Vivendi : groupe diversifié en manque de synergies

En fait. Le 1er mars, le groupe « diversifié » dans la télévision, les télécoms,
la musique et les jeux vidéo a présenté ses résultats 2010 – bénéfice net de
2,7 milliards d’euros (+ 4,4 %) et chiffre d’affaires de 28,9 milliards (+ 6,4 %) .
Son président, Jean-Bernard Lévy, veut décloisonner ses « métiers ».

En clair. Vivendi ne rime pas vraiment avec synergies. A l’heure de la convergence numérique entre audiovisuel et télécoms, le groupe Vivendi fait aujourd’hui plus figure de conglomérat – où chaque filiale travaille dans son coin – que de véritable groupe intégré et cohérent. Qui a-t-il de commun entre les 21 millions d’abonnés mobile de SFR (12,5 milliards d’euros de revenus), les 12,7 millions d’abonnés à Canal+ (4,7 milliards), les 12 millions d’abonnés dans le monde au jeu en ligne World of Warcraft d’Activision Blizzard (3,3 milliards d’euros) ou encore les ventes de musique d’Universal Music (4,5 milliards) ? Si toutes ces activités sont en hausse sur un an (1), la croissance reste à un chiffre (de 2% pour Universal Music à 9,6 % pour Activision Blizzard) et cela n’en fait pas de réels relais de croissance interne pour le groupe dirigé par Jean-Bernard Lévy. Pourtant la convergence est désormais une réalité mais les différentes filiales du groupe semblent l’ignorer. Est-ce le syndrome AOL-Time Warner qui empêche Vivendi de faire jouer les synergies internes ? « Plus que jamais, le consommateur de services et de contenus numériques est au cœur de nos priorités. Nos investissements dans les réseaux, les plateformes et les contenus s’accompagnent d’efforts soutenus pour développer les partages d’expertises et les projets communs entre nos métiers et pour stimuler l’innovation, afin d’accélérer notre croissance organique », a pourtant expliqué le président du directoire de Vivendi lors de la présentation de ses résultats annuels.
Mais il s’agit plus à ce stade d’un objectif que d’un constat. Dans une interview publiée
le 14 décembre dernier par Wall Street Journal, Jean-Bernard Lévy a clairement exprimé sa volonté de faire bouger les lignes : « Le monde des réseaux de télécommunications et du contenu sont en train de fusionner. Et nous sommes au milieu. (…) Je pense que nous pouvons désormais pousser l’efficacité et l’innovation en nous disant : “pourquoi ne pas travailler ensemble ?“ », a-t-il dit. Plus récemment dans Les Echos datés du 1er mars, cet X-Telecom (qui fête ses 56 ans le 18 mars ses 9 ans à la tête du groupe) a fixé sa priorité pour cette année : « Recentré, Vivendi doit trouver dans chacun de ses six métiers des relais de croissance, quitte à déplacer les frontières de ses activités, pour accroître la valeur ajoutée ». Reste que cette convergence ne pourra pleinement se faire que lorsque Vivendi aura racheté les 20 % de Lagardère dans Canal+ et les 44 % de Vodafone dans SFR. @

UltraViolet veut être une alternative à iTunes

En fait. Le 20 juillet, plus d’une soixantaine de groupes de la high-tech et des médias – réunis dans le consortium Digital entertainment Content Ecosystem (DECE) – ont annoncé qu’ils testeront à l’automne leur nouveau format musique
et vidéo baptisé UltraViolet, lisible sur tous les terminaux.

