TF1 prévoit des acquisitions dans le numérique

En fait. Le 12 novembre, Nonce Paolini – qui ne sera plus PDG de TF1 le 19 février 2016 au soir – était l’invité de l’Association des journalistes médias (AJM). Il se félicite des performances digitales, avec notamment MyTF1. Son successeur Gilles Pélisson devra aller plus loin, y compris par acquisitions.

Turbulences : s’achemine-t-on vers l’éclatement de la bulle « Apple » ?

Malgré une dévalorisation de 20 % depuis le début de l’année, la marque à la pomme demeure la première capitalisation boursière mondiale. Après l’accueil mitigé de l’Apple Watch, il lui faut trouver un autre produit – la TV en ligne ? – pour compenser la saturation du marché des smartphones.

La rentrée d’Apple s’annonce décisive. Timothy Cook, qui
a pris la succession de Steve Jobs il y a maintenant quatre ans (le 24 août 2011), doit encore convaincre sur sa capacité à maintenir Apple dans la course à l’innovation et à la croissance. Deux rendez-vous l’attendent en tant que keynote speaker : la traditionnelle conférence de rentrée prévue le 9 septembre à San Francisco, où seront présentés de nouveaux iPhone, un décodeur Apple TV plus puissant, et un nouvel iPad ; la conférence annuelle BoxWorks le 29 septembre, organisée par la société américaine Box à San Francisco également, où Apple tentera de séduire les entreprises.

Débâcle boursière évitée de peu
Mais avant de faire état de ses nouveaux produits, la marque à la pomme a dû affronter durant l’été des turbulences boursières. Le 24 août dernier, l’action d’Apple en Bourse a bu la tasse : elle est passée un temps sous la barre des 100 dollars, avant de remonter au-dessus pour demeurer la première capitalisation boursière au monde. Ce yoyo est intervenu à la suite des craintes des investisseurs à propos de l’impact du ralentissement de la croissance en Chine sur les ventes du fabricant des iPhone et des iPad. Apple, qui réalise maintenant près de 30 % de son chiffre d’affaires dans l’Empire du Milieu grâce à un doublement de ses ventes trimestrielles, s’est voulu rassurant :
« Je continue de penser que la Chine offre des opportunités sans égales sur le long terme », a souligné Tim Cook (photo), le PDG d’Apple, dans un email envoyé à la chaîne de télévision financière CNBC. A ce propos, le magazine américain Fortune estime que ce message pourrait violer la règlementation boursière de la SEC (1) qui interdit aux entreprises cotées de partager des informations (fair discosure) avec des personnes susceptibles d’en tirer profit. Or Jim Cramer, le chroniqueur de CNBC destinataire de l’e-mail de Tim Cook, cogère un fonds qui a Apple parmi ses investissements… Délit d’initié ?

Il n’en reste pas moins que le retournement de tendance de l’économie en Chine a plus que jamais un impact direct sur les perspectives de croissance de la firme de Cupertino (Californie), qui y réalise désormais un chiffre d’affaires plus important qu’en Europe.
Le marché chinois pourrait devenir à terme le premier d’Apple dans le monde. Ce jour-là, l’action d’Apple a reculé jusqu’à 13 % à 92 dollars, avant de reprendre du poil de la bête dans la journée à un peu plus de 103 dollars. Tim Cook, avec son e-mail, aurait sauvé Apple d’une débâcle boursière de 70 milliards de dollars ! Mais on est loin des 133 dollars atteints en février dernier, ce qui correspond à une baisse de la valorisation de plus de 20 % depuis le début de l’année. Cependant, Apple n’est pas un cas isolé dans cette tendance baissière : Google, Facebook, Amazon, Microsoft, Netflix ou encore Twitter ont eux aussi subi une certaine décote boursière, tout comme les
valeurs chinoises telles Alibaba, Baidu et Weido.

Doit-on s’attendre pour autant à une explosion de la bulle « Apple » ? Les analystes financiers ne l’envisagent pas, pour l’instant. L’action vedette du Nasdaq résiste donc. Mais jusqu’à quand ? Apple va-t-il terminer son année fiscale, le 30 septembre prochain, sur des ventes de l’iPhone aussi « décevantes » qu’au cours du troisième trimestre ? La marque à la pomme, dont l’action en Bourse avait déjà reculé de 6 %
en juillet, est très dépendante de son smartphone vedette qui pèse plus de 60 % dans ses revenus globaux. Malgré une croissance des ventes d’iPhone de 35 % au cours
du troisième trimestre (47,5 millions d’unités sur ces trois mois), c’est en deçà de ce qu’attendaient les analystes et plus de 20 % de moins qu’au trimestre précédent. Quant aux ventes des iPad, elles continuent de reculer. Pour enrayer la chute, Apple prévoit la sortie d’une tablette à large écran susceptible de séduire les détenteurs d’ordinateurs portables (notamment dans les entreprises).

