Wearables encore perçus comme gadgets, les montres connectées commencent à décevoir

Huit ans et cinq ans après les lancements de respectivement l’iPhone et l’iPad, Apple lance le 9 mars l’« iWatch ». Mais le design de la marque à la pomme suffira-t-il à faire décoller le marché encore hésitant de la montre connectée ? Pour l’heure, le gadget se le dispute à l’innovation.

« Les Français ne s’intéressent pas aux wearables ». C’est le constat que fait l’institut d’études et de marketing Kantar, filiale du groupe britannique WPP (numéro un mondial de la publicité), sur la base d’un sondage portant sur les montres, bracelets, lunettes et vêtements connectés (1). De quoi jouer les rabat-joie, alors que le prêt-à-porter électronique tenait la vedette début mars au Mobile World Congress de Barcelone.
En France, ils sont 64 % à déclarer ne pas avoir l’intention d’acquérir une montre connectée dans les douze prochains mois (59 % de ceux qui portent une montre traditionnelle). « Le chiffre est implacable. Autre chiffre cruel : seulement 1,2 % des Français possèdent actuellement une montre ou un bracelet connectés », commente Romain Brani, directeur adjoint chez Kantar.

Le public n’est pas à l’heure
La majorité des sondés ne trouvent pas d’utilité à la montre connectée et le prix est perçu comme « un frein majeur », 76 % n’étant pas prêt à payer plus de 200 euros pour une montre ou un bracelet connectés. L’Apple Watch devrait être vendue à partir de 350 dollars (2) et même très cher pour l’« Apple Watch Edition » dorée à l’or jaune ou rose 18 carats ! Entre les geeks et les millionnaires, l’e-montre doit encore trouver son public. Mais l’autre problème est que le smartphone remplit déjà toutes les fonctions
de ces montres dites « intelligentes » prétendent apporter (3) : notifications, navigation/géolocalisation, passer des appels audio ou vidéo, envoyer des messages instantanés, écouter de la musique, paiement sans contact/NFC, prendre des photos, contrôle vocal, … Quant à la commande vocale de ces minis terminaux accrochés au poignet, fonction déjà peu utilisée sur les smartphones (seulement 2 % des sondés),
« elle agace plus qu’elle n’incite ». Et globalement, près de 20 % des Français interrogés disent clairement : « Je ne comprends pas cette technologie » ! Les fabricants de montres connectées ou « smart watches » – Samsung, Google, Sony, Microsoft, Motorola, LG, HTC, Huawei, Withings, Pebble, Jawbone et maintenant Apple (4) – doivent encore séduire le public. Les smart watches sont en tout cas citées en premier parmi les wearables, devant les accessoires de fitness et de santé, les lunettes connectées et les e-textiles. Pour faire oublier leur côté « gadget », tous les fabricants s’affrontent sur le terrain du design mais avec une tendance à imiter les montres classiques (couronne, cadran métallique rond, bracelet en cuir, …). C’est ce critère qu’est bien sûr attendu aussi la marque à la pomme, dont l’iWatch est présentée le
9 mars (5). « Apple veut clairement faire appel à la partie la plus irrationnelle et viscérale de notre prise de décision, en axant avant tout sa communication sur le design de l’objet [look traditionnel, bien que le cadran soit carré, ndlr].Faire appel au viscéral plutôt qu’au rationnel pourrait être le meilleur moyen d’accroître enfin l’intérêt des consommateurs pour ces nouveaux gadgets », indique Carolina Milanesi, directrice d’étude chez Kantar.
Selon l’Idate, les montres connectées devraient représenter plus de 60 % des 20 millions de produits prêt-à-porter électronique commercialisés dans le monde en 2014
– soit 12 millions de ces « smart watches ». Et ses prévisions tablent sur un total des ventes de ces équipements de 123 millions en 2018 grâce à une croissance exponentielle de 70 % en moyenne par an en volume. Mais l’institut GfK constate un bien moindre engouement sur le terrain : seulement 4 millions de montres connectées vendues en 2014 dans le monde, dont quelque 190.000 en France, et s’en tient à une prévision de plus de 26 millions d’unités cette année. « De nombreux consommateurs ne perçoivent pas encore les avantages que présentent les montres connectées », estime aussi Jan Wassmann, analyste chez GfK. L’institut indique qu’il s’est vendu
plus de bracelets connectés dans le monde (13,5 millions en 2014) que de montres connectées. Ces bracelets mesurent l’activité physique (marche, course, vélo, randonnée, …), le rythme cardiaque, la qualité du sommeil ou encore le nombre
de calories consommées (quantified self).