En clair. De Microsoft à NBC Universal/Comcast, en passant par Paramount, Warner Bros., Sony Pictures, Cisco, IBM, Hewlett-Packard, Adobe, Nokia, Philips, LG Electronics, DivX, CinemaNow, Alcatel-Lucent et Technicolor (ex-Thomson), ils
sont aujourd’hui près de 60 industriels du cinéma, des médias audiovisuels et des technologies à proposer une alternative à la presque toute puissance d’Apple et
son format propriétaire ALAC (Apple Lossless Audio Codec) utilisé pour les fichiers musicaux et vidéos sur iTunes Store. Comme la marque à la pomme ne brille pas
par son ouverture (1) (*) (**) et s’impose progressivement partout dans le monde,
la concurrence s’organise depuis le début de l’année au sein du consortium « cross-industry » DECE (Digital Entertainment Content Ecosystem). Objectif : tenter d’imposer une nouvelle norme qui doit être testée à la rentrée aux Etats- Unis. Les spécifications techniques d’UltraViolet seront ensuite proposées sous licence avant la fin de l’année. Fonctionnant à la manière du streaming (sans téléchargement de fichier préalable) et dans un environnement de cloud-computing (ressources de stockage informatique accessible à distance), elle offrira « le choix et la liberté d’acheter, de gérer et de regarder des films numériques, des programmes télévisés ou d’autres contenus de divertissement ». Le logo UltraViolet sera à terme estampillé sur les terminaux et services, afin que le grand public les identifie facilement.
« En complément du DVD et du Blu-ray sur les marchés résidentiels du divertissement, UltraViolet permettra aux consommateurs de regarder leurs programmes numériques sur de multiples plateformes, telles que des télévisions connectées [à l’Internet], des micro-ordinateurs, des consoles de jeux, des smartphones et des tablettes, de manière aisée et continue », explique Mitch Singer, président de DECE et par ailleurs directeur technique de Sony Pictures Entertainment. Les utilisateurs pourront créer gratuitement leur compte sur le site web UltraViolet (2), incluant notamment un « panier de droits » (Digital Rights Locker) qui seront interopérables. Les studios hollywoodiens y voient un moyen de compenser rapidement la baisse des ventes de DVD. Le nom UltraViolet a été retenu car il s’agit en fait d’un dérivé du format Blu-ray. Apple n’est pas le seul à être absent de ce consortium. Disney, qui pousse son propre format appelé KeyChest, ou encore Amazon n’ont pas (pour l’instant ?) rallié cette initiative. @

VOD et catch up TV : les obligations pour 2011

En fait. Le 15 juin, le CNC a confié, à Sylvie Hubac, une mission jusqu’à fin 2010
sur les services de médias audiovisuels à la demande (SMAd). Le 14 juin, le CSA
a annoncé le lancement d’une consultation publique – jusqu’au 28 juin – sur un projet de délibération portant sur diverses obligations des SMAd.

En clair. Le projet de délibération que le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a
adopté en séance plénière, le 1er juin dernier, est le pendant du projet de décret sur
les obligations des services de médias audiovisuels à la demande (SMAd) – vidéo
à la demande et télévision de rattrapage en tête. Alors que le décret à venir va les obliger à investir dans la production cinématographique ou audiovisuelle française
et européenne, la future délibération porte cette fois sur des obligations liées à la déontologie, la protection du jeune public et l’accessibilité des programmes (aux personnes sourdes, malentendantes, aveugles ou malvoyantes). Pour l’heure, le décret SMAd se fait attendre. « L’adoption de ce texte a pris un peu de retard, notamment
du fait de la concertation approfondie qui a présidé à son élaboration », a reconnu le ministre de la Culture et de la Communication, Frédéric Mitterrand, lors du colloque NPA-Le Figaro, le 10 juin. Et d’ajouter : « Je souhaite que ce dispositif entre en vigueur au 1er janvier 2011.
Nous entendons le publier d’ici la rentrée 2010, en prenant évidemment en compte les différents organismes dont l’avis est requis : le CSA, le Conseil d’Etat et la Commission européenne ». Cependant, la Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) a dû revoir sa copie à la lumière des critiques formulées par les entreprises de la vidéo, du cinéma, du Web et des télécoms (1) (*) (**) (***) (****).
L’une d’elles est le risque de « distorsion de concurrence » entre éditeurs de SMAd de différents pays européens. « Seule cette large adhésion permettra d’éviter les risques qui pèsent aujourd’hui sur la régulation des [SMAd] : la délocalisation et la concurrence déloyale d’opérateurs non régulés », a indiqué Frédéric Mitterrand. Le distinguo VOD par abonnement-VOD à l’acte et le principe de seuil de chiffre d’affaires au-delà duquel des obligations de production s’appliqueront sont entérinés. De son côté, le Centre national du cinéma et de l’image animée a indiqué le 15 juin dernier qu’il confiait à Sylvie Hubac une mission sur « certains aspects complémentaires de la régulation » des SMAd et « leur impact sur la création », notamment sur « la mise en oeuvre concrète du principe de rémunération minimale garantie (…) pour l’exploitation de films de cinéma, ainsi que du principe d’accès non discriminatoire des services de [VOD] aux réseaux de distribution ». Conclusions : fin 2010 @

Le web et le cinéma critiquent le décret « SMAd »

En fait. Le 16 avril, s’est achevée la consultation publique de la Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC), du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC)
sur le projet de décret sur les médias audiovisuels à la demande.

