RTL conteste à Europe 1 la place de n°1 du numérique

En fait. Le 7 novembre, Christopher Baldelli, président du directoire de RTL Radio depuis trois ans, était l’invité de l’Association des journalistes médias (AJM). Alors que son audience à l’antenne est menacée d’érosion, la première radio hertzienne de France entend « faire mieux » dans le numérique.

En clair. Christopher Baldelli ne supporte pas qu’Europe 1 se déclare « radio leader sur
le numérique ». Pour le président du directoire de RTL Radio en France, « Europe 1 n’est pas le leader du numérique ». « Si l’on regarde le nombre de podcasts et l’audience du site web, c’est nous qui sommes leader du numérique. (…) Nous allons communiquer pour le dire », a-t-il affirmé. S’il ne conteste pas que sa concurrente de Lagardère Active est la numéro 1 en nombre de podcasts téléchargés par mois, comme au mois d’octobre avec plus de 6,3 millions, contre 4,7 millions pour RTL (voir Indicateur p. 10), il estime que c’est en revanche loin d’être toujours le cas tous les mois pour le site europe.fr. Bien que ce dernier soit arrivé en tête des sites web de radio sur les mois de novembre (grâce à un bond de 48 % à 9,8 millions de visites (1), contre 8,3 millions pour rtl.fr qui décline de 2 %), le rapport est en effet inversé sur le mois précédent. En octobre, rtl.fr reprend la tête avec plus de 8,5 millions de visites (+ 2%), contre 6,6 millions pour europe1.fr (- 23 %), ce dernier ayant dépassé sa rivale au mois de septembre. Bref, pour Christopher Baldelli qui dirige la première radio hertzienne de France, Europe 1 – la quatrième radio hertzienne – ferait dans l’abus de langage. « Nous avons un meilleure classement, non seulement en podcast, où nous sommes passés de quatrième à second, mais aussi sur Internet », insiste le patron de RTL, qui édite aussi Fun Radio (4,9 millions de visites sur le site web en novembre) et RTL2 (1 million de visites).
Malgré cette polémique, Christopher Baldelli reconnaît que les podcasts et le streaming live (2) est « une écoute en plus ». C’est une aubaine pour les radios généralistes dont l’audience globale a perdu 1 point de part de marché sur un an, pendant que les radios musicales gagnaient 1 point. Surtout, c’est une source de rajeunissement de l’auditoire dont l’âge moyen pour une généraliste est de 57 ans. Or les 25-34 ans sont les plus nombreux à recourir à la catch-up radio. « Le podcast est un plus formidable, comme
la télévision de rattrapage que j’ai vécue avec M6 Replay (3). Mais la catch up est partie plus vite en télé ; elle progresse en radio », s’est-il félicité. Il a en outre annoncé que
M6 Publicité Digital sera la régie des sites web de RTL, RTL2 et Fun Radio dès
janvier 2013. @

Exaspération culturelle

Cette semaine, les médias bruissent de rumeurs concernant la restitution publique des conclusions d’un rapport consacré aux nouvelles orientations de la politique culturelle du pays. Le gouvernement en a fait la commande avec l’espoir, plus ou moins avoué et peut-être illusoire, d’enfin réconcilier promotion de la création nationale et mutation technologique. Cet énième rapport sera-t-il à son tour refermé à peine ouvert après avoir suscité d’âpres débats et fait monter au créneau les représentants des différentes parties prenantes ? Rejoindrat- il ces prédécesseurs, comme le célèbre rapport Lescure de 2013 qui devait déboucher sur une série d’ajustements limités de nombreux dispositifs en place ? Des réformes ambitieuses étaient pourtant attendues, les moins bien intentionnés parlèrent de « rustines » pour le dispositif Hadopi. Un rapport qui signa, quoi qu’il en soit, le passage à un « acte 2 de l’exception culturelle » à la française.

« Les Européens sont ainsi en train d’enrayer
la malédiction selon laquelle les cultures nationales fécondes et originales ne s’exporteraient pas. »

Le numérique devient-il la vache à lait de la culture ?

