Piratage : l’Hadopi se dit prête a gérer la liste noire

En fait. Le 10 septembre, Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication, a lancé le « Comité de suivi des bonnes pratiques dans les moyens de paiement en ligne pour le respect des droits d’auteur et des droits voisins ». La charte des acteurs du e-paiement tarde, mais l’Hadopi est prête.

Cyril Zimmermann, PDG de Hi-Media : « Taxer tous les acteurs du Net sans distinction risque d’être peu efficace »

Alors que le groupe Hi-Media – régie Internet européenne et opérateur de e-paiement – a présenté le 30 août ses résultats semestriels, son PDG fondateur, Cyril Zimmermann, répond à EM@ sur le développement de ses activités et le ralentissement du marché publicitaire online, ainsi que sur la fiscalité numérique en vue.

Internet+ et MPME donnent naissance à « Internet+ Box » et « Internet+ Mobile »

Les FAI et les opérateurs mobile français fusionnent leurs kiosques de micro-paiement sur facture – respectivement Internet+ et MPME – pour donner
naissance à « Internet+ Box » et à « Internet+ Mobile ». Objectif : simplifier
en « 2 clics » les transactions et résister face à iTunes et Paypal.

Des fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et les trois opérateurs mobile français
– en l’occurrence Free, Alice, SFR, Bouygues Telecom et Orange – ont décidé de fusionner leurs solutions de paiement sur facture sous une seule marque : Internet+,
qui se décline désormais en « Internet+ Box » pour les premiers et « Internet+ Mobile » pour les seconds.

Micro-paiements sur factures opérateurs
C’est ainsi que le signe abscons de MPME – pour Micro Paiement Mobile & Enablers – est abandonné à peine plus d’un an après avoir été lancé, durant le premier trimestre 2010. Internet+, lui, est plus ancien puisqu’il a été lancé en juin 2005 par l’Association
pour le commerce et les services en ligne (Acsel) et les FAI. Ces kiosques de paiement en ligne permettent de faire payer l’internaute ou le mobinaute directement en débitant la somme de la transaction sur la facture fixe ou mobile de son (ou ses) opérateur(s). Cette facturation peut porter sur des achats à l’acte allant jusqu’à 30 euros ou des abonnements plafonnés à 5 euros par semaine, voire 30 euros par mois ou par trimestre. Lorsque l’utilisateur choisit Internet+ Box ou Internet+ Mobile, son FAI ou son opérateur mobile est automatiquement identifié. Ces derniers reversent ensuite jusqu’à 90 % du montant des transactions aux fournisseurs de services ou aux éditeurs de contenus. Et ça marche ! En dehors des achats effectués sur des App Stores, ces solutions de paiement sur facture sont encore largement utilisées par les consommateurs français : selon l’Association française du multimédia mobile (AFMM (1)), 58,2 % des mobinautes et
62,1 % des internautes les préfèrent aux autres paiements en ligne (cartes bancaires ou comptes Paypal, iTunes, Amazon Payments, Google Checkout, …). Et selon une étude de l’Acsel réalisée avec le Geste (2) par PriceWaterhouseCoopers en début d’année,
« les moyens de paiement les plus proposés sont les paiements sur facture opérateurs
et la carte bancaire. La césure entre les deux se situe à environ 3 euros ». Résultat : le paiement en ligne sur facture d’opérateur est le premier mode de paiement sur l’Internet mobile et le second sur l’Internet fixe. Les micros montants se situent en moyenne autour de 4 euros, les petits montants autour de 10 euros et les montants moyens autour de
30 euros. Les petits montants représentent en moyenne 58 % des transactions.
En 2010, le paiement sur facture en France a franchi la barre des 500 millions d’euros
de chiffre d’affaires – à 540 millions précisément – grâce à une croissance sur un an
de 15,3 % (3). Mais le paiement par SMS+, ces textos mobiles surtaxés pour payer notamment services ou contenus, occupe à lui seul un peu de plus de 70 % de ces revenus. Les 30 % restants se partagent entre MPME/Gallery (4) (94 millions d’euros)
et Internet+ historique (66 millions d’euros). Internet+ Box et Internet+ Mobile fonctionnent de la même manière en « 2 clics », à ceci près que sur les téléphones portables une étape supplémentaire par SMS (comprenant un « code web » à indiquer lors du paiement) est nécessaire lorsque la transaction se fait hors connexion 3G (via WiFi ou sur ordinateur connecté à une box).
Avec l’explosion des smartphones, Internet+ Mobile devrait continuer à progresser et même à rogner sur l’usage des SMS+ encore largement dominant dans les transactions sur téléphones portables. Cette solution de m-paiement remplace MPME qui était en
fait issu de la plateforme Gallery lancée en juillet 2003 par les trois opérateurs mobiles. Cette galerie marchande, qui référence aujourd’hui plus de 2.000 sites mobiles édités
par 400 entreprises, a donc été scindée en deux début 2010 : d’un côté le moteur de référencement Gallery, de l’autre la partie micro-paiement sans ne plus avoir forcément
à être référencé sous Gallery. Les éditeurs de services réunis au sein du Geste avaient en effet exigé « moins de contraintes éditoriales ». Avec MPME, les niveaux tarifaires
sont plus élevés que le kiosque SMS+ lancé au printemps 2002 et complété au printemps 2006 par les MMS+ (messages courts surtaxés pour les images et les vidéos). Internet+ Mobile.

