Convergence télécoms-audiovisuel et financement des oeuvres : vers une nouvelle régulation

Ancien député UMP du Maine-et-Loire, conseiller régional des Pays de la Loire et membre de la Cnil, Dominique Richard – auteur du rapport « Audiovisuel 2015 » remis en avril – a été nommé par le CSA Médiateur pour la circulation des œuvres. Et une mission « TV connectée » vient d’être lancée.

Dominique Richard devient le nouvel homme fort du paysage audiovisuel français en pleine mutation. S’il ne fait pas partie
de la mission TV connectée lancée le 28 avril par Frédéric Mitterrand lors du colloque du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) sur le sujet, il en est l’instigateur. Confiée à Marc Tessier (1), Philippe Levrier (2), Takis Candilis (3), Martin Rogard (4) et Jérémie Manigne (5), cette mission – dont les conclusions sont attendues pour septembre – s’inscrit en effet dans le prolongement du rapport sur les perspectives de l’audiovisuel en France d’ici 2015 que Dominique Richard a remis le 4 avril au ministre de la Culture et de la Communication lors du dernier MipTV à Cannes (6). Ce consultant, conseiller régional des Pays de la Loire et membre de la Cnil, vient en outre d’être nommé par le CSA Médiateur pour la circulation des œuvres. Il s’agit notamment de « fluidifier » un marché encore dominé par un oligopole constitué par les chaînes historiques. La TNT, l’IPTV, le Web, la VOD, la catch up TV et plus encore la TV connectée – en attendant la télévision mobile personnelle (TMP) – sont en passe de déstabiliser le marché français des programmes audiovisuels et cinématographiques.

Un rapport, un médiateur et une mission
Se posent alors les questions épineuses de la libre circulation des œuvres sur les nouveaux réseaux numériques de diffusion, ainsi que de leur financement via le fonds Cosip (7). « Les opérateurs de réseaux de télécommunication pourraient ainsi se voir autorisés à facturer l’hyperconsommation de bande passante aux nouveaux acteurs,
quel que soit leur lieu d’implantation, pour financer les investissements et soumettre le chiffre d’affaires supplémentaire ainsi généré à la contribution Cosip, plutôt que de créer une nouvelle taxe spécifique », suggère Dominique Richard dans son rapport final.
Les ambitions audiovisuelles affichées des Google, Apple et autres géants du Net,
sans parler de l’arrivée prochaine de plateformes télévisées et vidéo telles que Netflix ou Hulu, accroissent la pression. De plus, les fabricants de téléviseurs (Samsung, Panasonic, LG Electronics, …) s’invitent dans la chaîne de valeur. La fragmentation de l’offre de contenus audiovisuels, sur fond de bataille des exclusivités, apparaît aux yeux de Frédéric Mitterrand « préjudiciable ».

