L’âge d’or du d-Cinema

Ce soir, c’est ciné ! Et pas sur notre home cinéma mural.
Ce n’est pas non plus la bonne vielle sortie familiale pour
voir et partager le dernier blockbuster dans une salle à grand spectacle. Non, ce soir, Festival de Cannes oblige, nous allons assister à la diffusion de deux films de la sélection officielle, projetés simultanément dans une centaine de salles réparties sur la planète. Nous pourrons même participer au choix du film auquel sera attribuée la Palme du public, en votant directement sur nos smartphones. Est-ce tout ? Peu de chose aurait donc fondamentalement changé depuis qu’un Platon imagina une séance pour des spectateurs hypnotisés par des images projetées tout au fond d’une caverne symbolique. Si les spectateurs se retrouvent toujours dans une même salle, comme pour la première projection payante au Grand Café à Paris en 1896, les progrès n’ont cessé d’accompagner ce « Septième Art » devenu également une industrie culturelle puissante.

« L’ère digitale a changé la classique salle de cinéma en un véritable lieu de spectacle numérique, largement ouverte sur d’autres domaines (concerts, matchs, théâtres, …) »

L’Europe numérique et les industries culturelles

En fait. Le 19 mai, la Commission européenne a publié son « plan d’action » quinquennal pour une « stratégie numérique ». Les deux premières mesures qui arrivent en tête consistent à créer un « marché unique numérique » et à élaborer une « directive-cadre sur la gestion collective des droits [d’auteur] ».

En clair. Après deux consultations publiques sur les « contenus créatifs en ligne »,
l’une en 2006 et l’autre en 2010 (EM@ 1 p. 4), la Commission européenne vient d’arrêter sa « stratégie numérique » d’ici à 2015, voire 2020. Les industries culturelles
– musique, cinéma et autres œuvres (1) – se retrouvent en première ligne de ce que la commissaire européenne Neelie Kroes en charge de la Stratégie numérique appelle
« la révolution numérique ». Ainsi le premier des « sept obstacles les plus importants » identifiés par l’exécutif européen concerne le « cloisonnement des marchés
numériques » – provoqué par une « mosaïque de marchés en ligne nationaux ».
Le second a trait au « manque d’interopérabilité » à cause de « défaillances en matière de normalisation » et du manque de « plateformes ouvertes ». L’industrie de la musique est la première à être épinglée par Bruxelles : « Autant les consommateurs peuvent acheter des CD dans n’importe quelle boutique, autant il leur est souvent impossible d’acheter de la musique sur des plateformes en ligne à travers l’Union européenne parce que les droits sont accordés sur une base nationale ». Résultat : « Il y a quatre fois plus de téléchargements de musique aux Etats-Unis qu’en Europe qui pâtit du manque d’offres légales et du cloisonnement des marchés ». La filière musicale fait figure de « bête noire » depuis cinq ans aux yeux de Neelie Kroes, qui était auparavant commissaire en charge de la Concurrence (2).
Le secteur audiovisuel est lui aussi dans le collimateur et fera l’objet, cette année, d’un
« livre vert » sur notamment « les problèmes posés par la distribution en ligne d’œuvres audiovisuelles ». Concernant le cinéma, une « recommandation sur la promotion de la numérisation du cinéma européen » (et « autres contenus créatifs ») sera publiée
« d’ici à 2011 ». En conséquence, la première « action clé » de la Stratégie numérique
de l’Europe est de « simplifier l’acquittement et la gestion des droits d’auteur et l’octroi de licences transnationales », à commencer par « renforcer le régime et la transparence de la gestion des droits (en ligne) et l’octroi de licences paneuropéennes en proposant une directivecadre sur la gestion collective des droits d’ici à 2010 ». Et d’ici à 2012, Neelie Kroes proposera des mesures pour « la libération du potentiel des industries de la culture et de la création » qui font l’objet d’une consultation jusqu’au 30 juillet 2010. @

L’industrie musicale sauvée par… le numérique

En fait. Le 4 mai, le Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) a présenté les chiffres du marché de la musique enregistrée qui atteint au premier trimestre les 128,6 millions d’euros, dont 82 % réalisés par les ventes physiques et 18 % par les ventes de musique en ligne (téléchargement en tête).

