Les tablettes n’ont pas réussi à s’imposer face aux smartphones et leur usage est resté secondaire

Les tablettes sont-elles vouées à disparaître ? La question peut paraître osée, mais pas tant que cela. L’usage écrasant des smartphones depuis des années a relégué les ardoises au second plan. La presse mondiale en espérait beaucoup, mais ce fut la déception. Leurs ventes sont souvent en baisse.

Apple, Samsung, Huawei, Lenovo et Xiaomi constituent le « Top 5 » mondial des fabricants de tablettes. Mais leurs ventes sur ce segment de marché font pâle figure par rapport aux ventes de leurs smartphones. Prenons le numéro un mondial des ardoises tactiles, Apple avec son iPad – qui est entré depuis le 3 avril dernier dans sa quinzième année depuis sa première génération. La marque à la pomme en a vendu au cours de son dernier exercice annuel (clos le 30 septembre 2023) pour 28,3 milliards de dollars, en baisse de – 3 % sur un an. Alors que les iPhone, eux, lui ont rapporté sur la même période 200,5 milliards de dollars.

Apple pourrait passer en second
Les tablettes de la firme de Cupertino ne pèsent que 7,3 % de son chiffre d’affaires global annuel. Sur les six premiers mois de l’exercice en cours (c’est-à-dire au 30 mars 2024), les iPad (5,5 milliards de dollars contre 45,9 milliards de dollars pour les iPhone) ne représentent là encore que 6,1 % du chiffre d’affaires total sur ce premier semestre. Le recul des ventes de des tablettes de la Pomme sur ces six premiers mois de l’année fiscale en cours est de – 17 %.
Reste à savoir pour le PDG d’Apple, Tim Cook, si sa keynote du 7 mai dernier consacrée aux nouveautés iPad (1), relancera les ventes de ses ardoises. Si les annonces du successeur de Steve Jobs se sont faites sans accros de l’Apple Park circulaire, il n’en a pas été de même pour la publicité pour l’iPad Pro diffusée le jour même (2). Montrant une énorme presse hydraulique broyant lentement guitare, métronome, sculpture, livre, tourne disque, trompette, appareil photo, mannequin en bois d’artiste, sur fond de tubes de couleurs explosant au fur et à mesure comme du sang qui gicle, pour laisser apparaître la fine tablette, cette publicité a suscité une vague d’indignation à travers le monde. Certains y ont vu une dystopie froide portant atteinte à la création humaine ; d’autres se sont offusqués de cette uniformisation du monde réduite à l’écran. « Nous avons raté la cible avec cette vidéo, et nous sommes désolés », s’est excusé Apple le 9 mai par la voix de son vice-président marketing communication, Tor Myhren, dans une déclaration à l’hebdomadaire américain Ad Age (3). L’avenir dira si cette publicité ratée accentuera le déclin des iPad, malgré les nouveaux modèles dont certains plus grands, plus puissants, mieux éclairés, mieux sonorisés, etc. (4).

Position dominante de Qualcomm: une amende de 1 milliard d’euros annulée peut en cacher une autre

