Plus de 200 opérateurs mobiles, dans 80 pays, offrent la 5G à plus de 1 milliard d’utilisateurs

Les équipementiers télécoms – Samsung, Huawei, Ericsson, Nokia, Apple, Qualcomm, Intel ou ZTE – se frottent les mains : la cinquième génération de mobiles prend enfin son envol. Deux seuils sont dépassés cette année : plus de 200 opérateurs 5G et plus de 1 milliard d’utilisateurs dans le monde.

Pour les membres exécutifs de la Global Mobile Suppliers Association (GSA), que sont Samsung, Huawei, Ericsson, Nokia, Apple, Qualcomm, Intel et ZTE, le marché mondial de la 5G décolle enfin. Leur organisation internationale, basée au Royaume-Uni et présidée par Joe Barrett (photo), a publié fin juin auprès de ses adhérents un état des déploiements de la 5G dans le monde : sur près de 500 opérateurs télécoms (1) dans 150 pays et régions qui investissent dans un réseau 5G (y compris tests, achat de licences, projets, déploiements et lancements commerciaux), plus de 200 d’entre eux dans 80 pays ont lancé des services mobiles (2).

5G fixe (FWA) et 5G standalone (SA)
La GSA, dont le snapshot est établi à fin mai 2022 (voir 1er graphique), a recensé parmi ces opérateurs 85 dans 46 pays et territoires qui ont lancé des services de 5G fixe à la norme 3GPP (3), appelés aussi Fixed Wireless Access (FWA). Cela représente tout de même environ 40 % des opérateurs télécoms qui offrent de la 5G fixe. Preuve supplémentaire, s’il en était besoin, que la cinquième génération de mobiles ne sera pas uniquement au service de la mobilité. Elle est amenée aussi à concurrencer la fibre optique dans les foyers, dont certains n’hésiteront pas à remplacer leur « box » fixe (ADSL ou FTTH) par une « box » 5G (FWA).
Autre constat : quelque 108 opérateurs télécoms ont investi dans ce que l’on appelle la « 5G autonome » ou « 5G standalone » (5G SA), dont 28 d’entre eux sont des réseaux publics. Il s’agit de réseaux construits uniquement pour la 5G, contrairement à d’autres réseaux 5G qui s’appuient sur des réseaux 4G existants. L’avantage de cette 5G autonome – dotée de ses propres équipements – est qu’elle est bien plus performante, en termes de connexions disponibles, de temps de latence très faibles et de très haut débits dignes de ce nom. Mais cette « vraie » 5G suppose de la part des « telcos » des investissements plus importants. Partir des installations 4G déjà en place pour monter progressivement en puissance vers la 5G nécessite en effet de moindres dépenses, mais – contrairement à ce que croit le client abonné – les appels voix continuent de passer par la 4G et les données transitent par la 4G et la 5G. La 5G SA, elle, forte de son autonomie et de sa pleine puissance, est « 100% 5G » et peut même être une sérieuse alternative dans les zones rurales mal ou pas desservies par la fibre optique de bout-en-bout, pour peu que les opérateurs télécoms se donnent la peine d’investir de façon « autonome ».
Par exemple, en France, Bouygues Telecom (4), SFR, Free et Orange ont prévu de mettre en service dès 2023 leurs réseaux 5G standalone. Pour l’heure, selon les chiffres publiés le 7 juillet par l’Arcep au 31 mars 2022, l’Hexagone compte 4,1 millions d’abonnés 5G. Autrement dit, la France ne pèse que 0,4 % du milliard d’utilisateurs identifiés par CSS Insight. Ce cabinet d’étude britannique a publié fin juin une estimation du nombre d’utilisateurs 5G dans le monde : la barre du milliard est en train d’être franchie pour atteindre 1,2 milliard d’utilisateurs à la fin de cette année et, selon ses prévisions, ce nombre aura plus que doublé en 2024 (voir 2e graphique). La 5G devient réalité, du moins si la « vraie » 5G suit le mouvement. @

Charles de Laubier

Pourquoi le fantôme de Snap fait trembler Internet

En fait. Le 23 mai, la société Snap – dirigée par son cofondateur Evan Spiegel – a émis un avertissement sur ses prévisions de résultats pour le second trimestre 2022. Depuis, le cours de Bourse du réseau social au fantôme a chuté de près de 45 % (1). C’est un vrai coup de semonce pour tout l’écosystème publicitaire.

