Les « box » sont de plus en plus court-circuitées

En fait. Le 10 septembre, le cabinet d’études NPA Conseil a tenu sa conférence
de rentrée au « Club 13 » de Claude Lelouch à Paris pour y présenter les grandes tendances de l’audiovisuel en France. Parmi elles, les « box » de Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free ne sont plus des passages obligés.

Réseaux sociaux et plateformes vidéo : les influenceurs dans le collimateur de la régulation

Les influenceurs du Net sont suivis par des milliers voire des millions d’abonnés,
de fans ou d’amis qu’ils informent ou conseillent. Ils vantent des marques et des produits dont ils font la publicité. L’aura de ces bloggeurs en fait des médias d’influence en marge de la régulation audiovisuelle. Pour l’instant.

Le Danemark envisage d’encadrer les influenceurs. Qu’ils soient sur YouTube, Facebook, Instagram, Twitter, Dailymotion, Pinterest ou Twitch, lorsque ce n’est pas sur d’autres plateformes vidéo ou réseaux sociaux, ces éditeurs individuels – hommes ou femmes – ont acquis pour certains une très forte audience. Le 8 juillet dernier, la ministre danoise de l’Enfance et de l’Education, Pernille Rosenkrantz-Theil (photo), a publié sur son compte Facebook un commentaire appelant à responsabiliser ces influenceurs.

Les soumette « aux règles de l’éthique »
« Nous devons mieux nous occuper des enfants et des jeunes sur les médias sociaux – et entre nous en général. Par conséquent, nous devrions nous efforcer de faire en sorte que les règles en matière d’éthique de la presse s’appliquent aux titulaires de profils [influenceurs] de grande taille, qui devraient assumer des responsabilités analogues à
celles de l’éditeur. (…) Nous devons mieux nous occuper des enfants et des jeunes, ainsi que de la communauté sur le Web », a expliqué la ministre danoise. Deux jours après, son ministère publiait un communiqué se posant la question : « Les blogueurs ont-ils une responsabilité ? ». Pour Pernille Rosenkrantz-Theil, la réponse est oui : « Les profils sur les médias sociaux qui comptent de nombreux adeptes doivent être soumis aux règles de l’éthique ».
Sa déclaration est intervenue après qu’une blogueuse connue et influente – Fie Laursen (star de la télé-réalité au Danemark) – ait publié un message de suicide sur son compte Instagram (1), lu et commenté par des dizaines de milliers de jeunes (elle comptait 334.000 abonnés en août). La star du petit écran et des réseaux sociaux avait été hospitalisée mais ses écrits funèbres étaient, eux, restés en ligne. La mère de Fie Laursen s’en était même émue sur la chaîne TV 2 Danmark : « On aurait préféré que le post soit supprimé, mais cela n’a pas été faisable ; cela fait mal au coeur car le message pouvait inspirer d’autres jeunes ». Le ministère danois concerné a aussitôt lancé le débat : « La ministre de l’Enfance et de l’Education a-t-elle raison de dire que les blogueurs ayant de nombreux adeptes assument une responsabilité qui correspond aux médias établis ? Où est la limite entre l’éthique des médias et la liberté d’expression personnelle ? », peut-on lire sur la page du débat en question, laissant la parole aux experts, aux hommes politiques et aux leaders d’opinion (2). En France, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) ne s’est pas encore penché sur la responsabilité des influenceurs et bloggeurs à fortes audience. Leur responsabilité éditoriale est quasi inexistante puisqu’ils ne relèvent pour l’instant ni de la presse ni des médias audiovisuels. La directive européenne dite « SMA » de 2010 excluait clairement « les activités dont la vocation première n’est pas économique et qui ne sont pas en concurrence avec la radiodiffusion télévisuelle, comme les sites web privés et les services qui consistent à fournir ou à diffuser du contenu audiovisuel créé par des utilisateurs privés à des fins de partage et d’échange au sein de communautés d’intérêt » (3). Mais la directive européenne du 14 novembre 2018, également dite « SMA », est venue modifier celle de 2010 pour tenir compte de « l’évolution des réalités du marché ». Publiée auJournal Officiel de l’Union européenne (JOUE) le 28 novembre 2018 et transposable par les Etats membres « au plus tard le 19 septembre 2020 », cette nouvelle directive SMA (4) responsabilise les YouTube, Dailymotion et autres plateformes vidéo (Facebook, Snapchat, Musical.ly/TikTok, …).
Ces acteurs du Net sont donc désormais censés – comme les services de télévision traditionnels et de diffusion à la demande (replay et VOD) – protéger les mineurs contre les contenus préjudiciables comme la pornographie, et protéger tous les citoyens européens contre la haine et les propos racistes, ainsi qu’en interdisant tout contenu incitant à la violence et au terrorisme. « Parce qu’ils se disputent les mêmes publics et les mêmes recettes que les services de médias audiovisuels, ces services de médias sociaux doivent être inclus dans le champ d’application de la directive [SMA de 2010]. En outre, ils ont également un impact considérable en ce qu’ils permettent plus facilement aux utilisateurs de façonner et d’influencer l’opinion d’autres utilisateurs » (5).

