Filtrage par Free de la e-pub de Google : coup d’éclat ou d’épée dans l’eau ?

A la demande du gouvernement français, Free a renoncé à la mise en place du filtrage par défaut des publicités sur Internet, celles de Google en tête. Mais l’option demeure. Cette affaire préfigure une évolution des rapports de force entre les différents acteurs de la société numérique.

Par Rémy Fekete (photo), avocat associé, et Thomas Boutan, stagiaire, Gide Loyrette Nouel

Nul ne sait précisément quelles sont les raisons intrinsèques ayant conduit le groupe Iliad au filtrage publicitaire par défaut. Coup de pub maîtrisé ? Volonté de faire pression sur le géant américain Google dans des négociations sur le peering ? Désir de prouver à qui veut bien l’entendre qu’un fournisseur d’accès à Internet (FAI) peut garder un tant soit peu de contrôle sur ses abonnés ?

Réforme européenne de la protection des données personnelles : l’année 2013 sera législative

Il y a un an, la Commission européenne publiait son projet – contesté par les “Cnil” des Vingtsept – de règlement européen et de nouvelle directive sur la protection
des données personnelles et de la vie privée. Après des mois de consultation,
le dénouement législatif est venu.

Par Etienne Drouard, avocat associé, cabinet K&L Gates

La Commission européenne a publié le 25 janvier 2012 (1)
une proposition de réforme complète (2) des règles adoptées
par l’Union européenne en 1995 en matière de protection des données personnelles et de la vie privée. Après six mois de débats passionnés ouverts durant l’été 2012 au sein du Parlement européen, lequel a exposé le 10 janvier 2013 sa position dans un rapport (de l’eurodéputé Jan Philipp Albrecht) auquel ont largement contribué les autorités nationales de protection des données. Ces dernières s’opposent catégoriquement à la confiscation de leurs pouvoirs réglementaires nationaux.

Ciné : la polémique fait l’impasse sur le numérique

En fait. Le 28 décembre dernier, la parution dans Le Monde de la tribune de Vincent Maraval intitulée « Les acteurs français sont trop payés ! », a jeté un pavé dans la mare du cinéma français. Les Assises du cinéma, le 23 janvier prochain, élargiront-elles le débat au numérique ?

En clair. Ce qui frappe dans la polémique déclenchée par la prise de position du fondateur de la société de distribution de films Wild Bunch (1), c’est l’absence de toute référence à la révolution numérique à laquelle est confrontée toute l’industrie du cinéma. Comme si les salaires bien « trop » élevés pour bon nombre d’acteurs étaient le premier problème du 7e Art français. Comme si son « économie de plus en plus subventionnée » résumait à elle seule les travers de cette filière culturelle. Comme si
le « miracle du système du financement du cinéma français (…) qui protège l’exception culturelle » et « ne profite qu’à une minorité de parvenus » se limitait à « la subvention directe dont jouit le cinéma français (chaînes publiques, avances sur recettes, aides régionales) », d’une part, et à « la subvention indirecte (l’obligation d’investissement des chaînes privées) », d’autre part.
Pas un mot non plus sur le numérique dans les nombreuses réponses à ce pavé dans
la mare, tout juste le président de l’Association des producteurs de cinéma (APC),
Marc Missonnier, a-t-il évoqué l’« intégration des acteurs du numérique ». Pourtant,
le numérique remet en questions tout l’écosystème du cinéma. Cela commence dans les salles de cinéma de l’Hexagone, qui seront d’ailleurs toutes en 2013 équipées
d’une projection numérique. Elles sont plus de 5.000 en France : record mondial. La chronologie des médias leur accorde toujours une exclusivité de diffusion pour tous
les nouveaux films durant quatre mois. La VOD, laquelle ne demande qu’à décoller, continue ainsi d’être privée comme le DVD et le Bluray du lancement des films. La Commission européenne en est consciente, qui s’apprête à présenter un recommandation « Cinéma en ligne » incitant les Etats membres à expérimenter la (quasi) simultanéité de diffusion des films en salle et en VOD (2). En outre, la pauvreté des catalogues de films français en ligne (moins de 10.000 titres malgré la promesse
du CNC (3)) encourage le piratage sur Internet : les déboires de la musique n’ont pas servi. Quant aux sources « numériques » de financement du cinéma français (taxe VOD, taxe des opérateurs télécoms/FAI, demain les fabricants de terminaux et de téléviseurs), ils sont aussi passés sous silence. Tout comme le souhait des auteurs d’être rémunérés, en plus, lors de l’exploitation en ligne de leurs films (4). @

