taxe, surnommée aussi TOCE (3), a été instaurée en mars 2009, d’abord de 0,9 %, puis de 1,2 % en 2015 et 1,3 % en 2016, afin de financer France Télévisions après la suppression de la publicité en soirée. Accroître ce taux évitait d’augmenter la redevance audiovisuelle de 2 euros de la redevance audiovisuel en limitant cette hausse à 1 euro.
Mais le 21 octobre, la création de la « taxe YouTube » et la hausse de la « taxe Copé » ont été respectivement rejetée et refusée par les députés lors des débats. Seul l’adoption d’un amendement du gouvernement prévoit d’augmenter de 25,5 millions d’euros le plafond de la TOCE – donc inchangée au niveau de l’assiette – affectée à France Télévisions.
Avant d’en arriver là, les réactions des intéressés ne s’étaient pas faites attendre, via leur organisation professionnelle respective. La Fédération française des télécoms (FFTélécoms), qui regroupe Orange, SFR, Bouygues Telecom et dix autres, auxquels s’était associé ponctuellement Free (Iliad n’étant toujours pas adhérent…), avait fait
part dès le 14 octobre de leur « grand inquiétude » à propos de la « nouvelle hausse
de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques (…) pour financer France Télévisions au détriment des priorités fixées par le gouvernement en matière d’aménagement numérique des territoires ». Pour les fournisseurs d’accès à Internet (FAI), il fallait choisir entre les taxer pour financer l’audiovisuel public et les inciter à déployer le très haut débit en France. « Cet effort supplémentaire de plusieurs dizaines de millions d’euros se rajoute aux 1,8 milliard d’euros qui auront été acquittés par les opérateurs depuis la création de cette taxe [TOCE] en 2009 jusqu’à cette année, montant cumulé qui représente l’équivalent de 3,8 millions de prises en fibre optique
ou d’environ 18.000 installations d’antennes 4G », a calculé la FFTélécom, présidée
par Régis Turrini, directeur des affaires réglementaires du groupe Altice et secrétaire général de SFR (4).
L’Association des services Internet communautaires (Asic), dont sont membres Google (et sa filiale YouTube), Dailymotion (Vivendi), PriceMinister (Rakuten), AOL et Yahoo (tous les deux détenus par Verizon), ainsi que Facebook, Deezer (Access Industries), Microsoft ou encore Allociné (Fimalac), s’était pour sa part dite « inquiète du retour, chaque année depuis neuf ans à la même époque, au moment de l’examen du projet de loi de Finances, de propositions tendant à mettre en oeuvre une taxation spécifique pour Internet ».

Financer des films pour la salle ou le Net ?
L’Asic, présidée par Giuseppe de Martino, par ailleurs directeur général délégué de Dailymotion, s’était en outre interrogée le 12 octobre sur la cohérence de cette volonté politique de mettre en oeuvre une nouvelle taxation des plateformes d’hébergement de vidéos au regard de la chronologie des médias : « Taxer les revenus des créateurs sur les plateformes de partage de vidéos au profit de l’industrie cinématographique soulève de nombreuses interrogations. D’une part, elle va vraisemblablement consister à demander à la jeune création, aux auteurs naissants d’abonder le CNC et ainsi financer les prochains films français qui sortiront, d’abord et en exclusivité au cinéma ». Les acteurs du Net préféraient que soient plutôt mis en place des mécanismes incitant l’industrie du 7e Art à exploiter ses films – et à « ne pas les laisser dormir sur des étagères » – en profitant de la puissance des différentes plateformes vidéo pour toucher un nouveau public. Face aux opérateurs télécoms et aux acteurs Internet,
les industries culturelles et leurs ayants droits s’étaient frottées les mains, tout en applaudissant ces deux taxes… avant de déchanter.