Lignes directrices au niveau européen
Selon les informations de Edition Multimédi@, les discussions sur les lignes directrices que prépare la Commission européenne sur « l’application pratique du critère relatif à la “fonctionnalité essentielle” figurant dans la définition d’un service de plateformes de partage de vidéos » se poursuivent en septembre en vue d’une publication qui pourrait intervenir dès cet automne. Trois pays – la Finlande, l’Irlande et les Pays-Bas – avaient, eux, émis des réserves quant à la portée de cette nouvelle directive modifiant l’ancienne directive SMA
de 2010, en mettent en garde contre les dérives possibles au détriment de la liberté d’expression et de la créativité (6). Pour autant, si les plateformes numériques qui les hébergent sont tenues responsables des contenus mis en ligne, les influenceurs, youtubeurs et autres bloggeurs ne semblent pas directement responsables de la légalité
de leurs diffusions.

Placements de produits et sponsoring
Les influenceurs sont en outre très sollicités par les marques pour faire de la publicité de leurs produits – via, entres autres, du band content. La nouvelle directive SMA de 2018 ouvre grand les vannes du placement de produit, tout en y mettant des limites. « Le placement de produit devrait donc être autorisé dans tous les services de médias audiovisuels et services de plateformes de partage de vidéos, sauf exceptions. Le placement de produit ne devrait pas être autorisé dans les programmes d’information et d’actualité, les émissions de consommateurs, les programmes religieux et les programmes pour enfants. Il est en particulier avéré que le placement de produit et les publicités incorporées peuvent influer sur le comportement des enfants, ceux-ci n’étant généralement pas capables de reconnaître le contenu commercial » (7). Encore fautil aussi que les adultes soient bien informés de l’existence de tels contenus sponsorisés, sinon cette pratique devient de la publicité déguisée illicite.
Beaucoup d’influenceurs omettent de signaler le placement de produit, alors qu’ils sont les bénéficiaires directs de ce type d’opération promotionnelle contre rémunération et/ou remise de produit. Les « micro-influenceurs » comptent 1.000 abonnés, les « mid » moins de 100.000 abonnés, tandis que les « top-influenceurs » dépassent ce seuil pour atteindre ou dépasser 1 million de fans. La rémunération peut alors aller jusqu’’à 10.000 euros pour une « story » ou une photo de marque. Se transformer en homme-sandwich du Web leur apporte un regain de visibilité, un renforcement de leur image et une consolidation de leur
e-réputation. Les plateformes de mise en relation des influenceurs et des marques se sont développées, comme Kolsquare (société Brand and Celebrities) ou Socialbakers. Or la loi française de 2004 sur la confiance dans l’économie numérique (loi dite LCEN) prévoit bien que dans son article 20 : « Toute publicité, sous quelque forme que ce soit, accessible par un service de communication au public en ligne, doit pouvoir être clairement identifiée comme telle. Elle doit rendre clairement identifiable la personne physique ou morale pour le compte de laquelle elle est réalisée » (8). La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) veille au respect de cette disposition. Elle s’appuie aussi sur l’article L121-1 du code de la consommation, selon lequel « une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu’elle n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte » (9). Dès décembre 2015, la DGCCRF démarre une enquête contre une dizaine de youtubeurs ayant été rémunérés jusqu’à 100.000 euros pour faire la promotion d’une marque de voiture sans mentionner leur relation contractuelle avec le constructeur automobile. Une publicité mensongère est une pratique commerciale déloyale et trompeuse, qui, en tant que délit pénal, peut valoir à son auteur deux ans de prison et 300.000 euros d’amende pour les personnes physiques (10). « Si vous vous estimez mal informé ou trompé par une communication d’influenceur ou lors de vos achats, vous pouvez vous retourner vers le jury de déontologie publicitaire », indique Stéphane Martin, directeur général de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP). Le JDP (11) a été mis en place en 2008. La France n’est pas pionnière dans cette chasse aux publicités déguisées émises par les influenceurs. Aux Etats-Unis, la Federal Trade Commission (FTC) avait épinglé des youtubeurs et instragrameurs ayant fait la promotion du jeu « Shadow of Mordor » de Warner Bros sans en informer les internautes.
Le marketing d’influence (ou influence marketing) est estimé en France à 150 millions d’euros en 2018 et devrait atteindre 300 millions d’euros cette année. Les marques et les entreprises y consacrent un budget pouvant atteindre aujourd’hui 20 % de leurs dépenses publicitaires. Webedia (Fimalac) surfe sur cette nouvelle tendance, avec les trois youtubeurs les plus suivis : Cyprien, Squeezie, Norman, Caroline, Aurélien. Lorsque le groupe de Marc Ladreit de Lacharrière a pris le contrôle au printemps 2019 de la société de production audiovisuelle Elephant, l’Autorité de la concurrence s’est pour la première fois penchée sur « l’industrie que constitue la monétisation de l’”influence” et des “influenceurs” » (12).