Films et programmes : bataille des contenus
Qu’ils se nomment Samsung, Yahoo, Dailymotion ou Microsoft, tous les nouveaux diffuseurs audiovisuels vont être appelés à financer la création en France. Fragmentation, financement et répartition de la valeur seront donc au coeur de cette mission « TV connectée ». Surtout, la bataille des contenus va s’intensifier entre diffuseurs, distributeurs et services en ligne. D’autant que les chaînes hertziennes historiques – TF1, France Télévisions, M6 et Canal+ – n’ont plus le monopole de la diffusion des œuvres cinématographiques et audiovisuelles, ni les seules supposées cofinancer des œuvres pour en avoir l’exclusivité initiale en tant que « primo-diffuseurs ». Les fournisseurs d’accès à Internet (FAI), les éditeurs de services de VOD ou encore les nouvelles chaînes de télévision numérique terrestre (TNT) – voire les fabricants de terminaux interactifs – veulent pouvoir remplir leurs catalogues de programmes dans
des conditions tarifaires raisonnables, de façon non discriminatoire et dans le respect
de la concurrence. Ce sera le rôle central du Médiateur pour la circulation des œuvres. Dans sa lettre de mission datée du 28 mars 2011, Dominique Richard a deux ans pour démontrer l’efficacité de son action de conciliation, d’arbitrage et de règlement de litiges entre les tuyaux et les contenus. Il sera à la circulation des œuvres sur les réseaux numériques ce que le Médiateur du cinéma (Roch-Olivier Maistre) – institué en 1982
dans le sillage du CNC (8) – est à la chronologie des médias (de la salle aux autres fenêtres de diffusion). Des freins sont identifiés par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) depuis 2006. L’accès aux programmes et aux films récents par les nouveaux supports et les services de médias audiovisuels à la demande – les fameux SMAd (VOD, Catch up TV, …) – devient un enjeu crucial. Les chaînes historiques ont commencé à être concurrencées à partir de 2000 par le câble, le satellite et la TNT, lesquels ont aussi été appelées comme leurs aînées à des quotas de diffusion d’oeuvres audiovisuelles et à des obligations de contribution financière à la production d’oeuvres. En 2007, Dominique Richard s’était déjà penché avec David Kessler sur les relations entre les diffuseurs et les producteurs (décrets Tasca) : cette première mission a abouti à trois décrets sur les régime de la contribution à la production audiovisuelle des différents éditeurs de services de télévision. Et pourtant. Bien que le « gel de droits » n’ait pas été démontré, le CSA a néanmoins constaté que « la circulation des oeuvres s’effectue principalement entre chaînes d’un même groupe » grâce notamment à une clause dite de « droit de premier et dernier refus » ou « clauses de rétrocession », lesquelles reviendraient à un gel de droits, autrement dit « à restreindre ou à fausser le jeu de la concurrence » (9). Ce qui ne va pas sans poser des problèmes pour les autres chaînes de la TNT et pour les SMAd. Ces derniers sont en effet soumis, par décret du 12 novembre 2010 applicable depuis le 1er janvier 2011, à des obligations de financement de films et de programmes. Mais s’ils ne peuvent accéder aux programmes et films, leurs obligations sont inatteignables et leur pérennité compromise faute d’œuvres attractives à leur catalogue.
Avec leur charte TV connectée rendue publique le 23 novembre, les chaînes françaises veulent en plus garder le contrôle du téléviseur. Dans son rapport d’étape remis fin novembre, Dominique Richard estime que les TF1 et M6 pourraient refuser de donner accès à leur programme à Google TV par exemple, en prétextant des régimes d’obligation différents. Il met en garde contre une « situation de blocage », bien que les fabricants de téléviseurs soient en « position de force » dans la mesure où la charte
« [ne les] engage pas »). Les Google TV, Apple TV et autres plateformes de VOD pourraient être de redoutables concurrents. « (…) L’enjeu général pour Google et l’ensemble des acteurs concernés est donc de capter une part des 3 h 33 quotidiennes de “temps de cerveau disponible“ (10), ainsi que les recettes publicitaires associées », explique Dominique Richard dans son rapport final. Alors que sa lettre de mission de Médiateur ne le prévoit pas explicitement, ce dernier pourrait aussi être saisi de conflits entre plateformes VOD et FAI. La conseillère d’Etat Sylvie Hubac avait bien identifié – dans son rapport remis début janvier au CNC – le manque d’ouverture des FAI, plus soucieux de favoriser leur propre service de VOD que d’ouvrir leurs réseaux IPTV à des bouquets de VOD concurrents.

VOD et chronologie des médias
Se pose aussi la question de la chronologie des médias : elle a proposé de réduire le délai de diffusion des films en VOD par abonnement (actuellement de 36 mois après la sortie en salle). La réforme de la chronologie des médias, y compris les 4 mois de la VOD à l’acte, semble inéluctable comme le suggère Marc Tessier. Autant dire que la convergence numérique-audiovisuel va plus que jamais bousculer la réglementaire
et la régulation de deux mondes qui se regardent en chiens de faïence. Le rapport
« Audiovisuel 2015 » prône un « rapprochement » entre le CSA et l’Arcep. @

Charles de Laubier

Opérateurs : l’ère des géants

Assis à mon bureau, j’ouvre comme chaque matin le courrier de la nuit d’un ordre vocal bref. Le premier message de la liste, déjà triée par genre, est ma facture mensuelle de communication. L’entête du courriel, au nom de Google Network, me surprend… Aurais-je changé mon abonnement pour choisir un opérateur d’un genre nouveau ? La sonnerie de réveil de mon téléphone, en déchirant les derniers lambeaux de mon rêve, m’apporte une réponse définitive à cette question. Cet épisode singulier me ramène pensif, dix ans en arrière, à une époque où des débats houleux animaient les conférences internationales des acteurs-clés de la filière des télécoms, d’où émergeaient des termes souvent ésotériques pour le commun des utilisateurs : réseaux hybrides, spectre, capex, neutralité, services managés, over-the-top, … De manière plus prosaïque, cela revient à dire que les opérateurs télécoms devaient faire face à des enjeux colossaux : mettre en place parallèlement les réseaux fixes de fibre optique et les réseaux mobiles de 4e génération, assurer la diffusion d’un ensemble de services et de terminaux de plus en plus nombreux et complexes, tout en déployant
des stratégies internationales ambitieuses. Comment s’étonner dès lors que les plus puissants d’entre eux ont rassemblé leurs forces, poursuivant une course à une taille critique sans cesse croissante. Comme s’ils s’abandonnaient à une force centrifuge les poussant sans cesse à la concentration.