En clair. « Le marché français du numérique pour la musique se structure et devient significatif avec près de 20 % du revenu total sur le premier trimestriel de l’année. Cela commence à compter et nous commençons à retrouver nos investissements dans le numérique », s’est félicité David El Sayegh, directeur général du Snep, qui réprésente notamment les majors du disque (Universal Music, Sony Music, EMI ou encore Warner Music). D’autant que la croissance trimestrielle de la musique en ligne – 28,7 % à 23,1 millions d’euros – tire plus que jamais le marché de la musique enregistrée, même si les ventes physiques (albums et vidéoclips en tête) se sont ressaisies en début d’année de 4,3 % à 105 millions d’euros, après cinq années du chute continue. Total : 128,6 millions d’euros de janvier à mars, soit une hausse de 8 % sur un an (1). Mais le numérique est « encore loin de compenser » les pertes sur le physique, qui caracollait alors à 305 millions d’euros au premier trimestre 2002. Aujourd’hui, le téléchargement continue de mener la danse avec un bond sur un an supérieur à 50 % sur les trois premiers mois de l’année, avec un chiffre d’affaires de 12,5 millions d’euros. Pour la première fois, le téléchargement devient majoritaire en termes de parts de marché trimestrielles (54 % contre 46 % un an auparavant). C’est cependant le streaming (écoute en ligne sans téléchargement préalable) qui progresse le plus : +100 %, à 2,6 millions d’euros, avec une part de marché trimestrielle qui croît de quatre points à 11 %. Quant aux revenus trimestriels des abonnements musicaux en ligne, ils progressent de près de 27 % sur un an, avec un chiffre d’affaires de 3,8 millions d’euros et une part de marché stable à 17 %. Seul continue de chuter le marché des sonneries sur téléphone mobile. Comme lors du dernier Midem de janvier (lire EM@6 p 3), le Snep veut voir dans la maturation du marché de la musique en ligne les premiers effets dissuasifs de la loi Hadopi – même si la « riposte graduée » ne sera pas mise en oeuvre avant juin prochain. David El Sayegh parle d’« effet psychologique » sur les internautes qui sont allés plus souvent sur les plateformes légales, tout en reconnaissant que « la loi Hadopi ne va pas éradiquer la piraterie sur Internet, car certains trouveront toujours des outils pour la contourner ». @

Hyper Social

Cela fait peu de temps que mon notebook s’allume sur un écran d’accueil véritablement nouveau : à la place d’un portail standard ou d’un moteur de recherche zen, j’ai enfin accès en un coup d’oeil aux informationsclés dont j’ai le plus besoin. J’y trouve mes rendezvous et ma liste de tâches, ma revue de presse personnalisée, un aperçu de mes comptes bancaires
et bien sûr, au tout premier plan, la vie de mon réseau social. Comme pour les moteurs de recherche, l’idée à la base des réseaux sociaux est extrêmement simple : offrir un outil de gestion d’une liste de personnes ayant un intérêt commun. Tout a commencé avec la mise en ligne de l’annuaire de l’université d’Harvard par Facebook.

« Nous voici désormais à la tête d’annuaires de toutes natures, d’amis, de lieux, de photos, de vidéos, de livres, comme autant de listes, qui donne à notre époque un statut particulier ».

Convergence télécoms-audiovisuel : où va la création de valeur

Le problème du partage de la valeur entre les « tuyaux » et les contenus se pose, alors que la convergence numérique rebat les cartes. Selon l’institut économique Coe-Rexecode, les géants américains du Net sont les grands gagnants face aux opérateurs de réseaux.

Les opérateurs de réseaux – AT&T, France Télécom, Free, Vodafone, … – sont
les premiers touchés par la création et la destruction de valeur provoquée par la convergence télécoms-audiovisuel-informatique. Cette « destruction créatrice » profite d’abord aux « fournisseurs de services et des plateformes d’intermédiation sur Internet » que sont les Google, Yahoo, Amazon, eBay, Facebook et autres acteurs du Web.
C’est ce qui ressort d’un document de travail intitulé « Les opérateurs de réseaux dans l’économie numérique » et présenté, le 12 mars dernier, par l’institut d’études économiques Coe-Rexecode (1).