Les industries culturelles ont exulté
Avant que la « taxe YouTube » ne soit finalement rejetée, l’Union des producteurs
de cinéma (UPC), qui revendique être « le premier syndicat de producteurs cinématographiques en Europe » avec près de 200 producteurs de films membres, avait « remercié » le 14 octobre les députés d’avoir instauré la taxe de 2 % sur les plateformes vidéo pour, selon eux, « réparer une inéquité de régulation aboutissant à ce que ces opérateurs ne contribuent pas au financement des œuvres qu’ils mettent ainsi à disposition, contrairement aux autres diffuseurs de telles œuvres [tels que France Télévision ou Canal+, ndlr] ». La Société des réalisateurs de films (SRF) s’était elle aussi « réjoui[e] de l’adoption en commission des finances d’un amendement visant à créer une taxe sur les revenus notamment publicitaires ou de parrainage des plateformes vidéo sur Internet, de YouTube à Netflix », tout en se félicitant alors de
« ce premier pas fondamental pour enrayer la spirale de l’évasion fiscale des géants du Web ». Quant à l’Union syndicale de la production audiovisuelle (USPA) et au Syndicat des producteurs de films d’animation (SPFA), ils avaient ensemble fait part le même jour de « leur profonde satisfaction » concernant la « taxe YouTube » qui « renforce
le cercle vertueux par lequel tout opérateur qui tire profit de la mise à disposition des œuvres audiovisuelles et cinématographiques doit contribuer au financement de la création à venir ». Les deux organisations s’étaient félicitées que cette taxe de 2 % soit étendue à l’ensemble des modes de consommation en ligne des films et des séries, après la taxe sur les services de VOD payante à l’acte et de SVOD établis en France
et celle – en cours de validation par la Commission européenne – visant les services équivalents installées hors de France (voir encadré ci-dessous). La Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), forte de plus de 58.500 auteurs associés, s’était également « réjoui[e] » de l’adoption de cette taxe de 2 % qui, à ses yeux, faisait coup double. « Ce dispositif est un instrument utile et adéquat pour lutter contre l’optimisation fiscale des géants de l’Internet et pour moderniser le financement de la création audiovisuelle et cinématographique ». C’est en outre, pour la société de gestion collective des droits, une mesure qui permettait d’étendre aux plateformes vidéo en ligne la taxe de 2 % qui existait déjà depuis 1992 sur les ventes physiques de vidéo
(K7 vidéo, puis DVD/Blu-ray) et depuis 2013 sur la VOD. De son côté, la Société civile des auteurs multimédias (Scam) – qui gère les droits de plus de 38.100 ayants droits associés – avait aussi salué cette « taxe YouTube » comme « une décision positive »
et « une question d’équité ». Et d’ajouter alors : « Les revenus des plateformes gratuites proviennent de la publicité dont le montant est valorisé pour une large part par les œuvres audiovisuelles. A l’instar des chaînes de télévision et des opérateurs ADSL, il est logique qu’elles soient soumises au même régime fiscal et contribuent au financement de la création via le CNC ».

25,5 M€ en plus pour France Télévisions
Dans un second communiqué, la Scam avait tenu à faire part de sa « stupéfaction » quant à la limitation de la hausse de la redevance audiovisuelle à 1 euro (au lieu de
2 euros initialement prévus) contre une augmentation de la « taxe Copé » à 1,4 % :
« L’augmentation de 0,1 % de la taxe sur les opérateurs télécoms votée dans la foulée pour tâcher de préserver l’équilibre financier du COM [Contrat d’objectifs et de moyens de France Télévisions, ndlr] ne saurait pour autant assurer sa stabilité dans la durée. Les recettes de cette taxe ne sont pas affectées intégralement au financement de l’audiovisuel public ». La société civile des Auteurs- Réalisateurs-Producteurs (ARP) s’est félicitée le 22 octobre des 25,5 millions d’euros supplémentaires accordés à France Télévisions. @

Charles de Laubier

En France comme aux Etats-Unis, les « box» des FAI verrouillent-elles le marché Internet ?

Alors que la FCC aux Etats-Unis a adopté il y a huit mois une proposition visant à « ouvrir » les « box » des fournisseurs d’accès à Internet (FAI), soulevant un âpre débat outre-Atlantique, la question pourrait se poser aussi en France où la quasi totalité des foyers en ont une pour accéder à Internet.

Aux Etats-Unis, le débat bat son plein sur l’opportunité
d’« ouvrir » à la concurrence les set-top-boxes des câblo-opérateurs ou des opérateurs par satellite. C’est ouvrir la boîte de Pandore pour les uns (les opérateurs télécoms et les industries culturelles) ; c’est ouvrir le marché de l’accès pour les autres (les acteurs du Net et les associations de consommateurs). Plusieurs dizaines d’organisations telles que Public Knowledge, Electronic Frontier Foundation ou encore New America’s Open Technology ont appelé le 17 octobre dernier le régulateur des télécoms américain – la FCC (1) – à poursuivre sa réforme des règles sur les « box ».

