Face à la fragmentation de l’audience, l’Internet global

En fait. Le 14 mars, Médiamétrie a fait le point sur les faits marquants du Web
sur l’année 2011 (les barres des 40 millions d’internautes et des 20 millions de mobinautes atteintes) et présenté les évolutions à venir des mesures d’audience. L’Internet fixe et L’Internet mobile vont être réconciliés.

La loi « Copie privée » est contestée devant le Conseil constitutionnel et l’Union européenne

La nouvelle loi sur la copie privée, prolongeant d’un an les taxes (pourtant annulées par le Conseil d’Etat), fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) et d’un recours devant la Commission européenne.
Les industriels français estiment payer « 100 millions d’euros de trop ».

Selon les informations de Edition Multimédi@, le Syndicat des industries de matériels audiovisuels (Simavelec) et le Syndicat national des supports d’image et d’information (SNSII) ont déposé ce vendredi 10 février leur recours devant le Conseil constitutionnel pour faire annuler la nouvelle loi sur « la rémunération pour copie privée » – datée du
21 décembre dernier et promulguée le lendemain au JORF (1).

Cour de justice européenne en vue
Le Simavelec et le SNSII ont le soutien d’autres organisations professionnelles, que
sont la Fédération française des télécoms (FFT), le SFIB (technologies de l’information), le Gitep TICS (télécommunications), le Secimavi (fabricants et importateurs d’appareils électroniques grand public) et la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad). Contestant déjà devant le Conseil d’Etat les décisions de la commission « copie privée », laquelle relève de trois ministères (Culture, Industrie et Consommation), le Simavelec et le SNSII ont le droit de soulever une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). La plus haute autorité juridictionnelle de l’Etat devra dire si la nouvelle loi « copie privée » porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution française garantit.
Les industriels veulent faire annuler cette loi, tant au niveau français qu’européen, en la contestant devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). « Fin février, nous allons saisir la Commission européenne qui jugera si elle transfert notre dossier devant la CJUE », nous précise un proche du dossier. Selon les plaignants, la loi « copie
privée » va à l’encontre non seulement de la décision de la Haute juridiction administrative  du 17 juin 2011, mais aussi de l’arrêt (dit « Padawan ») de la CJUE, et de la directive européenne du 22 mai 2001 sur « l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information » (DADVSI). En France, le gouvernement avait obtenu des parlementaires de voter (2) la loi « copie privée », laquelle prolonge d’un an (jusqu’au 31 décembre 2012) les barèmes actuels. Ces taxes sont prélevées sur tous – ou presque (pas les ordinateurs…) – les supports de stockage numérique (CD/DVD, clés USB, baladeurs MP3, disques durs externes, smartphones, « box », décodeurs à disque dur, …) utilisés pour y copier musiques, films ou autres. Pourtant, ces taxes – qui rapportent près de 200 millions d’euros par
an aux ayants droits (3) – avaient été annulées par le Conseil d’Etat à compter du 22 décembre dernier (4).
A la suite de l’arrêt du Conseil d’Etat de daté du 11 juillet 2008, lequel avait rendu illégales toutes les décisions de la commission « copie privée » (5), la nouvelle loi permet aux acquéreurs professionnels de ces supports numériques de se faire rembourser ou, dans certains cas, d’être exonérés. Ce que fustigent les industriels :
« Cette loi impose aux professionnels d’acquitter une rémunération pour copie privée dont le droit communautaire interdit pourtant qu’ils puissent être débiteurs ». Ce point sera attaqué devant la Cour de justice de l’Union européenne, laquelle – dans son arrêt du 21 octobre 2010 (affaire « Padawan ») – avait exempté de la taxe les professionnels. Les industriels reprochent que les barèmes annulés par le Conseil d’Etat seront maintenus pendant 12 mois. « Une telle prorogation vient pénaliser les consommateurs qui pouvaient espérer que le nouveau barème vienne compenser seulement un manque à gagner pour les ayants droit du seul fait des actes de copie privée licite (6) », ont déjà expliqué les organisations professionnelles. Elles dénoncent donc le fait « qu’une intervention législative efface, du revers de la plume, les effets d’une décision du Conseil d’Etat et engage la responsabilité de l’Etat français devant les institutions européennes ». La saisine de la Commission européenne va intervenir au moment où cette dernière étudie une réforme des taxes pour copie privée (Private Copying Levies) pour éviter les abus et aboutir à une harmonisation au sein des Vingtsept (7). Pour les industriels, il ne s’agit pas de remettre en cause la « légitimité de la rémunération des ayants droit au titre de l’exception de copie privée » mais plutôt de remettre à plat le calcul : non pas en partant de la capacité des supports (méthode retenue à l’époque de l’analogique), mais plutôt du préjudice réel des ayants droit. Les industriels ont demandé au cabinet de consultants Eight Advisory d’évaluer ce « manque à gagner ».

Les tablettes taxées elles-aussi
Résultat : « Les constructeurs paient 100 millions d’euros de trop par an ! », a lancé Philippe Citroën, président du Simavelec (8), lors d’une conférence de presse le 6 février. Et ce n’est pas fini, car la commission « copie privée » a décidé le 9 février de taxer les tablettes jusqu’à 12 euros. Ce qui ajouterait jusqu’à 36 millions d’euros dans l’escarcelle des ayants droit, puisque 3 millions de tablettes seront vendues en France cette année (9). @

Charles de Laubier

Le salon CES a sonné la fin de la domination d’Apple

En fait. Le 13 janvier s’est achevée à Las Vegas la grand-messe internationale de l’électronique grand public, le Consumer Electronics Show (CES). Cette industrie mondiale va dépasser pour la première fois cette année les 1.000 milliards de dollars de chiffre d’affaires, selon l’association CEA organisatrice.

