Le groupe Amaury s’inspire de la musique en ligne pour sa stratégie « omnimédia » numérique

Philippe Carli, directeur général du groupe Amaury, explique pourquoi la presse devrait s’inspirer de la musique en ligne et comment le groupe de Marie-Odile Amaury met en place une nouvelle plate-forme de vente en ligne pour les sites web de L’Equipe, du Parisien ou encore de la chaîne L’Equipe 21.

Par Charles de Laubier

Philippe CarliLe groupe Amaury entame sa mue numérique en se dotant d’une plate-forme de vente en ligne déjà utilisée par The Times, BSkyB
ou encore Universal Music (Vivendi). Développée par la société britannique MPP Global Solutions, elle va permettre aux sites web des quotidiens Le Parisien-Aujourd’hui en France et L’Equipe de vendre plus facilement des articles à la demande et des abonnements numériques. « Comme Amazon ou Apple, nous allons offrir une expérience d’achat très simple – en un seul clic (après avoir renseigné une première fois ses données et sa carte bancaire) – pour le client
qui sera plus impliqué », a expliqué Philippe Carli (photo), directeur général du groupe Amaury, le 9 avril dernier devant l’Association des journalistes médias (AJM). Sport oblige, L’Equipe sera prêt au mois de mai en prévision de la Coupe du monde de football démarrant en juin. Le Parisien suivra en juillet.

Claude Perdriel, cofondateur du Nouvel Obs, ne croit pas au payant sur Internet

Cofondateur du Nouvel Observateur il y a près d’un demi-siècle, Claude Perdriel
(87 ans) a confié qu’Internet l’ « inquiète » et le « désespère ». Alors que l’hebdo,
cédé au trio Niel-Bergé-Pigasse, devrait lancer le 15 avril une édition du soir pour tablette, il dit ne pas croire au payant sur Internet.

Par Charles de Laubier

Claude PerdrielL’une des figures emblématiques de la presse française
ne croit pas vraiment à Internet. Claude Perdriel (photo),
qui est encore pour quelques jours président du conseil de surveillance de la société Le Nouvel Observateur du Monde qu’il a cofondée et qu’il cède à la holding Le Monde Libre
du trio Niel-Bergé-Pigasse (déjà propriétaire du groupe Le Monde), a exprimé de sérieux doutes sur la révolution numérique des journaux.
« Internet m’inquiète et me désespère un peu pour ce qui concerne la presse écrite », a-t-il confié devant l’Association
des journalistes médias (AJM), le 20 mars dernier.

« Internet menace l’univers médiatique »
D’après lui, les recettes ne sont pas au rendez-vous. « Souvent, on vient me trouver pour faire tel ou tel service Internet. Mais je demande s’il y aura des internautes intéressés. On me répond que oui, quelques centaines de milliers. Bon, et je demande quelles seront les recettes de publicité. On me dit ‘’zéro’’, car tant que l’on n’est pas dans les millions d’internautes. Mais il faudra embaucher deux seniors et deux juniors pour couvrir cela. Donc, c’est 400.000 ou 500.000 euros [par an] pour zéro en recettes… », a-t-il regretté avec scepticisme.
Cela ne l’empêche pas de se dire content du site web Sciences & Avenir Santé :
« Je m’en occupe un peu car vraiment ça me passionne. Et on est très content ;
on se félicite : bravo ! Le malheur, c’est que je crois que l’on a zéro pour cent de
recette ! Il n’y a pas de recette car faire un site santé de Sciences & Avenir à 500.000 internautes n’apporte pas une miette de publicité. Comment on va faire pour vivre ou survivre ? », s’est inquiété Claude Perdriel.