Le « monopole des set-top-boxes »
La FCC, dont le président Tom Wheeler(photo) espère mener à bien sa réforme d’ici
la fin de cette année, a en effet adopté le 28 février dernier une proposition ayant pour objectif de rendre le marché des « box » d’accès à Internet et aux services en ligne plus concurrentiel. Et ce, au moment où les offres de contenus vidéo (VOD, SVOD, OTT (2) vidéo, …) se multiplient avec le très haut débit. Objectif : permettre aux consommateurs américains de pouvoir choisir le boîtier multimédia qui leur convient le mieux et à des prix moins élevés que ceux pratiqués. Les Américains paient en moyenne 231 dollars par an une telle set-top-box, soit 20 dollars par mois. Cela représente outre-Atlantique un marché annuel d’environ 20 milliards de dollars, préempté par quelques câblo-opérateurs – au premier rang desquels Comcast et Verizon –, lorsque ce ne sont pas des opérateurs par satellite tels que DirecTV (appartenant AT&T prêt à s’emparer de Time Warner) ou Dish Network.
Les organisations de consommateurs dénoncent ce « monopole des set-top-boxes ». La FCC, qui constate en outre que le coût de location d’un tel boîtier a fait un bond de 185 % depuis 1994, pense qu’« ouvrir » le marché de l’accès à Internet à d’autres appareils que les seules « box » permettrait d’animer un marché pour l’instant oligopolistique et coûteux pour les consommateurs victimes de « strangulation » (CQFD). Pourquoi ne pas permettre en effet un accès au réseau à partir de tablettes, de téléviseurs connectés ou d’autres appareils multimédias de type magnétoscope numérique ? C’est commercialement impossible, en raison du blocage des fournisseurs d’accès à Internet (FAI) américains. De leur côté, Google, Apple, Amazon, Tivo, Roku ou encore des fabricants de smart TV plaident pour ce déverrouillage du marché des
« box ». Par exemple, Google a lancé le 3 octobre aux Etats-Unis une set-top-box (ou streaming media player) basée sur Android TV version 6.0 et baptisée « Mi box » (3). La bataille de l’accès est en fait celle du contrôle media center ou de la video gateway dans les foyers. C’est aussi un vaste changement complet d’écosystème qui s’annonce, si la réforme proposée par la FCC aboutie malgré un lobbying intense des FAI et des ayants droits (The Copyright Office, MPAA, …). Les consommateurs ne seraient alors plus obliger de s’abonner à une set-top-box mais pourront choisir leur appareil de connexion, et avoir le droit de changer facilement de FAI comme bon leur semble. Switcher d’un câblo-opérateur vers un OTT, ou vice versa, se fera sans contraintes. Cette ouverture du marché devrait accélérer la tentation du cordcutting (4), où le consommateur décide de s’affranchir de tout FAI pour accéder aux offre vidéo et
TV sur Internet. Ce que propose la FCC est une régulation disruptive sur un marché encore captif de la « box ». Les fabricants de settop- boxes traditionnels pour le marché américain – comme l’américain Arris International et le français Technicolor – verraient alors leur chiffre d’affaires sérieusement impacté. Le débat en cours aux Etats-Unis
sur les set-top-boxes porte aussi sur la protection de la vie privée, d’une part, et sur la neutralité du Net, d’autre part (5), avec des considérations sur la pratique du zero-rating (6).
Qu’en est-il en France ? L’Hexagone compte plus de 27,2 millions d’abonnements (dont 80 % ADSL) à une « box » Orange, SFR, Bouygues Telecom ou encore Free, lesquels FAI détiennent à eux quatre la quasi totalité du marché d’accès fixe à Internet – tout comme de l’accès mobile d’ailleurs.

Suprématie des FAI en France
Récemment, des chaînes de télévision locales se sont plaintes auprès du CSA du changement non concerté de leur canal sur la « box » des FAI. Des hausses tarifaires sont également injustifiées aux yeux des abonnés, comme chez SFR cet été. Videofutur s’est résolu à lancer sa propre « box » faute d’avoir eu accès aux « box » des FAI. Autre inconvénient : à l’heure du direct, les décalages numériques des « box » sont de plus en plus mal vécus. De là à remettre en cause la suprématie des FAI de l’Hexagone, il n’y a qu’un pas. @

Charles de Laubier

Le groupe Canal+ s’affirme plus que jamais comme le régulateur du cinéma français

Après avoir présenté le 18 octobre aux professionnels du cinéma français ses propositions de réforme de la chronologie des médias, Maxime Saada – DG de Canal+ – les a détaillées dans une interview au Film Français. Contacté par EM@, le CNC se défend d’être hors jeu et poursuit ses « contacts bilatéraux ».

