Le smartphone suscite l’intérêt des producteurs TV

En fait. Du 4 au 7 avril s’est tenu à Cannes le 52e Marché international des programmes de télévision (MipTV), organisé par Reed Elsevier qui parle de
« contenus TV & digitaux ». Le téléphone mobile – le plus répandu des écrans audiovisuels, surtout chez les jeunes – suscite de nouvelles stratégies.

En clair. Vivendi a annoncé durant le MipTV le lancement en septembre prochain de séries créées spécialement pour les smartphones. Cette offre, baptisée Studio+, sera constituée de séries de formats courts et d’une application pour mobiles pour les diffuser. C’est Dominique Delport, qui a remplacé Rodolphe Belmer (ex-DG de Canal+) à la présidence de la filiale Vivendi Contents, qui pilote cette initiative tournée vers la jeune génération. Il a précisé que chaque série sera dotée d’un budget de 1 million d’euros, pour dix épisodes de 10 minutes chacun – d’une qualité d’image qui n’a rien
à envier à celle de la télévision. Ces productions, au nombre de près d’une centaine, seront vendues dans le monde entier, en partenariat avec des opérateurs télécoms. Studio+ a déjà à son catalogue des dizaines de séries courtes telles que « Madame Hollywood », « Urban Jungle », « Kill Skills », « Amnesia » ou encore « Blanca ». Vivendi n’est pas le seul groupe de médias à s’intéresser aux smartphones comme écran de films très courtsmétrages. Le groupe américain Vice Media, qui était présent au MIPDigital Fronts dédié aux productions en ligne et aux MCN (1), veut aussi développer des productions originales notamment pour téléphones mobiles et tablettes très prisés des jeunes. Son fondateur Shane Smith va lancer une douzaine de chaînes « Viceland » en Europe. En France, c’est Matthieu Pigasse, vice-président de la banque Lazard en Europe et propriétaire (2) du magazine Les Inrockuptibles, de Radio Nova et d’un tiers du groupe Le Monde, qui assure son lancement à l’automne prochain sur CanalSat.
Autre groupe américain : Viacom, qui détient les studios hollywoodiens Paramount, est lui aussi en quête de nouveaux programmes numériques où le mobile sera bien pris en compte. C’est l’un des nouveaux objectifs de Philippe Dauman, son PDG franco-américain, pour transformer Viacom.
Selon une étude d’Eurodata TV Worldwide, organisme international créé par Médiamétrie, la télévision se regarde de plus en plus sur les autres écrans et en différé. Le smartphone rivalise avec le téléviseur. En France, le téléphone mobile et la tablette progressent depuis 2014, tandis que le téléviseur et l’ordinateur sont stables. Les Français sont désormais plus nombreux à utiliser quotidiennement le téléphone mobile (61,2 %) que l’ordinateur (59,3 %). @

Musique : la vidéo pèse 65 % du streaming en France

En fait. Le 8 mars, le Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) a dressé le bilan du marché français de la musique enregistrée : 426 millions d’euros, en recul de – 7 %, dont 152,3 millions pour les revenus du numérique,
en hausse de + 14,7 %. Le streaming musical est dominé par la vidéo qui
rapporte peu.

En clair. Le nombre de titres consommés en streaming au cours de l’année 2015 en France a atteint la barre des 50 milliards de titres, dont 65 % sont de la musique en vidéo et les 35 % restants de l’audio. C’est ce qu’a révélé le Snep – qui regroupe notamment les majors de la musique (Universal Music, Sony Music et Warner Music) – lors de la présentation de son bilan 2015, en s’appuyant sur les chiffres des plateformes numériques et du cabinet d’étude GfK. Or le Snep constate que si près des deux tiers des titres musicaux streamés sont de la vidéo, celle-ci ne génère que 10 % des 104,2 millions d’euros de revenus totalisés par le streaming dans son ensemble l’an dernier. Autrement dit, le streaming audio représente à peine plus d’un tiers des titres musicaux streamés mais rapporte 90 % des revenus totaux du streaming. « En France, un streamer YouTube rapporte 54 fois moins qu’un abonné à un service audio et 3 fois moins qu’un utilisateur de service audio gratuit », a déploré le directeur général du Snep, Guillaume Leblanc, qui en appelle à une « nécessaire correction du transfert de valeur ». En monnaie sonnante et trébuchante, cela veut dire que le revenu annuel du producteur par utilisateur en 2015 a été de 27 euros par abonnement streaming audio (1), mais seulement de 1,5 euros pour le streaming financé par la publicité, et seulement de 0,5 euro pour le streaming vidéo gratuit.
Assistant à la présentation, Denis Thébaud, PDG de Xandrie et acquéreur fin décembre de Qobuz (2), la plateforme de musique en ligne de haute qualité sonore, a interrogé le Snep sur ce constat : « Sur Qobuz, cela pourrait nous intéresser d’avoir une offre vidéo. Mais j’ai été frappé par la divergence des revenus. Car 54 fois plus, c’est énorme pour le même service (que le streaming audio) mais avec la vidéo en plus. Avec l’image, on se dit que cela devrait être plus cher… ».
Ce à quoi Stéphane Le Tavernier, le président du Snep et directeur général de Sony Music France, lui a répondu : « Pour l’instant, il n’existe pas d’offres vidéo sur les principales plateformes à part YouTube. Mais nous sommes tout à fait ouverts à tout nouveau modèle qui permettrait de continuer à développer l’usage. Si vous avez un bon modèle et techniquement les possibilités d’attirer de la clientèle sur un modèle de vidéo payant, la totalité des producteurs seront ravis d’y participer ». A bon entendeur… @