« iWatch » : Tim Cook joue son avenir
Qu’à cela ne tienne : dans sa course contre la montre, Apple a prévu de vendre 5 à 6 millions de son « iWatch » dès sa commercialisation dans le monde au printemps. Tim Cook, le PDG d’Apple, sera-t-il à l’iWatch ce que Steve Jobs, le défunt fondateur, a été à l’iPhone et à l’iPad ? La firme de Cupertino a en tout cas les moyens financiers pour jouer gros dans cette aventure industrielle. Il lui sera toujours temps de remettre les pendules à l’heure… L’année 2015 sera donc décisive pour les montres « gadgets ». @

Charles de Laubier

Avec l’arrivée de Carrefour, le marché français de la VOD s’éclate encore un peu plus

Est-ce une bonne nouvelle pour le marché français de la vidéo à la demande (VOD) ? Carrefour a lancé le 27 janvier un service baptisé Nolim Films – sur Nolim.fr, déjà librairie en ligne. La France compte déjà plus de 80 offres VOD
à l’acte ou par abonnement, alors que les ventes ne décollent pas.

Carrefour arrive un peu tard sur un marché français de la VOD déjà saturé d’un trop plein d’offres légales de films et séries en ligne, aux catalogues qui laissent souvent à désirer en termes de qualité et de profondeur – sans parler du manque de fraîcheur liée aux contraintes réglementaires de la chronologie des médias. D’après le site Offrelegale.fr que gère l’Hadopi, il y a pas moins de
81 services de VOD (à l’acte) ou SVOD (par abonnement) en France (1) – sans compter Nolim Films non encore référencé.

En attendant Amazon Prime en France
Apple avec iTunes et les opérateurs télécoms (Orange, SFR, Numericable SFR, BBox VOD, …) dominent le marché, suivis des offres des chaînes de télévision (MyTF1 VOD, CanalPlay, …) et des acteurs indépendants (Videofutur, Filmo TV, Wuaki, MegaVOD, Jool Vidéo, …). Le lancement de l’offre SVOD de Netflix en France il y a à peine cinq mois n’a pas bousculé le marché, malgré une campagne de publicité soutenue et une couverture médiatique sans précédent (2). Ce qui devrait refroidir les ardeurs d’Amazon Prime qui lorgne la France.
Cet éclatement du marché du cinéma à la demande ne facilite pas la tâche des consommateurs qui se perdent dans les méandres des différents catalogues et qui éprouvent de la frustration à force de ne pas trouver les oeuvres recherchées – le nouveau portail http://vod.cnc.fr y remédiera- t-il ? Malgré la pléthore de plateformes, l’offre de films disponibles ne dépasse à peine les 12.000 oeuvres : 12.160 titres précisément à septembre 2014, selon le CNC. Ceci explique sans doute cela : il y a
une quasi stagnation du marché français de la VOD et un succès grandissant des
sites web favorisant le piratage. Selon les cabinets NPA Conseil et GfK, la vidéo à
la demande en France (VOD et SVOD) n’a progressé que de 5 % sur un an, à 225 millions d’euros de janvier à novembre 2014. C’est un peu mieux que l’année 2013
qui affichait pour la première fois un recul du chiffre d’affaires de près de 3 %, à 245 millions d’euros.

