Nouveau PDG de TF1, Gilles Pélisson passera-t-il sous la barre des 20 % de part d’audience ?

La hantise de la chaîne TF1 est de passer sous la barre des 20 % de part d’audience nationale, après avoir caracolé à plus de 30 % il y a dix ans encore. Gilles Pélisson, qui n’est pourtant pas un homme de télévision, va devoir relever le plus grand défi d’un PAF chamboulé par le numérique et la fragmentation de l’audience.

Et si Gilles Pélisson (photo), le nouveau PDG du groupe TF1, devenait celui qui verra la première chaîne passer sous la barre des 20 % de part d’audience ? On n’en est pas loin. Au rythme où va l’érosion, ce plancher pourrait être enfoncé dès cette année. Ce serait sans précédent pour la chaîne historique, dont la part d’audience est descendue à seulement 20,6 % en janvier, heureusement suivi d’un léger rebond à 21,6 % en février (voir tableau p.10). Les premiers mois de l’ère « Pélisson » seront décisifs. Le successeur de Nonce Paolini, véritablement en fonction depuis le 19 février dernier, hérite d’une tendance baissière de TF1 constatée depuis maintenant dix ans. En effet, la doyenne des chaînes de télévision généralistes françaises a déjà perdu de sa superbe et a vu l’aura de son antenne chuter de 30,7 % de part d’audience nationale moyenne en 2007 à 21,4 % en 2015, soit une perte de près de dix points. Le déclin de TF1 semble inéluctable, bien que la chaîne du groupe Bouygues reste pour l’instant encore la plus regardée de l’Hexagone, surtout en prime time où elle a réalisé 98 des 100 meilleures audiences de l’année. La concurrence des nombreuses autres chaînes de la TNT (y compris TMC, NT1, HD1, LCI appartenant toutes au groupe TFI) et des plateformes de vidéo sur Internet (YouTube, Facebook, Dailymotion, Netflix, …) est à l’oeuvre pour contester la suprématie de la première chaîne et lui grignoter inlassablement des parts d’audience.

Affaire « New Media Online » : comment la CJUE a pris à revers son avocat général

Selon l’arrêt « New Media Online » du 21 octobre 2015 rendu par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), l’offre de vidéos sur le site Internet d’un journal peut relever de la réglementation des services de médias audiovisuels. Dans cette hypothèse, cette offre est soumise au contrôle du CSA et aux obligations associées.

Par Katia Duhamel, experte en droit et régulation des TICs, K. Duhamel Consulting

C’est à la suite d’une demande de décision préjudicielle, dont elle a avait été saisie par une juridiction autrichienne afin de déterminer si le site web d’un quotidien sur lequel figure des vidéos relève de la directive européenne « Services de médias audiovisuels » (SMA) (1), que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rendu son arrêt « New Media Online » (2). La Cour a ainsi rejeté les conclusions de l’avocat général Maciej Szpunar datant de juillet 2015, selon lesquelles ni le site web d’un quotidien qui comporte des vidéos, ni aucune partie d’un tel site, ne constitue un « service de médias audiovisuel » au sens de la directive SMA (3).

Molotov.tv : Pierre Lescure lance son bouquet de TV en ligne sans Canal+, dont il fut cofondateur

Un comble : Pierre Lescure, cofondateur de Canal+ (sous la direction d’André Rousselet il y a trente ans), n’a pas encore réussi à convaincre la chaîne cryptée de faire partie de son bouquet de télévision sur Internet, Molotov.tv. L’explication est à aller chercher du côté de CanalSat et de la chaîne cryptée.

« Canal+ est une chaîne premium, mais ce n’est pas la raison pour laquelle elle ne veut pas travailler avec Molotov.tv, contrairement à OCS et à beIN Sports qui seront, eux, bientôt disponibles sur Molotov.fr. La raison serait plutôt que Canal+ opère aussi CanalSat, un service par abonnement d’accès à une vaste offre de chaînes destinées à l’écran de télévision, aux set-top-box, aux tablettes, aux ordinateurs portables, etc. », explique Steve Rosenblum (1), membre du conseil d’administration de la société Molotov. Cette startup est présidée par Pierre Lescure (photo), en charge de la stratégie et du développement. Il fut cofondateur de Canal+ il
y a trente ans et actuellement président du Festival de Cannes.

La presse en ligne peut avoir à financer le cinéma !

En fait. Le 9 décembre prochain, se réunit la commission « Enjeux réglemen-taires » du Groupement des éditeurs de contenus et services en ligne (Geste). Seront notamment abordées les conséquences de la décision « New Media Online » rendue par la CJUE le 21 octobre sur les vidéos des sites web de la presse.

En clair. Les sites de presse en ligne, qui recourent de plus en plus à de la vidéo, pourraient être amenés à contribuer au financement de cinéma français ! Cela pourrait être l’une des conséquences de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), daté du 21 octobre dernier (1), qui a rend applicable aux éditeurs de presse en ligne la directive européenne sur les services de médias audiovisuels – SMA (2) – de 2010. Cet arrêt « New Media Online », du nom d’une société autrichienne qui édite un journal en ligne (Tiroler Tageszeitung via www.tt.com) et qui proposait un accès à un catalogue de vidéos, fait jurisprudence dans toute l’Europe.

TF1 prévoit des acquisitions dans le numérique

En fait. Le 12 novembre, Nonce Paolini – qui ne sera plus PDG de TF1 le 19 février 2016 au soir – était l’invité de l’Association des journalistes médias (AJM). Il se félicite des performances digitales, avec notamment MyTF1. Son successeur Gilles Pélisson devra aller plus loin, y compris par acquisitions.

En clair. « Dans les contenus digitaux, s’il y a des choses à regarder (en vue de les acquérir), on continuera à le faire. Dans les systèmes de commercialisation automatisée, la publicité programmatique, on regardera aussi. Si l’on va dans ce sens, ce serait pour aller chercher des clients dans le monde entier, Internet n’ayant pas de frontières. Sur le digital, il y aura donc sans doute des mouvements à faire. C’est Gilles Pélisson qui les décidera plus tard. Mais nous sommes très prudents : mon patron [Martin Bouygues, ndlr] est Auvergnat, ce qui lui donne toute la sagesse de ne pas faire des folies ! », a indiqué Nonce Paolini, le PDG sortant du groupe TF1, le 12 novembre devant l’AJM. En marge de cette rencontre, Edition Multimédi@ lui a demandé ce qu’il envisageait dans le domaine des réseaux multi-chaînes – MCN (1) – sur YouTube ou Dailymotion : un développement en interne, comme c’est le cas avec MyTF1xtra et avec le MCN Finder Studios, ou bien par acquisition ? « Les deux mon Général ! », nous a-t-il répondu. Et d’indiquer : « Aujourd’hui, nous avons un partenaire, Finder Studios [un MCN français présent sur les thématiques « beauté », « cooking »,
« humour », « hommes » et « enfants », disponible sur YouTube, Facebook, Twitter, Snapchat ou encore MyTF1, ndlr]. Sur MyTF1xtra, des acteurs du digital peuvent aussi venir présenter ce qu’il font. Cela nous permet d’ouvrir MyTF1 à un cercle un peu plus large, notamment à des jeunes ». En revanche, il a réaffirmé que ces chaînes diffusées en ligne sur notamment YouTube, ne sont pas sous la marque de TF1 pour ne pas mélanger les genres (2) (*) (**).