Guillemot contre Bolloré : bras de fer autour d’Ubisoft et de Gameloft qui veulent garder leur indépendance

Les frères Guillemot à la tête des deux éditeurs français de jeux vidéo Ubisoft et Gameloft – le premier fête ses 30 ans en mars et le second est la cible d’une OPA hostile de la part de Vivendi – ne veulent pas sacrifier leur indépendance. Vincent Bolloré « rampe » pour tenter de prendre le contrôle des deux sociétés.

Pas sûr que le milliardaire et homme d’affaires Vincent Bolloré (photo), président du conseil de surveillance du groupe Vivendi et par ailleurs PDG du conglomérat Bolloré, s’attendait à autant de résistance de la part des cinq frères Guillemot – Yves, Michel, Claude, Gérard et Christian. C’est cinq contre un. Le seul point commun entre euxet leur prédateur, c’est qu’ils sont Bretons d’origine ! Les cinq frères sont originaires de Carentoir, tandis que l’héritier Bolloré est de Cornouaille. Mais ne cherchez pas plus loin, il n’y a pas d’affinités. C’est même plutôt la guerre des Bretons ! Et pour cause, les Guillemot sont très remontés contre Bolloré depuis que ce dernier a lancé Vivendi il y a quatre mois à l’assaut de leur deux groupes : Ubisoft, qui va fêter ses 30 ans en mars 2016, et Gameloft, qui a 17 ans d’âge. Mais Yves Guillemot et Michel Guillemot – PDG respectivement d’Ubisoft et de Gameloft – ne veulent pas passer sous la coupe de Vivendi recentré sur les contenus et les médias. A la tête du troisième groupe mondial de jeux vidéo (derrière Activision Blizzard et Electronic Arts), Yves l’a encore martelé lors de la journée des investisseurs d’Ubisoft qui s’est tenue le 18 février dernier, tout en pensant fortement à son frère Michel chez Gameloft, confronté depuis le 19 février
à une offre publique d’achat (OPA) jugée « hostile » lancée par Vincent Bolloré.

Le marché français du jeu vidéo fait fi de la crise et s’apprête à atteindre 3 milliards d’euros cette année

Pendant que la crise économique perdure, les Français s’amusent. Les jeux vidéo ont généré en 2015 un chiffre d’affaires en croissance de 6 % à 2,87 milliards d’euros et devraient franchir la barre des 3 milliards cette année. C’est un secteur cyclique soutenu par les pouvoirs publics.

« La transition vers les consoles de génération 8 est arrivée à son terme. Le marché a définitivement basculé vers ce 8e cycle. Sur les consoles de salon, nous constatons une migration du public très rapide entre la génération 7 et une génération 8 en très forte croissance », constate Jean-Claude Ghinozzi (photo), président du Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (Sell) et par ailleurs directeur de la division grand public de Microsoft France.

La tentative d’un retour à un triopole rappelle de bien mauvais souvenirs (entente illicite et prix élevés)

C’était fin 2005 : le « triopole mobile » de l’époque – Orange, SFR et Bouygues Télécom – écopait d’une amende record de 534 millions d’euros pour constitution de cartel afin de préserver leurs parts de marché et des prix élevés. Ce précédent historique devrait dissuader de retourner à trois opérateurs télécoms.

Ce fut le 30 novembre 2005 – il y a maintenant plus de dix ans – que les trois opérateurs mobiles Orange, SFR et Bouygues Telecom avaient été condamnés à, d’une part, une sanction pécuniaire de 442 millions d’euros pour entente illicite sur trois ans (2000-2002) revenant à se répartir le marché et, d’autre part, à 92 millions d’euros pour avoir échangé régulièrement des informations confidentielles (1) sur le secteur durant plusieurs années (1997-2003).