Pour lui, point de salut en dehors de la gratuité financée par la publicité – à condition d’avoir des millions de visiteurs pour intéresser les annonceurs. « Moi, je ne crois pas au payant en matière d’Internet. En tout cas, absolument pas pour l’information généraliste. L’information est partout et elle est gratuite. Les internautes ne paieront jamais », a-t-il insisté. Même s’il peut admettre que faire payer peut avoir du sens pour une information thématique poussée ou un conseil de boursier : « Peut-être. Mais cela veut dire qu’il faut engager des gens spécialisés (…) deux cracks qui vont vous coûter 300.000 euros et deux community managers à 300.000… Et vous allez avoir quoi comme recettes ? Je ne crois pas au payant ». A tel point qu’il ne croit pas beaucoup aux chances de succès de l’édition quotidienne du soir payante pour tablettes que Le Nouvel Obs devrait sortir le 15 avril. « J’ai laissé (…) faire. En plus, elle est financée
par [le fonds Finp d’aide à la presse de] Google : alors je n’avais rien à dire ! Mais…
Je n’y crois pas beaucoup. Je pense que les gens ne vont pas s’abonner. D’ailleurs la question se pose aussi pour Challenges [qu’il conserve avec Sciences & Avenir, ndlr] puisqu’on va faire un quotidien du soir d’ici deux mois. Mais moi, je voudrais le faire gratuit car je préfère avoir plus d’internautes » (1). Car il ne conçoit pas faire tout ce travail pour quelques milliers d’internautes payant, alors que le site web de Challenges compte plus de 3,5 millions de visites par mois (selon l’OJD).
« Donc, voilà mon problème. (…) J’espère que je pourrai le faire gratuit ! », a-t-il lancé.
Pire : celui qui s’est lancé il y a trente ans avec succès dans les fameuses messageries roses sur Minitel (les 3615 Aline ou 3615 Jane), lesquelles lui ont permis de renflouer Le Nouvel Observateur, estime en revanche qu’Internet met en péril la presse :
« L’univers médiatique que je défends est menacé, y compris par Internet, par lui-même. Parce que l’univers d’Internet va à une vitesse vertigineuse. D’abord, pendant des années, Internet a été de l’écrit. Après, ce fut les photos. Maintenant, ce sont les vidéos qui l’emportent. Et les vidéos créent un univers très lointain du nôtre. (…) D’abord on sait pas faire : ça coûte trop cher ; faut prendre les vidéos des autres et
on ne sait pas où sera la marge. Et ça, c’est un peu inquiétant sur le numérique.
C’est quand même ce qui est en train de se passer ».

Rachat de Rue89 en 2012 : « Un peu cher » Enfin, questionné sur savoir s’il ne regrettait pas d’avoir acheté Rue89 pour 7,5 millions d’euros en janvier 2012, il a répondu : « C’était un peu cher. Mais là je dirais que j’avais une raison : j’aime beaucoup les gens de Rue89, ce sont des amis, des gens formidables ; ils étaient en péril, même gravement ; ils auraient peut-être disparu. Mais on a pas vraiment fait prendre la mayonnaise : on ne les a pas ramené à côté de l’Observateur, ce que Louis Dreyfus va faire [lire p 2]. Et je ne regrette pas de les avoir rachetés (2). Même si c’était un peu cher ». @

Charles de Laubier

Edwy Plenel en appelle à «une grande loi sur la liberté de l’information» pour la presse en pleine crise

Le fondateur du site de presse en ligne Mediapart et ancien directeur de la rédaction du quotidien Le Monde lance un appel aux parlementaires pour
« refonder l’écosystème des médias » dont la crise économique risque à
ses yeux d’accentuer « la double dépendance » (industrielle et étatique).

« Il devrait y avoir aujourd’hui une immense consultation faite par
le Parlement en vue d’une grande loi sur la liberté de l’information,
de même ambition que celle de 1881 (1), qui permette de refonder notre écosystème : le droit de savoir, notre métier, le droit de savoir des citoyens, l’accès aux informations, le droit de dire, la liberté d’expression, le droit des rédactions, leur protection, le droit du public, les sources, les lanceurs d’alertes, la neutralité du numérique, … », a expliqué Edwy Plenel, le 13 mars dernier, à l’occasion de la présentation des résultats annuels du site de presse en ligne Mediapart (2) qu’il a créé il
y a six ans et qu’il souhaiterait voir détenu par un « fonds de dotation » d’ici un an pour pérenniser son indépendance.