« Je viens de souscrire auprès de ma banque habituelle, chef de file d’une de ces nouvelles alliances, la dernière offre septuple-play »

Cela fut par exemple le cas en 2011 aux Etats-Unis avec le rachat de T-Mobile par l’emblématique AT&T. Le relais a ensuite été pris par les opérateurs télécoms européens, qui ont fait difficilement émerger cinq champions continentaux là où dix
ans auparavant ils étaient encore près de quarante largement enfermés dans leurs territoires historiques. Ces leaders ont poussé très loin l’intégration verticale de leurs offres d’accès, de contenus médias délivrés et de services managés au sein d’un écosystème de transaction hautement fiabilisé. Il y avait d’ailleurs une certaine urgence puisque, dans le même temps, se lançaient hors de leurs frontières de nouveaux compétiteurs venus des marchés asiatiques, lesquels donnèrent naissance à des géants taillés pour gérer des centaines de millions d’abonnés.
Dans ce contexte, les opérateurs encore dans la course ont cependant su mettre en oeuvre des stratégies très différentes et faire mentir tous ceux tentés de réduire le débat à quelques slogans trop réducteurs, du genre : « Pas de salut pour les dumb
pipe ! ». C’est ainsi que l’on a vu des opérateurs investir massivement dans les réseaux pour devenir des références incontournables et être en mesure de fournir également
à l’ensemble des acteurs du Web et du Cloud des fonctions de connectivité et d’interfaces de programmation ouvertes. D’autres, à l’autre bout du spectre, ont su devenir de véritables experts en marketing avancé d’offres de communication, en composant des gammes de services et de contenus pouvant aller jusqu’à l’hyperspécialisation.
Il est une bataille, une question hautement stratégique, qui n’a toujours pas trouvé d’issue : qui sera le gestionnaire du foyer numérique ? Les fournisseurs d’accès, les plus proches de leurs clients et détenteurs des fameuses « box » à tout faire, ont su tirer leur avantage, lié à leur proximité, sans encore l’emporter face à des challengeurs. De grandes alliances se mettent en place, afin de proposer des services désormais essentiels pour gérer de manière unifiée la facturation, l’identité numérique, l’interopérabilité des services et des équipements et la sécurisation des données-clés des clients. L’opérateur télécoms de nos rêves – qui se ferait oublier derrières des offres simples à comprendre et à installer, presque transparentes, sans interruption de services et à des prix toujours très abordables – est sans doute encore à venir. Mais indubitablement les choses changent, puisque je viens de souscrire auprès de ma banque habituelle, chef de file d’une de ces nouvelles alliances, la dernière offre septupleplay qui m’assure, en plus des abonnements classiques à mes services de communication et de contenus, un service très attendu permettant de sécuriser la gestion de mon identité et de mon coffre-fort numérique. @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » : Cloud content
* Jean-Dominique Séval est directeur général adjoint
de l’Idate. Sur le même thème l’Idate publie
son rapport « Future Telecom : Stratégies 2020 »,
par Steven Andlauer.

Fusion entre FFT et Afom, sans Free ni Numericable

En fait. Le 3 janvier, a été « officialisée » – avec Eric Besson – la fusion de l’Association française des opérateurs mobile (Afom) au sein de la Fédération française des télécoms (FFT). L’Afom devient un « collège mobile », dont l’ancien président Jean-Marie Danjou devient directeur général délégué.

Vers une protection juridique de la neutralité du Net

Alors que la consultation de l’Arcep s’est achevée le 13 juillet – avec 40 contributions reçues et des « recommandations » prévues pour septembre
– et que le rapport du gouvernement va être remis au Parlement, le débat
sur la neutralité des réseaux prend une envergure européenne.

