Comment un ex-informaticien de Tsahal est devenu le roi européen du streaming sportif avec DAZN

Il a été ingénieur informaticien dans l’armée israélienne Tsahal dans les années 90 ; il est depuis janvier 2022 PDG du groupe DAZN. L’Israélien Shay Segev dirige la première plateforme européenne de streaming sportif et poursuit son expansion mondiale pour être le « Netflix du sport ».

« De 1994 à 1998, Segev a travaillé comme ingénieur informatique dans les forces de défense israéliennes », à savoir Tsahal, indique la fiche Wikipedia le concernant (1). Cependant, la fiche LinkedIn de Shay Segev (photo) ne fait pas, elle, référence à ce passé dans l’armée d’Israël, juste avant qu’il ne décroche en 2001 un diplôme en informatique (2) à l’université de Tel Aviv (3). Son parcours professionnel, débuté en Israël (Tsahal, Comverse Technology, Mercury Interactive), l’amènera à partir de 2006 en Estonie, à Londres et à Gibraltar (Videobet, Playtech, Coral, Entain) dans le domaine des jeux d’argent et de hasard en ligne.

DAZN devance Bein Sports et Canal+
Mais c’est en juin 2021 que sa carrière change, lorsque Shay Segev entre chez DAZN – prononcez « Da Zone » – en tant que co-PDG aux côtés de James Rushton, cofondateur de ce groupe britannique de diffusion en streaming d’événements sportifs. Ce dernier, considéré comme un vétéran de l’industrie du sport depuis plus d’un quart de siècle, a passé presque toute sa carrière dans la société londonienne Perform Group à l’origine de DAZN. Après avoir innové dans la diffusion en ligne avec ePlayer proposant de la VOD sportive premium, James Rushton met sur pied en 2015 avec Simon Denyer et d’autres cadres – « frustrés par le status quo » dans la diffusion sportive – la plateforme DAZN « pour les amateurs de sport du monde entier » (4). En 2016, après avoir installé ses premiers bureaux, à Tokyo et à Munich, Perform Group ouvre le service OTT (Over-The-Top) sportif DAZN, d’abord en Allemagne, en Suisse, en Autriche et au Japon. L’offre sportive se concentre sur le football : la Premier League (britannique), la J League (japonaise) pour un contrat de 10 ans, et LaLiga (espagnole). La NFL (football américain) et la NBA (basket américain) sont aussi au programme, rejoints par la boxe britannique. Le service DAZN est ensuite lancé en Italie (2018), en Espagne et au Brésil (2019). A partir de novembre 2020, il est accessible sur la PlayStation 5 de Sony, puis massivement sur les smartphones grâce à des accords avec des opérateurs mobiles à partir de mars 2021.

Téléfoot : le groupe sino-espagnol Mediapro espère signer aussi avec Canal+, Facebook et YouTube

En 2018, le groupe audiovisuel Mediapro remportait plus de 80 % des droits de diffusion 2020-2024 des championnats français de football de Ligue 1, moyennant 800 millions d’euros par an, ainsi que la Ligue 2. Sa chaîne Téléfoot vise 3,5 millions d’abonnés payants pour rentabiliser ses investissements.

Téléfoot, nom de la chaîne que le groupe espagnol à capitaux chinois Mediapro emprunte sous licence à TF1 (1), n’est pas encore diffusée par Canal+. « Les discussions restent au point mort », selon le directeur de la chaîne, Julien Bergeaud, cité le 9 septembre par l’AFP. En revanche, ce jour-là, un accord était annoncé avec Orange qui revendique à fin 2019 plus de 21,7 millions d’abonnés mobile et plus 11,6 abonnés haut débit fixe (2). Les quatre fournisseurs d’accès à Internet (FAI) français ont donc chacun signé.

Piratage des contenus sportifs : vers de nouveaux moyens d’une lutte efficace après le déconfinement ?

Comme par magie, le piratage sur Internet des retransmissions sportives en direct a disparu avec l’annulation de la plupart des rencontres et des épreuves, en raison de la pandémie de covid-19. Mais avec la sortie progressive du confinement à partir du 11 mai, le live streaming sportif illicite reprendra.

Par Richard Willemant*, avocat associé, cabinet Féral-Schuhl/Sainte-Marie

Selon une étude de l’Hadopi réalisée avec l’Ifop et publiée le 14 avril, 13 % des internautes interrogés regardaient encore fin mars des retransmissions sportives en direct durant le confinement – bien que beaucoup de rencontres ont été annulées depuis. Et tous biens culturels confondus, le piratage en ligne a légèrement diminué en un an pour représenter 21 % de leur consommation (1). En mai 2019, l’Hadopi publiait une autre étude avec l’Ifop où 45 % des consommateurs de contenus sportifs en live-streaming en France déclaraient s’être désabonnés d’une offre légale pour consommer le même contenu de manière illégale (2).

Faute d’avoir anticipé la concurrence, l’ancien monopole Canal+ fait entrer Netflix dans sa bergerie

Face à la montée de la concurrence mondiale et puissante des plateformes de streaming, l’ancien monopole de chaîne cryptée Canal+ n’a pas anticipé et a perdu deux ans avant de réagir. Résultat : pour endiguer sa perte d’abonnés en France, la filiale de télévision de Vivendi pactise avec Netflix.

La fin des monopoles a toujours exigé des entreprises qui vivaient de cette rente de situation des remises en causes profondes. Encore faut-il s’y prendre assez tôt et anticiper. Canal+ savait depuis 2011 que Netflix allait tôt ou tard débarquer en France. Et ce qui devait arriver arriva : la plateforme de SVOD tant redoutée est lancée avec tambours et trompettes sur le marché français le 14 septembre 2014, à partir de… 7,99 euros par mois. De quoi tailler des croupières au « monopole » Canal+ et ses 39,90 euros mensuels.

Surenchère des droits de diffusion sportive – foot en tête : quid du Net, des smartphones et des extraits ?

L’obtention d’exclusivités de diffusion sportive se paie au prix fort pour les chaînes de télé, comme l’illustre la surenchère des droits 2020-2024 de retransmission de la Ligue 1 pour un montant record de 1,15 milliard d’euros par saison. Mais les GAFAT et les OTT n’ont pas dit leur dernier mot.

Sur les cinq lots attribués à l’issue de l’appel à candidatures qu’a organisé la Ligue de football professionnel (LFP), présidée par Nathalie Boy de
la Tour (photo) et dirigée par Didier Quillot, un lot qualifié de « digital » portait sur « les droits de diffusion d’extraits en quasi-direct sur tous les matches et les droits magazines en vidéo à la demande ». C’est le groupe Iliad, maison-mère de Free, qui l’a remporté, signant ainsi son entrée pour la première fois dans le football français. Tous les autres lots portent sur la diffusion audiovisuelle et ont été attribués à l’espagnol Mediapro (1) (lots 1,2, 4) et au qatari BeIn Sports (lot 3).