La presse et la radio se lancent à l’assaut de la télé

En fait. « Le 14 mai à 18h00, vous trouverez à cette adresse [Lopinion.fr] un nouveau média : L’Opinion », a annoncé Nicolas Beytout sur son site web avant
le lancement… vers 20 heures. A l’instar de la presse et de la radio, l’ancien patron des Echos mise sur la vidéo pour être plus visible et attirer la publicité.

En clair. La presse et la radio misent de plus en plus sur la vidéo, laquelle ne relève pourtant pas de leur savoir-faire historique. C’est une tendance de fond qui devrait brouiller à terme les frontières qui préexistaient avant l’ère numérique. L’écrit et l’audio
se mettent ainsi à marcher sur les platesbandes de la télévision. Nicolas Beytout parle
de « chaîne vidéo » et de « journal télévisé » (JT) sur L’Opinion, ce qui lui permet de s’immiscer à nouveau dans le PAF (1).
Il faut dire que l’ex-PDG du groupe Les Echos a toujours été attiré par la télévision, non seulement lorsqu’il était directeur de la rédaction du quotidien économique et financier Les Echos (doté de son propre studio télé) mais aussi lorsqu’il avait des vues sur la direction de l’information de TF1 (en 2007), en passant par ses différentes collaborations télévisées (LCI, iTélé, …).
Avec L’Opinion, présenté initialement comme un « bimédia » (web-papier), Nicolas Beytout renoue avec l’audiovisuel. Quelque 40 minutes de vidéo seront proposées chaque jour sur le site web du quotidien pluri-média, dont deux flashes d’information vidéo diffusés à 12 heures et à 21 heures, ainsi qu’un JT à 18 heures. « L’information vidéo aura la même ligne que le journal, c’est à dire libérale, européenne et probusiness », a tenu à préciser le directeur de la rédaction lors d’une conférence de presse le 13 mai dernier. Et contrairement à la majeure partie de L’Opinion qui est payante, la vidéo sera proposée gratuitement.
Cela se comprend aisément : la publicité sur vidéo en ligne (dite in-stream, c’est-à-dire intégrée dans le flux vidéo en streaming) affiche le plus fort dynamisme (+ 50 % à 90 millions d’euros en 2012) du marché français des recettes de la e-pub (2). Les autres médias traditionnels, comme Le Figaro côté presse et RTL côté radio, ne s’y sont pas trompés. Fin mars, le quotidien de Serge Dassault lançait un portail Figaro TV d’actualités vidéo (video.lefigaro.fr). De plus, le quotidien papier propose la fonction Figaro Play pour les détenteurs de smartphone qui souhaitent prolonger en vidéo un article imprimé. Fin avril, RTL commençait à diffuser sur Internet et en direct vidéo de ses studios la tranche 7h-12h30. Mi-mai, Europe 1 faisait de même sur la tranche 6h30-13h. Le journal vidéo et la radio filmée vont bousculer un peu plus la manière de regarder la télé. @

YouTube part à la conquête de la Pay-TV et de la SVOD

En fait. Le 9 mai, YouTube, la filiale vidéo en ligne de Google, a annoncé le lancement d’« un programme pilote pour un petit groupe de partenaires
[54 chaînes thématiques dans un premier temps, ndlr] qui proposeront des chaînes payantes (…) avec des frais d’abonnement démarrant à 0,99 dollar par mois ».

En clair. Le géant du Web se lance à l’assaut du marché mondial de la télévision
payante. Les 54 chaînes thématiques qui sont d’ores et déjà proposées moyennant
des abonnements allant de 0,99 cent à 7,99 dollars par mois, en passant par 1,99 dollar, 2,99 dollars ou encore 6,99 dollars (1). Elles sont accessibles via youtube.com/channels/paid_channels. Si le nouveau service de SVOD de YouTube
a été lancé dans dix pays, comme « programme pilote », force est de constater que toutes ne sont pas accessibles dans chacun des pays. Par exemple, selon nos constatations, 24 d’entre elles ne sont pas accessibles en France. « Désolé, cette chaîne payante n’est pas disponible dans votre pays », nous précise-t-on pour certaines sur la mosaïque des thématiques.
Jusqu’alors essentiellement axé depuis son lancement en février 2005 sur le partage
de vidéos entre particuliers et amateurs financées par la publicité en ligne, YouTube – racheté l’année suivante par Google – fait le pari de la Pay-TV et de la SVOD en même temps. Après avoir lancé des chaînes thématiques originales et gratuites en 2011, dont treize en France (2), YouTube se présente désormais comme un sérieux concurrent potentiel des services de vidéo à la demande par abonnement comme Netflix aux Etats-Unis ou des chaînes de télévision payante comme Canal+ en France. Des films et des séries seront proposés. YouTube dispose de ses propres studios, à Los Angeles, et y investit plus de 100 millions de dollars en subventionnant des producteurs et des artistes. Mais des accords ont aussi été passés avec Paramount Pictures (Viacom) ou Walt Disney.
Les chaînes payantes de YouTube constituent en outre un pas supplémentaire vers
une programmation à la carte, à laquelle les médias traditionnels ont résisté. Les recettes d’abonnements seront réparties entre YouTube et l’éditeur de la chaîne thématique, lequel en gardera plus de la moitié. Quant à la publicité, elle est laissée à l’appréciation des éditeurs de ces chaînes premium. La volonté de YouTube est bien de diversifier ses revenus par delà la publicité en ligne qui profite déjà à plus de 1 million de chaînes vidéo (youtube.com/channels), dont 4.089 dans la catégorie « Sciences et éducation », 1.229 dans « Cinéma et divertissement », 1.754 dans « Astuces et tutoriels », 862 dans « Cuisine et santé » ou encore 347 dans « Actualités et politique ». @