Il dénonce l’immobilisme du gouvernement
Alors que la presse française traverse la plus grave crise de son histoire, il monte au créneau : « Nous voudrions lancer un appel aux parlementaires, puisque l’immobilisme
du ministère de la Culture et de la Communication est flagrant, pour qu’ils se mobilisent dans une logique de majorité d’idées – car la liberté de la presse est utile à toutes les familles politiques – afin de créer, de refonder notre écosystème face au risque que la crise économique des médias ne fasse qu’aggraver une double dépendance : dépendance à l’égard d’industriels supposés mécènes qui achètent de l’influence à travers les médias et dépendance à l’égard la puissance étatique qui selon ses opportunités vient au secours de tel ou tel [média]». Par ailleurs secrétaire général du Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (Spiil) qu’il a cofondé, Edwy Plenel déplore que depuis l’élection présidentielle de 2012 – à l’exception du vote des parlementaires (à l’Assemblée nationale le 4 février, puis au Sénat le 17 février 2014)
pour la TVA super réduite à 2,10 % – « il n’y a rien »… « Nous voudrions vous faire part de notre inquiétude devant l’immobilisme du gouvernement par rapport à l’immense crise qui traverse les métiers de l’information sur tous supports. La révolution numérique est un défi qui appelle, comme toute révolution industrielle, une réinvention de l’écosystème des médias », déclare l’auteur de « Le devoir de savoir » (Don Quichotte éditions, 2013).
Il combat les différences de traitement entre ce qu’il appelle « la vieille presse » et la presse numérique. Dès 2008, Mediapart a bataillé pour qu’un journal numérique soit reconnu comme de la presse – à une époque où pour la législation un journal c’était du papier. « Grâce à nos démarches, cela a donné le statut de la presse en ligne : désormais, à la CPPAP (3), la presse en ligne est reconnue », se félicite le patron de Mediapart. Puis ce fut le succès en début d’année de la TVA à 2,10 % : « Le vote des parlementaires a montré que c’est l’administration fiscale qui avait une interprétation archaïque, en retard d’une révolution numérique par rapport à la réalité de l’égalité entre presse en ligne et presse papier » (4).

Autre archaïsme : celui des articles 226-1 et 226-2 du Code pénal qui punit d’un an
de prison et de 45.000 euros d’amende le fait de publier des enregistrements. « Ces
deux anciens articles du code pénal, d’avant la révolution numérique, sont l’objet d’une interprétation archaïque et figée de la Cour de cassation qui fait que nous sommes
hors du droit de la presse (5) », regrette Edwy Plenel. Il a indiqué avoir écrit au Canard enchaîné (journal papier) et à Atlantico (site de presse en ligne) ayant essuyé le même type de décision avec les enregistrements Buisson) pour proposer une démarche commune. « C’est une jurisprudence totalement schizophrène (…) Il y a un verrou,
à l’heure du numérique (des photos numériques, des selfies, des enregistreurs, du partage, …) qu’il faut évidemment faire sauter en revenant dans le lit du droit de la
presse », ajoute-t-il. Plus largement, cela fera six ans, le 24 novembre prochain, que
le manifeste de Mediapart a été publié avec Reporters sans frontières (RSF) intitulé
« Combat pour une presse libre ». Edwy Plenel estime qu’il est plus que jamais d’actualité.

Le contrôle des médias par des industriels
« Tant que ce travail transparent public ne se fait pas, la crise galope et elle est l’occasion de manœuvres, d’arrangements, sur fond de conflits d’intérêts, de mélanges des genres. (…) Vous voyez bien que le risque est grand que s’accentue un travers immense du paysage médiatique français : le contrôle des médias par des industriels, (…) qui sont des marchands d’armes, qui sont dans l’aéronautique, dans la banque, dans la téléphonie, dans le luxe, dans le bâtiment et les travaux publics, … et qui, tous, sont dans des relations de clientélisme avec la puissance publique », dénonce-t-il. Sera-t-il entendu ? @

Charles de Laubier

Le Monde et la presse française se préparent à un exercice 2014 à haut risque, sur fond de consolidation

Le premier quotidien national fête cette année ses 70 ans. Mais Le Monde, comme l’ensemble de la presse française, est remis en question par les géants de l’Internet et par une chute « violente » de ses recettes publicitaires. Son président, Louis Dreyfus, s’interroge sur son avenir papier-numérique.