Webedia, Studio71, Studio Bagel, Golden Network
De son côté, TF1 est présent avec sa filiale Studio71 (150 chaînes YouTube). Canal+ a aussi sa filiale Studio Bagel (chaînes Studio Bagel et Mister V), tandis que M6 détient le collectif Golden Network (Golden Moustache, Enjoyphoenix et Horia). Les influenceurs ont désormais leur World Bloggers Awards (13), dont la première édition s’est déroulée à Cannes le 24 mai dernier pendant le festival du film. Et depuis juin dernier, a été créée la
« Guilde des vidéastes » pour fédérer les métiers de la création audiovisuelle sur Internet. @

Charles de Laubier

Bienvenue Monsieur Dominique Boutonnat au CNC !

En fait. Le 25 juillet, est paru au Journal Officiel le décret de nomination de Dominique Boutonnat à la présidence du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). L’accueil qui lui a été réservé a été plutôt glacial de la part du 7e Art français qui va pourtant devoir se moderniser sans tarder.

Les réformes de France Télévisions et Radio France passent par la diffusion numérique moins coûteuse

L’audiovisuel public – France Télévisions et Radio France en tête – n’a plus vocation à être diffusé uniquement sur respectivement la TNT et la FM. L’Etat actionnaire pousse les deux groupes à aller plus sur Internet et les mobiles, pour faire des économies et en même temps conquérir la nouvelle génération.

C’est une priorité fixée par le gouvernement à Delphine Ernotte (photo) et à Sibyle Veil, présidentes respectivement de France Télévisions et de Radio France : que les deux groupes emblématiques de l’audiovisuel public, situés de part et d’autre
de la Seine à Paris, aillent trouver sur Internet les indispensables économies budgétaires, tout en allant à la conquête des jeunes téléspectateurs et auditeurs issus de la génération « Digital Native » ou « Millennials ».

« Ambition numérique de l’audiovisuel public »
Chez France Télévisions, les chaînes France 4 et France Ô doivent quitter à terme la diffusion hertzienne de la TNT pour se retrouver en ligne sur Internet. France 4, la chaîne dédiée aux jeunes publics, rejoindra les marques Ludo et les Zouzous au sein d’une plateforme numérique baptisée Okoo et destinée à la jeunesse. « Plateforme de référence gratuite pour les 3-12 ans », elle sera lancée en décembre prochain avec un catalogue riche de 5.000 titres. Okoo s’inspirera de la plateforme numérique éducative Bitesize de la BBC. De son côté, France Ô intègrera début 2020 – avec le réseau Premières d’Outre-Mer – une autre plateforme en ligne dédiée à l’outremer (2). Cette délinéarisation des programmes « ultramarins » s’accompagne d’un « pacte de visibilité » sur les antennes hertziennes de France Télévisions. Par ailleurs, France Télévisions renforcera Slash, son site web pour les 18-30 ans, et, en prévision des JO de 2024, lancera dès 2020 une chaîne olympique numérique dédiée à la préparation de l’événement. Concernant la production de « contenus exclusifs » pour le site web France.tv, elle se concrétisera par exemple à la rentrée dans le cadre de la nouvelle émission « France TV Nature » (défis pour la planète). Delphine Ernotte s’est en outre engagée à mettre en oeuvre un « pacte citoyen (engagement, innovation et plaisir) pour rendre le service public meilleur qu’il ne l’est aujourd’hui » d’ici trois ans. Par ailleurs, le groupe France Télévisions s’est engagé avec les deux poids lourds du privé TF1 et M6 dans Salto, le projet commun de plateforme TV et de SVOD, actuellement étudié par l’Autorité de la concurrence.
• Chez Radio France, s’il n’est plus question pour le moment de basculement de radios sur le numérique (en webradios) comme le préconisait en 2015 un rapport de la Cour des comptes pour Mouv et même Fip, la stratégie digitale n’en est pas moins réaffirmée pour rattraper un certain retard numérique (3). En montrant le 7 juin à ses 4 millions de followers qu’il avait fait tatouer sur son poignet le logo en couleur de sa radio préférée – la française Fip –, le fondateur de Twitter, Jack Dorsey, a rappelé implicitement que la radio n’a plus de frontières à l’ère du podcast et de l’écoute en streaming – l’ère du seul hertzien est révolu. Depuis le 1er juillet dernier, Dana Hastier (ex-directrice de France 3) a remplacé Guy Lagache à la direction des antennes et de la stratégie éditoriale de Radio France. A ce titre, elle a la responsabilité de Franceinfo, France Inter, France Culture, France Bleu, Fip et Mouv, à la fois de leur stratégie éditoriale et de leur développement numérique, ainsi que de la plateforme Radiofrance.fr. L’ambition de la Maison-Ronde est de devenir la plateforme de référence de l’audio en France dans les trois ans, en misant notamment sur les podcasts, et de proposer à partir de 2020 une offre de « radio personnalisée » – projet qu’avait initié Mathieu Gallet (4). Le Premier ministre Edouard Philippe, lui, a précisé le 19 juin que le projet de loi sur la réforme de l’audiovisuel public sera présenté en conseil des ministres « d’ici la fin du mois d’octobre » par le ministre de la Culture Franck Riester. Le texte devrait être débattu « au plus tard au mois de janvier 2020 à l’Assemblée nationale », avec pour objectif une entrée en vigueur du texte législatif « durant l’année 2020 ». C’est en clôture du colloque « Médias, liberté et création », organisé pour les 30 ans du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), qu’Edouard Philippe a fixé ce nouveau calendrier de la réforme qui a été à maintes reprises repoussée.

