Le «Earned Media» dilue le papier dans le digital

En fait. Le 1er juillet, Kantar, société internationale d’études et de conseils médias et marketing, a publié un rapport sur le « Earned Media » qui démontre que les annonceurs peuvent pousser leurs marques dans les médias – notamment sur les réseaux sociaux – sans forcément investir dans de la publicité.

En clair. « Dans le monde des médias, la crise du covid-19 a révélé un incroyable paradoxe : alors que pour la première fois de l’histoire, l’information digitale a atteint des audiences record sur tous les continents, parallèlement les investissements publicitaires se sont effondrés touchant de plein fouet un secteur déjà fortement mis à mal, a relevé le 1er juillet Christophe Dickès, directeur des projets stratégiques à la division médias de Kantar. Pourtant, dès les premiers jours de la crise, les Etats ont placé la presse dans la liste des biens essentiels ». Ce paradoxe se retrouve aussi dans le fait que, pendant la crise sanitaire, 81 % des Français ont augmenté leur consommation d’au moins un média et 52 % de plus de quatre médias. « Alors que la confiance à l’égard des médias mais aussi l’intérêt porté à l’actualité s’effritaient avec le temps, la crise du covid-19 a littéralement redonné un nouvel élan aux médias mainstream», a-t-il ainsi constaté. Mais Kantar, qui n’est plus une filiale du géant publicitaire mondial WPP (1), démontre dans un rapport publié le 1er juillet que les annonceurs misent de plus en plus sur le « Earned Media ». Il s’agit de la visibilité et de la « réputation » qu’obtient une entreprise sur les réseaux sociaux, les chaînes vidéo, les blogs, les influenceurs en ligne ou encore les commentaires des internautes, ainsi qu’en étant cité dans des articles des journalistes. C’est l’effet de halo que favorisent notamment le buzz et la viralité sur Internet. En creux, le paradoxe que démontre ce rapport instructif d’une quarantaine de pages (2) est que les annonceurs peuvent obtenir gratuitement ou à peu de frais une publicité indirectes en ligne sans acquérir d’espaces publicitaires payants dans les médias en général et les journaux en particulier selon le modèle opposé du « Paid Media ».
« Le Earned Media renforce la confiance et permet aux marques ou organisations de bénéficier du crédit des médias qu’elles utilisent », résume Kantar. Les médias traditionnels et surtout la presse en crise veulent s’inscrire dans cette tendance multi-canaux. Le papier n’est plus le coeur de la presse. Ce n’est pas un hasard si, le 24 juin, Kantar, Médiamétrie et le CESP (3) ont aidé l’Alliance pour les chiffres de la presse et des médias (ACPM) à lancer OneNext en France, une nouvelle mesure d’audience « sur tous les supports et en plaçant le digital au centre » (4) – présentée comme « une première mondiale ». @

La grande réforme de l’audiovisuel est morte, vive la réforme de l’audiovisuel à la découpe !

La réforme de l’audiovisuel et la transposition de la directive SMA sont dans un bateau : la réforme de l’audiovisuel tombe à l’eau : qu’est-ce qui reste ? La crise sanitaire aura eu raison de la grande réforme voulue par Emmanuel Macron. Edition Multimédi@ fait le point sur ce revirement.

Emmanuel Macron (photo) en a rêvée en tant que candidat à la présidence de la République ; devenu chef de l’Etat il y a trois ans, il ne la fera finalement pas ! Il faudra « simplifier la réglementation audiovisuelle en matière de publicité, de financement et de diffusion, pour lever les freins à la croissance de la production et de la diffusion audiovisuelles et préparer le basculement numérique, tout en préservant la diversité culturelle », avait promis début 2017 celui qui était encore quelques mois plus tôt ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique (2014-2016).

Presse : le droit voisin des éditeurs sous la coupe de Google et dans les mains de l’Autorité de la concurrence

La décision rendue par l’Autorité de la concurrence (ADLC) le 9 avril dernier à l’encontre de Google, à la demande de l’Alliance de la presse d’information générale (APIG), du Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) et de l’Agence France-Presse (AFP), est très instructive. Explications.

Par Christophe Clarenc, avocat, Cabinet DTMV & Associés

Fini la convergence entre les télécoms et les médias chez Altice, qui se sépare aussi de ses titres de presse

La filiale française du groupe de Patrick Drahi le déclare toujours dans ses communiqués, et ce depuis plus de deux ans que l’intégration de NextRadioTV est effective : « Altice France est le premier acteur de la convergence entre télécoms et médias en France ». Mais dans les faits, cette stratégie a fait long feu.