Les éditeurs craignent de « perdre» leurs clients

En fait. Le 23 novembre, s’est tenue la 26e assemblée générale du Groupement
des éditeurs de contenus et de services en ligne (Geste). Son président, Philippe Jannet – PDG du Monde Interactif – constate que les promesses des tablettes
et de la TV connectée s’accompagnent aussi de « complexités nouvelles ».

Terminal ouvre-toi !

Aujourd’hui comme hier, un même rêve reste encore inaccessible : quel que soit le terminal utilisé (smartphones, tablettes, télévisions, …), quels que soient les applications
et services concernés (musique, vidéo, vie pratique, …),
je passe des uns aux autres sans plus me soucier de compatibilité ou de disponibilité. Autant de contraintes dépassées. Autant d’obstacles levés. Seuls comptent les contenus et les services délivrés, toujours accessibles.
Les terminaux – simples écrans de taille différentes selon
les lieux et les usages, avec leurs cortèges d’applications – sont devenus des commodités, certes indispensables, mais qui savent se faire oublier. Il me suffit de demander à haute voix ce dont j’ai besoin, et quelque part un écran s’allume pour me satisfaire, dans ma poche, sur mon bureau ou dans mon salon. Les progrès vers l’interopérabilité des systèmes d’exploitation (OS), Graal des développeurs et des utilisateurs, n’est cependant pas pour tout de suite. Les magasins d’équipements sont encore bien remplis d’un bric-à-brac complexe. Il faut se souvenir que l’univers numérique fut à l’origine une addition de mondes clos, les téléphones mobiles ayant été conçus dès le début comme des terminaux fermés : chaque constructeur en maîtrisait autant le hard que le soft. Cet ensemble d’univers parallèles, forgés au cœur des télécoms, a été anéanti par le big bang de l’Internet. Une course de vitesse a alors été lancée : quels seraient les rares élus à se partager le contrôle du terrain hautement stratégique des OS ? Les équipementiers historiques se sont lancés dans la bataille mais n’ont pu que regarder, impuissants, l’arrivée de nouveaux entrants.

« Les terminaux sont devenus des commodités. Mais le progrès vers l’interopérabilité des systèmes d’exploitation (OS) n’est pas pour tout de suite. »

 

Avec le lancement de l’iPhone en 2007, Apple a réinventé de manière magistrale, et à son seul profit, un monde fermé visà- vis de l’extérieur mais ouvert à l’échelle de l’ensemble
de sa gamme. Très peu ont été en mesure de le suivre sur ce terrain, où il a conquis une position unique : son iOS capta rapidement une part du marché des smartphones qui monta, en seulement trois ans, à 20 %. Deux ans plus tard, en 2009, c’est Google qui se lança dans l’aventure en proposant Androïd – son système ouvert – à la communauté des équipementiers et des opérateurs. Arrivée au bon moment, il se tailla une part de marché de 40 % en à peine deux ans.
Alors que Nokia tentait de sauvegarder sa position dominante par une alliance avec Microsoft, dont l’OS Windows Mobile était malmené, Samsung se jetait dans le bain avec Bada : en faisant le pari que non seulement son OS équiperait autant ses smartphones que ses tablettes et téléviseurs connectés, mais aussi qu’il serait utilisé par d’autres constructeurs grâce au « code source » proposé à partir de 2012. La même année RIM présentait BBX, son nouvel OS qui portait une grande partie des espoirs de relance du Blackberry. La plupart des autres équipementiers, comme LG Electronics, jouèrent la prudence, par manque d’atouts, d’ambition ou simplement de place.
Certes, l’ouverture a continué de progresser, mais certains « wallen gardens » ont été
en mesure de résister comme celui d’Apple qui, entre temps, s’était relancé à la conquête du téléviseur : une nouvelle occasion pour la marque à la pomme d’élargir encore son domaine réservé et sa surface financière, la tentation étant trop grande de reproduire
avec la TV – aux interfaces encore pauvres et anti-ergonomiques à l’époque – ce qu’il avait réussi dans le mobile. D’autres, peu nombreux, ont malgré tout tenté l’aventure. Facebook voulut reproduire la prouesse de Google en lançant à son tour, peu après 2015, son propre OS mobile. Fort de ses 2 milliards d’utilisateurs, il ne lui était en effet plus possible de rester, sur les terminaux de ses fans, une application parmi tant d’autres. C’est une logique différente qui poussa plusieurs acteurs chinois à lancer, entre 2011
et 2012, leurs propres OS mobile : China Unicom sortait Wophone ; le moteur de recherche Baidu finalisait Qiushi ; le site de e-commerce Alibaba confirmait Aliyun !
Autant de stratégies de conquêtes qui s’appuyèrent néanmoins sur une compatibilité
totale avec Android, reconnaissant ainsi que la grande époque des citadelles isolées
était bien révolue. @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » : Chronologie du livre
* Directeur général adjoint de l’IDATE. Sur le même thème,
l’Idate publie l’étude « LTE Devices »,
par Frédéric Pujol, et organise le DigiWorld Summit 2011
sur le thème « Will the device be king ? »