Warner Music Group (Access Industries) en Bourse sert de lièvre pour Universal Music Group (Vivendi)

L’entrée en Bourse réussie le 3 juin de la troisième major mondiale de la musique enregistrée, Warner Music, est de bon augure pour la première major du secteur, Universal Music, dont la maison mère Vivendi prévoit sa cotation « au plus tard début 2023 ». A moins que Vincent Bolloré n’accélère.

Maintenant qu’il n’est plus accaparé par le groupe Lagardère, dont il a fait l’acquisition de 10,6 % du capital, grâce à la vente finalisée le 31 mars dernier de 10 % du capital de sa filiale Universal Music Group (UMG) au chinois Tencent, le groupe Vivendi présidé par Vincent Bolloré (photo de droite) prépare l’introduction en Bourse de sa filiale musicale qu’il prévoit « au plus tard début 2023 ». La cotation boursière réussie au Nasdaq à Wall Street de sa rivale et troisième « maison de disques » mondiale Warner Music Group (WMG) incitera-t-il le milliardaire breton à accélérer la cadence vers la mise en bourse du numéro un mondial de la musique enregistrée ?

La neutralité de l’Internet se retrouve prise en étau entre le coronavirus et le gouvernement

C’est la double peine pour les Français : non seulement ils doivent s’en tenir à un confinement de plus en plus stricte chez eux, mais en plus le gouvernement, les opérateurs télécoms et – priées d’obtempérer – les acteurs du Net réduisent la bande passante de leurs plateformes de divertissement.

L’exception culturelle française a encore frappée ! Disney+, la plateforme de SVOD de la Walt Disney Company, a bien été lancée le 24 mars dernier dans sept pays supplémentaires, tous en Europe : Royaume- Uni, Irlande, Allemagne, Espagne, Italie, Autriche et Suisse. La France devait en être, mais le gouvernement français – faisant sienne une suggestion que lui a faite Stéphane Richard, le PDG d’Orange – a exigé de Disney qu’il reporte de quinze jours, au 7 avril, le lancement sur l’Hexagone de son nouveau service. C’est le seul pays européen à avoir imposé ce décalage.

A la demande des industries créatives, les Etats-Unis déclarent la guerre à la contrefaçon et au piratage

La peur va-t-elle changer de camp aux Etats-Unis ? Le président Donald Trump entend donner des gages aux industries créatives en déclarant la guerre à la contrefaçon et au piratage de produits, y compris en ligne. Les plateformes de e-commerce devront coopérer. Mais le risque liberticide existe.

Fabrice Lorvo*, avocat associé, FTPA.

Au commencement de la révolution numérique, les acteurs de l’Internet, par philosophie ou par appât du gain, se sont opposés à toute régulation au nom de la liberté. Cependant, se pose avec persistance l’éternelle question : « Peut-il y avoir de liberté sans contrainte ? ». Dans les faits, le cyberespace est devenu un terreau fertile sur lequel a pu prospérer tant la contrefaçon que la piraterie.

Mark Zucherberg en appelle à une régulation du Net

En fait. Le 17 février, le PDG fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, s’est entretenu à Bruxelles avec trois commissaires européens : Margrethe Vestager (Europe numérique), Vera Jourová (Consommateurs) et Thierry Breton (Marché intérieur). Nick Clegg, lobbyiste de Facebook, a, lui, parlé avec Didier Reynders (Justice).