La grande réforme audiovisuelle tarde
« La loi de 1986 est une grande loi ; elle a façonné l’audiovisuel pendant 30 ans. La nouvelle loi audiovisuelle doit l’être tout autant, pour répondre aux défis des transformations profondes que nous connaissons aujourd’hui. Les travaux sont en cours », a assuré le Premier ministre. Il s’agit de « repenser la réglementation de l’audiovisuel français » face aux entreprises du numérique que sont les GAFAN, tout en « réaffirm[ant] le rôle de l’audiovisuel public ». France Télévisions et Radio France sont en première ligne de cette réforme majeure voulue par le président de la République, Emmanuel Macron, qui en avait fait une promesse de campagne. « Je sais que les groupes audiovisuels publics ont engagé de profondes transformations, a déclaré Edouard Philippe. Des transformations qui bousculent des habitudes et qui se font dans un cadre financier contraint. (…) Nous avons réaffirmé les priorités de l’audiovisuel public, l’information, la culture, la proximité et la jeunesse. Nous avons affirmé l’ambition numérique de l’audiovisuel public ».

Audiovisuel public : « ambition numérique »
L’Etat, dont les participations dans les six sociétés de l’audiovisuel public (France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, INA, Arte et TV5 Monde) pourraient être regroupées dans une holding de tête par le projet de loi audiovisuelle (5), compte sur le digital pour atteindre au total quelque 500 millions d’euros d’économies à faire d’ici à 2022. « A l’heure des bouleversements numériques, il faut privilégier l’investissement dans les contenus plutôt que dans un mode de diffusion », avait prévenu Françoise Nyssen, alors encore au ministère de la Culture le 4 juin 2018, tout en ajoutant que « [son] ambition [était] de créer un média global à vocation universelle ». En creux : la TNT hertzienne coûte chère, Internet beaucoup moins (6). La réforme de l’audiovisuel public prévoit aussi un rapprochement de France 3 et de France Bleu, avec une hausse des investissements dans le numérique pour lancer des offres communes entre la troisième chaîne à vocation régionale et le réseau des radios locales publiques (trois fois plus de programmes régionaux). Mais la numérisation à marche forcée de l’audiovisuel public, en prévision de la réforme législative, ne se fait pas sans tensions au sein des deux groupes. « Que ce soit à Radio France ou à France Télévisions, les raisons de la colère sont partagées face à une tutelle (et des directions aux ordres) obnubilées par les économies tous azimuts et leurs conséquences mortifères sur nos entreprises », avait fustigé le syndicat CGT dans son appel à la grève du 20 juin dernier avec FO et la CFDT. L’intersyndicale dénonce « la paupérisation » de l’audiovisuel public, qui passe notamment par la suppression du journal télévisé « Soir 3 » et l’arrêt des matinales filmées avec la radio France Bleu, sur fonds de plan d’économies.
• A Radio France, un nouveau plan d’économies de 60 millions d’euros d’ici 2022 est assorti d’environ 300 suppressions de postes (sur un total d’environ 4.590 salariés à fin 2018). Le plan « Radio France 2022 », que Sibyle Veil a présenté début juin, prévoit d’accroître les investissements dans le numérique, dont la radio numérique terrestre (RNT) en DAB+ pour Fip et Mouv (7), alors que la contribution de l’Etat va baisser de 20 millions d’euros quatre ans. « Si on ne change rien, a prévenu la présidente de Radio France, on sera en déficit de 40 millions d’euros en 2022 ». Cela a déclenché mi-juin une première grève, très suivie par les salariés