Pourquoi Gaumont pense du bien de la box Videofutur

En fait. Le 1er octobre, Netgem a présenté « La Box Videofutur » en OTT (indépendante des FAI), couplant télé et ciné avec fonctions de time shifting,
pour un forfait sans engagement de 10 euros par mois (+ 2,99 euros pour les
films récents de quatre mois). Parmi les six partenaires cinéma : Gaumont.

Hervé Rony, Scam : « La dynamique de l’Acte 2 de l’exception culturelle s’effiloche »

Le directeur général de la Société civile des auteurs multimédia (Scam) fait part
de ses regrets sur le projet de loi de Finances 2014 (redevance, Cosip, …) et se
dit favorable au conventionnement de services Internet avec le CSA. Pour le livre numérique, il craint le piratage et l’autoédition comme pour la musique (il fut DG
du Snep de 1994 à 2009).

L’Observatoire européen de l’audiovisuel voit « Net »

En fait. Le 3 septembre, l’Observatoire européen de l’audiovisuel – rattaché au Conseil de l’Europe – publie une nouvelle étude intitulée « Qu’est-ce qu’un service [vidéo] à la demande ? ». Tandis que la consultation de la Commission européenne sur le livre vert « TV connectée » est reportée à fin septembre.

Pourquoi Rupert Murdoch a cassé en deux son groupe News Corp, sur fond d’échecs numériques

Depuis le 1er juillet, est cotée en Bourse chacune des deux nouvelles sociétés issues de la scission intervenue le 28 juin de l’empire News Corp de Rupert Murdoch : d’un côté les activités de presse et d’édition (nouveau News Corp),
de l’autre celles de télévision et de cinéma (21st Century Fox).

Par Charles de Laubier

RMLe magnat américano-australien des médias Rupert Murdoch (photo), 82 ans, divise pour… mieux régner encore un peu. Alors que son conglomérat News Corp, constitué au cours
des 60 dernières années, vient de terminer pour la dernière
fois une année fiscale « intégrée » au 30 juin 2013, le divorce
est désormais consommé entre les deux branches.
Fini le géant des médias aux actifs valorisés 68 milliards de dollars et au méga chiffre d’affaires annuel de 35 milliards de dollars. Désormais, il faudra compter avec deux entités présidées par le patriarche milliardaire : le nouveau News Corp réunissant les activités presse et édition (Dow Jones/The Wall Street Journal, The New York Post, The Times, The Sunday Times, The Sun, The Australian, The Daily Telegraph, HarperCollins Publishers, Amplify, …), et 21st Century Fox regroupant les activités télévision et cinéma (Fox, FX cable networks. Fox broadcasting, 20th Century Fox, BSkyB, Sky Italia, Sky Deutschland, …).

Deux nouveaux exercices commencés depuis le 1er juillet
Signe que Rupert Murdoch est contraint de tourner plus vite la page de la presse qui l’a le plus passionné : il devient président et directeur général de 21st Century Fox, mais il est seulement président du nouveau News Corp, Robert Thomson en étant le directeur général.
Le magnat de la presse a dû céder et opérer ce méga spin off sous la pression des investisseurs.  Pour chacune des deux nouvelles sociétés cotées séparément, le nouvel exercice fiscal a débuté le 1er juillet. La nouvelle société de presse et d’édition pourrait voir son chiffre d’affaires reculer de 4 % à 7,7 milliards de dollars.
Tandis que la nouvelle société de télévision et de cinéma verrait le sien gagner près de
10 % à 30,2 milliards (1). Le cours de Bourse de chacune des deux entités – symbolisées respectivement par NWSA et FOXA – pourrait être volatil durant juillet (2), le temps que les investisseurs et les actionnaires arbitrent sur les deux titres : vont-ils se débarrasser du nouveau News Corp pour ne garder que 21st Century Fox ? Garderont-ils les deux ? Abandonneront-ils tout ce qui se réfère à Murdoch ? Avant la séparation, les sociétés 21st Century Fox et nouveau News Corp étaient valorisées respectivement à environ 65 milliards et 9 milliards de dollars.