Apple Watch : succès incertain
C’est aussi à l’aune de ses résultats annuels, lesquels seront dévoilés en octobre, que seront données pour la première fois les ventes de l’Apple Watch, la montre connectée qui est censée compenser le déclin des ventes des baladeurs musicaux iPod. Aucun chiffre n’a pour l’instant été indiqué, mais Tim Cook a assuré que « l’Apple Watch a représenté plus que 100 % de la croissance de la catégorie “autres produits” » et
que les retours des clients sont « incroyablement positifs ». La société d’études Slice Intelligence a estimé que les ventes de l’iWatch – déjà considérées comme modestes au regard du battage médiatique lors du lancement (2) – avaient chuté après les premières semaines de commercialisation. Selon l’agence de presse Bloomberg, Apple aurait vendu quelque 2 millions de montres connectées depuis le mois d’avril, loin des
3 à 5 millions unités espérés par des analystes. Quoi qu’il en soit, le patron d’Apple table sur les fêtes de fin d’année pour remettre les pendules à l’heure.

Musique et télé : planches de salut ?
C’est encore dans la catégorie « autres produits » que Tim Cook est attendu au tournant, avec cette fois la musique en ligne par abonnement. Depuis son lancement fin juin, Apple Music aurait fidélisé 79 % de ses utilisateurs. C’est du moins ce qu’affirmait le 19 août à l’AFP un porte-parole de la marque à la pomme, alors que la société d’études MusicWatch était plus pessimiste : seulement 52 % de fidélisés, les autres utilisateurs ayant renoncé à utiliser ce nouveau service de streaming par abonnement (9,99 dollars par mois) après une période d’essai gratuit de trois mois. Dans une interview au quotidien USA Today le 6 août, Eddy Cue – vice-président d’Apple en charge des logiciels et services Internet (reportant directement à Tim Cook) – avait indiqué qu’Apple Music comptait alors 11 millions d’utilisateurs (3). C’est encore très loin des 75 millions d’utilisateurs (dont 20 millions payants) du concurrent suédois Spotify (4). En 2013, Apple avait lancé iTunes Radio sans grand succès. En 2010, réseau de partage musical Ping avait été lancé puis arrêté deux ans plus tard.

Numéro un mondial du téléchargement de musiques, l’opérateur de la boutique iTunes n’est pas assuré de gagner son pari de devenir leader sur le marché de la musique
en streaming. A moins que la version Android attendue pour cet automne attire plus d’abonnés. A cette incertitude s’ajoute le fait que, selon l’agence de presse Reuters
le 13 juillet dernier, le gendarme américain de la concurrence (la Federal Trade Commission) examine les pratiques d’Apple sur son App Store vis-à-vis des applications des services de streaming musical concurrents (Spotify, Deezer, Rhapsody, Jango, …). De son côté, la Commission européenne continue d’observer ce marché des applications musicales où Apple prélève 30 % de commission (voir encadré). Au-delà de l’Apple Watch et d’Apple Music, la marque à la pomme compte sur un autre service qui viendra là aussi enrichir sa catégorie « autres produits » : la TV en ligne. Selon l’agence Bloomberg le 14 août, l’annonce de ce bouquet de télévision sur Internet devait être faite le 9 septembre mais elle a été reportée à 2016 en raison des négociations plus longues que prévu avec les groupes de télévision américains (CBS, Fox, ABC, …) et du manque de capacités sur les réseaux. Il y a un an, Apple avait discuté en vain avec le câblo-opérateur Comcast. En revanche, une version plus puissante de son set-top-box Apple TV devrait être annoncé ce jour-là. Ce décodeur, dont la première version fut lancée fin mars 2007, devrait proposer l’an prochain le futur bouquet TV qui sera aussi disponible sur les smartphones et tablettes fonctionnant sous iOS. La chaîne HBO du groupe Time Warner est déjà proposée par Apple, qui envisage par ailleurs de se lancer dans la production originale (selon Variety du 1er septembre). La firme de Cupertino doit aussi apaiser les craintes des chaînes de télévision et des câbloopérateurs américains de voir leur clients renoncer à leurs abonnements mensuels « cable TV » au profit de services TV sur Internet (Over-The-Top) moins coûteux et délinéarisés avec les programmes à la demande (5). Mais comme le succès n’est pas garanti, même quand on s’appelle Apple, il reste encore la possibilité de faire des acquisitions telles que celle au prix fort – 3 milliards de dollars – de Beats Electronics en mai 2014. La firme de Cupertino en a largement les moyens : son trésor de guerre a dépassé pour la première fois, fin juin, la barre des 200 milliards de dollars (à 202,8 milliards précisément). Que va faire la firme de Cupertino de cette masse d’argent disponible ? Jusqu’alors, elle a préféré s’endetter pour verser des dividendes à ses actionnaires plutôt que de puiser dans ses réserves. Une nouvelle acquisition n’est pas à exclure. @