Mobile versus carte bancaire
Mais les trois opérateurs mobile ne veulent pas se cantonner au micro-paiement. Ils lancent ensemble le 8 septembre Buyster, une nouvelle solution pouvant aller jusqu’aux macro-paiements après avoir associé son numéro de mobile à sa carte bancaire.
La société commune créée au début de l’année avec la SSII Atos Origin a même été agréée en avril dernier par l’Autorité du contrôle prudentiel de la Banque de France en qualité d’établissement de paiement. Est-ce le début de la fin de la carte bancaire ? @

Charles de Laubier

Le mécénat pour les nuls

Le croirez-vous, mais après avoir crié au loup pendant des années parce que des millions d’internautes déboulèrent, telle une horde de Huns, dans les vastes plaines de l’Internet pour piller les œuvres et leurs auteurs, certains découvraient qu’une des voies de sortie de cette impasse était… de faire payer les internautes. Bien sûr, il n’est plus question de leur vendre de simples morceaux de musique mp3, désormais facilement accessibles librement et légalement, mais de donner accès à une part de l’univers de leur artiste préféré sous des formes très variées : certaines étant bien connues comme les concerts ou les produits dérivés, d’autres étant plus innovantes. L’une d’entre elle, qui est venue renforcer les diverses sources de revenus qui financent à présent le travail des auteurs, s’est d’abord fait connaître au début des années 2000 sous le terme de crowdfunding. Véritable mot valise qui recouvre en fait une réalité diverse mais qui se réfère à des pratiques très anciennes,il se définit simplement comme le recueil de fonds destinés à financer un nouveau projet par l’appel au plus grand nombre seulement permit par une collecte de très nombreuses petites sommes. Apparemment, rien de nouveau : la souscription, qui fût en effet une pratique très utilisée durant tout
le 19e siècle pour financer des monuments ou éditer des ouvrages d’art, correspond à une forme de démocratisation du mécénat jusqu’alors largement dominant.

« Les majors et les maisons de production les mieux structurées n’ont pas voulu laisser passer ce nouveau train, en reprenant des sites déjà existant ou en créant leur propre activité de crowdfunding. »

Il y eu bien dans les années 90 des groupes d’amateurs qui mirent leurs moyens en commun pour acheter des œuvres à de jeunes artistes en devenir, sur le principe
d’une propriété partagée et d’un accrochage tournant des tableaux chez les membres du club. Mais rien de comparable à ce qui a été rendu possible par la puissance du réseau numérique. C’est en effet la force du Net que de donner un élan nouveau à des pratiques existantes grâce à l’accès simplifié à de multiples réseaux, à la démultiplication du message par les réseaux sociaux et à l’utilisation des outils de micro-paiement. Parfois traduite par le terme de « colinvestissement », la pratique du crowdfunding ne semblait pas avoir de limite et paraissait pouvoir s’appliquer à tous les domaines. La musique a lancé le mouvement dès 1997, par habitude sans doute des chemins de traverse défrichés par les labels indépendants, avec une tournée aux Etats-Unis du groupe britannique Marillion financée par une levée de fond auprès des fans sur Internet.
Le cinéma, a suivi en 2004, avec la production du film Demain la Veille, grâce à une souscription organisée par la jeune société de production française Guyom Corp. Tout s’est ensuite accéléré : de nombreux sites de production de musique comme Sellaband aux Pays-Bas ou MyMajorCompany en France ; l’édition de livres ou de bandes dessinées avec Sandawe ; le journalisme avec Spot.Us. Des sites à vocation généraliste ont aussi vu le jour comme le New-Yorkais Kickstarter ou Indiegogo.com
de San Fransisco. qui aident au financement de toute sorte de projets, de la danse au théâtre, de la peinture à la photo. Les modèles économiques et les motivations de ses nouveaux modes de financement donnèrent lieu à des services mariant à des degrés divers les deux modèles initiaux. D’un côté, un mécénat populaire apporte son écot à des projets en devenir avec, comme seule rétribution, la satisfaction d’avoir été partie prenante d’une aventure artistique mais également de recevoir en retour des gratifications de plus en plus variées : éditions et objets collector, rendez-vous avec l’auteur, invitation à un concert, … De l’autre, l’investissement collectif répond à une logique financière, en permettant de caresser un espoir de revenus futurs, comme on mise en Bourse, mais avec un supplément d’âme.
Après une période pionnière qui vit se multiplier les initiatives isolées, une professionnalisation a rendu nécessaire une organisation progressive des entreprises. Les majors et les maisons de production les mieux structurées n’ont pas voulu laisser passer ce nouveau train, en reprenant des sites déjà existant ou en créant leur propre activité de crowdfunding. Cette année, j’ai pu participer au financement d’un reportage d’investigation d’un jeune reporteur parrainé par « Le Monde », au défilé d’une jeune créatrice de mode et apporter ma part au bouclage du budget de production du dernier album de Philippe Katerine que nous aidons modestement à faire son retour sur scène après une trop longue traversée du désert. @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » : La ville, média du futur
*Depuis 1997, Jean-Dominique Séval est
directeur marketing et commercial de l’Idate.