En clair. « Depuis que nous avons publié nos objectifs le 21 avril 2022, l’environnement macroéconomique s’est détérioré davantage et plus rapidement que prévu. Par conséquent, nous pensons qu’il est probable que nous fassions état d’un chiffre d’affaires et d’un EBITDA ajusté inférieurs à l’extrémité inférieure de notre fourchette de prévisions pour le deuxième trimestre 2022 ».
Par cet avertissement enregistré par le gendarme de la Bourse américain, la SEC, et publié le 23 mai (2), l’éditeur de la plateforme Snapchat a jeté un froid et entraîné avec lui à la baisse d’autres entreprises cotées de réseaux sociaux et/ou leur maison mère (Twitter, Pinterest, Meta/Facebook, Alphabet/ YouTube, …), mais aussi des entreprises de publicité également cotées (Publicis, WPP, Omnicom, Interpublic Group, …).
Cette alerte laconique porte sur le chiffre d’affaires et la marge brute d’exploitation du deuxième trimestre en cours, dont les résultats seront publiés courant juillet. Comme l’essentiel des revenus de la société Snap provient pour l’essentiel de la publicité, ces quelques lignes ont sonnées comme coup de semonce pour toutes les plateformes numériques vivant de la publicité sur Internet et pour tous les acteurs de ce marché publicitaire très sensible aux conjonctures économiques. Snap est l’archétype de cette dépendance à la publicité en ligne : rien que sur son premier trimestre 2022, son chiffre d’affaires – essentiellement publicitaire – a franchi pour la première fois la barre du 1 milliard de dollars, soit un bond de 38 % sur un an (contre 769,6 millions de dollars au premier trimestre de l’année précédente).
Deux offres publicitaires principales sont proposées par le réseau social au fantôme, qui revendique 332 millions d’utilisateurs en moyenne par jour dans le monde, dont 75 % de Millennials et de GenZ : Snap Ads (3) et AR Ads (4). La publicité dite AR (Augmented Reality) propose aux annonceurs et partenaires des « filtres » sponsorisés (sponsored filters) et des « lentilles » sponsorisées (sponsored lenses). Mais l’inflation, la hausse des taux d’intérêt et la guerre en Ukraine a fait revenir tout l’écosystème de la virtualité à la réalité. Aux difficultés économiques, s’ajoutent la fin des cookies pour le ciblage chez Apple et Google, d’une part, et le fléau persistant de la fraude publicitaire (5), d’autre part. @

Le FTTH et la 5G vont permettre aux opérateurs télécoms d’accroître leurs revenus fixe et mobile

La France est en train de tourner la page des télécoms par chères. Les opérateurs télécoms commencent à encaisser des revenus à la hausse, notamment sur les forfaits grâce aux abonnements à la fibre optique et à ceux de la 5G. Les consommateurs voient déjà leurs factures augmenter.

Cela fera vingt ans cette année que le concept de triple play débarquait en France (à l’initiative de Free avec le lancement de la « box » en novembre 2002) pour 29,99 euros par mois. Ce forfait – comprenant la téléphonie, l’accès à Internet et la réception de chaînes de télévision – a défié la concurrence qui s’est alignée sur cette offre avantageuse pour les abonnés. Six ans auparavant, c’était Bouygues Telecom qui inventait en France le premier forfait mobile dont le principe fut adopté par tous ses rivaux, avec parfois des offres agressives à 9,99 euros par mois voire à des prix bien en-dessous.

