L’Hadopi démarre 2014 sur les chapeaux de roue

En fait. Le 11 février, la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi) a publié les chiffres de la réponse graduée sur janvier 2014. Le moindre que l’on puisse dire, c’est que l’année commence très
fort pour la Commission de protection des droits (CPD).

En clair. On croyait l’Hadopi morte. Or elle bouge encore ; elle est même en pleine forme ! C’est ce que démontre l’envoi en janvier, par la Commission de protection des droits (CPD), de 132.000 e-mails de premier avertissement aux internautes suspectés de piratage d’œuvres (musiques ou films) sur Internet. Il s’agit du deuxième mois le plus actif d’Hadopi depuis le lancement de la réponse graduée en octobre 2010, le mois d’octobre 2013 détenant encore le record historique à ce jour avec ses 138.000 e-mails de premier avertissement. Janvier 2014 porte à plus de 2,6 millions le cumul des premiers avertissements envoyés depuis trois ans et trois mois maintenant. L’année 2013 aura donc été marquée par une hausse de 73,7 % sur un an de ces premiers avertissements. Quant aux deuxièmes avertissements, ils sont au nombre de 11.950 en janvier – soit plus du double qu’il y a un an – pour un cumul de 270.673 envois depuis octobre 2010. Tandis que 7.350 récidivistes ont reçu une lettre recommandée avec accusé de réception, dont 57 ont vu leur dossier mis en délibération à la CPD (1) – le bras armé de l’Hadopi ne communicant pas le nombre transmis à la justice…

Le streaming s’apprête à dépasser le téléchargement

En fait. Le 3 février, les chiffres 2013 du marché français de la musique en ligne
– que le Snep a publiés au Midem – ont révélé un ralentissement de la croissance du streaming payant ou gratuit (+ 3,9 %) à 54 millions d’euros, et, pour la première fois une baisse du téléchargement (- 1,1 %) à 62,7 millions.

En clair. Selon nos estimations, le streaming devrait dépasser fin 2014 le téléchargement dans les modes de consommation de la musique en ligne en France (1). C’est un tournant majeur dans l’industrie musicale, confrontée au numérique depuis une douzaine d’année. Lorsque le téléchargement enregistrait encore en 2012 une croissance à deux chiffres, soit + 11,8 % sur un an à 63,4 millions d’euros de chiffre d’affaires, il pesait un peu plus
de la moitié des 125 millions d’euros du marché numérique de la musique enregistrée.
L’an dernier, cette fois, le « fléchissement du download » constaté par le président du Snep (lire ci-dessus) se traduit pour la première fois par un recul de ce mode de consommation, soit – 1,1 % sur un an à 62,7 millions d’euros. Résultat : le téléchargement pèse désormais un peu moins de la moitié des 125,8 millions d’euros des ventes numériques (voir tableau p. 10).

Stéphane Le Tavernier, Snep : « 2013 a fait du bien »

En fait. Le 3 février, Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) a publié lors du Marché international du disque et de l’édition musicale (Midem), qui s’est tenu à Cannes, les chiffres 2013 du marché français : 493,2 millions d’euros
(+ 0,9 %), dont 125,8 millions en ventes numériques (+ 0,6 %).

En clair. « L’année 2013 nous a fait du bien », a résumé Stéphane Le Tavernier, président du Snep qui regroupe près d’une cinquantaine de membres (1) et président de la filiale française de Sony Music Entertainment. « L’industrie a eu la possibilité de reprendre un peu son souffle, après onze ans de mutation dans la douleur avec la révolution d’Internet. C’est une industrie qui a perdu depuis 60 % de sa valeur. L’année 2013 a donc été une année d’accalmie et atypique. Dans le digital, il semble y avoir une mutation dans la mutation : on arrive peut-être cette année à un petit changement dans la manière dont le marché numérique se comporte, puisque l’on a un léger fléchissement du téléchargement qui était jusqu’alors le mode de consommation roi », a-t-il expliqué le 29 janvier dernier,
au cours d’un déjeuner « pré-Midem » organisé dans les locaux de Sony Music à Paris.

Yves Riesel, président de Qobuz Music Group : « Le clivage streaming versus téléchargement est déjà caduc ! »

Le cofondateur et président du directoire de Qobuz Music Group (ex-Lyra Media Group), qui comprend la plate-forme de musique en ligne Qobuz.com et la maison de disques Abeille Musique, estime qu’il est temps de passer à la qualité Hi-Fi sur Internet. Et il ne cesse de pester contre la gratuité musicale.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Yves RieselEdition Multimédi@ : La holding Lyra Media Group est devenue au 1er février Qobuz Music Group, du nom de votre plate-forme de musique en ligne Qobuz créée il y a cinq ans. Est-ce parce que les ventes numériques de musiques deviennent majeures dans vos activités ?
Yves Riesel :
Lyra regroupe la maison de disques Abeille Musique créée en 1997 et Qobuz créée en 2007. Les deux sociétés font du numérique, lequel génère 60 % du chiffre d’affaires de l’ensemble. Mais Abeille Musique, qui est toujours engagée dans la vente de CD, la production et la distribution, fait essentiellement de la vente aux professionnels (B2B). Tandis que Qobuz fait de la vente aux particuliers (B2C). Ce changement de dénomination ne concerne
pas le clivage physique/numérique. Il vise à donner de la force à la marque Qobuz qui maintenant s’ouvre à l’international et à montrer la totale cohérence du métier de distribution de musique des deux sociétés, que ce soit en B2B ou en B2C. Abeille Musique est maintenant devenue une société de distribution de musique numérique,
avec un catalogue important, elle est positionnée en tant que fournisseur de services
de distribution de haute qualité auprès des labels et des artistes – rien à voir avec tant d’agrégateurs dont le soin apporté aux produits est minime. Qobuz et Abeille, qui partagent le même souci de qualité (son, documentation, métadonnées) font un travail cohérent, qui sera réuni sous la même marque en particulier à l’international. Quant à notre filiale Virgule, elle a une activité de publishing [gestion des droits des compositeurs et des chanteurs, ndlr].

Décision « Allostreaming » : une première mondiale mais à portée limitée

En France, six fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et sept moteurs de recherche vont devoir respectivement bloquer et déréférencer seize sites de streaming de
la galaxie « Allostreaming ». Mais la CJUE, la neutralité du Net et la loi française
« LCEN » empêchent toute mesure généralisée.

Par Rémy Fekete, avocat associé, Gide Loyrette Nouel

Dans un jugement rendu en la forme des référés le 28 novembre 2013 (1), le Tribunal de grande instance (TGI) de Paris a tranché
en faveur des professionnels français du film dans un litige qui les opposaient à six fournisseurs d’accès à Internet (Orange, Bouygues Telecom, Numericable, Free, SFR et Darty Télécom)
et sept moteurs de recherche (notamment Google, Microsoft, Yahoo et encore Orange).