Numérique : 10 % du divertissement cette année

En fait. Le 14 janvier, l’institut d’études GfK a publié son bilan 2010 du marché français de l’« Entertainment » à travers les ventes physiques et dématérialisées
du livre (50 % du chiffre d’affaires), des loisirs interactifs (22 %), de la vidéo
(18 %) et de la musique (10 %). Le numérique tire la croissance.

En clair. C’est durant cette année que les ventes numériques sur le marché français
du divertissement (Entertainment) va franchir pour la première fois les 10 % du chiffre d’affaires total. « Grâce à cette dynamique inéluctable des marchés dématérialisés, l’ensemble du marché de l’Entertainment – physique et dématérialisé – a de fortes chances de s’inscrire dans un schéma de croissance en 2011, pour dépasser les
8,5 milliards d’euros, dont près de 1 milliard d’euros pour le seul marché dématérialisé », affirme François Klipfel, directeur général adjoint chez GfK Retail and Technology France. L’an dernier, les ventes dématérialisées ont déjà représentées 686 millions d’euros, soit 8,2 % des 8,3 milliards d’euros réalisés de façon cumulée (physique + numérique). Grâce au numérique, qui compense plus que jamais avec ses 30 % de croissance sur un an, le marché du divertissement en France (livres, loisirs interactifs/ jeux, vidéos et musiques) a évité à nouveau en 2010 l’érosion due à l’affaissement des ventes physiques. D’après les chiffres de GfK, ces dernières ne cessent de décroître inéluctablement : -2,1 % entre 2009 et 2010, à 7,69 milliards d’euros. Le marché physique de la musique, par exemple, accuse une baisse de 11,7 % à 719 millions d’euros. Pour le marché de gros, le Snep (1) avait indiqué au Midem que le recul en 2010 a été de 8,9 % (lire EM@28, p. 4). « L’année 2010 marque un tournant dans l’histoire du marché de la musique puisque l’équilibre entre les actes d’achat physique et numérique a été quasiment atteint avec 54 millions de CD vendus et 52 millions d’actes de téléchargement web et mobile [en augmentation de 23,9 % à 93 millions d’euros, ndlr]», constate GfK. La vidéo, elle, représente en 2010 un marché dynamique grâce à l’essor de la VOD qui augmente de 52 % en volume (39,4 millions de téléchargements) et 40 % en valeur (135 millions d’euros). « Force est de constater que le raccourcissement de la fenêtre d’exploitation à 4 mois a tenu ses promesses et a prolongé sur 2010 l’effet positif constaté en 2009 », commente Gaël Babarit, chez GfK. Concernant les loisirs interactifs, jeux vidéos en tête, les jeux en ligne ont généré l’an dernier 400 millions d’euros de chiffre d’affaires – ce qui représente 13 % de ce segment de marché. Quant au marché du livre, il reste encore largement dominé par
le papier mais le livre numérique devrait, selon GfK (2), « commencer à générer des ventes additionnelles en 2011 ». @

Pub en ligne : 34 milliards d’euros sur le DigiWorld

En fait. Les 17 et 18 novembre, à Montpellier, a eu lieu le 32e DigiWorld Summit de l’Idate sur le thème de « Qui finance l’Internet du futur ? ». Au-delà des acteurs eux-mêmes (opérateurs, FAI/abonnés, moteurs, portails, …), la publicité en ligne – « taxe Google » comprise – était dans tous les esprits.

En clair. La publicité est plus que jamais le nerf de la guerre numérique. Surtout qu’un vent de reprise publicitaire – constaté au troisième trimestre par différents médias (presse, télévision, web) – a aussi soufflé sur Montpellier lors des deux journées internationales de l’Institut de l’audiovisuel et des télécommunications en Europe (Idate). Selon ce dernier, les publicités vidéos, mobiles et réseaux sociaux constituent les trois « nouveaux marchés » de la publicité en ligne dans le monde, laquelle enregistre une croissance annuelle (à deux chiffres) supérieure à celle (à un chiffre) des médias traditionnels. Bien que ces trois segments émergents soient encore de taille modeste, à savoir 6,6 milliards d’euros en 2010 sur un marché mondial de la publicité en ligne estimé à 34 milliards d’euros (1), ils sont promis à un bel avenir. Grâce notamment au « poids gigantesque des usages de Facebook, YouTube ou de l’App Store ». Pour l’instant, les réseaux sociaux arrivent en tête avec, rien qu’en Europe,
383 millions d’euros de recettes publicitaires cette année, suivis des vidéos online générant 261 millions et des mobiles affichant 191 millions. Mais, prévoit Vincent Bonneau, directeur Internet à l’Idate, « la publicité vidéo sera le format le plus dynamique » – au point de dépasser les réseaux sociaux dès 2012 et de franchir
1 millard d’euros de revenus publicitaires (2) en Europe courant 2013 ! Même scénario pour l’Internet mobile qui, en Europe, se placera en seconde position de ces trois marchés publicitaires prometteurs – mais en s’arrogeant la première place au plan mondial. Malgré une audience massive, les réseaux sociaux relégués au troisième
plan « connaîtront une progression un peu moins soutenue ».
Cet engouement des annonceurs pour la vidéo est aussi constaté par le cabinet d’études PricewaterhouseCoopers : « Le rich media [multimédia interactif, ndlr] et
la vidéo porteront la croissance de la publicité en ligne », d’autant que « les taux d’interaction se révèlent 20 à 50 fois supérieurs aux taux de clics ». Pour l’heure, ce sont les moteurs de recherches – Google en tête mais visé par la taxe de 1% par les sénateurs français (3) – qui captent plus de la moitié du marché mondial de l’e-pub avec leurs liens sponsorisés – soit 18,6 milliards d’euros en 2010 selon l’Idate. Un poids qui dépassera les 60 % à l’horizon 2014, non sans soulever des questions de position dominante, de transparence des moteurs, de protection des consommateurs ou encore de… taxation de l’e-pub. @