Fixe et mobile : factures en hausse
Cette période de deux décennies avec des forfaits fixe (à moins de 30 euros par mois) et mobile (à moins de 10 euros par mois) est en passe d’être révolue. Autrement dit, les télécoms commencent à peser plus lourd dans le budget des foyers français. Orange, SFR ou encore Bouygues Telecom font déjà des augmentations « par défaut » du prix de certains forfaits (mobile ou fixe), bien que cette pratique discrète soit controversée. La généralisation de la fibre et de la 5G vont contribuer à augmenter encore plus les factures mensuelles des consommateurs. C’est déjà le cas des 14,4 millions d’abonnés à un forfait de fibre optique de bout en bout dit FTTH (1), ainsi que des 3millions d’abonnés à une offre 5G (au 31 décembre 2021). Si la facture mensuelle moyenne par abonné avait tendance à être plus ou moins stable depuis plusieurs années, elle s’est installée au dernier trimestre 2021 dans la fourchette haute : à 33,5 euros par mois en moyenne pour les abonnements fixe et 14,9 euros par mois en moyenne pour les clients mobile (voir tableau ci-dessous). « Pour l’utilisation d’accès Internet à haut ou très haut débit et les services associés, un abonné dépense en moyenne 33,5 euros HT par mois, une facture qui augmente légèrement depuis le début de l’année 2020 (+ 30 centimes en un an ce trimestre) après deux années de recul continu », constate l’Arcep dans son observatoire du marché des télécoms publié le 7 avril. Et côté mobile : « La facture mensuelle moyenne par carte [SIM] augmente de 3,2 % en un an, et s’élève à 14,9 euros HT. Elle progresse de 50 centimes en un an, et atteint un niveau supérieur à celle observée avant la crise sanitaire ». Ces haussent des montants payés par les abonnés se traduisent par l’augmentation des revenus des opérateurs télécoms, lesquels souhaitent depuis des années une revalorisation de leurs forfaits fixe et mobile soumis depuis des années à une pression des prix (vers le bas) en raison de la bataille tarifaire – notamment entre les quatre principaux opérateurs fixe et mobile que sont Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free. Les deux premiers appellent d’ailleurs depuis des mois à un passage de quatre à trois opérateurs télécoms en France, « pour être plus forts » et « cesser la bataille tarifaire » (2).

Pour l’heure, en 2021, les opérateurs télécoms enregistrent – malgré la crise sanitaire – une hausse de leur chiffre d’affaires total au rythme de 2% à 4% sur un an chaque trimestre, pour atteindre 9,4 milliards d’euros au quatrième trimestre 2021 et totaliser 36,1 milliards en 2021. Selon les calculs de Edition Multimédi@ sur l’année calendaire, cela correspond à une hausse annuelle de 2,5 % entre 2020 (35,238 millions d’euros) et 2021 (36,118 millions d’euros). « Cette progression, qui contraste après plusieurs années (de 2011 à 2020) de recul, est tirée par à la fois les revenus des services mobile et ceux des services fixe », relève l’Arcep. En y regardant de plus près, ce sont les abonnements et forfaits mobile (donc hors cartes prépayées) qui rapportent le plus aux opérateurs télécoms depuis plusieurs années : 3,5 milliards d’euros au quatrième trimestre de 2021 pour un total de 13,5 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année, soit une hausse de 5,1% sur un an. Le deuxième poste de recettes le plus élevé pour les opérateurs télécoms réside dans les abonnements d’accès haut et très haut débit à Internet et à la téléphonie (hors autres services Internet comme publicité en ligne ou commerce en ligne) : 2,6 milliards d’euros au quatrième trimestre de 2021 pour un total de 10,2 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année, soit une hausse de 5,1 % sur un an. Le fait que ces deux premières sources de revenus des opérateurs télécoms (forfaits et abonnements mobile et fixe) affichent le même taux de croissance l’an dernier (5,1 %) n’est que pure coïncidence, mais cette hausse significative prouve que les consommateurs paient plus cher leurs accès télécoms. Il faut s’attendre à ce que ces hausses tarifaires pour le client final se poursuivent voire s’amplifient avec la généralisation de la fibre et de la 5G aux forfaits plus coûteux.