En fait. Le 2 octobre, Aurélie Filippetti a présenté le budget 2013 du ministère de
la Culture et de la Communication – en baisse de 2 % par rapport à cette année,
à 7,4 milliards d’euros (dont 3,55 milliards d’euros pour la culture, la recherche
et les médias et 3.83 milliards pour l’audiovisuel public).

En clair. Bien que le numérique bouleverse de fond en comble les modèles économiques des industries culturelles, les budgets qui leur sont consacrés sont
« maintenus ». Il faudra attendre le printemps prochain pour savoir si le futur projet
de loi de Finances rectificatif 2013 prendra en compte les conclusions de la mission
de Pierre Lescure de l’ « Acte 2 de l’exception culturelle », lequel doit rendre son rapport final en mars prochain sur le financement de la création – cinéma, audiovisuel, musique, édition, presse, photo – à l’ère du numérique (1) et sur la Hadopi. Cette dernière voit son budget 2013 ramené à 8 millions d’euros (- 27 %), selon l’annexe
au projet de loi de Finances 2013. Pour le septième art, le gouvernement a décidé
de « préserver » le Compte de soutien à l’industrie des programmes audiovisuels (Cosip). En particulier, il met fin à « l’écrêtement du produit de la taxe sur les services de télévision (TST) acquittée par les distributeurs [les FAI et les éditeurs de chaînes, ndlr] » (2). En 2013, elle représentera 537,2 millions d’euros (- 0,3 %), dont 247 millions prélevés sur les FAI. Cependant cette TST, réformée pour entrer en vigueur le 1er janvier 2013, est contestée par le Commission européenne qui y voit une taxation des opérateurs télécoms contraire à la directive Autorisation du Paquet télécom. En outre,
« afin de contribuer au redressement des finances publiques, le fonds de roulement du CNC (3) subira un prélèvement exceptionnel à hauteur de 150 millions d’euros », a confirmé la ministre, tout en précisant que cela impactera les investissements du CNC dans le numérique. La taxe VOD, elle, s’élèvera à 30,25 millions (-7 %).
« En définitive, les recettes fiscales affectées au CNC en 2013 devraient être stables », tente de rassurer Aurélie Filippetti. Pour la filière musicale, « les dispositifs existants
sont maintenus » – malgré l’inquiétude des producteurs de musique de voir le crédit d’impôt absent du PLF 2013.
La presse, elle, bénéficiera de 516 millions d’euros d’aides (- 3,24 % sur un an), dont
35,5 millions d’euros pour le Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) – comprenant notamment le Fonds d’aide au développement des services de presse en ligne. Quant au livre, qui bénéficie de 250 millions d’euros, il a déjà vu en juillet dernier le taux réduit de TVA à 5,5 % rétabli au lieu des 7 %. @

Rapport de l’Assemblée des médias au gouvernement

En fait. Le 24 septembre, l’Association des Médias et du 7e Art a organisé toute la journée la 5e édition de l’Assemblée des médias (ex-La Nuit des Médias) présentée comme « la seule manifestation à réunir des professionnels de l’audiovisuel, du cinéma, des télécommunications et de l’Internet ».