En clair. Le projet de décret sur les services de médias audiovisuels à la demande (SMAd), qui prévoit les contributions de préachat ou de coproduction de films européens ou français, ne fait pas l’unanimité ! Après l’opposition de Marc Tessier, président du Syndicat des éditeurs de vidéo à la demande (SEVD), à ce texte « qui
ne se comprend pas » (lire EM@ 11, p. 4), c’est à l’Association des services Internet communautaires (ASIC) de critiquer ce texte. Pour ses membres, comme Dailymotion ou Youtube (Google), « une réelle ambiguïté demeure quant au champ d’application de ces mesures ». Car le projet de décret semble méconnaître « la frontière entre SMAd
et services d’hébergement ». L’Asic, coprésidée par Giuseppe de Martino (Dailymotion) et Pierre Kosciusko-Morizet (PriceMinister), demande donc au ministère de la Culture et
de la Communication – dans leur contribution que Edition Multimédi@ s’est procurée –
de maintenir cette frontière « en remplaçant systématiquement [dans le texte] le terme “éditeurs de services” par le terme “éditeurs de services de médias audiovisuels” ».
Et, dans le cas d’offre combinant par exemple vidéo à la demande (VOD) et hébergement de contenus des internautes, seule la partie du chiffre d’affaires générée par l’activité « SMAd » (VOD, catch up TV, …) devrait être concernée. De même, le seuil de déclenchement des 15 millions d’euros prévu pour la VOD par abonnement ou à l’acte ne devrait concerner que le chiffre d’affaires « SMAd ». Insatisfaction également du côté du cinéma. Alors que le Bureau de liaison des organisations du cinéma (Bloc) – qui a obtenu un délai d’une semaine (1). – n’a répondu qu’en fin de semaine dernière, la Socièté civile des Auteurs, réalisateurs et producteurs (ARP) demande, elle, à une
« scission plus claire, dans le régime des obligations, entre télévision de rattrapage (…) et des SMAd », afin de « lever une ambiguïté ». En outre, selon elle, le décret devrait préciser le régime applicable aux SMAd « mixtes » (à l’abonnement et à l’acte). L’ARP répète ce qu’elle a déjà dit au Conseil supérieur audiovisuel (CSA), à savoir opter pour « un régime adapté d’obligations pour les SMAd qui réalisent entre 5 et 15 millions d’euros de chiffre d’affaires » et à un autre régime « d’obligations plus importantes pour les services d’abonnement et les services mixtes ayant des recettes d’abonnement majoritaires qui réalisent plus de 15 millions d’euros de chiffre d’affaires net annuel » @

Xavier Couture, Orange : « Remettre en cause nos exclusivités serait une très mauvaise nouvelle »

Nommé il y a un peu plus d’un an et demi à la tête de la direction des Contenus du groupe France Télécom, Xavier Couture dresse un premier bilan de son action et explique à Edition Multimédi@ la stratégie d’Orange dans ce domaine.

PROPOS RECUEILLIS PAR CHARLES DE LAUBIER

Edition Multimédi@ : Qu’avez-vous mis en place depuis 20 mois ? Quelle place représente maintenant la direction Contenus d’Orange chez France Télécom ?
Xavier Couture :
Depuis mai 2008, mon action a été de donner corps à la stratégie de contenus voulue par le président Didier Lombard, et initiée par mes prédécesseurs. Orange a gagné une véritable légitimité dans les contenus. L’année 2008 a été très riche pour notre activité, avec le lancement de la chaîne « Orange foot », devenue depuis « Orange sport », et du bouquet « Orange cinéma séries ». Cela nous a permis d’enrichir l’offre de la « TV d’Orange » et de poursuivre notre politique de différenciation par rapport aux autres opérateurs et fournisseurs d’accès à Internet (FAI). En 2009, nous avons consolidé la stratégie contenus : les chaînes sont montées en puissance et se sont enrichies en terme de fonctionnalités (par exemple, fonction redémarrage sur « Orange cinéma séries ») ; nous avons mené une politique active
de partenariats innovants avec les professionnels du monde des médias. Ainsi, nous proposons à nos abonnés les services de télévision de rattrapage de France Télévisions [accord sur trois ans devrant être renégocié mi-2010, ndlr] et M6, ou encore, nous avons signé un accord avec France Télévisions pour les intégrer à
2424 actu, notre service d’actualité multi supports.
La « TV mobile d’Orange » a également connu une belle progression – le phénomène iPhone y ayant sans doute contribué – avec aujourd’hui une moyenne de 1 million d’utilisateurs actifs par mois. Enfin, citons la signature – le 10 novembre 2009 – d’un accord historique avec la majorité des organisations professionnelles du cinéma français pour notre bouquet « Orange cinéma séries ». Désormais, nous sommes
un acteur avec lequel il faut compter ! En 2010 nous poursuivrons notre politique
de partenariats.