Convergence dans les télécoms : vers plus de concentration et moins de concurrence ?

Après avoir fait figure d’arlésienne pendant dix ans, la convergence devient réalité. Or, ce nouvel eldorado n’est pas sans risque sur la concurrence ni sans incidence sur la concentration du marché des communications électroniques déjà élargi à l’audiovisuel.

Par Katia Duhamel, avocate, cabinet Bird & Bird

L’émergence des offres convergentes fixe-mobile pose
en premier lieu la question du cadre d’analyse pertinent de marchés, aujourd’hui étroitement liés, alors qu’ils étaient auparavant bien distincts. Par voie de conséquence se pose également la question de savoir comment il sera encore possible d’analyser la relation entre prix de gros et prix de détail sur ces marchés, de surcroît au sein d’opérateurs télécoms intégrés ? Une autre problématique est liée au risque de voir se propager, comme
l’a écrit l’Arcep (1), « la faible fluidité du marché mobile à l’ensemble du secteur ».
Et ce, grâce à des pratiques commerciales biaisées par les avantages que certains opérateurs pourraient tirer de leur situation de dominance sur l’un des marchés concernés, et grâce en particulier à un processus de changement d’opérateur rendu plus complexe avec des offres groupées et de l’utilisation croisée de leur base de clientèle.

Cross-selling autorisé pour Orange
Dans son avis du 14 juin 2010 (2), l’Autorité de la concurrence analyse les effets de
ces pratiques commerciales en se concentrant sur l’utilisation croisée des bases de clientèle (« cross-selling ») dans un contexte de ventes couplées (« bundles »). En effet, l’Autorité de la concurrence ne semble pas inquiète outre-mesure des risques de distorsion de concurrence que pourrait emporter l’utilisation croisée de ses bases de clientèle par Orange, alors que cet opérateur est « susceptible de détenir une position dominante sur le marché du détail du haut débit ». Cette position se fonde sur deux constats : les bases de clientèle acquises, dans le cadre d’une compétition par les mérites, ne constituent pas des informations privilégiées, non reproductibles par les concurrents ; l’évolution récente des parts de marché en faveur de SFR et de Bouygues Télécom serait davantage liée à l’attractivité tarifaire des nouvelles offres de couplage proposées aux consommateurs, ou à d’autres facteurs comme la qualité de service, qu’à l’utilisation croisée de bases de clientèle. En revanche, selon l’Autorité, les offres convergentes d’Orange présenteraient, en elles-mêmes, des risques pour la concurrence, notamment en termes de verrouillage du marché.

Plusieurs risques concurrentiels
L’Autorité identifie en effet plusieurs risques de nature concurrentielle, liés intrinsèquement à la nature même des offres de convergence. En particulier l’Autorité met en avant le risque de voir s’accroître les coûts de sortie pour un consommateur qui souhaiterait changer d’opérateur, dans la mesure où les nouveaux services à valeur ajoutée proposés dans le cadre d’offres convergentes – applications, téléchargements audio, vidéo ou de jeux, espace de stockage, etc. – constituent des freins supplémentaires à ce changement et viennent s’ajouter aux durées longues d’abonnement. Il existe aussi un risque de verrouillage, non seulement des clients, mais aussi des foyers dans la mesure où les avantages techniques ou tarifaires des offres de couplage et de convergence inciteraient ses membres à migrer vers le même opérateur pour tous leurs besoins, dans un mouvement qui ne peut qu’avantager les opérateurs qui disposent des meilleures parts de marché (« effet club »). Enfin, l’Autorité de la concurrence met en garde contre le risque d’une distorsion générale de concurrence au profit des trois opérateurs mobiles en place (Orange, SFR et Bouygues Telecom) et au détriment des autres opérateurs.
Les sages de la rue de L’échelle notent d’ailleurs que, compte tenu des barrières à l’entrée sur le marché mobile et de l’orientation du marché vers le modèle d’opérateur universel proposant au consommateur des offres « tout en un », un opérateur fixe, même efficace, qui ne pourrait pénétrer le marché mobile, risquerait à terme l’éviction. Ce risque pourrait être atténué par l’arrivée de Free sur le marché de la mobilité, sous réserve qu’il puisse bénéficier d’une prestation d’itinérance – dans des conditions raisonnables – sur l’un des réseaux en place, non seulement pour la 2G mais aussi pour la 3G. Or, note le gendarme de la concurrence, il semblerait que les négociations butent actuellement sur ce point. Pour prévenir les risques de verrouillage du marché, l’Autorité de la concurrence propose alors de renforcer les mesures en faveur des consommateurs, notamment en matière de durée d’engagement et de réengagement des clients souscrivant à une offre de couplage, ainsi que de synchronisation du terme des abonnements aux services haut débit et mobile, de standardisation de certaines fonctionnalités pour en assurer l’interopérabilité.