Pourquoi la vidéo menace la neutralité du Net

En fait. Le 17 novembre, lors du DigiWorld Summit de l’Idate à Montpellier, le séminaire
« Média » a fait la part belle à la vidéo en ligne, qui explose de 100 à 130 % par an et qui participe pour plus de la moitié à l’augmentation – de 50 % à 60 % par an – du trafic de l’Internet. Ce n’est pas neutre…

En clair. Imaginez que 40 % du trafic sur Internet soient de la vidéo en ligne mais que ces flux génèrent seulement 4,4 % des revenus du réseau des réseaux. Imaginez aussi que seulement 10 % du trafic sur le Net soient issus des moteurs de recherche mais que ces derniers représentent 26,7 % du chiffre d’affaires généré sur le Net. Cette dé-corrélation entre le trafic et les revenus est à l’origine des craintes des opérateurs télécoms de voir leurs réseaux saturer et des débats remettant en cause la neutralité. Et la montée en charge de l’Internet mobile et l’arrivée de la télévision connectée devraient accentuer le fait que le trafic augmente plus vite que les revenus. Les YouTube, Yahoo, Dailymotion et autres Facebook sont montrés du doigt par les opérateurs télécoms qui veulent un retour sur investissement. Comment ? En instaurant un péage sur leurs infrastructures, notamment à travers une « tarification à la terminaison d’appel data » ou d’un « paiement d’une interconnexion premium par les fournisseurs de services ou de contenus ». Le système de peering, selon lequel les opérateurs du Net s’échangeaient sans facturation mais compensation leurs trafics plus ou moins sysmétriques, est en passe de devenir obsolète avec le déséquilibre des flux provoqué notamment par la vidéo. Les acteurs du Web, de plus en plus gourmands en bande passante, estiment, eux, qu’ils font le nécessaire pour optimiser leur trafic, notamment avec des CDN (1). « Il n’y aura pas de Big Bang », a lancé Martin Rogard, DG de Dailymotion France, affirmant qu’il pouvait y avoir un effet de congestion mais pas de blocage. « Les grands émetteurs de trafic doivent contribuer [au financement
de notre réseau]», a répondu Stéphane Richard, DG de France Télécom. Dans cet écosystème perturbé, l’arrivée de la télévision connectée laisse présager une augmentation exponentielle de la vidéo sous toutes ses formes (VOD, catch up TV,
pub vidéo, …). Les fabricants de téléviseurs, vont à leur tour venir bousculer la chaîne de valeur (lire p. 7). Google TV, Apple TV mais aussi Yahoo ont déjà posé des jalons pour contôler le téléspectateur. Yahoo, dont la directrice « connected TV » pour l’Europe, Shirlene Chandrapal, s’est rendue pour la première fois au DigiWorld Summit, a indiqué à EM@ avoir trois accords européens ; avec le sud-coréen Samsung (2), le japonais Sony et le turc Vestel. Et dans le monde, « Yahoo! TV » est déjà présent sur 5,5 millions de téléviseurs connectés. @

L’apparent paradoxe de la vidéo sur Internet

En fait. Le 5 octobre, l’Institut de l’audiovisuel et des télécommunications en Europe (Idate) a présenté en avant-première les thèmes de sa 32e conférence internationale DigiWorld Summit avec la questionclé « Qui finance l’Internet
du futur ? ». Au cœur des enjeux : l’explosion de la vidéo sur Internet.