Taxer la bande passante pourrait rapporter très gros

En fait. Le 22 avril, « Numerama » indique avoir obtenu la confirmation que le ministère en charge de l’Economie numérique considère l’hypothèse d’instaurer une taxe sur la bande passante comme était « la voie la plus sérieuse » parmi
les pistes fiscales en matière de numérique.

En clair. Taxer la bande passante tient la corde. « Nous devons veiller à assurer l’équité entre les différents acteurs, quelle que soit leur nationalité. Plusieurs pistes fiscales sont envisagées, comme une taxe au clic ou une taxe sur la bande passante », avait expliqué la ministre en charge de l’Economie numérique, devant les sénateurs lors de l’examen de la proposition « Fiscalité numérique neutre et équitable » de Philippe Marini (renvoyée finalement à la prochaine loi de Finances). Fleure Pellerin n’a donc pas mentionné la proposition-phare du rapport Collin & Colin sur la fiscalité numérique (1), à savoir la taxation sur l’exploitation des données personnelles.
D’autant que, comme l’a démontré l’avocat Winston Maxwell dans Edition Multimédi@ (n°73 p. 8 et 9), cette mesure serait difficile à mettre en oeuvre sans recourir à des techniques de Deep Packet Inspection (DPI). La taxe sur la bande passante apparaît ainsi comme possible. L’idée ne date pas d’hier. Le rapport sur la télévision connectée
de novembre 2011 suggère une « contribution perçue sur les échanges générés par les services en ligne », ces échanges transitant vers les opérateurs télécoms en provenance soit d’un autre opérateur, soit d’un acteur en interconnexion directe comme Google. «Un tel dispositif (…) permet d’assujettir, par ce biais, l’ensemble des acteurs, y compris ceux qui ont déterritorialisé leurs activités et leurs revenus », expliquent les cinq co-auteurs (2). Cette idée de considérer les accords d’interconnexion comme des bases d’imposition potentielle est reprise par le rapport Collin & Colin qui y met cependant un bémol : « Une taxe sur la bande passante présente toutefois un inconvénient majeur, qui tient à l’absence de relation entre la bande passante consommée et le caractère profitable du service ».
A cela s’ajoute le fait que les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) se transforment en
« percepteurs » des impôts ! Orange et Free, favorable au « peering payant » seraient favorables à la taxe sur la bande passante. Le rapport Collin & Colin suggère de s’appuyer non pas sur les flux entrants, mais sur les flux sortants du territoire français au niveau des points d’interconnexion. « Ces flux incluent en effet l’ensemble des données collectées par les entreprises étrangères auprès des internautes français utilisant des application telles que Google, YouTube ou Facebook ». @

TF1 : « Monétisation croissante de la vidéo en ligne »

En fait. Le 19 février, le conseil d’administration du groupe TF1 s’est réuni sous la présidence de Nonce Paolini (1) pour arrêter les comptes de l’année 2012 : le chiffre d’affaires est stable à 2,6 milliards d’euros, pour un résultat net en recul de 25,6 %
à 136 millions d’euros. Plus de payant en 2013.