L’arrivée du géant de la grande distribution, avec sa force de frappe, donnera-t-il une nouvelle impulsion à la VOD sur l’Hexagone. « Nous voulons devenir le catalogue le plus large de vidéos digitales en France, nous aurons 3.000 références au lancement sur le site Nolim.fr (3), et chaque jour, nous ajouterons des dizaines de films et séries », a promis Emmanuel Rochedix (photo), directeur culture (physique et digital) de Carrefour depuis octobre 2012. Après une première expérience en 2008 avec Glowria (devenu par la suite Videofutur chez Netgem), Carrefour se lance à nouveau dans la VOD – sur Nolim.fr mais pas via les box des fournisseurs d’accès à Internet (FAI)…
A-t-il tardé à se relancer sur le marché de la vidéo dématérialisée pour préserver ses ventes de DVD et Blu-ray, dont il est le troisième distributeur de en France ? Impacté directement par la chute des ventes de vidéos sur supports physiques, un segment de marché en chute de 14 % en valeur cette année (4), l’enseigne de grande distribution se devait de réagir. D’autant que les ventes de vidéo en ligne sont encore loin de compenser la baisse continue de celles de la vidéo physique (divisées par deux en
dix ans).
Nolim Films propose notamment la solution dite UltraViolet. Ce standard développé
par le consortium international Derec (5), lequel réunit des industriels et les majors du cinéma NBC Universal, Paramount, Warner Bros et Sony Pictures (mais pas Disney), permet à Carrefour d’inciter ses clients à continuer à acheter des supports vidéo physiques en leur permettant de récupérer en ligne et sans surcoût la copie numérique du film ou de la série. Un coupon avec un code UltraViolet est placé à cet effet dans le boîtier. Aux Etats-Unis, où ce standard a été lancé en 2011, les grands distributeurs Walmart et Target l’ont adopté. Lancé discrètement en France fin 2013, avec comme partenaires Sony Pictures ou Flixster (jusqu’à l’arrivée de Carrefour), ce standard ne totalise pour l’instant que 120.000 comptes ouverts sur le marché français. Mais UltraViolet compte aujourd’hui quelque 21 millions de comptes ouverts dans le monde (dont 18,7 millions aux Etats-Unis).

Attrait du téléchargement définitif (EST)
En France, il pourrait contribuer à la démocratisation du téléchargement définitif ou EST pour Electronic Sell Through (6). Alors que la VOD à l’acte en France est à la peine et que la SVOD est encore embryonnaire, l’achat définitif de films et séries dématérialisés (achetés une fois pour le stocker chez soi) devrait prendre de l’ampleur en 2015. Selon le cabinet NPA Conseil, l’EST aurait généré l’an dernier 50 millions d’euros de chiffre d’affaire et pourrait atteindre en 2018 de 80 millions d’euros. @

Charles de Laubier

Etats-Unis : des fréquences à prix d’or pourraient déstabiliser la concurrence à quatre opérateurs mobile

Le résultat des enchères en cours aux Etats-Unis pour le spectre 1.700/2.100 Mhz, et surtout l’an prochain pour le spectre 600 Mhz, sera déterminant pour la structuration du marché mobile américain et confirmera (ou non) la viabilité
d’un marché à quatre opérateurs. Ce que surveille l’Europe…

Internet devrait tourner à la guerre des plateformes

En fait. Le 19 novembre, l’Idate a présenté – lors du DigiWorld Summit qu’il organisait à Montpellier – ses quatre scénarios pour le futur d’Internet d’ici à 2025. Son auteur, Vincent Bonneau, directeur Internet de l’institut, a indiqué
celle qui était « la plus probable : la guerre des plateformes ».

Vidéos courtes au Mipcom : le format qui en impose

En fait. Du 13 au 16 octobre, s’est déroulé à Cannes la 30e édition du Marché international des contenus audiovisuels (Mipcom), organisé par l’anglo-néerlando-américain Reed Elsevier : plus de 4.500 acheteurs, dont 1.000 du monde digital, et 13.500 visiteurs s’y sont rendus. Le contenu court s’impose.