Ce n’est pas le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) qui orchestre les négociations sur la chronologie des médias mais, plus que jamais, Canal+ en tant que premier pourvoyeur de fonds du cinéma français (près de 200 millions d’euros par an). Directeur du groupe Canal+ depuis un peu plus d’un an, Maxime Saada (photo) a présenté en deux temps ses propositions sur l’évolution de la chronologie des médias – laquelle régente la sortie des nouveaux films selon différentes
« fenêtres de diffusion ». Actuellement, les salles de cinéma bénéficient d’une exclusivité de quatre mois. Ce monopole est suivi par la VOD et les DVD, puis par les chaînes payantes, avant les chaînes gratuites et ensuite la SVOD
qui arrivent bien après.
Le patron de Canal+ a d’abord exposé oralement sa position lors d’une réunion avec professionnels du cinéma français qui s’est tenue le 18 octobre en présence du Bureau de liaison des industries cinématographiques (Blic) (1), du Bureau de liaison des organisations du cinéma (Bloc) (2) et de la société civile des Auteurs- Réalisateurs-Producteurs (ARP). Le CNC, lui, n’était pas présent à cette réunion, pourtant déterminante pour l’avenir du cinéma français. Dans la foulée, Maxime Saada a détaillé plus avant et par écrit ses mesures dans une interview exclusive accordée à l’hebdomadaire Le Film Français.

La chaîne cryptée de Vivendi joue l’« agit-prop »
Le timing de l’annonce était savamment synchronisé pour que le pavé soit lancé
dans la marre du Septième Art français tout juste avant les 26e Rencontres cinématographiques de Dijon (RCD) que l’ARP a organisé du 20 au 22 octobre.
Autant dire que cette annonce fracassante de la chaîne cryptée du groupe Vivendi
était de toutes les conversations au cours des trois jours de ce rendez-vous annuel,
où le tout-cinéma français a l’habitude de se rendre. Le CNC, lui, censé coordonner
les discussions sur le financement du cinéma français et sur la chronologie des médias, était étrangement absent des débats. Les propositions de Canal+ sont censées relancer les négociations qui – à cause de « la chaîne du cinéma » justement – s’étaient enlisées dans un statu quo persistent depuis près de deux ans (3).

Le CNC est-il devenu hors jeu ?
Alors, le CNC est-il hors jeu ? Contacté par Edition Multimédi@, son directeur général Christophe Tardieu nous a répondu : « Je ne crois pas que le CNC soit hors jeu du débat sur la chronologie car tout le monde souhaite que nous agissions dans ce domaine ! Il ne faut pas confondre le débat public, avec tout ce que cela peut comporter d’intoxication et de postures, et le travail en souterrain pour définir les positions acceptables. Accessoirement nous étions déjà informés de la position de Canal avant les sorties dans la presse ». A l’heure où nous écrivons ces lignes, aucune date de réunion inter-professionnelle n’a cependant encore été fixée par le CNC. Interrogé
en marge des RCD à Dijon Maxime Saada a pourtant indiqué à EM@ que « les négociations vont commencer dans quelques jours » mais sans avancer de date. Précision de Christophe Tardieu sur le calendrier : « Aucune date n’est encore fixée pour une réunion plénière sur la chronologie des médias. Pour le moment, nous privilégions des contacts bilatéraux avec les différents protagonistes pour voir quelles sont les évolutions pouvant être consensuelles ». Et d’ajouter : « La question n’est pas d’avantager Canal ou d’autres. La question est plutôt de dire qu’il n’est pas illogique d’avantager dans la chronologie des médias les structures qui contribuent le plus à l’économie du cinéma ».
Depuis un certain « projet d’avenant n°1 » à l’accord du 6 juillet 2009 sur la chronologie des médias, avenant présenté par le CNC en janvier 2015 dans sa première mouture (4), le réaménagement de la chronologie des médias n’a toujours pas été fait en raison des exigences de Canal+ et du blocage des exploitants de salles de cinéma. L’an dernier, Canal+ avait conditionné la poursuite des renégociations sur la chronologie des médias à la signature préalable avec le 7e Art français de son accord quinquennal sur ses engagements dans le préfinancement de films (en échange de leur exclusivité).
Ce que Rodolphe Belmer, alors directeur général de Canal+, avait obtenu en mai 2015 – juste avant le Festival de Cannes. Cet accord 2015-2019 a prolongé le précédent accord 2010-2014 signé, lui, en décembre 2009 : Canal+ s’était engagé à consacrer 12,5 % de son chiffre d’affaires à l’achat de films européens et français (5), ou, si cela est plus intéressant pour le cinéma français, à payer un minimum garanti de 3 euros par mois et par abonné. Cette année, les choses ont changé pour « la chaîne du cinéma » payante, reprise en main par Vincent Bolloré qui est à l’origine de l’éviction de Rodolphe Belmer en juillet 2015 : la baisse du nombre d’abonnés (500.000 en moins
en trois ans, passant en dessous des 4 millions) a contraint Canal+ à scinder son offre (Cinéma, Sport, Série, Family) en instaurant de nouveaux tarifs allant de 19,90 euros à 99 euros par mois (au lieu de seulement 39,90 euros par mois), lesquels entreront en vigueur le 15 novembre. Du coup, Canal+ souhaite non seulement revoir l’accord de 2015 avec les organisations du cinéma français – notamment sur le minimum garanti par abonné qui risque selon elle de lui coûter trop cher (6) – mais aussi chambouler
la chronologie des médias à son avantage – notamment en ramenant sa fenêtre de diffusion de dix à six mois après la sortie d’un film en salle obscure.

