Des opérateurs devront choisir entre IPTV et OTT

En fait. Le 15 octobre, l’Institut de l’audiovisuel et des télécoms en Europe (Idate) a fait un point sur ses prévisions à 2025 – à un mois du DigiWorld Summit 2013. Et en attendant ses études Telecom 2025 fin octobre, Internet 2025 d’ici janvier, Télévision 2025 étant parue en septembre.

En clair. « A court ou moyen terme, c’est la stratégie d’opérateur intégré qui va être jouée – au sens intégration verticale entre infrastructure, contenu et OTT (1). Cela ne veut pas dire que les opérateurs télécoms vont se désintéresser de l’accès, pour lequel leur priorité va être de retrouver de la valeur », nous a expliqué Yves Gassot, DG de l’Idate.
Si les plus grands opérateurs télécoms, tel Orange en France, peuvent envisager une telle intégration verticale (2), il n’en irait pas de même pour les autres. Il leur faudra notamment choisir entre IPTV et OTT, comme nous l’a expliqué Gilles Fontaine, auteur
du rapport Future TV 2025 : « En France, les opérateurs de second niveau – c’est-à-dire ceux qui ne sont pas leaders sur leur marché (Bouygues Telecom, SFR et Free…) – sortiront de la distribution des contenus, donc de l’IPTV (3). La VOD est un foyer de pertes pour ces opérateurs. Et les services de catch up TV ne sont pas financés par la publicité et ne vivent que par les reversements des opérateurs télécoms aux chaînes de télévision. Le maintien d’un réseau IPTV est très lourd et le marché n’est plus dans une phase d’acquisition d’abonnés ». Lancé il y a plus de dix ans en France avec les offres triple play proposées depuis autour de 30 euros par mois seulement, l’IPTV commence
à être remis en question par certains. C’est le cas de SFR qui vient de se délester de la VOD en externalisant ce service auprès de VOD Factory et qui s’interroge sur son bouquet TV. L’IPTV coûte cher, d’autant que les FAI perçoivent 30 % environ du prix
de vente de ce qu’ils distribuent. L’absence de marge sur l’IPTV s’explique aussi par le coût élevé de R&D que représente une box innovante. Quelle alternative s’offre à ces opérateurs télécoms ? « Ces acteurs-là valoriseront la qualité de leur accès en ouvrant les vannes de l’accès aux services OTT ; ils signeront des accords à la manière du deal entre Netflix et Virgin Media en Grande-Bretagne. Ces opérateurs valoriseront leur pas-de-porte auprès des consommateurs comme gage de super qualité d’accès à des contenus et obtiendront [des fournisseurs de contenus] une contribution à la bande passante. Ce schéma va arriver assez vite », poursuit Gilles Fontaine.
Cela suppose à terme, pour certains opérateurs télécoms, d’abandonner une coûteuse stratégie IPTV au profit d’une ouverture vers la distribution d’OTT. @

Intel cherche d’urgence partenaires pour sa web TV

En fait. Le 27 septembre, Bloomberg a indiqué – sans citer ses sources – qu’Intel
a changé de stratégie pour son futur service de web TV, pour lequel il cherche maintenant des partenaires ayant de fortes audiences Internet ou des droits de films et de télévision. Objectif : lancer sa set-top-box fin 2013.

En clair. Le numéro un mondial des microprocesseurs Intel veut à tout prix monter dans la chaîne de valeur en se diversifiant dans une activité d’OTT et non des moindres : la télévision et la vidéo à la demande ! Et il y urgence à se diversifier car le marché mondial des ordinateurs PC, où il est en position dominante, commence sérieusement à décliner. Après avoir essuyé les plâtres il y a trois ans maintenant avec la Google TV, voici qu’Intel espère lancer d’ici la fin de l’année son service de Web TV. Mais y réussira-t-il ? Pas si sûr, si l’on en croit des proches du dossier. Cela fait un an et demi que la firme de Santa Clara (Californie) travaille à la fabrication de sa set-top-box de web TV. En février dernier, Erik Huggers (1), vice président et directeur général d’Intel Media, avait confirmé la rumeur selon laquelle le groupe allait lancer un service de TV en ligne dès cette année.
Le boîtier Intel TV serait doté d’une caméra destinée à orienter le « télé-naute » vers les contenus et à personnaliser les spots publicitaires.
L’utilisateur pourrait surtout regarder en direct un programme, tout en le stockant dans
le cloud pour pouvoir le mettre sur pause et le reprendre au même endroit (time-shifting). Intel Media, qui a ouvert en août dernier deux bureaux, l’un à New York et l’autre à Los Angeles, comptait lancer seul sa settop- box pour se positionner face à Amazon, Google, Apple, Sony ou Netflix. Mais changement de fusil d’épaule : la division média créée il y
a plus d’un an sur entend désormais s’appuyer sur des partenaires pour déployer un véritable écosystème audiovisuel et pour garantir le succès commercial de son ambitieux projet.

Hervé Rony, Scam : « La dynamique de l’Acte 2 de l’exception culturelle s’effiloche »

Le directeur général de la Société civile des auteurs multimédia (Scam) fait part
de ses regrets sur le projet de loi de Finances 2014 (redevance, Cosip, …) et se
dit favorable au conventionnement de services Internet avec le CSA. Pour le livre numérique, il craint le piratage et l’autoédition comme pour la musique (il fut DG
du Snep de 1994 à 2009).