Le Snapdragon Summit, grand-messe annuelle de l’américain Qualcomm, a eu lieu cette année les 15 et 16 novembre en livestream d’Hawaï, loin du tribunal de Luxembourg. Le numéro un mondial des puces pour smartphones reste dans le collimateur de la Commission européenne. près le tribunal de l’Union européenne au Luxembourg, les cocotiers sous le soleil d’Hawaï pour son Snapdragon Summit… Qualcomm – numéro un mondial des micro-processeurs pour smartphones et tablettes – peut continuer à conforter sa position dominante sur ce marché colossal. La Commission européenne a décidé de ne pas faire appel de l’arrêt annulant le 15 juin 2022 l’amende de 997,4 millions d’euros qu’elle avait infligée en janvier 2018 au fabricant américain de puces pour abus de position dominante, en pratiquant avec Apple des « tarifs d’exclusivité » (1). « Tarifs d’exclusivité », non tranchés au fond « La Commission européenne a étudié attentivement l’arrêt du tribunal de l’Union européenne dans l’affaire Qualcomm et a décidé de ne pas saisir la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) », a-t-elle indiqué à Edition Multimédi@, confirmant une information de Reuters datant de fin août (2). Pour autant, un autre recours de Qualcomm contre une deuxième décision de Bruxelles le condamnant à une amende dans l’affaire cette fois des « prix d’éviction » est actuellement instruite par le même tribunal de l’UE. Pour avoir facturé « des prix inférieurs aux coûts dans le but de forcer ses concurrents à quitter le marché », Qualcomm avait écopé le 18 juillet 2019 de 242 millions d’euros d’amende (3) mais le fabricant américain avait demandé en appel d’annuler cette décision. Ce verdict ne devrait pas tarder. En attendant, l’arrêt de la première affaire – publié au Journal Officiel de l’UE le 15 juillet (4) est un revers majeur pour Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive de la Commission européenne en charge du Numérique et, depuis novembre 2014, de la Concurrence. L’amende de près de 1 milliard d’euros infligée à Qualcomm en janvier 2018 sanctionnait un abus de position dominante sur le marché mondial des chipsets à la norme LTE (Long Term Evolution), le standard international des 3G et 4G. La sanction représentait 4.9 % du chiffre d’affaires de Qualcomm en 2017. La firme de San Diego, qui fournit ses puces à Samsung (numéro un mondial des smartphones), Apple, Xiaomi, Huawei, HTC, LG ou ZTE, est toujours en tête de ce marché étendu à la 5G. Il était notamment reproché à Qualcomm d’avoir accordé à Apple des « paiement d’exclusivité » pour que le fabricant d’iPhone et d’iPad ne se fournisse que chez lui en puces, ce que Bruxelles avait considéré comme un « abus de position dominante » à « effets anticoncurrentiels ». La Commission européenne avait même révélé que « Qualcomm avait payé à Apple une somme comprise entre 2 et 3 milliards de dollars » pour obtenir cette exclusivité, de 2011 à 2015 (5). Ce qui aurait dissuadé Apple d’aller voir la concurrence, dont Intel. Ces accords avaient cependant pris fin à la suite du lancement par Apple, le 16 septembre 2016, des iPhone 7 intégrant des chipsets d’Intel. Le tribunal de Luxembourg a annulé toute la décision de la Commission européenne en raison d’« irrégularités procédurales ayant affecté les droits de la défense de Qualcomm », d’une part, et, d’« illégalité » de l’analyse des effets anticoncurrentiels des « paiements incitatifs » dits d’exclusivité, d’autre part. Et n’aurait pas été pris en compte le fait qu’à l’époque « Apple n’avait pas d’alternative technique aux chipsets LTE de Qualcomm pour [ses] iPhone ». En outre, la Commission européenne n’avait pas fourni de notes et d’informations sur le contenu des réunions et des conférences téléphoniques qu’elle a eues avec les tiers comme Apple ou Nvidia. Ce qui ne respectait pas les droits de la défense de Qualcomm. La Commission européenne indique à Edition Multimédi@ qu’elle a « le devoir de protéger (…) l’identité des tiers qui ont présenté des demandes justifiées de garder l’anonymat en raison du risque de représailles ». Autre reproche : la Commission européenne se limitait à retenir un abus de position dominante sur le seul marché des chipsets LTE, alors que la communication des griefs portait aussi sur des puces UMTS (6). S’est ainsi achevée cette première procédure antitrust et judicaire de plus de huit ans qui s’est ouverte en août 2014 par l’enquête de la Commission européenne. Et sans que la CJUE n’ait in fine eu son mot à dire en appel sur « tarifs d’exclusivité » aux « effets d’éviction » de la concurrence. Accord pluriannuel avec Samsung Après deux années sous tension (pandémie, pénurie de puces et tribunal), la firme de San Diego – dirigée depuis fin juin 2021 par Cristiano Amon (photo) – peut continuer à prospérer sur le marché des smartphones. Avec sa nouvelle puce « Snapdragon 8 Gen 2 », Qualcomm compte bien remporter à nouveau la mise avec Noël. Samsung (7) abandonne sa propre puce Exynos pour le nouveau chipset de Qualcomm pour ses prochains Galaxy (passant de 75 % des S22 à 100% des S23) grâce à un « accord pluriannuel » dont les termes restent bien sûr sous le secret des affaires. @

Charles de Laubier

La mesure d’audience TV met enfin son nez dehors

En fait. Depuis le 31 mars, malgré le confinement, Médiamétrie intègre le « hors-domicile » dans ses mesures d’audience TV. Cette audience en mobilité vient s’ajouter à l’audience à domicile sur le téléviseur. Une petite révolution, au moment où Yannick Carriou succès à Bruno Chetaille à la tête de Médiamétrie.

En clair. C’est une petite révolution attendue dans la mesure d’audience des chaînes de télévision en France : le 30 mars correspond au premier jour de mesure « hors-domicile » pris en compte – désormais en plus de l’audience à domicile sur le téléviseur – par le système Médiamat de Médiamétrie. Et ce, 365 jours par an, quels que soient : l’écran (téléviseur, ordinateur, smartphone, tablette), le mode de consommation télévisuel (linéaire, délinéarisé, en live, différé, replay), le mode de réception (hertzien/TNT, câble, satellite, ADSL, fibre optique, OTT), et désormais le lieu en plus de la résidence principale (résidence secondaire, hôtel, location de vacances, bar, gare, aéroport, lieu public, voiture, train, bus, chez des parents, ou encore des amis). Selon nos informations auprès de l’institut de la rue Rivay (Levallois-Perret), « cette audience horsdomicile et en mobilité est restituée depuis le 31 mars de manière agrégée sans distinction entre domicile et hors domicile, puis sera incluse dès le 6 avril dans le Médiamat hebdo » qui sera rendu public. Vingt ans après avoir pris en compte pour la première fois la diffusion numérique et trentecinq ans après l’invention de l’Audimat (auquel a succédé Médiamat en 1989), le système de mesure d’audience TV de Médiamétrie prend enfin l’air (1). L’ironie de l’histoire – si l’on peut dire dans ce contexte dramatique de pandémie – est que cet élargissement de l’audience de la télévision intervient en plein confinement généralisé en France depuis le 16 mars (contrainte imposée à plus de 3 milliards de personnes dans le monde d’ailleurs). « Malgré la période de confinement actuelle, les résultats d’audience du Médiamat intègrent l’audience hors-domicile. Néanmoins, compte tenu des circonstances, nous avons souhaité reporter le partage et la communication sur les analyses de ces nouvelles audiences », nous indique une porte-parole de Médiamétrie.
En outre, l’institut n’a pas prévu – « pour l’instant » – de distinguer le domicile d’un côté et le hors-domicile de l’autre (2). Pour obtenir ces résultats agrégés, Médiamat d’appuie sur deux panels (3) : l’historique « à domicile » (5.000 foyers avec les téléviseurs équipés d’un audimètre fixe/11.400 individus) et le nouveau « hors-domicile/en mobilité » (4.500 individus équipés d’un audimètre portable). Dans les deux situations, la technologie utilisée reste le watermarking (4). @