Charles de Laubier

Parallèle entre neutralité du Net et TV connectée : c’est plus qu’une affaire de gestion de réseau

Convergence oblige, les problématiques économiques et concurrentielles ainsi que les questions de régulation entre la neutralité du Net et la TV connectée devraient se rejoindre. La « gestion du trafic » pourrait céder le pas à des arbitrages plus sophistiqués de partage de valeur.

Bruno Chetaille, PDG de Médiamétrie : « Nous allons tester un audimètre individuel, miniature et mobile »

Médiamétrie vient d’avoir 30 ans. L’institut de mesure d’audiences, créé le 24 juin 1985, s’est imposé en France dans la télévision, la radio et Internet. Son PDG Bruno Chetaille explique comment l’audimètre devient aussi miniature et mobile. Et en fin d’année, la mesure globale TV et Net sera lancée.

Vidéo en ligne : le cord-cutting menace la télévision traditionnelle, et en France ?

« Couper le cordon » avec la télévision traditionnelle payante par câble ou satellite pour consommer directement sur Internet – et à moindre coût – films, séries ou programmes audiovisuels : tel est le souhait de la jeune génération.
Les Etats-Unis sont les premiers impactés. L’Europe n’y échappera pas.
Mais en France, difficile de s’affranchir du triple play.

Quatre-vingt dix pourcent des consommateurs se disent favorables à une rupture en matière d’accès aux vidéos, quitte à être « prêts à résilier leurs abonnements de réseau câblé et de télévision payante pour adopter les services de vidéo OTT [Over-The-
Top] ». C’est ce qui ressort d’une étude réalisée en avril 2015 auprès de 1.200 consommateurs à travers le monde. « Les consommateurs s’éloignent de plus en plus de l’expérience télévisuelle traditionnelle, pour adopter la vidéo en ligne », affirme Jason Thibeault, directeur sénior chez Limelight Networks et auteur de ce rapport (1).

Digital Native et OTTV
Cette tendance est observée aussi par le cabinet Deloitte aux Etats-Unis, où 3 % des Américains interrogés déclarent avoir résilié leur abonnement à la télévision par câble ou par satellite, et 7 % disent l’envisager. La jeune génération – celle du « Y », également appelée « jeunesse du millénaire », suivie de celle du « Z » ou Digital Native – est à l’origine de ce changement. Elle regarde en moyenne entre 4 et 7 heures de vidéos en ligne par semaine, soit près de deux fois la quantité visionnée par toutes les autres classes d’âge interrogées. Le phénomène est mondial et devrait s’accroître au fur et à mesure que se développent les services de vidéo sur Internet.
Aux Etats-Unis, le groupe Time Warner a lancé en avril dernier HBO Now qui marque l’incursion de la première chaîne payante américaine sur le marché de l’OTTV (Over-The-Top Video). HBO Now, qui ne cache pas ses ambitions à l’international où il n’est pas encore accessible, est aussi diffusé sur l’Apple TV. La marque à la pomme prépare aussi de son côté un bouquet de service de vidéo en streaming, en partenariat avec des chaînes américaines. La chaîne CBS a aussi lancé son propre service de vidéo en ligne. Elle fait partie du groupe Viacom qui va aussi lancer un service en ligne pour sa chaîne Nickelodeon pour enfants. Sony vient de lancer « PlayStation Vue », un service de télévision en ligne sur ses consoles de jeux vidéo, qui non seulement proposera des vidéos à la demande mais aussi diffusera des programmes en direct – comme les événements sportifs qui étaient jusque-là la chasse gardée des chaînes sur le câble
et le satellite. L’opérateur de télévision par satellite américain Dish Network a lui aussi lancé Sling, son offre de vidéo en ligne.
Tous ces nouveaux entrants promettent une bataille autour de la vidéo face aux plateformes existantes telles que YouTube ou Yahoo, mais aussi Hulu ou Amazon Prime. YouTube préparerait même le lancement d’un service par abonnement sans publicité. Et ce n’est pas un hasard si Verizon – menacé de cordcutting aux Etats-Unis – a décidé de s’emparer d’AOL pour répondre à la forte demande de vidéos et de chaînes sur Internet (lire p. 3).
Mais l’Europe n’est pas en reste : Netflix et Amazon Prime commencent à convaincre,
y compris en France pour le premier qui concurrence la chaîne payante Canal+ (voir encadré page suivant). Quant au suédois Spotify, leader européen de la musique en ligne, il a annoncé le 21 mai une offre de streaming vidéo par abonnement sur le modèle de CanalPlay ou de Netflix.
Dans de paysage audiovisuel en cours de délinéarisation, les internautes souhaitent de plus en plus se procurer le contenu vidéo (films, séries, émissions, etc) directement sur l’Internet auprès de la chaîne ou du service de VOD ou de SVOD, plutôt que par un fournisseur de services de télévision payante. Quant aux abonnements à des réseaux câblés ou à des chaînes de télévision payantes, ils sont perçus comme onéreux, surtout lorsque que leur prix augmente. A cela s’ajoute le manque de flexibilité des offres traditionnelles.