de la Maison-Ronde. « Radio France a déjà fait les frais de plans d’économies successifs, qui ont conduit à des salaires bloqués depuis sept ans, de nombreux départs non remplacés et la politique de redéploiements au profit d’activités nouvelles, qui ont désorganisé bon nombre de secteurs », ont dénoncé les syndicats. Le prédécesseur de Sibyle Veil, Mathieu Gallet, avait été confronté à une grève historique en 2015, après qu’il ait annoncé restrictions budgétaires et réductions d’effectifs. Le plan « Radio France 2022 » de sa successeure prévoit la suppression de 270 postes dans tous les métiers si les salariés acceptent de faire une croix sur des semaines de congés (réorganisation des rythmes de travail), ou 390 postes s’il n’y a pas d’accord avec les syndicats. Radio France espère aboutir à un « nouveau pacte social » en septembre et à cette réforme d’ici à l’automne, afin de pouvoir négocier avec l’Etat son Contrat d’objectifs et de moyens (COM) pour la période 2019-2023. Mais le comité social et économique du groupe radiophonique, réuni le 18 juin, a opposé à la direction un rapport d’un cabinet indépendant (Tandem) qui considère les économies « surdimensionnées » et les charges de personnel prévues au cours des prochaines années « surévaluées » de 8,7 millions d’euros. Quelque 118 postes seraient ainsi supprimés par erreur ! Mais Marie Message, qui a remplacé Sibyle Veil comme directrice des opérations et des finances de Radio France, conteste la méthode de cette étude et a proposé de faire une contre-étude.
• A France Télévisions, le climat social n’en est pas moins tendu. Le groupe de télévisions public veut supprimer jusqu’à 900 postes d’ici à 2022 (sur environ 9.600 salariés à fin 2018), et va devoir supprimer deux de ses chaînes sur décision du gouvernement (France Ô et France 4). Les 6 et 13 juin ont été marqués par des grèves à l’appel de plusieurs syndicats, pour défendre l’emploi et le journal télévisé « Soir 3 », lequel sera supprimé au profit d’« une tranche d’information renforcée » en fin de soirée sur la chaîne hertzienne et numérique Franceinfo. Le 20 juin, plusieurs chaînes de France Télévisions ont été perturbées par une grève lancée à l’appel de l’intersyndicale pour dénoncer la « paupérisation » du service public télévisuel. De leur côté, le 11 juin et à l’occasion du Festival du film d’animation à Annecy, la SACD (8) et le SPFA (9) ont appelé le président Emmanuel Macron à reporter à 2022 la fermeture de la chaîne publique France 4, actuellement prévue pour 2020. Et ce, le temps de préparer une plateforme jeunesse capable de rivaliser avec Gulli (M6) et Disney.

Franceinfo « à la vitesse supérieure » ?
Quant à Franceinfo, plateforme multidiffusée (TNT, Internet, radio, câble, satellite, …) lancée il y a près de trois ans par France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’INA, elle ne dépasse pas encore les 0,5 % de parts d’audience (à juin 2019 selon Médiamétrie) et reste distancée par BFM TV (2,1 %), LCI (0,8 %) et CNews (0,7 %). Le basculement de « Soir 3 » sur Franceinfo pourrait être l’ultime tentative pour « passer à la vitesse supérieure » la dernière-née des chaînes d’information en continu. @

Charles de Laubier

Un « Euroflix » avec TF1, ProSiebenSat et… Canal+ ?

En fait. Le 3 juillet, le fils de Silvio Berlusconi – Pier Silvio, administrateur délégué du groupe de médias italien Mediaset – a mentionné TF1 comme partenaire potentiel de MediaForEurope (MFE), sa nouvelle holding néerlandaise, pour créer un « Netflix » européen. Vivendi étant actionnaire de Mediaset, avec Canal+ aussi ?