En clair. Pour Gilles fontaine, directeur général adjoint de l’Idate, il y a un « apparent paradoxe de la vidéo à la demande (VOD) ». Selon lui, il y a en effet une multiplication
des offres concurrentes sur le marché de la VOD mais en même temps des freins à
son développement comme l’explosion des offres de vidéos gratuites sur Internet (1), piratage en ligne des vidéos, et navigation « cauchemardesque » dans les services.
« Je suis sceptique sur le potentiel de développement de la VOD, qui va rester un
petit marché. En cela, je ne crois pas à la disparition du DVD », a-t-il expliqué.
L’autre facteur défavorable à la VOD reste que les chaînes de télévision n’ont pas dit leur dernier mot face à la délinéarisation. « Les chaînes se différencient de la VOD grâce aux directs, aux exclusivités et aux retransmissions d’événements et de sports,
le cinéma n’étant plus un différenciant face à la VOD », a poursuivi Gilles Fontaine, également coauteur de l’étude « Future Télévision. Stratégies 2020 ». Reste que le paradoxe réside dans la multiplication de l’offre de plateformes de VOD, dont le nombre se situe aujourd’hui autour d’une quarantaine, et l’explosion de la vidéo sur le Net via des sites de partage vidéo comme YouTube et Dailymotion, ou de télévision de rattrapage comme Hulu (2).
« C’est à se demander comment le consommateur va survivre quand il est habitué à naviguer dans une “mosaïque” de dix à quinze chaînes », s’interroge-t-il. Mais cette
« migration Internet » de la vidéo devrait trouver son aboutissement dans le salon.
« Après le câble, le satellite ou encore l’ADSL, la télévision connectée est la dernière brique de la diffusion vidéo, même si la télécommande est encore assez frustre », affirme Gilles Fontaine. Les bouquets de vidéos (chaînes, programmes, films, séries, …) vont se multiplier sur Internet, à l’image de la société californienne Sezmi qui, indique-t-il, propose d’agréger les offres de VOD et de catch up TV pour offrir un service dit “all-in-one personal TV” à des prix adaptés à chaque usage. « Sezmi pourrait amener les utilisateurs à renoncer à des offres de VOD classique du câble, du satellite ou de l’ADSL », estime-t-il. Apple TV ou Google TV devraient eux-aussi bousculer le paysage audiovisuel. « Une offre alternative moins chère sur Internet au bouquet de télévision payante n’est pas exclue ». @

La vidéo sur le Net est « une piste » pour Le Figaro

En fait. Le 12 octobre, Etienne Mougeotte était l’invité de l’Association des journalistes médias (AJM). Le DG adjoint du groupe Le Figaro et directeur
des rédactions (quotidien, magazines, web, …) veut que le chiffre d’affaires provenant du numérique passe « le plus vite possible » de 15 % à 20 %.

En clair. Sans dévoiler les premiers résultats de la nouvelle formule hybride « gratuit-payant » du Figaro.fr lancée en février (1) avec un objectif de 60.000 abonnés d’ici trois ans, Etienne Mougeotte a expliqué que la diversification du groupe Le Figaro passait
par Internet. Au-delà des sites Adenclassified (petites annonces), Ticketac (billetterie), thématiques (santé, automobile, …) et des versions en ligne du Figaro Magazine ou
de Madame Figaro, le groupe de presse va accélérer sur le Web. Interrogé par Edition Multimédi@ sur ses ambitions en matière de vidéo sur le Net, l’ancien dirigeant de TF1
a répondu que « cela peut être en effet quelque chose à regarder, même s’il n’y a pas encore de Web TV rentables ». Et d’ajouter : « Développer la vidéo sur Internet est une piste. Nous faisons déjà de la vidéo sur le Figaro.fr, notamment avec le Buzz Média, mais ce sont des formats courts de quelques minutes ». Le groupe de Serge Dassault, qui a déjà indiqué être prêt à des acquisitions dans le Web, détient 20 % du capital de la société française The Skreenhouse Factory. Habert Dassault Finance en détient autant (2). Créée il y a trois ans par Frédéric Sitterlé, cette société édite le portail vidéo MySkreen et la plateforme documentaire Vodeo TV, tout en possédant depuis juin 34 % d’Imineo (W4TCH TV). Elle réalise en outre Lefigaro.fr et Tvmag.com. Or, l’Institut national de l’audiovisuel (INA) négocie son entrée au capital de cette jeune société pour créer – avec l’aide du grand emprunt (lire EM@ 21, p. 4) – une plateforme de VOD et de télévision de rattrapage. « Il s’agit en effet d’un très beau contrat. Mais je ne peux pas vous dire si [le groupe Figaro] compte monter dans le capital », nous a répondu Etienne Mougeotte sur ce projet. Contacté, le président de l’INA, Mathieu Gallet, nous indique être en discussion avec les actionnaires de The Skreenhouse Factory pour
« une participation de quelques millions d’euros à l’occasion d’une augmentation de capital ». Quoi qu’il en soit, le patron de la rédaction du Figaro constate que « la délinéarisation va inciter à consommer de plus en plus d’images sans passer par le truchement des chaînes ». Internet, qui selon lui « fonctionne comme une agence de presse », va se traduire par « le rapprochement des rédactions web et papier, et ce le plus rapidement possible ». Tenté il y a un an par le toutpayant, Lefigaro.fr lui a préféré le gratuit-payant pour profiter de la reprise publicitaire sur le Net. @