En clair. A y regarder de plus près, le livre blanc intitulé « Tracer la voie à suivre. Réglementation des contenus en ligne » (1) et coordonnée par Monika Bickert, vice-présidente de Facebook, chargée des politiques de contenus, ouvre implicitement la voie à un possible super-régulateur de l’Internet. Ce document d’une vingtaine de pages remis par le fondateur de Facebook aux trois commissaires européens, qui l’ont reçu à Bruxelles, prépare en creux à une régulation du Net. « La réglementation pourrait (…) veill[er] à ce que les systèmes de modération des contenus Internet soient consultables, transparents et sujets à une supervision pleinement indépendante (2)», est-il préconisé.
Et de suggérer plus loin : « Les régulateurs pourraient obliger les plateformes Internet à publier des données annuelles sur la “prévalence” du contenu qui viole leurs politiques [et à] s’assurer que la prévalence de la violation du contenu demeure au-dessous d’un certain seuil standard. Si la prévalence dépasse ce seuil, le l’entreprise pourrait faire l’objet d’une surveillance accrue, de plans d’amélioration précis, ou – en cas de défaillances systématiques répétées – d’amendes ». Autrement dit, selon Mark Zuckerberg, l’autorégulation des plateformes pour empêcher le partage de contenus illicites (discours haineux, violence, propagande terroriste, etc) ne suffit pas. Les pouvoirs de contrôle et de sanction des régulateurs nationaux, à condition d’être coordonnés, sont nécessaires, évoquant implicitement l’idée d’un super-régulateur du Net. « Toute approche réglementaire nationale visant à lutter contre les contenus nuisibles devrait respecter la dimension globale d’internet et la valeur des communications internationales », prévient le patron de l’empire Facebook-WhatsApp-Instagram, qui parle de « supervision externe » des plateformes numériques dans le but de préserver in fine la liberté d’expression.
Dans une tribune parue au même moment dans le Financial Times, « Zuck » ne déclare pas autre chose : « Nous avons besoin de plus de surveillance et de responsabilisation (3). Les gens ont besoin de sentir que les plateformes technologiques mondiales relèvent de quelqu’un, la réglementation devant tenir les entreprises responsables lorsqu’elles font des erreurs. Les entreprises comme la mienne ont également besoin d’une meilleure surveillance lorsque nous prenons des décisions ». @

Loi audiovisuelle : David Kessler était « sceptique »

En fait. Le 3 février, David Kessler – haut fonctionnaire et, depuis 2014, directeur général d’Orange Content – est décédé à l’âge de 60 ans. Sa dernière intervention publique remonte au 7 novembre 2019, aux 29es Rencontres cinématographiques de Dijon (RCD). Il exprimait des doutes sur la réforme audiovisuelle.

En clair. Aux Rencontres cinématographiques de Dijon (1), le 7 novembre dernier, il était « là par accident » (dixit), car c’est Maxime Saada, PDG de Canal+, qui devait intervenir dans le débat sur la loi audiovisuelle, mais qui n’est pas venu… David Kessler, à la tête d’Orange Content, avait dû le remplacer au pied levé. Sur le projet de loi, il a exprimé surprise, scepticisme et regret : « Que cela Canal+ ou Orange (OCS), nous avons été un peu surpris du fait que le projet de loi sur l’audiovisuel ne dit et ne fait quasiment rien en faveur de la télévision payante, a lancé celui qui fut conseiller culture et communication de François Hollande à l’Elysée (2012-2014). Je suis frappé de voir qu’on accroît les taxes sur la VOD (par la loi de Finances), ce qui défavorise les deux plateformes françaises qui restent, myCanal et Orange VOD. Et il n’y a pas de mesure majeure sur les télévisions payantes, qui sont quand même les concurrentes directes des plateformes : le choix du consommateur se fait entre Canal+ et OCS, d’une part, et Netflix, Amazon Prime Video, Apple TV+ ou demain Disney+, d’autre part ». L’ancien directeur du Conseil supérieur de l’audiovisuel (1996- 1997) s’est aussi dit « plus sceptique sur la mise en œuvre de cette loi sur l’audiovisuel » : « Je pense que les choses seront plus difficiles qu’on ne l’imagine. J’ai souvent le sentiment qu’en France on fait dire à la directive européenne (SMA (2)) un peu plus qu’elle ne dit. Elle fait des avancées majeures – quotas d’exposition des œuvres (sur les plateformes) et possibilité de contribution (des plateformes au financement des œuvres) pour le pays de destination. Mais la directive ne remet pas en cause l’architecture fondamentale sur laquelle l’Europe s’est bâtie, à savoir que le pays d’origine reste celui où les choses se décident. Je ne suis pas sûr que ce soit le régulateur français [futur CSA-Hadopi, ndlr] qui puissent vérifier tout ça [la conformité des plateformes]» . L’ancien directeur du Centre national du cinéma (2001-2004) a aussi regretté que la loi audiovisuelle n’obligera pas Netflix à préfinancer le cinéma français car cette plateforme de SVOD « ne fait pas de cinéma car il ne sort pas de films en salles ». Et le haut fonctionnaire et ancien conseiller culture du Premier ministre Lionel Jospin (1997-2001) a conclu : « Je ne suis donc pas sûr que l’on ait été jusqu’au bout pour réformer notre système ». @