Télé-ciné plus rentable que presse-édition
Le nouveau News Corp, qui gagnerait à être rebaptisé, va tenter de redorer une image quelque peu écornée. La chute des recettes publicitaires « papier » au profit du digital, les difficultés à s’adapter au numérique, les pertes enregistrées par cette activité déclinante (3) et le scandale en 2011 des écoutes illégales au News of the World (fermé il y a deux ans) ont eu raison du « papivore » et devraient se solder par une réduction drastique des coûts. Si aujourd’hui encore ce groupe de presse – qui détient en outre depuis octobre 2012 la moitié du capital de l’opérateur de télévision payante australien Foxtel, l’opérateur télécoms Telstra détenant l’autre moitié) – est crédité de la première capitalisation boursière aux Etats-Unis (4), qu’en sera-t-il vraiment demain ?
Le groupe a déjà annoncé que l’activité presse-édition sera dépréciée de 1,4 milliard
de dollars en raison d’un flux de trésorerie en baisse dans ses journaux américains
et australiens. Mais une partie des 2,6 milliards de dollars de trésorerie mis à la disposition du nouveau News Corp – dépourvu de dette – laissent présager des acquisitions : le Los Angeles Times du groupe américain Tribune serait une cible tout comme le développement dans la presse sur Internet, l’éducation numérique ou encore l’immobilier en ligne. En Europe, News Corp pourrait entrer dans le capital du groupe de presse italien RCS Mediagroup (Corriera della Sera) à côté de Fiat, dont le président, John Elkann, est depuis mai membre du conseil d’administration de News Corp.
Quant à la nouvelle société 21st Century Fox, elle hérite des actifs audiovisuels plus rentables. La télévision à péage Sky Deutschland contrôlé à 54,5 % depuis le début
de l’année, l’est désormais par 21st Century Fox et consolidé dans les comptes. Selon
le journal allemand Manager Magazin du 21 juin, le fils, James Murdoch, deviendrait président du conseil de surveillance de Sky Deutschland d’ici la fin de l’année. A noter, par ailleurs, que Delphine Arnault, fille aînée du PDG de LVMH, entre au conseil d’administration de 21st Century Fox.
La saga médiatique de Rupert Murdoch n’a pas été non plus couronnée de succès sur
le front numérique : il n’a pas eu de chance avec Internet qu’il a eu du mal à adopter. Il a fallu que son plus jeune fils, James Murdoch, entré dans le groupe en 1997, insiste pour l’intéresser enfin au Web… juste avant l’éclatement de la bulle Internet. Mais plus de dix ans après, l’octogénaire a essuyé les plâtres : MySpace, le réseau social qu’il a acquis près de 600 millions de dollars en 2005 (c’était alors très cher pour deux ans d’existence), a été laminé par Facebook. Face à la baisse de la publicité sur le pionnier des réseaux sociaux, dont la fréquentation a diminué faute d’avoir su convaincre les fans de musique, il a fallu déprécier, supprimer la moitié des effectifs et restructurer. Même la femme du PDG, Wendi Murdoch, fut appelée à la rescousse en mai 2010
pour développer MySpace en Chine. Cela n’a pas suffit. Malgré ses 100 millions d’utilisateurs à l’époque, MySpace a finalement été vendu en juin 2011 pour environ… 30 millions de dollars, soit vingt fois moins que le prix d’achat ! Rupert Murdoch reconnaîtra plus tard que MySpace avait été « très mal géré ».
Entre temps en février 2011, il s’engage dans une autre aventure numérique avec le lancement de « The Daily », un quotidien payant créé dans un premier temps pour l’iPad. Investissement de départ : 30 millions de dollars et une centaine de personnes recrutées. Mais, devenu un militant de la presse on line payante après avoir racheté en 2007 le Wall Street Journal, Murdoch mise ainsi sur le payant en ligne. Mais le monde fermé d’Apple ne lui portera pas chance (5). Il y a sept mois, le 15 décembre dernier, News Corp, arrête la publication de The Daily qui n’a pas dépassé les 100.000 abonnés. Résultat, le directeur en charge des activités numériques, Jonathan Miller, est remplacé par Paul Cheesbrough. Il faut dire que la publication des résultats annuels de l’ancien groupe News Corp, arrêtés au 30 juin 2012 et publiés durant l’été, font l’effet d’une douche froide : chute de 57 % du bénéfice net à 1,18 milliard de dollars pour un chiffre d’affaires de 33,71 milliards en presque stagnation (+ 1 %).
A ces déboires numériques, s’ajoutent les démêlés de la filiale édition du groupe, HarperCollins, la Commission européenne la soupçonnant d’entente illicite avec Apple et d’autres éditeurs (dont Hachette Livre/Lagardère) sur le prix des e-books. Cette affaire a été soldée à l’amiable par les cinq éditeurs incriminés, qui ont dû verser 170 millions de dollars d’amendes et de dédommagements, alors que la procédure judiciaire contre Apple se poursuit.