Minimiser le risque des consommateurs
Il s’agit aussi d’assurer la portabilité des services convergents actuels et futurs (numéros unique ou applications distantes par exemple) pour les consommateurs qui ont souscrit à des abonnements multiples auprès d’un même opérateur et souhaiteraient en changer. Ajoutons ici qu’il sera nécessaire d’être très vigilant sur la qualité de l’information fournie aux consommateurs pour prévenir sa probable opacité. Mais l’analyse concurrentielle stricto sensu semble un peu en panne. Il nous semble, en effet, que l’émergence des offres couplées, et a fortiori des offres de convergence réelle – c’est-à-dire intégrant les terminaux puis les services –, rend pour le moins caduque l’analyse de marché telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, à savoir dans le cadre de marchés parfaitement séparés et étanches. A ce titre, il n’est pas certain que la notion d’effet de levier (3) suffise à interpréter l’ensemble des comportements restrictifs de concurrence que pourraient développer les opérateurs proposant des offres de convergence.
Par ailleurs, sans possibilité d’analyse des coûts de transfert internes au sein des opérateurs intégrés pour produire de telles offres, comment évaluer les barrières à l’entrée sur le nouveau marché et prévenir d’éventuelles pratiques d’éviction ?

Eviter le renforcement des positions acquises
Enfin, des éléments pourraient influencer grandement la concurrence sur le marché d’avenir des offres convergentes : les conditions d’accès à la boucle locale fibre, le rôle des plateformes sans-fil (télévision mobile, haut débit mobile), l’absence de vrais MVNO (4) et les incertitudes qui demeurent sur les conditions de « roaming 3G » (itinérance entre les différents réseaux mobiles) qui seraient accordées à un opérateur nouvel entrant sur le marché mobile comme Free. Il nous semble aujourd’hui que le développement de ces offres convergentes fige plus encore les positions acquises par les trois opérateurs mobiles et mette plus en péril encore l’économie des opérateurs fixes qui n’auraient pas les moyens d’une intégration fixe/mobile, Or, les autorités chargées de la concurrence – sectorielles ou non – paraissent curieusement démunies des outils conceptuels et de l’analyse économique approfondie nécessaires à la prévention des risques concurrentiels, lesquels pourraient naître de l’évolution du marché vers le modèle d’opérateur universel.
Il faut donc espérer que cette réflexion se fait dans l’ombre ou bien craindre une concurrence purement théorique dans le secteur des communications électroniques. @

ZOOM

Vers un marché des offres haut débit multiservices incluant l’audiovisuel ?
Triple play, quadruple play, multi play… Le « tout en un » inclut de plus en plus, pour les clients dits éligibles des opérateurs télécoms et fournisseurs d’accès à Internet (FAI),
un nombre croissant de services audiovisuels : chaînes gratuites de télévision, vidéo
à la demande, télévision de rattrapage, bouquets de chaînes payantes. Est également proposé en plus toute une gamme de services multimédias. L’Autorité de la concurrence constate justement, dans son avis du 14 juin dernier, que – à part Orange et ses offres multiservices véhiculant le signal audiovisuel par satellite jusqu’en en zones non dégroupées – « les autres opérateurs ne proposent de services audiovisuels dans le cadre d’offres multiservices qu’à environ la moitié de la population ». Faut-il réguler ce nouveau marché ? Si le marché des offres haut débit à destination des particuliers et des professionnels est susceptible de constituer un marché pertinent au sens du droit de la concurrence, les sages de la rue de l’Echelle disent qu’ « il n’est cependant pas exclu que des marchés plus étroits puissent être identifiés, notamment un marché des offres haut débit multiservices incluant des services audiovisuels,
à condition de pouvoir en tracer les limites avec suffisamment de certitude et de stabilité ». Cette délimitation du marché haut débit-services audiovisuels pourrait s’accompagner d’une segmentation géographique, en fonction de la capacité des opérateurs alternatifs à fournir ces offres aux foyers concernés. @

Charles De Laubier