Pourquoi Netflix risque d’être cannibalisé par Amazon

En fait. Le 4 septembre, Netflix, le service de vidéo à la demande par abonnement (SVOD) a vu son action chuter de 6 % à la Bourse de New York après un accord entre Amazon et Epix/Studio 3 Partners, joint venture de films et séries en streaming créée par Paramount, Metro-Goldwyn-Mayer et Lions Gate.

En clair. Netflix, l’un des services pionnier américain de la SVOD, pourrait à nouveau perdre des abonnés au profit d’Amazon. De quoi rappeler le mauvais souvenir des 810.000 abonnés perdus il y a un an à la suite de la hausse des prix appliquée durant
l’été 2011. Cette fois, le danger vient d’Amazon qui étoffe son catalogue de films de cinéma et de séries de télévision proposés en streaming, grâce à un accord annoncé
le 4 septembre avec des studios d’Hollywood réunis dans la joint venture Studio 3 Partners créée en octobre 2009. Si Epix dispose d’un catalogue de 15.000 films disponibles en streaming, Amazon ne pourra mettre en ligne que 3.000 d’entre eux. Son service par abonnement Amazon Prime Instant Video est déjà riche de 17.000 séries et films. Amazon, qui avait pris en janvier 2011 le contrôle de la plate-forme de streaming LoveFilm (1), a déjà noué des partenariats avec 20th Century, NBC Universal ou encore Warner Bros. Pictures. Sans oublier le fait qu’Amazon produit aussi ses propres films via Amazon Studios : quelque 7.500 scripts ont été à ce jour soumis sur Studios.amazon.com et près de 20 films sont en cours de développement (2).
Le cours de Bourse de Netflix a eu beau fléchir à l’annonce de cet accord, il n’en demeure pas mois que Amazon est encore un Petit Poucet de la SVOD. D’après une étude de IHS iSuppli publiée en juin dernier, Netflix est devenu en 2011 aux Etats- Unis le n°1 des sites de vidéos payants avec 44 % de parts de marché – devant Apple (32,3 %), Microsoft (7,6 %), Vudu du groupe Walmart (4,2 %) et Sony (2,4 %). Vient ensuite Amazon. Le géant du Web est par ailleurs outre-Atlantique le 9e site web de vidéo en
ligne en terme de visiteurs uniques (28,4 millions en juillet 2012, selon ComScore).
Mais sur le terrain de la SVOD, Netflix est encore le leader avec ses 27 millions de foyers américains abonnés – moyennant un abonnement de 7,5 dollars par mois. La société créée en 1997 et basée à Los Gatos (Californie) a annoncé le 20 août dernier que le Royaume-Uni (7,6 euros/mois) et l’Irlande (6,99 euros/mois) – premiers pays européens où elle s’est lancée il y a sept mois – totalisaient 1 million d’abonnés. Prochains lancement en Europe d’ici la fin de l’année : le Danemark, la Finlande, la Norvège et la Suède, en attendant la France, l’Allemagne et l’Espagne. @

Fair use et numérique : la Commission européenne prépare les esprits à plus de tolérance

La commissaire européenne en charge du numérique, Neelie Kroes, s’est
exprimée – le 2 mai sur son blog – en faveur de la consultation de la Hadopi sur
les « exceptions au droit d’auteur et aux droits voisins ». En toile de fond : l’idée
– encore taboue – d’un fair use en Europe.

« Une évolution vers une approche ouverte des exceptions (fair use), sur le modèle
des Etats-Unis, vous semble-t-elle souhaitable, ou pensez-vous que le maintien de l’approche française et communautaire (liste limitative d’exceptions) demeure préférable ? Pourquoi ? ».

e-Libraire cherche e-Lecteur

En ce samedi matin ensoleillé, après avoir bu un café en terrasse accompagné d’un journal sur tablette, j’ai poussé
la porte de ma librairie préférée. Mais ce rêve nostalgique s’évapore au réveil. C’est presque un cauchemar pour
moi qui aie toujours entretenu avec les livres une relation particulière grâce à la médiation des présentoirs des librairies : entrer au Furet du Nord, chez Mollat ou chez Sauramps, et au hasard d’un rayon se laisser attirer par
un titre, une couverture, un auteur, pour repartir avec ce
qui se révélera être un trésor pour le modeste prix d’une édition de poche. Le lent déclin de la librairie s’est encore accéléré après une longue histoire. Au XVIIIe siècle, le métier de libraire se sépara de celui d’éditeur pour éclore progressivement au XXe. Le temps que l’alphabétisation gagne du terrain et le livre devienne plus accessible. Durant une période assez courte, qui fût sans doute son âge d’or, la librairie accueillait de nombreux lecteurs heureux de pouvoir se créer à domicile leur propre bibliothèque personnelle. Ce qui fut l’apanage des lettrés durant de longs siècles, de l’antiquité à la renaissance. Si être Montaigne n’est toujours pas donné à tous, s’entourer de ses livres préférés devenait enfin un objectif raisonnable.