Les terminaux mobiles rapportent
Quant à la troisième source de revenu des opérateurs télécoms, elle correspond à location ou à la vente de terminaux mobiles tels que les smartphones (n’étant pas comptabilisée ici la vente de terminaux de téléphonie et Internet fixes plus marginale et en déclin) pour un total de 1,1 milliard d’euros au quatrième trimestre de 2021 et un total de 3,3 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année, soit une hausse là aussi non négligeable de 7,1 % sur un an. Non seulement ce poste a franchi l’an dernier la barre du milliard d’euros de chiffre d’affaires, mais aussi affiche une hausse supérieure à celles des accès fixe ou mobile. Pour la hausse des ventes d’accès fixe à Internet, par exemple, l’Arcep souligne que « cet accroissement s’explique en partie par l’accélération de la transition du cuivre vers la fibre optique ». D’autant que, pour la première fois, le nombre d’abonnements FTTH (14,4 millions au 31 décembre 2021) dépasse celui des abonnements ADSL/VDSL (12,4 millions). Et le terrain est favorable à la poursuite voire à l’accélération des hausses tarifaires fixes, puisque la fibre est orientée à la hausse et le cuivre à la baisse. « Au total, au 31 décembre 2021, 58 % du nombre total d’abonnements à Internet sont à très haut débit, dont près de 80 % en fibre optique de bout en bout. Parallèlement, le nombre de locaux raccordables au réseau FTTH progresse également fortement chaque année : 29,7millions de locaux le sont ce trimestre, soit + 5,5 millions en un an », détaille l’Arcep.

Baisse du cuivre, hausse des prix
Mais un peu plus de la moitié de ces prises « optiques » raccordables ne font pas encore l’objet d’un abonnement (voir tableau ci-dessus), alors que le raccordement technique lui-même peut poser de sérieux problèmes (3). L’opérateur télécoms historique Orange a d’ailleurs commencé à basculer vers la fibre, avec l’extinction du réseau de cuivre « à partir de 2023 » et sa disparition totale d’ici à 2030 (4). Avec l’explosion de la vidéo en (ultra) haute définition, de la musique en qualité hi-fi (5), des visioconférences ou encore des métavers qui déferlent (lire p. 8 et 9), les usages dévoreurs de bande passante ne manqueront pas de tirer vers le haut les forfaits et abonnements. C’est notamment sensible sur les mobiles.
Rien que sur la 4G encore largement dominante en France, la consommation de données a progressé l’an dernier de 22 % sur un an, à 2,2 exaoctet (Eo) sur le quatrième trimestre de 2021 – soit 8,6 Eo sur l’année. Ce qui correspond à 12,3 gigaoctets (Go) et par abonné 4G sur le quatrième trimestre de 2021 – soit 47,3 Go sur l’ensemble de l’an dernier. La cinquième génération de mobiles, elle, promet de faire exploser ces volumes de données consommées. Il en coûtera plus cher aux consommateurs. @

Charles de Laubier

La 5G franchira en 2022 les 10 % de connexions mobiles générées par les cartes SIM dans le monde

L’année 2022 s’annonce comme celle qui verra la 5G franchir la barre du 1 milliard de connexions au total dans le monde, que cela soit de la 5G mobile ou de la 5G fixe. Pour la première fois, elle va dépasser cette année le taux de 10 % des connexions mobiles grâce à 200 réseaux dans 70 pays.

La croissance de la 5G croît plus vite que les deux précédentes générations de mobiles sur la même période de démarrage commercial. « Cette croissance sans précédent représente le déploiement générationnel le plus rapide pour l’industrie du mobile par rapport à la 3G et la 4G. En comparaison, dix-huit mois après son lancement, la 5G représentait plus de 5,5 % des connexions mobiles – ni la 3G ni la 4G n’ont dépassé 2,2 % de pénétration au même moment de leur cycle de vie », s’est félicité Alex Sinclair (photo), directeur technique à la GSMA, laquelle réunit plus de 750 opérateurs mobiles et compte pour l’instant près de 200 réseaux 5G dans 70 pays.

