Pourquoi Akamai Technologies intéresserait Apple

En fait. Le 27 octobre, la société américaine Akamai Technologies – leader mondial des réseaux de distribution de contenus sur Internet – publie des résultats trimestriels supérieurs aux attentes. Apple, qui fait partie de ses
gros clients, serait tenté de le racheter. Rumeur non démentie à ce jour…

En clair. « Nous ne commentons pas les rumeurs », a répondu le porte-parole d’Akamai, Jeff Young, à EM@. Ce n’est pas la première fois que Akamai fait l’objet
de rumeurs de rachat. Il y a presque un an jour pour jour, Google était cité comme repreneur potentiel, jusqu’à ce que le PDG d’Akamai, Paul Sagan, démente. Cette
fois, Appel serait intéressé. Son patron, Steve Jobs, n’a pas caché le 18 octobre – lors de la présentation des résultats de son quatrième trimestre – « qu’une ou plusieurs opportunités très stratégiques pourraient se présenter prochainement ». Or, dès le lendemain, un analyste financier américain, Brian Marshall a indiqué à l’agence Bloomberg que la société Akamai pourrait être une cible « importante » pour Apple en quête d’acquisitions. A la différence de Google, Apple est l’un des grands clients d’Akamai. Et ce, depuis 1999. Cette société du Massachusetts créée en 1998 et cotée au Nasdaq est ce que l’on appelle un Content Delivery Network (CDN), autrement dit un réseau de distribution de contenus sur Internet. Son métier : apporter au plus près des internautes ou des mobinautes les contenus qu’ils demandent pour les rendre disponibles plus rapidement. Pour ce faire, Akamai stocke localement – sur ses 73.000 serveurs dans 70 pays et connectés à ses 1.000 réseaux – les sites web, les vidéos et les applications mobiles les plus demandés. Autant dire que les CDN (1) ont le vent en poupe, au point de susciter des inquiétudes chez les opérateurs télécoms craignant cette concurrence sur le Net. Parmi les clients d’Akamai : Apple, mais aussi Microsoft, MTV Networks, MySpace, Nintendo, TF1, Dailymotion ou encore Allociné. Son chiffre d’affaires devrait franchir cette année la barre du milliard de dollars, contre 859,8 millions de dollars en 2009 pour 2.000 salariés. Le partenariat entre Apple et Akamai s’est même renforcé en 2003, lors du lancement de iTunes Music Store. Depuis, avec l’iPhone et l’iPad, iTunes est devenu depuis non seulement la première plateforme mondiale de téléchargement de musique (2) mais aussi de plus en plus présent dans la vidéo en ligne (20.000 épisodes de télévision et plus de 2.000 films de cinéma). Akamai se fait le champion de la « gestion optimisé des flux » et délivre jusqu’à 20 % du trafic quotidien du Web. L’activité est très lucrative : 145,9 millions de dollars de bénéfice net en 2009. Cela pourrait coûter cher à Steve Jobs. Qu’à cela ne tienne : Apple dispose d’une trésorerie de plus de 50 milliards de dollars ! @

Apple parle beaucoup de ses produits, mais reste discret sur sa stratégie

Alors qu’Apple vient d’achever son exercice annuel le 26 septembre, jamais le groupe de Steve Jobs n’a été autant adulé par les médias. Pourtant, la marque
à la pomme n’est pas un exemple d’ ouverture et parle plus volontiers de ses produits que de sa stratégie controversée.

Apple, Apple, Apple, … iPod, iPhone, iPad, … Le groupe du mythique Steve Jobs ne cesse de défrayer la chronique, tant les médias ont croqué la pomme. Selon une étude publiée le 27 septembre par l’institut américain Pew Research Center, c’est l’entreprise
de la high-tech bénéficiant du plus grand nombre d’articles dans les médias : 15 % (1).
Le géant américain s’offrerait ainsi gratuitement une campagne de publicité planétaire, avec plus de 40 % des articles élogieux pour ses produits (2).