Louis Dreyfus-bisL’année 2013 aura été une annus horribilis pour la presse française : recul des ventes de journaux, chute des recettes publicitaires, pertes financières, suppression d’emplois, grèves à répétition, monétisation difficile du numérique, …
Rien que la chute de 7,1 % des ventes de quotidiens nationaux en kiosque sur la majeure partie de l’année 2013 a jeté un froid avant un hiver glacial en diffusion et publicité (1).
« Depuis octobre, on voit sur l’ensemble du marché de la presse une baisse forte, brutale, des recettes publicitaires. Il y a un refroidissement très net de la tendance. C’est une baisse à un chiffre mais importante en moyenne », s’est inquiété mi-décembre Louis Dreyfus (photo), président du directoire du Monde, devant l’Association des journalistes médias (AJM).

« La presse vit un crash industriel. C’est la sidérurgie des années 1980 »
Et 2014 ne se présente pas sous les meilleurs auspices, d’autant que les débuts d’année sont traditionnellement des périodes de vaches maigres pour la presse en matière de publicité. « Ce qui est en train de se passer dans la presse va forcer à une consolidation », a-t-il ajouté (2).
Le Monde, premier quotidien national, est à cet égard emblématique et illustre bien les doutes et interrogations qui taraudent la presse française en général face à ce énième « trou d’air » dû aux « à-coups très violents » du marché publicitaire.
« La presse vit un crash industriel. C’est la sidérurgie des années 1980 », a même osé lancer de son côté Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, le 9 janvier dernier.

A l’ère du digital, le papier peut encore sauver les meubles
Après une perte nette d’environ 2 millions d’euros en 2013, aggravée par rapport à
1,1 million de déficit net enregistré en 2012, le patron du groupe Le Monde – dont le quotidien perçoit près de 20 millions d’euros d’aides d’Etat par an – ne désespère pas pour autant. « On prévoit un retour à l’équilibre en 2014 », a-t-il assuré. Mais, en creux,
il y a tout de même péril en la demeure. Sur les 110 millions d’euros que le trio formé par Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse s’étaient engagés à injecter dans Le Monde, en échange de la prise de contrôle du groupe en novembre 2010, plus de la moitié a déjà été consommée à ce jour. Il ne reste donc plus qu’une cinquantaine de millions d’euros disponibles, dont une partie devrait aller au financement de la restructuration de l’imprimerie du Monde à Evry, déficitaire et en grande difficulté. Paradoxalement, en pleine révolution numérique, c’est le journal papier qui peut encore sauver les meubles mais en prenant un premier grand risque : la hausse du prix de vente de la version imprimée du quotidien Le Monde, passée à 2 euros (contre 1,80 euro) depuis le 4 janvier dernier, et même à 3,80 euros (au lieu de 3,50 euros) pour le quotidien du week-end flanqué de son magazine M très apprécié des médias-planneurs.