Vers 2 milliards de connexions 5G fin 2025
Un total de 1 milliard de connexions mobiles 5G – correspondant à autant de cartes SIM connectées à partir d’un appareil compatible avec la cinquième génération de mobile – devrait être atteint d’ici la fin de 2022, sur un total de plus de 8,4 milliards de connexions toutes générations de mobiles confondues (hormis les connexions des réseaux cellulaires d’objets connectés estimés à 2 milliards en 2021). Ainsi, pour la première fois, la 5G va dépasser dans le courant de cette année les 10 % de connexions mobiles pour tendre, selon nos calculs, vers les 12%. Ce taux est à comparer aux 8% seulement en 2021 sur un total de 8,3 milliards de connexions mobiles toutes générations confondues.
Ce « dynamisme » permet à la GSMA de tabler sur un franchissement des 2 milliards de connexions 5G d’ici la fin de l’année 2025, soit tout de même dans trois ans et demi. A ce moment-là la 5G comptera pour environ un quart (taux de 25 %) du total des connexions mobiles et plus de deux personnes sur cinq dans le monde vivront à proximité d’un réseau de cinquième génération. « La dynamique a été stimulée notamment par la reprise économique après la pandémie, la hausse des ventes de smartphones 5G, l’extension de la couverture des réseaux, et les efforts de marketing des opérateurs mobiles », souligne l’association professionnelle dans son rapport « The Mobile Economy Report 2022 » publié en mars (1). L’impulsion a été donnée par les marchés pionniers en 5G que sont la Chine, la Corée du Sud et les Etats-Unis. A la fin de 2021, ils étaient 176 opérateurs mobiles sur 70 marchés dans le monde à avoir lancé des services 5G commerciaux. Parmi eux, près de 70 offrent des services de 5G fixe (2). Côté Samsung, le numéro un mondial indétrônable des fabricants de smartphones (3), a indiqué qu’il s’attendait à ce que les smartphones 5G représentent en 2022 plus de la moitié de toutes ses ventes de smartphones. « Une nouvelle vague de déploiement de la 5G dans de grands marchés à revenus modestes comme le Brésil, l’Indonésie et l’Inde pourrait stimuler davantage la production de masse d’appareils 5G plus abordables », prévoit la GSMA. Autrement dit, les pays dits émergents pourraient contribuer fortement à démocratiser la 5G. Les smartphones compatibles vont devenir abordables, leur prix de vente passant sous les 500 dollars l’unité – avec certains d’entre eux à moins de 150 dollars comme chez le fabricant chinois Realme, filiale du groupe BBK Electronics.
Si les 10 % des connexions en 5G sont atteints au cours de cette année 2022, ce taux paraît faible au regard des investissements importants que consacrent les opérateurs mobiles aux déploiements des réseaux de cinquième génération. Et ces « Capex » (4) s’annoncent élevées pour les années à venir. D’après la GSMA, les opérateurs mobiles devront investir – entre 2022 et 2025 – plus de 600 milliards de dollars dans le monde, dont environ 85 % dans les réseaux 5G. La 4G, elle, a atteint son apogée durant l’année 2021 en représentant 58 % des connexions mobiles dans le monde. Elle a depuis entamé son déclin au profit de la 5G, laquelle ne sera pas pour autant la génération majoritaire lorsque la 4G deviendra minoritaire dans ces connexions mobiles au-delà de l’année 2025. Quant à la 3G, elle passe cette année sous la barre des 20 % des connexions mobiles. De nombreux autre opérateurs mobiles dans le monde se délestent de ces anciens réseaux. Aux Etats-Unis, AT&T a entamé l’extinction progressive de son réseau 3G depuis le 22 février dernier (5). En France, Orange prévoit de fermer ses réseaux 2G et 3G d’ici respectivement fin 2025 et fin 2028 (6).

L’« écomobile » génère 5 % du PIB mondial
Pour l’heure, à fin 2021 et toutes générations de mobiles confondues, le nombre d’abonnés mobiles a atteint les 5,3 milliards de personnes, soit 67 % de la population mondiale. Le seuil des 70 % de pénétration sera atteint d’ici fin 2025 avec 5,7 milliards d’abonnés mobile sur la planète. Les revenus générés l’an dernier par les technologies et services mobiles en général ont atteint 4.500 milliards de dollars (autrement dit 4,5 trilliards de dollars), soit 5% du PIB mondiale. Ce chiffre atteindra près de 5.000 milliards de dollars d’ici 2025. @

Charles de Laubier

Stéphane Richard joue les prolongations à la tête d’Orange, malgré sa condamnation dans l’affaire « Tapie »

PDG depuis près de onze ans d’Orange, Stéphane Richard ne quitte pas l’opérateur télécoms historique fin janvier. Il poursuit son mandat jusqu’à l’entrée en fonction, le 4 avril, de Christel Heydemann comme directrice générale. Et si un nouveau président n’est pas nommé d’ici le 19 mai, il pourrait rester jusqu’à cette date.