Déclin des ventes de tablettes iPad mais hausse des contenus et services digitaux : le paradoxe d’Apple ?

Apple a publié le 5 novembre, via le gendarme boursier américain (la SEC), le rapport financier de son année fiscale close le 29 septembre. Edition Multimédi@ y analyse deux tendances opposées mais paradoxales : la baisse des ventes de l’iPad et la hausse de celles des contenus et services en ligne.

Lorsque, en janvier 2010, la marque à pomme a révélé son tout premier iPad, on allait voir ce qu’on allait voir ! La tablette fut présentée – par Steve Jobs à l’époque (photo de gauche) – comme « un appareil révolutionnaire », qui allait être multimédia, communiquant et tactile pour accéder à tous les contenus. Moins de trois ans après la sortie de son premier iPhone, Apple tenait enfin avec son iPad le « puissant ordinateur dans un livre » promis au monde entier par Steve Jobs en 1983.

Le français Archos a vraiment du mal à s’en sortir

En fait. Le 3 octobre, Archos, le fabricant français de smartphones et tablettes,
a publié via l’AMF son document de référence annuel, ce qu’il n’avait pas fait depuis… 2011. Ce rapport financier porte sur trois ans et le 1er semestre 2018.
Il illustre la difficulté de faire du « made in France » high-tech.

En clair. Archos – anagramme de « Crohas », du nom de son fondateur Henri Crohas, actuel président du conseil d’administration et son premier actionnaire (6 % du capital et 11,2 % des droits de vote), mais aussi « maître » en grec () – est mal en point pour ses trente ans. La capitalisation boursière de l’entreprise française de smartphones et tablettes – fabriqués en Chine pour le compte d’« Archos Chine » (1) – n’a cessé de dégringoler ces dernières années pour ne peser aujourd’hui qu’à peine 22,5 millions d’euros (au 12-10-18). Le document de référence 2018 publié début octobre montre une PME exsangue : sur les six premiers mois de l’exercice en cours, les pertes nettes atteignent 5 millions d’euros, soit presque autant que durant toute l’année 2017 (6,4 millions d’euros de pertes nettes). Tout en creusant son déficit, l’entreprise du « Steve Jobs auvergnat » – dixit Challenges il y a dix ans dans son classement des grandes fortunes françaises (2) – a vu son chiffre d’affaires fondre au fil des années, passant de son plus haut niveau de 171,4 millions d’euros en 2011 – unique année positive avec 5,6 millions de bénéfice net – à seulement 114,1 millions en 2017 (-26,1 % sur un an). Le premier semestre de cette année montre un recul des revenus de 35,8 % en un an, à 32,2 millions d’euros, ne laissant rien augurer de bon pour cette année. L’endettement d’Archos atteint, lui, 25 millions d’euros (3). Le 1er mai 2013, Henri Crohas avait dû laisser la direction générale de son entreprise à Loïc Poirier, après 38,7 millions d’euros de pertes l’année précédente. Les déboires de cette PME française, basée à Igny (Essonne), illustrent les difficultés d’être un « fabricant français » de smartphones, viable et pérenne, sur un marché mondial dominé par Samsung, Apple, Sony, LG et
les chinois Huawei, Oppo ou Xiaomi. Leur puissance de feu, sur fond de guerre des prix, a été écrasante pour Archos.
Sa diversification surprenante semble être une fuite en avant : dans les trottinettes et vélos électriques depuis février 2017, dans les portefeuilles de cryptomonnaies depuis juillet 2018, et dans les assistants vocaux à écran – avec l’intelligence artificielle de Google Assistant depuis fin septembre et, à partir de janvier 2019, d’Amazon Alexa.
« L’objectif de la société est de réaliser environ 50 % de son chiffre d’affaires en 2020 sur les deux nouveaux piliers “Intelligence artificielle” et “Sécurité des transactions Blockchain” », indique le document de référence. @