Vidéo et TV en streaming
En termes d’usage, le téléviseur n’a plus le monopole de la réception audiovisuelle :
les ordinateurs portables sont devenus aujourd’hui le premier écran pour la consommation de vidéos en ligne, mais les plus jeunes « télénautes » sont plus susceptibles de regarder les vidéos sur un smartphone que leurs aînés. L’étude
de Deloitte aux Etats-Unis montre que plus de la moitié des Américains – 56 % – regardent désormais des films ou des programmes télévisés en streaming sur Internet : les programmes télévisés ne sont plus regardés en direct que 45 % du temps aux Etats-Unis, à l’heure où les chaînes les mettent à l’antenne en fonction de leur grille
de diffusion. Et plus le téléspectateur est jeune, moins il regarde la télévision linéaire : seulement 35 % dans la tranche 26-31 ans regardent les chaînes diffusées à l’antenne, et 28 % chez les 14-25 ans.
Le reste du temps, ces programmes sont consommés à la demande, en streaming ou en time-shifting (programmes enregistrés et regardés en différé par le téléspectateur grâce aux magnétoscopes numériques ou aux box avec enregistreur numérique).

La liberté du télénaute
Le téléspectateur assis dans son salon à regarder la télévision laisse la place, notamment chez les plus jeunes, à des télénautes utilisant différents terminaux à l’intérieur ou à l’extérieur du domicile, et à l’heure choisie.
Etre abonné à Netflix, c’est aussi l’assurance de pouvoir regarder une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle (films ou séries) dans son intégralité sans être interrompu par des coupures publicitaires intempestives (fini les contrariétés des interruptions).

Regarder des services de vidéo en ligne se traduit immanquablement par moins d’audience pour les chaînes traditionnelles et, in fine, des recettes publicitaires en recul. Une autre étude, émanant cette fois de Leichtman Research, montre que les grandes télévisions payantes outre-Atlantique commencent à perdre des abonnés. Ce que confirme le cabinet d’études américain Forrester : 38 % des 18-32 ans aux Etats-Unis ne regardent pas assez la télévision classique pour justifier le prix de l’abonnement aux chaînes de télévision par câble.
Selon une analyse de Frost & Sullivan, la grande majorité des programmes audiovisuels seront – d’ici dix à vingt ans – regardés en différé ou à la demande,
et non plus de façon linéaire. Les consommateurs posent de plus en plus un lapin à la
« télévision sur rendez-vous » ! Ils lui préfèrent la souplesse et la liberté des offres à la demande, quitte à devenir boulimique de vidéos, de séries ou de films sur Internet. Selon l’étude Deloitte déjà citée, 31 % des personnes interrogées reconnaissent faire du binge-watching, pratique qui consiste à regarder à la suite plusieurs épisodes d’une série ou d’un programme. Ce taux atteint même 80 % chez les 14-25 ans. @

Charles de Laubier