Communication verrouillée
Raison de plus pour savoir quelle stratégie se cache derrière cette frénésie pour la firme de Cupertino en Californie. « Je ne peux pas vous organiser d’interview. Nous faisons essentiellement des briefings produits. Je suis votre interlocutrice pour la presse en France et l’Europe, ainsi que pour les Etats-Unis qui me transfèrent les éventuelles demandes que je n’ai pas reçues directement… », répond Jasmine Khounnala, une porte-parole Corporate communications chez Apple France, à Edition Multimédi@ qui souhaitait soumettre à un dirigeant du groupe des questions sur la stratégie. Résultat, malgré notre cordiale insistance : « Nous n’avons pas de commentaire à faire à ce
sujet »… Pourtant, les interrogations ne manquent pas sur la stratégie de la multinationale devenue non seulement la deuxième capitalisation boursière dans le monde mais aussi un acteur puissant – voire en position dominante sur certains marchés.
Le volet le plus sensible concerne l’environnement propriétaire d’Apple, qui fait l’objet de plusieurs enquêtes antitrust préliminaires menées conjointement par l’Union européenne et le Federal Trade Commission (FTC) depuis le printemps dernier. Plusieurs activités de la marque à la pomme seraient en cause : le développement de logiciels pour les mobiles iPhone, le risque de position dominante de iTunes Music Store, les pratiques en termes de publicité sur mobile, les grilles tarifaires imposées
aux éditeurs, et plus généralement le manque d’interopérabilité plateformes-terminaux-contenus (3). Or, le 9 septembre dernier, Apple a annoncé l’assouplissement de
« toutes les restrictions sur les outils de développement utilisés pour créer des applications iOS [le système d’exploitation permettant de faire fonctionner iPhone, iPad et iPod] » pour « donner aux développeurs la flexibilité qu’ils souhaitent » (4). Les contenus devraient ainsi pouvoir être créés pour des environnements ouverts comme Android de Google, Blackberry de RIM ou encore Flash d’Adobe. Quant aux publicités online des environnements concurrents, elles pourraient s’afficher sur les terminaux d’Apple (5). Le 25 septembre, Joaquin Almunia, commissaire européen à la Concurrence, est resté prudent : « La réponse d’Apple à notre enquête prélininaire montre que la Commission européenne peut utiliser des règles de concurrence pour obtenir des résultats rapides sur le marché avec des bénéfices clairs pour les consommateurs, sans avoir besoin d’ouvrir une procédure formelle ». Mais la stratégie de « walled garden » d’Apple reste sous sourveillance car elle pose problème à Neelie Kroes, la commissaire européenne au Numérique, laquelle a fait de l’interopérabilité son cheval de bataille pour le « marché unique des contenus en ligne » (lire page 5). Les éditeurs de contenus – applications, musiques, films, journaux, magazine, livres, jeux, etc – s’interrogent aussi sur la politique marketing et commerciale de Steve Jobs : sur les formules d’abonnement et les grilles tarifaires que leur impose Apple ou sur la maîtrise par ce dernier a sur les bases de données clients. Aux Etats-Unis, la presse entend garder le contrôle de la relation- client après s’être ruée sur la tablette iPad. Le fabricant informatique s’arroge en outre de confortables commissions sur les ventes en ligne via sa toute puissante boutique en ligne iTunes, pouvant atteindre 30 % sur les contenus numériques et 40 % sur les publicités online.

Position dominante d’iTunes
La position dominante d’iTunes rajoute à l’inquiétude. Rien que dans la musique,
la boutique en ligne d’Apple créée en 2003 s’est imposée dans le téléchargement musical (6) – à 0,99 dollar le titre, voire à 0,69 ou 1,29 dollar – et s’apprête à faire de même dans le streaming. Riche de 8millions de titres musicaux, l’écosystème fermé s’est étendu à la vidéo (20.000 épisodes de télévision et plus de 2.000 films de cinéma), ainsi qu’à l’édition (livre et presse). L’emprise d’Apple sur les industries culturelles devrait s’intensifier avec Apple TV que le groupe tente de relancer via iTunes, avec de nouveaux accords avec les ayants droits. Il s’agit de ne pas se laisser distancer sur le marché prometteur de la télévision connectée. « Applemania » jusque dans nos salons ? Encore faut-il que la diversité culturelle, le choix concurrentiel et l’interopérabilité technique soient préservés… @

Charles de Laubier

Vers la disparition de la filiale Le Monde Interactif ?

En fait. Le 28 juin, Pierre Bergé, Matthieu Pigasse et Xavier Niel publient un communiqué à l’issue du vote du conseil de surveillance du Monde SA (LMSA)
qui leur est favorable, au détriment de l’offre concurrente Perdriel-Prisa-Orange. L’investissement numérique est au coeur de leur stratégie.