Propos recueillis par Charles de Laubier

HR EM@Edition Multimédi@ : Finalement, la redevance audiovisuelle
ne sera pas dissociée la propriété du poste de télévision, ni étendue aux autres écrans numériques, contrairement à ce
que voulaient Aurélie Filippetti et Rémy Pflimlin (France Télévisions) : le regrettezvous ? Faut-il l’augmenter ?

Hervé Rony : La Scam regrette vivement que le gouvernement ait figé toute réforme de fond de la contribution à l’audiovisuel public (CAP). Pourtant, l’an dernier, lorsque le Parlement a fort justement voté une première hausse, la ministre avait promis ce débat. Aujourd’hui, au nom de la pause fiscale : plus rien !
Du coup, même si le Parlement vote l’indexation de la redevance sur l’inflation, la CAP restera sensiblement moins élevée (133 €) que la redevance britannique (180 €) ou allemande (217,8 € par an). Il est grand temps que les pouvoirs publics proposent un élargissement de l’assiette (par exemple, comme en Allemagne, par foyer fiscal, résidences secondaires comprises).
Sur ce sujet comme sur d’autres, nous avons écrit au président de la République et au Premier ministre. C’est un sujet majeur. Nous attendons une réponse. Seule la CAP apporte un financement pérenne et de nature à assurer l’indépendance du service public de l’audiovisuel.
Car ne l’oublions pas, c’est non seulement France Télévisions qui est concernée mais aussi Radio France, Arte, RFI, France24, TV5 Monde, sans oublier l’INA qui remplit d’importantes missions et qui verse des droits aux auteurs sur l’exploitation des archives audiovisuelles.

Avec les affaires « Stéphane Richard » et « Dailymotion », l’Etat a repris le contrôle de France Télécom

Le 16 juin, François Hollande annonce le maintien de Stéphane Richard. Le 17 juin, le conseil d’administration a entériné sa décision. Le 1er juillet, France Télécom deviendra Orange. L’Etat, qui détient seulement 27 % du capital, en reprend le contrôle depuis l’affaire Dailymotion.

SRC’est un fait. L’Etat français reprend le contrôle sur France Télécom, dont il ne détient pourtant que 26,9 % du capital.
Et encore, il n’en possède directement que 13,4 %. Les 13,5 % autres actions sont détenues indirectement via le Fonds stratégique d’investissement (FSI).
Les droits de vote, eux, sont à peu près du même niveau (respectivement 13,5 % et 13,6 %). Bien que cela fasse dix ans
à la fin de l’année (depuis une loi du 31 décembre 2003), que l’ancien monopole public de télécommunications est devenu
une entreprise privée (1), l’Etat a bien repris la main en tant que premier actionnaire,
n’en déplaise à Stéphane Richard (photo) qui s’était insurgé contre l’intervention du gouvernement en avril dernier dans la négociation, avortée depuis, entre son groupe
et Yahoo.

Les acteurs du Net affichent une croissance insolente

En fait. Le 28 mai, l’Idate a présenté la 13e édition de son DigiWorld Yearbook sur
le marché mondial du numérique : sérieux ralentissement de la croissance à 2,7 % en 2012 – contre 3,9 % en 2011 et 4,7 % en 2010 – pour atteindre 3.169 milliards d’euros. Seuls les services OTT affichent une croissance à deux chiffres.

En clair. Malgré les prolongations de la crise de 2008 provoquant la stagnation des pays développés, le retour au ralentissement du marché mondial du numérique l’an dernier et
la baisse des revenus des opérateurs télécoms empêtrés dans une guerre tarifaire destructrice de marge (mais bien profitable aux consommateurs), un segment de marché du numérique – celui des services dits OTT (1) – affiche encore une croissance insolente, de l’ordre de… 20 % par an ! C’est le paradoxe du rapport 2013 de l’Idate (2) : pendant que les opérateurs télécoms mangent leur pain noir, les acteurs de l’Internet – Google, Apple, Facebook, Amazon ou encore Microsoft – tirent leur épingle du jeu. Ces
« nouveaux services Internet » ont progressé de 18,7 % en 2012 pour atteindre
158 milliards d’euros de revenus au niveau mondial. La croissance de ces services
OTT (publicité en ligne et services payants sur Internet) était même de 22 % l’année précédente et devrait à nouveau être de 22 % en 2013, pour tutoyer la barre des
200 milliards d’euros (à 193 milliards précisément). « Les acteurs du Net fournissent
la raison d’être des opérateurs télécoms. Mais ces derniers doivent faire évoluer leur modèle économique et prendre des parts de marché dans les services OTT », estime Yves Gassot, directeur général de l’Idate. Evoluer ou mourir ! C’est particulièrement urgent en Europe, où les opérateurs télécoms accusent le coup sur un marché en stagnation (+0,1%) à 869 milliards d’euros en 2012. « Il apparaît désormais fort peu probable que l’on revienne à terme vers les niveaux de croissance du milieu des années 2000, encore moins vers ceux à deux chiffres de la fin des années 90… sauf pour les nouveaux services de l’Internet (OTT) », prévient Yves Gassot. L’Idate en profite au passage pour tordre le cou à « une idée fausse », selon laquelle les opérateurs télécoms seraient victimes des OTT. « Les opérateurs télécoms aux Etats-Unis sont tout autant exposés aux acteurs de l’Internet que leurs homologues en Europe. Or, les premiers enregistrent une croissance [+ 1,5 %] et les seconds un recul [- 1 %] », souligne-t-il. La raison est ailleurs : en l’occurrence, selon l’Idate, dans la fragmentation des opérateurs télécoms sur le Vieux Continent et dans la guerre des prix. @