Ce coup-double de la part de Canal+ était accueilli de deux façons aux RCD de Dijon. Les propositions faites sur la chronologie des médias semblent satisfaire la plupart des organisations du cinéma, notamment celles – comme la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) ou la Fédération nationale des distributeurs de film (FNDF)
– décidées à « sanctuariser » les quatre mois de la salle. Là où le rapport Lescure de mai 2013 et le CSA dans la foulée préconisaient le passage de la VOD de quatre à
trois mois, la chaîne cryptée, les exploitants de salles et les distributeurs de films font toujours barrage à cette évolution. A l’instar de Maxime Saada et de Jean-Pierre Decrette, président du Blic et président délégué de la FNCF, Victor Hadida, président de la FNDF, a expliqué à Edition Multimédi@ que « le piratage de films sur Internet explose dès que les films sont disponibles en DVD et en VOD ».
Le seul geste que fait Maxime Saada envers la VOD, c’est de « dégeler totalement »
la fenêtre de Canal+ – après y avoir été opposé – pour que les plateformes de VOD n’aient plus à déprogrammer des films lorsque la chaîne payante les diffuse. Il propose en outre de donner un « avantage chronologique » au téléchargement définitif d’un film (dit EST (7)) par rapport à la VOD à l’acte (dite locative). « Je préconise de lui sanctuariser une fenêtre de 15 jours, entre quatre mois et quatre moi et demi, avant de rendre disponible le film en VOD », a-t-il dit dans Le Film Français. La raison est simple : un film se vend plus cher en EST (environ 20 euros) qu’en VOD (3 à 10 euros).

Canal+ veut revoir l’accord de 2015
En revanche, l’idée de Maxime Saada de réviser l’accord quinquennal de 2015 et ses minimums garantis ne convient pas au Bloc, notamment à l’Union des producteurs de cinéma (UPC) qui, le 20 octobre, s’est dite d’accord sur la nouvelle chronologie des médias proposées mais « dés lors que, de manière concomitante », Canal+
« prolong[e] sans changement (…) pour une durée de deux ans » les accords signés avec le cinéma en mai 2015. Or, il serait étonnant que Canal+ accepte de les passer
de cinq à sept ans sans pourvoir en revoir les modalités de calcul. @

Charles de Laubier

Dailymotion : fuite d’effectifs et… chute d’audience

En fait. Le 11 octobre, Giuseppe de Martino – promu début 2016 DG délégué de Dailymotion en même temps que Martin Rogard (photo) – a confirmé à EM@ que ce dernier a quitté le groupe Vivendi « le 1er août » (il est DG de We Are TV). Après la perte de la moitié de ses effectifs, Dailymotion voit son audience chuter.