En clair. Toute la question est de savoir ce qu’il adviendra de la filiale Le Monde Interactif, détenue à 34 % par Lagardère. Ce dernier aurait été prêt à céder sa participation stratégique pour 33 millions d’euros au trio Perdriel-Prisa-Orange (lire EM@16 p. 3), mais pas apparemment au trio vainqueur, Pigasse- Bergé-Niel. Pour ces derniers, qui prônent l’intégration web-papier des rédaction, Le Monde Interactif pourrait disparaître.
En effet, dans le document détaillé de leur offre daté du 21 juin, ils sont pour que « le site Internet et l’activité numérique du Monde [soient] réintégrés dans le périmètre du
quotidien ». Autrement dit : « Les rédactions papier et numérique seront décloisonnées afin de réellement travailler ensemble. La combinaison des forces des rédactions papier
et numérique fera du Monde le premier éditeur d’information numérique en France, loin devant ses concurrents ». Pour y parvenir, les trois protagonistes envisagent ni plus ni moins qu’un rapprochement des structures juridiques – Le Monde SA et Le Monde Interactif – et des équipes éditoriales. A leurs yeux, il s’agit de « la seule option sérieuse ». Ils s’inscrivent ainsi en faux par rapport à toutes la stratégie menée jusque-là par les dirigeants successifs du Monde Interactive. Le précédent PDG de la filiale Internet du Monde, Bruno Patino, avait instauré et maintenu – jusque dans son livre
« Une presse sans Gutenberg » (Grasset) – cette séparation des deux médias (papier et web). Son successeur, Philippe Jannet, ancien directeur des éditions électroniques du groupe Les Echos, n’avait pas remis en cause cette approche dichotomique. Avec
« Le Monde Libre », société des futurs propriétaires, « cette activité [numérique] doit revenir au journal et se placer au cœur de sa nouvelle stratégie éditoriale ». Pierre Bergé, Matthieu Pigasse et Xavier Niel critiquent au passage la stratégie de l’actuelle direction du Monde : « La déclinaison numérique des différents magazines du groupe [Le Monde Magazine, Télérama, La Vie, Courrier International, ndlr] paraît avoir été handicapée par un sous-investissement chronique. Ce retard est aujourd’hui dommageable à l’ensemble du groupe ». Le trio de l’offre dite « BNP » (leurs initiales, pas la banque !) prévoient donc « des moyens supplémentaires (…) pour que chacune des publications puisse sans délai mettre en oeuvre l’accélération de sa mutation numérique ». @

L’invasion des Serious Games

Cette semaine, mes journées de travail vont être légèrement perturbées par une série de séances de formation consacrées aux nouvelles techniques de négociation commerciale par “téléprésence”. Mon intérêt mesuré pour ce type d’exercice
est cette fois aiguisé par un e-mail que je viens de recevoir sur ma tablette. Il me précise que les sessions se déroulent avec l’aide d’un serious game de nouvelle génération, l’un des ces jeux dits sérieux qui ont littéralement envahi la planète sans que nous n’y prenions vraiment garde. Mais, cette semaine un peu particulière n’est cependant pas exceptionnelle tant les jeux sérieux se sont glissés en douceur dans notre quotidien.
Il s’agit, une fois encore, de l’histoire d’une diffusion ultra-rapide d’une innovation numérique.

« Il n’est plus aujourd’hui un domaine ou une profession qui ne disposent de son propre catalogue de jeux sophistiqués mariant immersion, 3D, jeu en réseau et mobilité, voire même robotique. »