Hausse des tarifs mais baisse du lectorat
Mais cette augmentation tarifaire, à laquelle se sont résolus d’autres quotidiens nationaux en mal d’argent frais (Le Parisien, Libération, Les Echos, …), n’ira pas dans le sens d’une progression de la diffusion de la presse en France – bien au contraire.
« On ne considère pas que l’on aura plus de lecteurs en augmentant le prix, mais cette hausse est inéluctable », a reconnu le patron du groupe Le Monde devant l’AJM.
Cette hausse, qui semble tenir d’une fuite en avant, touche aussi l’édition numérique du Monde, passant de 1,79 euro à 2 euros à partir de mi-janvier pour les ventes à l’acte, tandis que l’abonnement digital à 15 euros par mois passe à 17,90 euros sur lemonde.fr, et de 17,99 euros à 19,99 euros sur le kiosque d’Apple où il est présent depuis novembre dernier (3). Et ce, conformément à ce qu’a décidé le conseil de surveillance du groupe le 17 décembre. Pour l’heure, Le Monde vend moins de 280.000 exemplaires en moyenne par jour, en baisse de près de 5 %, dont 126.500 abonnés à l’édition digitale – parmi ces derniers, 56.500 l’étant uniquement en numérique. « Nous avons fixé un objectif de 200.000 abonnés numériques à deux ou trois ans », a rappelé Louis Dreyfus, qui ne semble pas craindre un ralentissement des ventes numérique sur l’abonnement nettement plus cher. Il prévoit en tout cas de lancer en avril prochain un autre journal tactile payant qui sera disponible en fin de journée (à partir de 18 heures) – en plus de l’édition payante de 14 heures.
En revanche, il ne parle pas d’objectif pour le papier… Et pour cause. Cette surenchère tarifaire va à l’encontre de ce principe démocratique selon lequel la presse imprimée devrait être accessible au plus grand nombre. En France, cette idée devient-elle un vœu pieux en ce nouvel an ? Cette inflation accentue une dichotomie confuse entre le gratuit et le payant, qui frappe la presse face à l’Internet. De ce point de vue, Le Monde et ses confrères ne savent plus bien à quel saint se vouer. Plus d’une décennie après avoir ouvert la boîte de Pandore du gratuit sur Internet (4), les quotidiens se livrent
– en déversant une quantité de leurs articles rendus accessibles librement auprès des internautes et mobinautes – à une course à l’échalote avec la multitude de sites web gratuits couvrant l’actualité. Aujourd’hui, les éditeurs s’en mordent les doigts et Louis Dreyfus en convient : il y a un vrai problème. « La question est plutôt de savoir comment on organise notre offre, payant sur le papier, gratuite et payante sur le web. (…) On a besoin d’avoir une offre gratuite, mais il faudra que l’on précise notre offre payante pour que la différence entre le gratuit et le payant soit plus évidente ».
Car c’est là que le bât blesse. Tant que la presse ne limitera pas la gratuité à l’information factuelle – par ailleurs disponible librement et massivement sur Internet et les mobiles –
et qu’elle n’étendra pas le payant à tous les articles à valeur ajouté (décryptage, analyse, enquêtes, interview, …), elle prendra un second grand risque, celui de dévaloriser son fond de commerce éditorial. « De manière générale, on a un modèle freemium sur le numérique : il y a du gratuit et du payant. Le gratuit ne peut pas être du payant en moins bien ! Car on a vocation à élargir l’audience de notre site web. Il faut que le payant soit compréhensible pour les internautes. Chaque fois que l’on créera des produits spécifiques payants, cela nous aidera à préciser la promesse éditoriale », a expliqué Louis Dreyfus. Cette quadrature du cercle – pour ne pas dire quadrature du Net – n’est pas impossible, à condition qu’il y ait une profonde remise en question éditoriale des éditeurs dans leur façon de proposer l’information. Publier le lendemain dans l’édition papier vendue 2 euros de l’actualité factuelle qui a été très largement divulguée gratuitement la veille sur l’Internet mondial, sur les « Google News » et via les dépêches d’agences de presse (AFP, Reuters, AP, Bloomberg, …) de plus en plus visibles librement sur tous les terminaux (5), ce n’est plus possible !
Troisième grand risque pris par la presse : celui d’une frontière plus poreuse entre la partie éditoriale et la partie publicité, aussi bien sur papier qu’en numérique, au risque de malmener la déontologie journalistique.

Des articles financés par les annonceurs…
L’année 2014 s’annonce en effet pour la presse comme étant celle du publi-information, appelé aussi « Native Advertising » pour désigner ces articles sponsorisés par des annonceurs. « Il y a une demande forte des annonceurs pour que l’on imagine de nouveaux formats. En même temps, nous sommes très vigilant sur la distinction entre ce qui est produit par la rédaction et ce qui ne l’est pas. Cela doit être clair », a voulu rassurer Louis Dreyfus, précisant que Le Monde pratique déjà cela sur mobile et sur son site web. Espérons que les lecteurs, eux, n’auront pas l’impression que leurs journaux y perdent leur âme. @

Charles de Laubier

Entre visibilité et financement, la presse française joue un double jeu avec Google

Google et l’Association de la presse d’information politique et générale (AIPG) ont lancé le 19 septembre le Fonds pour l’innovation numérique de la presse (FINP), doté pour trois ans de 60 millions d’euros. Le double jeu de la presse française
avec le géant du Net est à son comble.

Par Charles de Laubier

Après avoir accusé toutes ces dernières années Google de piller ses articles au mépris des droits d’auteurs et de capter la valeur au détriment de ses rédactions et journalistes, voilà que la presse française – ou du moins une partie des journaux dits d’information politique et générale – en est réduite à demander l’aide financière du numéro un des moteurs de recherche.