Comment le Cloud computing va décloisonner les droits d’auteurs et la copie privée

Le nuage informatique qui se forme sur les médias et les industries culturelles, pourrait tourner à l’orage et provoquer la foudre sur la gestion restrictive des droits d’auteurs et la « taxe » pour copie privée déjà bien contestée. Débats houleux en perspective au CSPLA.

Consulter tous ses contenus culturels ou ses médias – musiques, films, journaux, radios, chaînes, livres, vidéos, photos, réseaux sociaux, etc. – sans qu’ils soient localisés sur le disque dur ou la mémoire flash de n’importe lequel de ces terminaux
y ayant accès : voilà ce que le « cloud » offre maintenant au grand public. Cette possibilité de dématérialiser le stockage de ce que l’on pourrait appeler sa
« multi-médiathèque » et d’y accéder à distance, quels que soient le terminal, le lieu
et le pays où l’on se trouve, voire en partageant des contenus sur les réseaux sociaux, relève de la boîte de Pandore pour les ayants droits.

La nouvelle taxe Cosip attendra la loi de finances 2012

En fait. Dans la nuit du 22 au 23 juin, l’amendement du sénateur UMP Philippe Mariani tentant d’instaurant une nouvelle taxe « Cosip » sur les FAI avec un nouveau barème a finalement été retiré, comme l’avait le 10 juin le même amendement déposé par le gouvernement à l’Assemblée nationale.

En clair. C’est à l’automne prochain que les opérateurs télécoms et les FAI sauront à quelle « nouvelle taxe Cosip » ils seront soumis. Bien que le gouvernement – sur un arbitrage du Premier ministre – ait décidé de « préserver » les recettes du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), lequel gère le Compte de soutien à l’industrie des programmes (Cosip), il n’a pas réussi imposer son amendement allant dans ce sens.
Ni à l’Assemblée nationale le 10 juin, ni au Sénat le 23 juin, dans le cadre du projet de loi de finances 2011. Le lobbying de la Fédération française des télécoms (FFT) semble
avoir payé. Après le rejet par les députés de l’amendement 1577 déposé par surprise
par le gouvernement (1), ce dernier est revenu à la charge auprès des sénateurs avec l’amendement 225. Il s’agissait de faire en sorte que la taxe « Cosip » due par les FAI
soit « assise tant sur les abonnements aux services de télévision distribués séparément, que sur les abonnement à des services de communication en ligne ou des services de téléphonie, dès lors que leur souscription est nécessaire pour recevoir des services de télévision ». Car le gouvernement veut éviter que les FAI soient tentés de sous-estimer la part de l’audiovisuel dans leurs factures triple play pour minimiser leur contribution au Cosip. Or depuis la disparition de la TVA de 5,5 %, laquelle leur était accordée sur la partie distribution audiovisuelle des offres triple play en contrepartie de leur contribution au Cosip (2), les opérateurs ont intérêt à « optimiser » en réduisant l’importance de la télévision dans leurs revenus. Free est particulièrement visé pour avoir, en début d’année, rendu optionnelle son offre TV pour 1,99 euro par mois (portion congrue pour le calcul du Cosip). L’Association des producteurs de cinéma (APC) s’en était insurgée. Or Nicolas Sarkozy avait garanti aux organisations du cinéma français – reçues le 6 septembre 2010 – le financement des films via le CNC. Avec son amendement, le gouvernement voulait en outre simplifier à quatre tranches le barème de calcul de la taxe « Cosip » : de 1,25 % au-delà de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires jusqu’à 250 millions, ensuite 2,25 % jusqu’à 500 millions, puis 2,75 % jusqu’à 750 millions, enfin 3,25 % au-delà. En évitant l’optimisation des FAI, le gouvernement espérait garantir dès cette année 2011 le budget du CNC et éviter un manque à gagner pouvant aller de 20 à 140 millions d’euros selon Frédéric Mitterrand. @

Jean-Marc Tassetto, Google : « La taxe sur la publicité en ligne va freiner la croissance des PME »

DG de Google France, Jean-Marc Tassetto fustige la « taxe Google », explique sa surprise d’être encore accusé de contrefaçon par des éditeurs, assure que Google TV et Google Music respecteront les ayants droits, et précise la portée de l’Institut européen de la Culture. Il évoque aussi Panda et Google Wallet…

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@ : Google France a profité du Festival de Cannes pour lancer Media Ads. Quand Media Ads sera proposé à d’autres annonceurs que les producteurs de films ?
Jean-Marc Tassetto :
Le Festival de Cannes constituait
en effet une bonne opportunité pour présenter ce nouveau format publicitaire auprès des producteurs et des distributeurs de films en France. Cinq nouveaux films ont ainsi utilisé Media Ads pour leur promotion (1). Ce format permet de mettre en avant leur contenu au moyen de bandes-annonces ou d’extraits de films diffusés en haute définition lorsqu’un internaute clique sur l’annonce. Il s’agit actuellement d’un test bêta pour les annonceurs du cinéma. Lorsqu’un internaute effectuera une recherche liée à un film promu avec Media Ads, il trouvera une vidéo qu’il pourra lire sans quitter pour autant sa page de résultats. Nous attendons de voir les performances du format en France pour envisager de le proposer à d’autres annonceurs pour lesquels le format serait également pertinent. L’idée est clairement d’élargir la palette des outils publicitaires en ligne que Google propose aux différents annonceurs, mais aussi d’enrichir les réponses aux requêtes des utilisateurs. Notre souci constant est d’améliorer et d’innover sur nos formats publicitaires.