Même si le délicieux oxymore de « jeu sérieux » trouve ses origines au cœur de la Renaissance, à travers le Serio Ludere italien et ses dérivés rabelaisiens, le concept moderne n’est apparu que dans les années 70 : lorsque Clark Abt proposa une première approche organisée du sujet à travers son ouvrage éponyme, en voyant
dans les jeux de société, de rôle ou même de plein air – et bientôt sur ordinateur –
un support permettant d’enrichir les cursus scolaires.Mais c’est à la fin des années 80, avec le triomphe du progiciel et de l’ordinateur personnel et l’apparition des premiers gameplay, que des titres ludo-éducatifs font leur apparition. Nos enfants faisaient alors la connaissance de l’intrépide Carmen Sandiego et de l’étrange Adibou, sympathique personnage extra-terrestre venant leur donner des leçons à domicile. Les choses sont ensuite allées très vite, avec une véritable explosion d’applicatifs dans les domaines très divers de l’enseignement, du marketing, de la santé, de la défense et dans une débauche de néologismes tentant de fixer la taxonomie de cet univers foisonnant : edugames, edumarket games, advergames, cytigames, therapeutic games, military games, exergames, datagames, green games, newsgames, political games…
Un appel à projet national, lancé en 2009 dans le cadre d’un plan de relance gouvernemental, a ensuite attiré l’attention d’un public plus large sur un domaine dès lors identifié comme stratégique pour le futur de nos activités de services et notre compétitivité à venir. L’invasion était en marche, voyez plutôt : les plus jeunes se sont sensibilisés aux enjeux de la famine dans le monde avec le jeu Food Force des Nations-Unies ; les étudiants se sont formés à la gestion personnelle avec PostFinance d’IBM ; de nombreux conscrits virtuels ont participé à la défense des Etats-Unis avec
le jeu à succès America’s Army édité par l’US Army elle-même. Et nous avons été nombreux à suivre le programme d’entraînement cérébral du mystérieux Docteur Kawashima de Nintendo, vendu à l’époque à plus de 17 millions d’exemplaires ! Les maisons de retraite ont résonné de nouveaux cris de joie à l’arrivée inopinée du jeu de remise en forme Wii Fit, tandis que de vastes populations à faible pouvoir d’achat ont eu accès aux serious games de la société indienne ZQM, directement sur leur téléphone mobile,… Une liste qui n’a cessé de s’enrichir au cours de ces dernières années. Mais si les jeux sérieux se sont tout d’abord développés à partir d’une extension du domaine du jeu vidéo, ils ont proliféré ensuite à la faveur de croisements technologiques extrêmement fertiles : il n’est plus aujourd’hui un domaine ou une profession qui ne dispose de son propre catalogue de jeux sophistiqués mariant immersion, 3D, jeu en réseau et mobilité voir même robotique.
La presse ne s’est-elle pas fait l’écho cette semaine de la présence dans une classe
de CP d’un maître-assistant d’un nouveau genre : le robot NAO aide, entre autres, les enfants à réviser de manière ludique leurs leçons de lecture et de calcul ! Je dois mettre un point final à ces lignes car ma première session va bientôt commencer. J’ai hâte
d’aller me mesurer à mes adversaires de pixels et de leur faire mordre la poussière en
les acculant à signer un contrat léonin, dont on parlera encore longtemps dans le cyberespace… ou le contraire… @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » : La géolocalisation
Depuis 1997, Jean-Dominique Séval est directeur marketing et
commercial de l’Idate. Rapport sur le sujet : « Serious Games »
(Innovation Report) par Julien Alvarez et Laurent Michaud

iPad, iPhone, iPod, iTunes, iBooks Store, iAd… : Apple, l’« iPrison » dorée du Net

Apple est un « jardin muré » (walled garden). Mais le modèle économique de
la firme de Steve Jobs soulève des questions, notamment vis à vis de ses concurrents. Passé la frénésie médiatique autour de l’iPad, les autorités
antitrusts pourraient enquêter sur des abus éventuels.

L’iPad est-il la goutte d’eau qui va faire déborder le « vase clos » d’Apple ? Presque dix ans après le lancement de son baladeur iPod, sept ans après l’ouverture de sa boutique virtuelle iTunes Store qui en a assuré le succès, et trois ans après l’arrivée de l’iPhone, Apple joue encore à guichet fermé avec sa nouvelle icône : l’iPad. La tablette multimédia est disponible depuis vendredi 28 mai sur huit marchés hors des Etats-Unis (1), dont la France : 599 à 799 euros (2). Trois ans après le succès de l’iPhone, Apple défraie à nouveau la chronique avec son nouvel écran tactile multifonction.