Stéphane Richard ne cessera pas d’être PDG du groupe Orange « au plus tard le 31 janvier 2022 ». En effet, contrairement à ce qui avait été prévu par le conseil d’administration du groupe réuni de façon extraordinaire le 24 novembre dernier, soit le jour-même de la condamnation de son président dans l’affaire « Tapie-Adidas », ce dernier va continuer à assumer ses fonctions jusqu’à l’arrivée – le 4 avril – de Christel Heydemann (photo) en tant que directrice générale de l’opérateur télécoms. Et si le nouveau président n’était pas trouvé d’ici là – présidence et direction générale étant désormais dissociées –, Stéphane Richard pourrait même rester au-delà – cette fois comme président non-exécutif. Et ce, jusqu’à l’échéance de son mandat initial le 19 mai – date de la prochaine assemblée générale – et afin d’assurer la passation de pouvoir dans de bonnes conditions. Cette période d’overlap (ou d’handover), comme disent les Anglo-saxons pour désigner cette transition délicate, devrait permettre à Orange d’opérer son changement de gouvernance sereinement et sans heurts. Fini donc le poste de PDG : Christel Heydemann (47 ans), choisie par Bercy et approuvée par l’Elysée, sera à la direction générale du groupe. Sa nomination est entérinée ce vendredi 28 janvier lors de la réunion du conseil d’administration, dont elle est membre, et encore sous la présidence de Stéphane Richard qui la soutient.

Christel Heydemann sera DG d’Orange au printemps
Reste à désigner une autre personne qui lui succèdera à la présidence du conseil d’administration. Sébastien Crozier (photo page suivante), à la tête depuis une quinzaine d’années du syndicat majoritaire CFE-CGC d’Orange et directeur du mécénat public du groupe, est le premier candidat déclaré – depuis mi-décembre – à cette présidence du conseil d’administration, dont il membre depuis fin 2017. Passée la surprise, son nom familier en interne s’est installé depuis dans le paysage des prétendants présidentiables à 450.000 euros (salaire maximum d’une entreprise publique) – parmi lesquels Pascal Cagni, ancien dirigeant Europe d’Apple et actuel président de Business France, Jean-Noël Tronc, ancien DG de la Sacem et ancien PDG de Canal+ Overseas, ou encore Jacques Aschenbroich, PDG de Valeo. Quatre anciens dirigeants exécutifs de France Télécom/Orange se sont aussi positionnés pour cette présidence : Nicolas Dufourcq, Vivek Badrinath, Bruno Mettling et Didier Quillot. Les statuts d’Orange limite à 70 ans l’âge pour l’exercice des fonctions de président du conseil d’administration ; il faut donc que l’impétrant ou l’impétrante (mais pas de femme en vue) ait moins de 66 ans pour assurer jusqu’au bout le mandat qui est de quatre ans pour tous les administrateurs d’Orange (président compris).

