Canal+ fête ses 30 ans sur fond d’attrition d’abonnés

En fait. Le 4 novembre, Canal+ a fêté ses 30 ans et compte aujourd’hui 9,4 millions d’abonnés en France, dont 6 millions d’abonnés individuels et 520.000 abonnés à CanalPlay, les 2,88 millions restants étant des abonnements collectifs. Mais Netflix et BeIn vont lui faire perdre encore plus d’abonnés.

En clair. Canal+ à 39,90 euros par mois pourrait perdre jusqu’à 400.000 abonnés dès l’an prochain, en raison de la concurrence des 7,99 euros à 11,99 euros de Netflix, d’une part, et des 12 euros pour BeIN Sports, d’autre part. C’est l’hypothèse la plus pessimiste qu’avance Arthur Kanengieser, chercheur à l’école des Mines ParisTech, dans son étude intitulée « Après Netflix » publiée en septembre (1).
Selon lui, c’est CanalSat – le bouquet de télévision par satellite et ADSL de Canal+ – qui est le premier impacté. « Le nombre d’abonnements à Canal+ est resté stable,
au prix d’un coût de grille en hausse (+ 9,2 % entre 2008 et 2012), alors que CanalSat perd 300.000 abonnements entre 2012 et 2013. Les causes sont multiples (arrivée des chaînes TNT, concurrence des bouquets proposés par les FAI, …), mais l’une d’elles est révélatrice d’un nouveau jeu concurrentiel : la concurrence de BeIN Sports [du groupe de médias qatari Al-Jazeera] sur l’offre football de CanalSat, Sport+ », explique-t-il. Et depuis le lancement de Netflix le 15 septembre, CanalSat a un sérieux rival pour son offre Ciné+. Globalement la filiale de télévision du groupe Vivendi est victime d’attrition, c’est-à-dire de la perte d’abonnés : selon nos constatations, le taux de résiliation (churn) de la chaîne cryptée en France augmente sérieusement à environ
15 % cette année, contre tout juste 11 % en 2010. Pour contreattaquer, Canal+ veut lancer une offre directement sur Internet, en OTT (2), et son président Bertrand Meheut se verrait bien fédérer des partenaires de la SVOD française – dont Orange – autour
de CanalPlay pour contrer Netflix.

4 ans d’Hadopi : moins de 150 pirates devant la justice

En fait. Le 14 octobre, Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication, était auditionnée par la commission des Affaires culturelles
et de l’Education de l’Assemblée nationale. La veille au soir, le 13 octobre,
elle s’est entretenue avec la présidente de l’Hadopi, Marie-Françoise Marais.

En clair. Octobre 2010- octobre 2014 : quatre ans de lutte contre piratage aboutissent finalement à moins de 150 dossiers de « pirates récidivistes sur Internet » transmis à
la justice – le procureur de la République – par la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi). Pourtant, sur les signalements des ayants droits de la musique et du cinéma, la réponse graduée fonctionne à plein régime et, selon les calculs de Edition Multimédi@, l’Hadopi devrait franchir à la fin de cette année les 4 millions d’e-mails de premier avertissement (1) cumulés envoyés depuis le démarrage de la réponse graduée en octobre 2010. Tandis que le nombre
de lettres recommandées – expédiées en cas de récidive dans les six mois suivant l’e-mail – dépassera, lui, les 400.000 cumulées depuis quatre ans. Lors de son audition
à l’Assemblée nationale, Fleur Pellerin a laissé entendre que le maintien du budget
de l’Hadopi à 6 millions d’euros dans le projet de loi de Finances 2015 (au lieu de
8,5 millions) pourrait être revu à la hausse. D’autant que la ministre a déclaré que
« l’établissement et la publication d’une liste noire [de sites web pirates, ndlr] me paraissent rentrer parfaitement dans le cadre des compétences de l’Hadopi ».
Tous les intermédiaires du Net (2) seront alors obligés, selon elle, de prendre leurs responsabilités… @

La copie privée n’est pas du piratage mais un droit

En fait. Le 17 septembre, l’Hadopi a publié un avis après avoir été saisie deux fois – en mai 2013 et en février 2014 – contre les restrictions techniques imposées par les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) ou par satellite empêchant les plaignants d’exercer leur droit de copie privée de programmes télé.