En clair. Selon nos informations, la présidente de l’Association des Médias et du 7e Art, Jessica Miri Marcheteau, va remettre – dans les prochaines semaines – un rapport à la ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, laquelle a d’ailleurs clôturé les débats de cette journée annuelle (lire aussi EM@15, p. 4). Ce sera la première fois que cette association – soutenue par France Télécom, la SACD (1), le CNC, des producteurs audiovisuels (Atlantis Télévision et Maya Groupe), Médiamétrie à travers sa filiale Digitime ou encore Yacast (2) – remettra au gouvernement un rapport issu des réflexions des tables rondes de l’Assemblée des médias, afin notamment
d’« anticiper les mutations au sein de l’industrie des médias et du cinéma, et l’éclosion de nouveaux médias ». Cette contribution des mondes de l’audiovisuel, du cinéma,
des nouveaux médias, de la communication, des télécoms et d’Internet réunis ce jour-là arrivera à point nommé : pour alimenter les travaux non seulement de la mission Fiscalité numérique de Pierre Collin et Nicolas Colin, lesquels doivent faire des propositions cet automne pour « créer les conditions d’une contribution à l’effort fiscal du secteur [du numérique] mieux répartie entre ses différents acteurs », mais aussi ceux de la mission « acte II de l’exception culturelle » de Pierre Lescure, lequel doit rendre ses conclusions au printemps 2013.
Au-delà de la volonté de cet événement de « décloisonner » les médias, la création
et Internet, il ressort de ces « assises » un objectif d’amener les acteurs du Net à contribuer à la création de contenus médias, audiovisuel et cinématographique.
C’est le message qu’a par exemple voulu faire passer la presse traditionnelle. « Nous présentons au gouvernement un projet de loi pour que Google nous rémunère lorsqu’il utilise nos articles. Sinon, il y a pillage. Or, après huit mois de négociation, la firme de Mountain View nous répond que ‘’l’info n’a pas de valeur ; elle ne l’achètera pas’’ ! », s’est insurgé Francis Morel, PDG du groupe Les Echos et vice-président de l’IPG, nouvelle association réunissant les syndicats de la presse (SPQN, SEPM et SPQR).
La grande presse rejoint ainsi les industries culturelles, lesquelles veulent élargir à tous les acteurs du numérique les contribution au financement de la création : film, audiovisuel, musique, livre, … @

Chronologie des médias : immobilisme et critiques

En fait. Le 13 juillet, le Syndicat de l’édition vidéo numérique (SEVN) en a appelé au gouvernement pour soutenir le marché français du DVD, du Blu-Ray et de la VOD. Il souhaite en outre des « expérimentations » sur la chronologie des médias « visant à la réduction progressive du délai de sortie en vidéo ».

En clair. « Ces expérimentations doivent conduire à la mise en place de dérogations, encadrées mais réellement applicables par les éditeurs, pour des sorties vidéo avant quatre mois », explique Jean Yves Mirski, délégué général du SEVN. Cet appel à des
« expérimentations contractuelles » intervient au lendemain de la réunion interprofessionnelle sur la chronologie des médias qui s’est tenue au CNC (1) le 11 juillet. Les différents intervenants ont finalement décidé qu’il était urgent d’attendre… que soit nommée à partir du 1er septembre la mission élargie confiée à Pierre Lescure. C’est du moins la date fixée par la ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, lors de son audition par la commission des Affaires culturelle de l’Assemblée nationale le 11 juillet, avec un objectif précisé en Conseil des ministres
du 18 juillet d’avoir en mars 2013 des propositions. Cette mission ne se limitera pas
à la question de l’après-Hadopi, mais cherchera à faire émerger de nouveaux modèles de financement de la culture à l’ère numérique. La chronologie des médias, qui n’a pas bougé depuis l’accord de juillet 2009, pourrait ainsi sortir de son « immobilisme » d’ici
la fin de l’année. C’est du moins ce qu’espèrent la Société civile des Auteurs-Réalisateurs-Producteurs (ARP) et la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), non signataires de l’accord, qui veulent des aménagements tels que : ramener la fenêtre de diffusion de la vidéo à la demande par abonnement (SVOD) de 36 à 24 mois, et ne pas attendre 4 mois après la sortie en salle pour proposer en VOD à l’acte des films d’art et d’essai non financés par les chaînes (2). Mais le Bureau de liaison des organisations du cinéma (Bloc) – soit une quinzaine d’organisations du cinéma et majoritairement des producteurs (APC, SPI, SRF, …) – s’y oppose. Pourtant, les critiques se multiplient sur le manque de souplesse des « fenêtres » de financement
du cinéma français. Le président de l’Autorité de la concurrence, Bruno Lasserre, a déclaré le 9 juillet que « deux choses freinent les acteurs américains en France : la langue et la chronologie des médias. (…) Ni Netflix, ni Google, ni Apple ne peuvent dans l’état actuel de la législation française proposer des films récents en VOD ». Quant à la Commission européenne, elle veut la réformer pour l’adapter au « marché unique du numérique ». @