Sébastien Crozier, futur président ?
Sébastien Crozier (54 ans) a, lui, 28 ans de maison ; il est entré en 1994 chez France Télécom Multimédia et a participé dans la foulée au lancement de Wanadoo (avec un intermède entrepreneurial extérieur de 1997 à 2002). Contacté par Edition Multimédi@, le syndicaliste dirigeant nous confirme être plus que jamais candidat à la présidence d’Orange. « J’ai fait acte de candidature le 16 décembre, en présentant mon projet d’articulation pour l’avenir du groupe que je connais parfaitement, en France et à l’international, ayant aussi dirigé plusieurs filiales, notamment en Afrique et en Amérique Latine », nous confie-t-il. Stéphane Richard aurait accueilli sa candidature de façon plutôt favorable, en raison de ses compétences, en la considérant « atypique ». Il s’agit d’une candidature sans précédent pour un administrateur salarié et représentant du personnel.
En devenant directrice générale du groupe Orange, Christel Heydemann est, elle, la première femme à être nommée à sa tête depuis la création de France Télécom il y a 31 ans – société anonyme depuis un quart de siècle maintenant, devenue Orange en juillet 2013. Bien qu’elle n’ait jamais rempli de telles fonctions par le passé, celle qui est encore pour quelques semaines vice-présidente Europe de Schneider Electric n’est pas une inconnue chez Orange. Cooptée par Stéphane Richard qui l’a faite entrer au conseil d’administration en juillet 2017, elle est aussi membre du comité d’audit chargé du suivi du contrôle interne et de la gestion des risques (financiers, sociaux et environnementaux). L’Etat, qui est encore actionnaire à hauteur de 23 % du capital d’Orange tout en détenant près de 30 % des droits de vote (2), a réussi à imposer Christel Heydemann au détriment : d’un favori qui s’est finalement retirer, Frank Boulben, « Chief Revenue Officer » de l’opérateur télécoms américain Verizon, d’un outsider, Michel Paulin, directeur général d’OVHCloud, et d’une revenante, Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions (écartée par l’Elysée afin de ne pas déstabiliser l’audiovisuel public en pleine campagne présidentielle). Des candidats en interne s’étaient aussi positionnés : Fabienne Dulac, directrice générale d’Orange France, Ramon Fernandez, directeur financier du groupe, et Mari-Noëlle Jégo-Laveissière, directrice générale adjointe Europe. « Les membres du comex [le comité exécutif du groupe, ndlr] qui se sont portés candidats à la direction générale du groupe, mais qui n’ont pas été retenus, devraient partir à court ou moyen termes, nous indique une source. Sans parler de ceux qui vont bientôt partir à la retraite comme Gervais Pellissier, directeur général délégué du groupe en charge des ressources humaines, et Alioune Ndiaye, directeur général d’Orange Afrique et Moyen-Orient ». Il y a aussi Helmut Reisinger, directeur général d’Orange Business Services (OBS), qui a quitté ses fonctions le 17 janvier dernier après avoir été débauché. « Quant à Béatrice Mandine, directrice de la commu-nication, de la marque et de l’engagement, elle s’est dite “au chômage” le jour de la condamnation de Stéphane Richard. Tandis que Nicolas Guérin, secrétaire général et bras armée du PDG partant, pourra difficilement garder sa position », nous indique-t-on. C’est dire que le remaniement du comex semble inéluctable après l’entrée en fonction de cette nouvelle direction bicéphale.
Le prolongement de Stéphane Richard au sein de la maison rassure en interne, même si Bercy (alias Bruno Le Maire) aurait préféré que le PDG condamné en appel parte aussitôt. Mais nécessité fait loi. Et la candidature de Sébastien Crozier est aussi perçue, si elle était retenue, comme un gage de stabilité. Christel Heydemann, bien qu’ayant passé quinze ans dans les télécoms (chez Alcatel racheté par Nokia), devra être cornaquée dans ses nouvelles responsabilités. Car être équipementier, ce n’est pas être opérateur… Initialement prévu le 24 janvier, le conseil d’administration avait finalement été reporté au 28 janvier pour se donner le temps de préparer les esprits à la nomination « étatique » de Christel Heydemann qui ne faisait pas consensus au sein des quinze membres du conseil d’administration. « Chez Orange, des administrateurs indépendants – dont elle fait partie depuis le 26 juillet 2017 aux côtés notamment de Alexandre Bompard, PDG de Carrefour – n’étaient pas très ravis de sa candidature », nous signale-t-on. Il s’agit aussi de bien régler la dissociation des mandats (présidence et direction générale).

Stéphane Richard clame son innocence
Du moins si Bercy et l’Elysée ne s’opposent pas aux prolongations de Stéphane Richard… « La temporalité par rapport à l’élection présidentielle ne facilite pas son maintien », convient un proche du dossier. D’autant qu’il faut choisir en amont les nouveaux administrateurs et déposer les résolutions de nominations un mois avant les votes de l’AG. Pour autant, Stéphane Richard n’est pas empêché. Le fait qu’il se soit pourvu en cassation rend sa condamnation du 24 novembre – à un an de prison avec sursis et 50.000 euros d’amende pour « complicité de détournement de biens publics » (3) dans l’affaire « Tapie-CDR » (4) – non définitive. Et il reste présumé innocent. « Les accusations portées contre moi sont parfaitement infondées », avait-il encore martelé le 24 novembre dans un live vidéo (5) adressé en interne aux salariés du groupe : plus de 133.000 personnes dans le monde, dont plus de 64.000 en France, parmi lesquels 34 % de fonctionnaires. @

Charles de Laubier