De l’échec MySpace à la vente de Hulu
Par ailleurs, News Corp cherche à se désengager de Hulu, la plate-forme pionnière du streaming VOD cocréée en 2007 avec Walt Disney, NBC Universal et General Electric. Malgré ses 4 millions d’utilisateurs et un chiffre d’affaires de 700 millions de dollars réalisé en 2012, Hulu s’est fait largement distancé par son redoutable concurrent Netflix (lequel pèse 3,6 milliards de dollars de revenus en 2012 et 36 millions d’abonnés). Les actionnaires de Hulu cherchent à vendre (6) – soit à l’un d’entre eux, soit à un tiers (7). Yahoo est sur les rangs, après avoir échoué à s’emparer de Dailymotion, tout comme… l’ancien président de News Corp, Peter Chernin (8), à l’origine de la création de Hulu.
A suivre. @

Charles de Laubier

Publicité : fin de la prime au leader

Finalement, la bonne nouvelle pour la télé, c’est qu’elle a su s’adapter à Internet sans connaître tout à fait le sort, parfois fatal, de la plupart des autres contenus numériques. Ce super média qu’est la télévision bénéficiait d’une armure protectrice connue sous le nom de « prime au leader »,
cette différence constatée entre la part d’audience des chaînes leaders et leur part du marché de la publicité TV
en valeur, laquelle lui est souvent très supérieure. C’est ainsi que la puissance médiatique des chaînes historiques leur a longtemps permis de pratiquer des tarifs supérieurs à ceux des outsiders et de générer des revenus plus importants comparativement à leur audience ou au volume de publicité qu’ils diffusaient. Ainsi, en France, la chaîne TF1, qui enregistrait une part d’audience moyenne de 23 % sur l’année 2012 (en forte baisse par rapport aux années précédentes), captait 42 % du marché de la publicité TV en valeur. De la même façon, ITV, la première chaîne privée au Royaume-Uni en termes d’audience, captait 43 % du marché publicitaire en valeur pour une part d’audience de seulement 16 %.

« Si la pub TV a fait la preuve de son efficacité,
c’est sa notion même qui a perdu de son sens.
Les spots sont désormais distribués en même
temps en live ou en catch up. »

Cet avantage permit à la télévision de disposer de temps pour s’adapter aux nouvelles règles du jeu imposées par Internet, un temps précieux qui manqua tant à la musique ou
à la presse. Malgré la concurrence indéniable des services de médias audiovisuels à la demande (SMAd), la télévision prolongea son statut à part de média dominant (taux d’adoption par toutes tranches d’âge et consommation importante en temps passé).
À la fois source d’information et de loisirs, la télévision, par sa capacité à générer une audience de masse, dispose d’une puissance incomparable. Il n’est donc pas surprenant que la télévision « gratuite » ait largement attiré les annonceurs en quête de visibilité et de construction d’image, devenant le premier support d’investissement publicitaire avec, en moyenne, 40 % des dépenses médias des annonceurs (en excluant les investissements hors-médias). Et ce, pendant que son chiffre d’affaires continuait de progresser alors que celui de la presse n’en finissait plus de s’effondrer. Pourtant, malgré cette apparente bonne résistance, de premiers signes d’essoufflement apparurent avant 2015, notamment sur les marchés occidentaux où la télévision commença à perdre des parts de marché face à Internet. La multiplication des chaînes fut à l’origine de la fragmentation de l’audience, préjudiciable à l’Audimat des grandes chaînes et donc à leurs recettes publicitaires. De plus, la consommation des programmes TV devenant plus personnelle, elle se reporta vers les « nouveaux » écrans, en temps réel ou différé. Or, face à la désintermédiation, la TV « broadcast » conserva et conserve encore certains avantages irréductibles. En termes de couverture, les grands networks américains avaient toujours, en 2013, un reach de l’ordre de 70 %, quand celui de YouTube n’était que de 32 % et celui de Hulu de 9 %. Ensuite, un téléspectateur américain restait contraint à une moyenne de 72 minutes de publicité TV par jour, contre 23 minutes par mois pour un utilisateur de vidéo online. Pourtant, le “coût par mille moyen” (CPM) sur un site de vidéo premium ou sur un site de chaîne de télévision tenait la comparaison : aux Etats-Unis, il évoluait entre 15 et 20 dollars sur un site comme Hulu, contre 14 dollars pour toucher 1.000 foyers via une chaîne nationale.
Si la publicité TV a largement fait la preuve de son efficacité, c’est sa notion même qui a perdu de son sens. La part des publicités uniquement diffusées sur l’écran de TV pendant le flux de programmes fait place aux spots publicitaires distribués en même temps qu’un programme TV, qu’il soit « broadcasté » ou « streamé », en live ou en catch up. Sur ce ring, où s’est livrée durant cette dernière décennie une lutte sans concession, le combat est en train de se terminer faute de combattants : par la disparition des distinctions classiques. Car tandis que les chaînes survivantes sont devenues à leur tour des
poids lourds d’Internet, les géants du Net ont continué à phagocyter leur part du
gâteau publicitaire… @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » : Planète numérique
* Directeur général adjoint de l’IDATE.
Sur le même thème, le rapport « La publicité TV face
aux nouveaux médias », par Florence Leborgne.