Concentration des médias et « presse d’industrie »

En fait. Le 23 janvier, Edwy Plenel, président cofondateur du site de presse en ligne Mediapart et ancien directeur de la rédaction du quotidien Le Monde, s’est montré très inquiet de la concentration des médias en France, à l’heure du numérique, entre les mains d’industriels dont ce n’est pas le cœur de métier.

En clair. Invité par l’Association des journalistes médias (AJM), Edwy Plenel a mis en garde les journalistes présents : « Je crois que la démocratie est un écosystème (…). C’est une culture démocratique. De ce point de vue – et chacun et chacune d’entre vous défendez nos valeurs collectives là où vous travaillez – le paysage de concentration des médias, de remise en cause du pluralisme, de verticalité de cette concentration entre des médias audiovisuels, des médias papier, des propriétaires du numérique, des opérateurs de téléphonie, etc., n’a fait que s’accentuer ces dernières années », a-t-il déploré. Et de se faire plus explicite : « Nous offrons un paysage médiatique où des industriels du luxe, de l’armement, du bâtiment ou encore de la téléphonie sont aujourd’hui au cœur de notre système médiatique ».
L’ancien directeur de la rédaction du Monde, où il a été journaliste durant vingt-cinq ans (1980-2005), désigne ainsi sans les nommer LVMH de Bernard Arnault propriétaire des quotidiens Les Echos et Le Parisien, le groupe Dassault de Serge Dassault propriétaire du quotidien Le Figaro, Bouygues de Martin Bouygues propriétaire de TF1, SFR/Altice
de Patrick Drahi propriétaire du quotidien Libération et de l’hebdomadaire L’Express, Free/Iliad de Xavier Niel copropriétaire à titre personnel du quotidien Le Monde et de l’hebdomadaire Le Nouvel Obs, ou encore Vivendi de Vincent Bolloré propriétaire de Canal+ et de iTélé. C’est unique au monde. « C’est ce que le fondateur du Monde, Hubert Beuve-Méry, appelait “la presse d’industrie” où des intérêts industriels extérieurs aux métiers de l’information se mettent au coeur de nos entreprises (de médias) », a-t-il rappelé (1). Et Edwy Plenel de poursuivre : « Ils nous laisseront faire, même avec talent et brio, tant que l’on ne menace pas leurs intérêts, tant que l’on ne touche pas à leurs intérêts. Nous avons eu plusieurs épisodes récemment qui nous ont montrés ce qu’il en était [faisant allusion à la bataille chez iTélé pour l’indépendance de la rédaction]. (…) Ce mélange des genres au niveau des actionnaires, des propriétaires et du contrôle des médias a des incidences sur nos contenus ». C’est pour défendre l’indépendance des médias qu’il a lancé le 16 mars 2008 le site Mediapart, lequel compte aujourd’hui 130.000 abonnés, 74 salariés, pour un chiffre d’affaires en 2016 d’environ 13 millions d’euros. @

Information et publicité : comment la presse se retrouve court-circuitée par les réseaux sociaux

La presse n’en finit pas d’être submergée par le tsunami numérique. Non seulement les réseaux sociaux prennent le relais dans l’accès à l’information, mais en plus ils rattrapent les journaux en termes de dépenses publicitaires. Facebook, Twitter ou Snapchat se font de plus en plus « médias sociaux ».

La presse imprimée se fait toujours plus cannibaliser par les sites web. Les habitudes de consommation de l’information ne cessent de donner la part belle à Internet.
Selon une étude de Médiamétrie, 38 % de la population en France déclarent accéder
à l’information en passant par les pages d’actualité sur Internet (à partir de portails web), les pure players de l’information en ligne (Slate, Mediapart, Huffington Post, Rue89, …) et/ou les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, YouTube, Google, Instagram, LinkedIn, … ).

Le premier quotidien national Le Figaro, détenu par Serge Dassault, ne pèse plus que 20 % du groupe

Il y a un an, le groupe Le Figaro finalisait l’acquisition de CCM Benchmark qui édite Linternaute.com, Commentcamarche.net, Journaldesfemmes.com ou encore Journaldunet.com. Le groupe média de Serge Dassault poursuit sa diversification en ligne, au risque de réduire le quotidien à une portion congrue.

Le groupe Le Figaro devrait réaliser cette année 530 millions d’euros de chiffre d’affaires, soit une hausse de 6 % sur un an (1). Mais son quotidien – le plus ancien de la presse française puisque né il y a… 190 ans et aujourd’hui premier au niveau national (hormis Ouest-France) – ne pèse plus lourd au sein de ce conglomérat de médias, de e-commerce et de hors médias en termes de revenu et de diffusion.

Claude Perdriel laisse derrière lui un « Nouvel Obs » exsangue et un « Rue89 » en perdition

Le patriarche de la presse française, Claude Perdriel (90 ans), va céder sa part minoritaire qui lui reste dans le capital de la société Nouvel Observateur du Monde. Il laisse derrière lui un hebdomadaire historique mal en point et un pionnier des médias en ligne devenu l’ombre de lui-même.

C’est en janvier 2014 que Le Nouvel Observateur était passé sous le contrôle du trio « BNP » – constitué par le milliardaire Pierre Bergé, l’industriel Xavier Niel (Free) et le banquier Matthieu Pigasse (Lazard). Ensemble, ils l’avaient acheté
13,4 millions d’euros à son fondateur Claude Perdriel (photo) qui en avait alors conservé 35 % (1). Outre Le Nouvel Obs, rebaptisé depuis L’Obs, l’acquisition incluait aussi le site de presse en ligne Rue89 qui avait été racheté par Claude Perdriel en décembre 2011 – il y a maintenant cinq ans.

Presse en ligne, au numéro ou à l’article : la guerre des kiosques numériques est engagée

LeKiosk, PressReader, ePresse, Articly, Blendle, Apple News, Google News, SFR Presse, Discover, Instant Articles, News Republic, La Presse Libre, … Pendant que les kiosques des rues souffrent, les kiosques numériques, eux, prospèrent. Quotidiens et magazines se vendent entiers ou à l’article. Passage en revue non exhaustif.

Principaux e-kiosques, par ordre alphabétique.

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