En clair. L’Hadopi « invite donc les opérateurs de télévision par ADSL ou satellite
à proposer aux téléspectateurs, dans un délai raisonnable, une faculté de copie privée des programmes télévisés qui leur permette de réaliser des copies durablement conservables et disposant d’une interopérabilité suffisante pour l’usage privé du
copiste ». Cet avis (1) est un sérieux avertissement lancé aux fournisseurs de box que sont Orange, SFR, Bouygues Telecom, Free ou encore Numericable. D’autant que les
« box à disque dur ou à mémoire de stockage multimédia » sont taxées jusqu’à plus de 20 euros en fonction de leurs capacités de stockage.

Réformer le cinéma pour lutter contre le piratage

En fait. Le 6 août, le producteur et distributeur de films Jean Labadie a interpellé l’ex-ministre de la Culture et de la Communication dans une tribune à Libération : « Madame Filippetti, la piraterie tue le cinéma ». Cette dernière lui a répondu le 8 août. L’Hadopi, l’ARP et l’APC ont réagi.

En clair. La meilleure façon pour le cinéma français de lutter contre le piratage
est d’abord de se réformer lui-même. C’est en creux ce qu’Aurélie Filippetti, alors ministre de la Culture et de la Communication, a répondu le 8 août à Jean Labadie, producteur et distributeur de films, à la suite de sa tribune dans Libération. « L’absence d’évolution du dispositif [de la chronologie des médias] depuis l’accord de 2009 n’est plus tenable », lui a-t-elle écrit. Le temps presse : après les rapports Lescure et Bonnell, le cinéma français est attendu au tournant. Le CNC (1), qui coordonne depuis le début de l’année les négociations entre les professionnels du Septième Art français, entame en septembre la dernière ligne droite de la concertation. Il s’agit pour la ministre de
« parvenir à un accord équilibré, qui tienne compte de la volonté du public à disposer plus rapidement des œuvres ». Aurélie Filippetti a incité les professionnels à « aller plus loin » que les propositions du CNC présentées en juillet « d’avancer les fenêtres TV de 2 mois, d’allonger la période d’exposition des oeuvres en VOD et d’avancer
de 12 mois la fenêtre SVOD », la VOD restant à quatre mois sauf dérogations renforcées… En outre, le CNC va lancer à la rentrée un appel d’offres pour « un dispositif de référencement des offres légales en ligne existantes en France, pour mieux orienter l’internaute dans son envie d’accéder aux œuvres ». N’est-ce pas
ce que fait déjà l’Hadopi avec Offrelegale.fr ? L’Hadopi, justement, critiquée par Jean Labadie pour son manque de dissuasion depuis la suppression de la coupure de l’accès à Internet comme sanction ultime, a abondé dans le sens de l’ex-ministre,
dans une interview de son secrétaire général Eric Walter à Libération le 7 août :
« Le piratage est avant tout une conséquence de la carence de l’offre légale, jamais
la cause ». La visibilité des films, notamment sur les box Internet des FAI, est « plus central que le piratage » (2). Début juillet, l’Hadopi a d’ailleurs contesté l’étude de l’Alpa (3) concluant à une augmentation de la piraterie audiovisuel. « Tant que l’offre n’est pas adaptée, tous les moyens déployés pour lutter contre le piratage ne changeront les choses qu’à la marge », a insisté Eric Walter. Les organisations du cinéma ARP – qui dénonce le « flou » des positions de la ministre sur le téléchargement illégal – et APC ont, elles, donné raison à Jean Labadie. Dialogue de sourds ? @

La lutte contre le piratage sur Internet a dix ans

En fait. Le 15 juillet 2004, il y a 10 ans, se réunissaient à Bercy fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et industries culturelles en vue de signer la charte de lutte contre le piratage en ligne de la musique, de films ou de jeux vidéo. La mention « Le piratage nuit à la création artistique » a aussi 10 ans.

SarkozyEn clair. La mention « Le piratage nuit à la création artistique », que les FAI ont l’obligation d’indiquer dans leurs offres haut débit et a fortiori très haut débit, a maintenant 10 ans. Elle est imposée aux opérateurs Internet par la loi pour la confiance dans l’économie numérique (1), promulguée au J.O. le 22 juin 2004.
« Lorsque les [opérateurs télécoms et FAI] invoquent, à des fins publicitaires, la possibilité qu’elles offrent de télécharger des fichiers dont elles ne sont pas les fournisseurs, elles font figurer dans cette publicité une mention facilement identifiable et lisible rappelant que le piratage nuit à la création artistique », stipule en effet l’article 7 de cette loi.