Le vieux débat sur la régulation des OTT est réactivé après le lobbying des opérateurs télécoms

Parmi les règles proposées par la Commission européenne le 14 septembre dernier, dans son projet de « code des communications », figure la possible application – à tout le moins partielle – du régime des opérateurs de communications électroniques aux fournisseurs de services Over-the-Top (OTT).

Par Katia Duhamel, experte en droit et régulation des TIC, K. Duhamel Consulting

Depuis la publication par l’Organe des régulateurs européens des communications électroniques (Orece) de son rapport sur les OTT (1), on s’en doutait un peu, l’Europe semblait incliner vers l’adoption de « règles plus convergentes » entre OTT (Over-The- Top) et opérateurs de communications électroniques. La Commission européenne a désormais tranché : elle souhaite soumettre partiellement au Paquet télécom révisé, les opérateurs télécoms et services OTT tels que Skype, WhatsApp ou FaceTime.

Régulation des plateformes numériques : état des lieux et des divisions

Cela fait un an, le 6 mai, que la Commission européenne a présenté sa « Stratégie pour un marché unique numérique ». Depuis, le principe de « loyauté des plateformes numériques » fait son chemin et pourrait devenir le pendant de la neutralité des réseaux. La France et l’Allemagne le réclament.

Par Christophe Clarenc (photo) et Martin Drago, cabinet Dunaud Clarenc Combles & Associés

En septembre 2013, la ministre de l’Economie numérique de l’époque, Fleur Pellerin, déclarait dans une interview dans la presse (1) : « Ce qui me frappe, c’est que l’on reste très focalisé aujourd’hui sur la régulation des réseaux, comme l’illustre le nouveau “Paquet télécom” proposé par la Commission européenne. Mais on oublie que l’enjeu principal concerne désormais les grandes plateformes, comme Apple, Google, Facebook, Amazon et consorts, qui sont devenues les points d’accès obligés à l’Internet. Ce sont les conglomérats du XXIe siècle qui organisent la nouvelle économie à leur avantage ».

L’Arcep pivote et, ce faisant, cherche à étendre son champ d’intervention : à tort ou à raison ?

Avec sa « revue stratégique » de janvier 2016, l’Arcep veut élargir la régulation des « communications électroniques » aux « communications numériques ».
En Europe, deux visions s’opposent entre les partisans d’une régulation des acteurs du Net et ceux craignant une sur-régulation des « marchés émergents ».

Par Winston Maxwell (Hogan Lovells) et Stéphane Piot (Analysys Mason)

Le « virement » stratégique de l’Arcep (1), présenté en janvier 2016, est structuré autour de quatre piliers (investissement dans les infrastructures, territoires connectés, Internet ouvert, prisme pro innovation) et trois nouveaux modes d’interventions (bâtir une régulation par
la donnée, co-construire la régulation et jouer un rôle d’expert neutre dans le numérique et le postal). Une feuille de route détaillée comprenant 21 thèmes a été arrêtée et 12 chantiers prioritaires ont été définis pour 2016/2017.

L’année 2016 s’annonce comme le – trop lent – décollage de la radio numérique terrestre (RNT)

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) se hâte lentement dans le lancement des appels à candidatures, qui s’étaleront de fin mars 2016 à… fin 2023. Tant d’années pour que la RNT devienne nationale, c’est de l’avis de certains professionnels « trop lent » à l’heure du numérique.

Par Charles de Laubier

Olivier Schrameck« C’est beaucoup trop lent pour déployer une nouvelle technologie numérique, mais, au moins, cela avance avec un calendrier qui fixe les dates précises des appels à candidatures », a confié à Edition Multimédi@ un bon connaisseur de la RNT quelque peu circonspect, en marge de la cérémonie des voeux du CSA prononcés par son président, Olivier Schrameck (photo), le 21 janvier dernier. Les nouveaux appels à candidatures vont en effet s’échelonner de 2016 à 2023, soit durant huit ans encore et aussi huit ans après le premier appel à candidatures de… mars 2008 sur Paris, Marseille et Nice (comme le montre le tableau ici). Le CSA a décidé ce calendrier à rallonge durant son assemblée plénière du 9 décembre 2015, après de nombreuses années de débats et d’oppositions, ainsi qu’à l’issue d’une ultime consultation publique menée l’an dernier.

« Est-ce que l’Arcep sert encore à quelque chose ? », s’interroge Sébastien Soriano, son président

C’est la question la plus pertinente que le président de l’Arcep, Sébastien Soriano, a lancée lors de son show des conclusions de sa « revue stratégique », le 19 janvier, dans le grand amphithéâtre de La Sorbonne, avec la participation
de Emmanuel Macron, ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique.

« Nous devons nous poser la question
de notre valeur ajoutée : est-ce qu’on
sert encore à quelque chose ? », s’est interrogé Sébastien Soriano (photo de gauche), président depuis un an maintenant de l’Autorité de régulation
des communications électroniques et
des postes (Arcep). « Je pense que oui. Mais comment ? », a-t-il ajouté. Alors que cette autorité administrative indépendante (AAI), créée en 1997, va fêter dans un an ses 20 ans,
elle a tenté dans le cadre de sa « revue stratégique » de résoudre son problème existentielle, à savoir quelles seront ses nouvelles missions maintenant que le cycle d’ouverture à la concurrence des télécoms s’est achevé. Tout ce qui faisait la vocation de l’Arcep tend à disparaître : ses compétences historiques étaient d’édicter des règles dites ex ante, c’està- dire établies « au préalable » (a priori) et applicables aux seuls opérateurs télécoms en position dominante sur le marché – Orange (ex-monopole public France Télécom) et dans une moindre mesure SFR. Cette régulation qualifiée d’« asymétrique » consiste à imposer des obligations spécifiques à l’opérateur
« puissant » sur un marché, dans le but de supprimer ou de réduire les « barrières
à l’entrée » et permettre ainsi aux opérateurs concurrents – alternatifs – de s’installer
et de prospérer – surtout lorsqu’il existe une infrastructure essentielle comme c’est le cas de la boucle locale téléphonique encore très largement utilisée pour l’accès à Internet haut débit dans les offres triple play (1).