La rémunération pour copie privée appliquée au « cloud » n’est pas pour demain

Le 23 octobre dernier, le très contesté Conseil supérieur de la propriété littéraire
et artistique (CSPLA), a publié un avis selon lequel la redevance pour copie privée devrait s’appliquer aux services en nuage (cloud). Les sociétés d’auteurs sont satisfaites, les acteurs du numérique ulcérés.

Par Katia Duhamel, avocat, cabinet Bird & Bird

Selon CSPLA, la redevance pour copie privée doit s’étendre aux services de stockage en ligne qu’il s’agisse de services de stockage personnel de type Dropbox, Hubic ou Skydrive, ou bien ceux liés à une plateforme de téléchargement légal,
ou encore ceux proposant des fichiers de substitution comme iTunes Match. A contrario, la Commission européenne semble aujourd’hui privilégier une analyse de la question sous l’angle du droit exclusif et non sur la base de l’exception pour copie privée.

RTL conteste à Europe 1 la place de n°1 du numérique

En fait. Le 7 novembre, Christopher Baldelli, président du directoire de RTL Radio depuis trois ans, était l’invité de l’Association des journalistes médias (AJM). Alors que son audience à l’antenne est menacée d’érosion, la première radio hertzienne de France entend « faire mieux » dans le numérique.

En clair. Christopher Baldelli ne supporte pas qu’Europe 1 se déclare « radio leader sur
le numérique ». Pour le président du directoire de RTL Radio en France, « Europe 1 n’est pas le leader du numérique ». « Si l’on regarde le nombre de podcasts et l’audience du site web, c’est nous qui sommes leader du numérique. (…) Nous allons communiquer pour le dire », a-t-il affirmé. S’il ne conteste pas que sa concurrente de Lagardère Active est la numéro 1 en nombre de podcasts téléchargés par mois, comme au mois d’octobre avec plus de 6,3 millions, contre 4,7 millions pour RTL (voir Indicateur p. 10), il estime que c’est en revanche loin d’être toujours le cas tous les mois pour le site europe.fr. Bien que ce dernier soit arrivé en tête des sites web de radio sur les mois de novembre (grâce à un bond de 48 % à 9,8 millions de visites (1), contre 8,3 millions pour rtl.fr qui décline de 2 %), le rapport est en effet inversé sur le mois précédent. En octobre, rtl.fr reprend la tête avec plus de 8,5 millions de visites (+ 2%), contre 6,6 millions pour europe1.fr (- 23 %), ce dernier ayant dépassé sa rivale au mois de septembre. Bref, pour Christopher Baldelli qui dirige la première radio hertzienne de France, Europe 1 – la quatrième radio hertzienne – ferait dans l’abus de langage. « Nous avons un meilleure classement, non seulement en podcast, où nous sommes passés de quatrième à second, mais aussi sur Internet », insiste le patron de RTL, qui édite aussi Fun Radio (4,9 millions de visites sur le site web en novembre) et RTL2 (1 million de visites).
Malgré cette polémique, Christopher Baldelli reconnaît que les podcasts et le streaming live (2) est « une écoute en plus ». C’est une aubaine pour les radios généralistes dont l’audience globale a perdu 1 point de part de marché sur un an, pendant que les radios musicales gagnaient 1 point. Surtout, c’est une source de rajeunissement de l’auditoire dont l’âge moyen pour une généraliste est de 57 ans. Or les 25-34 ans sont les plus nombreux à recourir à la catch-up radio. « Le podcast est un plus formidable, comme
la télévision de rattrapage que j’ai vécue avec M6 Replay (3). Mais la catch up est partie plus vite en télé ; elle progresse en radio », s’est-il félicité. Il a en outre annoncé que
M6 Publicité Digital sera la régie des sites web de RTL, RTL2 et Fun Radio dès
janvier 2013. @