Anonymisation des données personnelles : un enjeu de taille, notamment en matière de santé

Alors qu’une deuxième vague de coronavirus menace, le gouvernement croit en l’utilité des données « pseudonymisées » de son application mobile StopCovid malgré le peu d’utilisateurs. Mais le respect de la vie privée ne suppose-t-il pas une « anonymisation » ? Le dilemme se pose dans la santé.

Par Olivia Roche, avocate, et Prudence Cadio, avocate associée, cabinet LPA-CGR avocats

Aucune enquête coordonnée en Europe n’a été menée sur le scandale « Cambridge Analytica »

Plus de deux ans après l’éclatement de l’affaire « Cambridge Analytica » sur l’exploitation massive et illégale des données personnelles de dizaines de millions d’utilisateurs de Facebook à des fins de ciblages politico-publicitaires, aucune enquête n’a été menée en France par la Cnil. Surprenant.

Aux Etats-Unis, Facebook a écopé l’été dernier d’une amende record de 5 milliards de dollars infligée par la FTC (1) pour n’avoir pas géré ni protégé correctement les données personnelles de ses utilisateurs. En Grande-Bretagne, la « Cnil » britannique – ICO (2) – l’a condamné en octobre 2019 au maximum que lui permettait la loi du pays pour violation sur la protection des données, soit 500.000 livres (plus de 565.000 euros). Ces données ont notamment été exploitées en 2016 pour influencer respectivement l’élection présidentielle américaine et le référendum britannique sur le Brexit.

Affaire Schrems : probable non-invalidation des clauses contractuelles types, fausse bonne nouvelle ?

Alors que le scandale « Cambridge Analytica » continue depuis deux ans de ternir l’image de Facebook, une autre affaire dite « Schrems » suit son cours devant la Cour de justice européenne et fait trembler les GAFAM. Retour sur les conclusions de l’avocat général rendues le 19 décembre 2019.

Par Charlotte Barraco-David, avocate, et Marie-Hélène Tonnellier, avocate associée, cabinet Latournerie Wolfrom Avocats

Les clauses contractuelles types – conformes à la décision prise il y a dix ans maintenant, le 5 février 2010, par la Commission européenne (1) – seraient bien un moyen valable de transfert de données personnelles hors d’Europe (lire encadré page suivante). C’est en tous cas ce que l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) préconise de juger dans la deuxième affaire « Schrems » (2) qui fait trembler les GAFAM. Reste à attendre de savoir si, comme souvent, la CJUE le suivra. Cette décision, imminente, est attendue non sans une certaine fébrilité.

Pour la reconnaissance faciale à distance ou locale, les enjeux éthiques ne sont pas les mêmes

Identifier un visage dans une foule soulève de sérieuses questions sur les libertés individuelles. Mais il existe de nombreux autres usages de la reconnaissance faciale, notamment la validation d’identité en local. Ces utilisations ont vocation à se développer mais posent d’autres questions éthiques.

Par Winston Maxwell* et David Bounie**, Telecom Paris, Institut polytechnique de Paris

L’utilisation de la reconnaissance faciale pour l’identification à distance constitue une menace pour les libertés individuelles, car cela tend à banaliser une société de surveillance. Selon le New York Times, une start-up américaine Clearview AI a déjà fabriqué des gabarits d’identification de 3 milliards d’individus à partir d’images copiées sur le Web (1). N’importe quelle force de l’ordre – mais pas le grand public (2) – peut utiliser le logiciel de Clearview AI et identifier les visages dans une foule. Cependant, plusieurs villes américaines ont temporairement banni cette utilisation de la technologie par leurs autorités publiques.

Les internautes reprennent la main sur les cookies, mais les éditeurs de sites web se rebiffent

« Le placement de cookies requiert le consentement actif des internautes ; une case cochée par défaut est donc insuffisante », a rappelé la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans un arrêt du 1er octobre, RGPD oblige. Ce consentement actif préalable ne plaît à tous les éditeurs du Web.

L’étau du règlement général sur la protection des données (RGPD), entré en vigueur en mai 2018, se resserre sur les cookies, ces traceurs ou autres mouchards déposés sur les terminaux des internautes et mobinautes à des fins de publicités ciblées et de collecte de données. L’arrêt rendu le 1er octobre par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) suit les conclusions de l’avocat général de cette dernière, qui, le 21 mars 2019, avait rappelé que pour être valide le consentement de l’utilisateur à accepter des cookies doit être « éclairé » (1).