En clair. La crise économique va continuer à peser sur les recettes publicitaires de TF1, qui prévoit une baisse de 3 % de son chiffre d’affaires cette année (2). Dans son rapport financier annuel 2012 publié le 19 février, la filiale de Bouygues dit vouloir « consolider
son offre gratuite » (quatre chaînes gratuites que sont TF1, TMC, NT1, et HD1) mais aussi « renforcer son offre payante » (Eurosport/Discovery, LCI, TV Breizh, TF6, Série Club, Histoire, Ushuaïa TV ou encore Stylia). Le rapport annuel indique notamment que
« la monétisation croissante de la vidéo en ligne » contribue – avec par ailleurs la hausse de la publicité sur les chaînes de la TNT et Eurosport – « à compenser le recul de la publicité sur la chaîne TF1 ». Mais le rapport ne dit mot sur l’offre de SVOD que prépare TF1 pour 2013 afin de contrer l’arrivée d’Amazon et de Netflix, voire de Hulu. « Nous y travaillons et nous rediscutons avec M6 et Canal » (3), nous avait indiqué Régis Ravanas, directeur général adjoint de TF1, en marge de la présentation de MyTF1 Connect le
17 janvier dernier.
Pour l’heure, le chiffre d’affaires vidéo de TF1 affiche une croissance des revenus de
7,4 % à 84,1 millions d’euros – notamment grâce à « la progression des ventes de VOD ». Le résultat opérationnel courant de TF1 Vidéo est légèrement positif à 300.000 euros
en 2012, après une perte de 11,7 millions d’euros l’année précédente. Quant à l’activité
e- TF1, elle enregistre une forte croissance de son chiffre d’affaires à 101,3 millions d’euros (+ 19,2 %) et un doublement de son résultat opérationnel à 18,3 millions d’euros. Et ce, grâce notamment à MyTF1 qui totalise sur l’an dernier sur son site web 658 millions de vidéos vues en replay (télévision de rattrapage), soit une hausse de 20,3 %. Depuis son lancement en janvier 2011, le succès de l’application MyTF1 se poursuit avec plus
de 4,5 millions de téléchargements à fin décembre 2012. Le site MyTF1.fr enregistre une hausse de sa fréquentation : 8 millions de visiteurs uniques en décembre 2012, soit une progression de 1,3 % par rapport à décembre 2011. « Ce succès tant en termes d’audience, de chiffre d’affaires que de rentabilité démontre à nouveau la pertinence de
la stratégie digitale de TF1. (…) Le groupe allie désormais l’efficacité du média de masse
à la proximité des médias numérique », se félicite le groupe dans son rapport financier. @

Plus de gestion collective pour YouTube et Dailymotion

En fait. Le 15 janvier, la Société des auteurs compositeurs dramatiques (SACD)
a donné le coup d’envoi du premier appel à candidatures – jusqu’au 22 février – pour sélectionner dix courts-métrages vidéo dans le cadre de l’Académie SACD/YouTube lancée en novembre dernier. Dailymotion n’est pas en reste.

En clair. La SACD fait un pas de plus vers la gestion collective des droits des auteurs audiovisuels dont les œuvres vidéo sont diffusées sur Internet. « Au bénéfice de contrats généraux de représentation conclus avec Dailymotion et YouTube, [la SACD] assure à ses membres d’être rémunérés au titre du droit d’auteur pour leurs œuvres exploitées
sur ces plates-formes et elle est la seule à avoir mis en place un système de répartition réellement proportionnel au nombre de visualisations », explique la société de gestion collective le jour du lancement de la première « promo des créateurs du web » initiée avec YouTube. Rémunérer directement les auteurs de vidéo ou de films sur Internet, voire en plus de leurs éventuels contrats avec des producteurs, c’est le cheval de bataille de la SACD et de la Scam (Société civile des auteurs multimédia) qui sont toutes les deux membre de la puissante Société des Auteurs Audiovisuels (SAA) représentant les
intérêts des sociétés de gestion collective des droits d’auteur dans une quinzaine de pays (1 millions de titulaires de droits). En France, si les œuvres audiovisuelles diffusées en VOD, TV payante ou en catch up TV nécessitent pour les sociétés de gestion collective de passer un protocole d’accord avec les producteurs de cinéma (1), il n’en pas de même pour les autre modes d’exploitation à la demande comme les plates-formes de vidéo en ligne comme YouTube ou Dailymotion. C’est ainsi que des accords ont ainsi été conclus directement par la SACD et la Scam avec Dailymotion en 2008 et YouTube (2) en 2010, afin de permettre la rémunération des auteurs pour la mise à disposition de leurs œuvres en ligne.
Le lancement de l’Académie SACD/YouTube intervient deux ans après l’accord avec la filiale vidéo de Google, lequel permet aux auteurs concernés de pouvoir être rémunérés pour leurs œuvres exploitées sur Internet – proportionnellement à leur nombre de vues
en ligne. D’après Ecran Total, les premiers versements aux auteurs devraient intervenir dès cette année. Quant à l’accord passé antérieurement entre la SACD (où Pascal Rogard est DG…) avec Dailymotion (où Martin Rogard, son fils, est DG), notre confrère indique encore que les premières rémunérations ont été versées mi-décembre dernier.
La société de gestion collective travaille d’ailleurs avec les auteurs pour faciliter le calcul de leur rémunération Internet. @