Cinq ans après avoir initié le rapprochement entre les télécoms et les médias, avec l’acquisition par Altice en juillet 2015 de 49 % à l’époque de NextRadioTV, le groupe de Patrick Drahi (photo) en est aujourd’hui à détricoter cette velléité de stratégie de convergence. Il y a deux ans, en avril 2018, l’intégration de la société d’Alain Weill avait finalement obtenu le feu vert du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), lequel avait préalablement validé la prise de contrôle par NextRadioTV de la chaîne Numéro 23 – rebaptisée par la suite RMC Story. Avec NextRadioTV (RMC, BFM TV, BFM Business, BFM Paris, RMC Découverte, …), le pôle médias d’Altice France – maison mère de SFR, deuxième opérateur télécoms français – rajoutait l’audiovisuel à son portefeuille déjà constitué alors de la presse écrite avec Libération et L’Express, rachetés respectivement en juin 2014 et février 2015. Depuis lors, la filiale française ne manque pas d’affirmer dans ses communications : « Altice France est le premier acteur de la convergence entre télécoms et médias en France ». Même la holding – néerlandaise depuis près de cinq ans, après avoir été luxembourgeoise – y va encore aujourd’hui de son couplet sur la convergence : « Altice Europe, cotée sur Euronext Amsterdam (2), est un leader convergent dans les télécommunications, le contenu, les médias, le divertissement et la publicité ». La maison mère chapeaute aussi Altice Portugal (Meo, Fastfiber), Altice Israel (Hot) et Altice Dominicana (République dominicaine).

De quelle ampleur sera la catastrophe publicitaire ?

En fait. C’est mi-mai que l’Institut de recherches et d’études publicitaires (Irep), Kantar et France Pub publient leur Baromètre unifié du marché publicitaire et de la communication (Bump) pour le 1er trimestre. Les résultats ne seront pas bons et laisseront présager une annus horribilis, tous médias confondus.

En clair. « Il est encore un peu tôt pour modifier nos prévisions annuelles… Nous pensons que nous serons probablement autour de – 30 % sur le 1er semestre 2020, une hypothèse un peu plus optimiste que celle diffusée mi-avril … Pour l’annuelle, cela dépendra de la dynamique de la reprise », a indiqué à Edition Multimédi@ Hélène Chartier, directrice générale du Syndicat des régies Internet (SRI).
Le 14 avril dernier, ses 38 adhérents – parmi lesquels Google, Facebook, TF1 Pub, FranceTV Publicité, Le Monde Publicité (M Publicité-RégieObs) ou encore Verizon Media (ex-Oath) – avaient constaté « une baisse drastique des revenus publicitaires digitaux : de l’ordre de – 40 % pour le seul mois de mars, avec des prévisions allant jusqu’à – 80 % pour avril et une estimation d’impact sur le marché du display de – 20 à – 30 % pour l’ensemble de l’année 2020 ». Cette chute annoncée de la seule publicité digitale – pourtant habituel amortisseur avec ses croissances annuelles à un ou deux chiffres par rapport à la publicité sur les médias classiques souvent, eux, en déclin (dont la presse) – ne laisse rien augurer de bon pour le marché global de la publicité en France. S’il n’y avait pas eu la crise sanitaire, les recettes publicitaires dans leur ensemble – télévision, presse, radio, cinéma, imprimés et Internet – auraient progressé cette année d’environ 1 %, contre 1,5 % en 2019. Bref, 2020 devait être en « léger ralentissement » avec notamment « une progression un peu plus limitée des médias numériques ». C’était du moins ce que prévoyait (1) l’Irep (2) avant la fermeture des lieux publics le 14 mars et la promulgation de la loi du 23 mars 2020 instaurant l’état d’urgence sanitaire.
Près de deux mois de confinement après, sur fond de récession économique, la question n’est plus de savoir s’il y aura une catastrophe publicitaire mais de quelle ampleur sera-t-elle. Surtout que la date du 11 mai, à partir de laquelle le déconfinement des Français et des entreprises sera progressif, ne marquera pas le retour à la normal du marché publicitaire – loin de là. Mi-mai, l’Irep, Kantar et France Pub publient les résultats publicitaires du premier trimestre 2020 dans le cadre de leur baromètre « Bump » (3). Ils donneront un aperçu de la catastrophe annoncée : – 20 %, – 30 %, – 50 % voire plus ? Puisque l’on vous dit que 2020 est une annus horribilis.@