Projet de loi de Finances 2011 : les e-taxes

En fait. C’est le 7 décembre que se terminent les débats au Sénat sur le projet
de loi de Finances pour 2011, lequel avait été adopté par l’Assemblée nationale
le 17 novembre dernier. En attendant, la commission mixte paritaire du 13 décembre, Edition Multimédi@ fait le point sur les mesures « numériques ».

En clair. L’économie numérique et les nouveaux médias contribuent plus que jamais
aux recettes de l’Etat français, qui en a bien besoin… La plus emblématique des taxes instaurées par le gouvernement et les parlementaires français restera la taxe dite
« Google », qui a été adoptée par le Sénat le 23 novembre et qui sera applicable à
partir du 1er janvier 2011. Elle s’appliquera à partir du 1er janvier 2011 sur les recettes publicitaires réalisées en France par Google, Yahoo, Dailymotion et tout autres
services web. Elle devrait rapporter à l’Etat jusqu’à 20 millions d’euros. « La taxation
des annonceurs est la seule solution, compte tenu de la localisation hors de France
des principaux vendeurs d’espaces publicitaires en ligne, tels que Google », explique Philippe Marini (1).
Le Web rejoint ainsi la télévision et la presse gratuite, dont les recettes publicitaires sont déjà taxées et rapportent respectivement 70 et 30 millions d’euros par an à l’Etat. En revanche, son amendement pour une taxe de 0,5 % sur le commerce électronique
a été abandonné. Sur le triple play (ou le quatruple play), l’Assemblée nationale avait relevé en octobre la TVA de 5,5 % à 19,6 % sur la moitié du tarif d’abonnement haut débit qui bénéficiait du taux réduit pour distribution de service de télévision. Pour les opérateurs télécoms, cela remettait en cause leur contribution au Compte de soutien
à l’industrie de programmes (Cosip). Mais pour ne pas déstabiliser le financement des films français (2), le gouvernement a finalement donné des gages aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) en leur accordant un « abattement de 50 % » sur les recettes fiscales prélevées sur le triple play avec télévision. Ce qui revient à « neutraliser les effets collatéraux de la suppression du taux réduit forfaitaire de TVA » sur les offres triple play. Les FAI n’auront donc pas un « effort fiscal supplémentaire » à faire. En échange de quoi, la taxe Cosip n’est pas remise en cause et, pour prendre en compte la partie télé du triple play, les FAI bénéficient d’une déduction de 55 % sur les recettes des abonnements triple play.
Dans un tout autre domaine, le Sénat a adopté le 22 novembre pour le livre numérique le même taux de TVA réduit que pour le livre papier – à savoir 5,5 %. Quant au projet de prix unique du livre numérique, adopté au Sénat fin octobre, il doit encore être approuvé par l’Assemblée nationale. @

Yves Gassot, Idate : « Les ventes mondiales sur Internet ne dépassent pas encore les 20 milliards d’euros »

A un mois du 32e DigiWorld Summit qui se tiendra les 17 et 18 novembre
à Montpellier, le directeur général de l’Institut de l’audiovisuel et des télécommunications en Europe (Idate) qui l’organise répond aux questions
de Edition Multimédi@ sur les enjeux futurs d’Internet.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@ : Le thème des prochaines journées de l’Idate est « Qui finance l’Internet du futur ? ». A question simple, problématiques multiples…
Yves Gassot (photo) :
Naturellement tous les acteurs contribuent, par leurs innovations et leurs investissements, à l’Internet. Mais
il y a une vraie difficulté à avoir une vision d’ensemble de l’écosystème : comment ça marche ? Qui fait quoi ? Qui investit dans quoi et bénéficie de quelles recettes ? Quelles sont les transformations en cours les plus significatives ? Pour notre conférence internationale, nous allons essayer de clarifier ces points en se concentrant sur quelques maillons
de la chaîne et sur les problématiques qui les accompagnent. Au coeur de l’Internet,
il sera question des tiraillements entre les « backboners » (Level3, Global Crossing,
AT&T, …), les grands agrégateurs de contenus (Google, Amazon, …), les réseaux de distribution de contenus ou CDN (1) (Akamai, Limelight, …) et les fournisseurs d’accès
à Internet (FAI). Comment font-ils pour s’interconnecter, supporter la croissance des flux, les contraintes de qualité de la vidéo ? etc. En périphérie, sera soulevée la problématique du renouvellement des réseaux d’accès en fibre (FTTx) ou cellulaire (LTE) : dans quelle mesure les FAI peuvent-ils supporter ces investissements en se limitant à fournir un accès aux consommateurs ? Sur le marché de la vidéo : que va changer la TV connectée ? Comment les chaînes vont-elles survivre face à la profusion d’offres de « video over the top » (2) ? Dans l’accès même aux applications et services par l’internaute, il y a d’autres interrogations : quelle peut être la place de Facebook face au modèle de type Apple (App Store) ou du Web « ouvert » défendu par Google qui contrôle le marché des moteurs de recherche ? Et finalement, nous aborderons les thématiques de la Net neutralité et des atouts européens face aux perspectives de l’Internet du futur.