« Nous avons découvert que le livre pouvait aussi se lire en streaming, le monde de la littérature adoptant le modèle déjà existant dans la musique. »

Quatre ans après l’accord de l’Elysée, Nicolas Sarkozy s’impatiente sur le filtrage et le streaming

Depuis l’accord dit « de l’Elysée » du 23 novembre 2007, les FAI n’ont toujours
pas expérimenté le filtrage. Tandis que Nicolas Sarkozy menace le streaming
d’une « Hadopi 3 », le cinéma (APC, FNDF) et la vidéo (SEVN) demandent au
juge de bloquer quatre sites de streaming, comme l’a déjà fait Google.

« Il faut aller plus loin parce qu’il y a les sites de streaming (…).
Sur les sites de streaming, l’idéologie du partage, excusez-moi,
c’est l’idéologie de l’argent : je vole d’un côté et je vends de l’autre. Qu’on ne me demande pas de soutenir ça ; personne ne peut soutenir ça. (…) On m’a présenté comme fanatique d’Hadopi. L’Hadopi… Mais Hadopi c’est un moyen, c’est pas une fin. (…)
Et certains d’entre vous se sont inquiétés lorsque j’ai dit que j’étais prêt à Hadopi 3. Pourquoi, parce que, j’ai bien conscience que la technologie évolue. Ce qui compte dans notre esprit – à Frédéric [Mitterrand] comme à moi –, c’est de protéger les droits d’auteur : si la technologie nous permet une nouvelle évolution,
eh bien on adaptera la législation. Pourquoi en rester là ? A partir du moment où l’on respecte cette question du droit de propriété [intellectuelle] ». Ainsi s’est exprimé le 18 novembre le chef de l’Etat lors du Forum d’Avignon, lequel accueillait également – à sa demande – un sommet élargi (G8/G20) de la culture. Ainsi, quatre ans après l’« accord pour le développement et la protection des oeuvres et programmes culturels sur les nouveaux réseaux » – accord dit « de l’Elysée » ou « Olivennes », signé par les opérateurs télécoms, les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et les ayants droits de
la musique, du cinéma et de l’audiovisuel –, Nicolas Sarkozy s’est dit prêt à une loi
« Hadopi 3 » pour combattre le streaming illégal.

Nicolas Seydoux, président du Forum d’Avignon : « Chacun doit protéger la culture »

Le président des Rencontres internationales de la culture, de l’économie et des médias – organisées à Avignon du 17 au 19 novembre – explique à EM@ les enjeux de cet événement. Le patron de Gaumont, président de l’Alpa, en appelle aussi aux FAI pour lutter contre le piratage sur Internet et financer la création.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@ : Le Forum d’Avignon, que vous présidez, a pour thème cette année « Investir la culture ». Pourquoi ? Nicolas Seydoux : L’ambition du Forum d’Avignon est non seulement d’apporter des messages, des idées ou des opinions au monde de la culture, mais aussi à l’ensemble de la collectivité des décideurs, économiques ou politiques. Le monde est à la recherche de repères. La culture, quelle qu’en soit la définition ou l’absence
de définition, représente fondamentalement des valeurs éthiques
et esthétiques, qui plongent leurs racines dans le temps. Dans le monde moderne, tout doit être réglé dans l’instant, alors qu’il faut savoir donner du temps au temps, pour reprendre l’expression de François Mitterrand. La crise ne peut se régler qu’en rappelant les éléments fondamentaux de chacune de nos sociétés, à commencer par la culture. Le Forum d’Avignon veut avant tout éviter de recréer un ghetto culturel culturel français. Il est international – 40 nationalités représentées – et trans-sectoriel avec plus de 50 activités différentes, des journalistes aux artistes et personnalités politiques, en passant par des entrepreneurs de groupes de médias ou d’entreprises de la nouvelle économie. Certains, comme Vivendi (France) ou Reliance (Inde), sont présents à la fois dans le contenu et dans le contenant. Ces mondes, qui trop souvent sont coupés les uns des autres, doivent regarder ensemble les problèmes de notre temps. « Investir la culture », c’est s’investir au sens humain (réfléchir) et investir
au sens financier.