Ecosystème très « propriétaire »
Le groupe de Steve Jobs fait à chaque fois d’une pierre deux coups, en se rendant indispensable et incontournable : non seulement il fabrique le terminal « propriétaire »
mais aussi fournit le contenu qui va avec, exclusivement. Sans l’iPhone ou l’iPad, pas
de contenus provenant de l’App Store, la boutique en ligne des applications. Pas de musiques ni de films non plus à télécharger à partir de la plateforme online dédiée, iTunes. La marque à la pomme cultive ainsi ce que l’on appelle outre-Atlantique son
« walled garden », qui heurte les principes d’interopérabilité et de neutralité du Net. Depuis dix ans maintenant, la firme californienne a ainsi trouvé la voie en instaurant sur le Net – pourtant ouvert et standardisé – un écosystème autarcique et fermé. A chaque vente à l’acte ou à l’abonnement en ligne, Apple se rémunère en prélevant une commission de 30 % et en reversant les 70 % restant aux fournisseurs de contenus
ou d’applications. Attractif. Quelque 200.000 applications ont ainsi été développées à ce jour pour ce monde pourtant fermé, et plus de 5.000 déjà pour l’iPad. Au passage,
la multinationale enrichit sa base de millions de clients finals qu’il maîtrise, tout comme les prix.
Et avant même sa disponibilité, la tablette multimédia a été plébiscitée par les médias, presse écrite en tête. En France, Lagardère Active (Paris Match), Le Monde, Prisma Presse (Géo), Les Echos, le groupe Amaury (Le Parisien) ou encore Le Figaro croient
y voir le moyen de faire payer leurs articles en ligne (3). Les maisons d’éditions, dont Hachette ou Albin Michel, sont aussi tentées par cet environnement sécurisé pour leurs livres numériques. Mais Apple leur impose ses conditions.
Depuis le succès du tarif unique à 0,99 dollar ou euro pour un titre musical téléchargé sur l’iPod à partir d’iTunes,le géant américain continue avec l’iPad d’obliger les éditeurs de contenus « partenaires » à s’aligner sur sa grille tarifaire (4). Quant à la conférence mondiale des développeurs d’Apple, qui se tiendra à San Francisco du 7 au 11 juin, elle est en réalité un club très fermé. Le système d’exploitation d’Apple est une sorte de forteresse imprenable et incompatible avec d’autres environnements ou terminaux. Les développeurs d’applications et les éditeurs de contenus sont tenus d’utiliser les outils de programmation d’Apple. Cette créativité en « liberté surveillée » et évince les autres outils. Par exemple, le logiciel de créations multimédias Flash du groupe américain Adobe – pourtant utilisé dans le monde par 3,5 millions de créatifs – ne peut pas être utilisé sur l’iPhone ni sur l’iPad. Depuis quelques semaines, Steve Jobs critique cet outil qu’il juge « démodé ».
Les autorités antitrusts ont été saisies outre- Atlantique d’une plainte d’Adobe. La Federal Trade Commission (FTC) et le Department of Justice (DoJ) américains auraient commencé leur enquête pour savoir s’il y a abus de position dominante et pratique anticoncurrentielle par Apple. Contactée par Edition Multimédi@, Mitchell Katz, porte-parole de la FTC, explique – sans démentir – que « les investigations ne sont pas rendues publiques » et que « rien n’a été annoncé quant à cette plainte » d’Adobe. Dans son premier rapport trimestriel 2010, Adobe se plaint que « les nouvelles versions des systèmes d’exploitation et des produits tiers, plateformes ou appareils, tels que l’iPhone ou l’iPad d’Apple, rendent la performance de nos produits plus difficile. Et nos utilisateurs sont incités à utiliser des technologies alternatives, ce qui pourrait être dommageable pour notre activité »…

Le ver est-il dans le fruit du « jardin muré » ?
Selon le « New York Times » du 26 mai, le DoJ a déjà lancé une enquête antitrust contre Apple dans la musique en ligne. La Commission européenne, elle, pourrait s’intéresser à son tour au défaut d’interopérabilité de la marque à la pomme. Le ver est-il dans le fruit du « jardin muré » ? Dans son plan d’action 2010-2015 publié le 19 mai, Neelie Kroes – désormais en charge à Bruxelles de la Stratégie numérique après avoir été à la Concurrence – affiche sa détermination à faire la chasse aux « normes » et
« plateformes » qui ne seraient pas « ouvertes » : « L’interopérabilité (…) doit encore
être accrue ». Après Microsoft (5), Apple pourrait devenir la bête noire de l’exécutif européen. @

Charles de Laubier