La 5G : tout le monde en parle mais personne ne l’a !

En fait. Le 1er mars, le Mobile World Congress – grand-messe internationale consacrée au téléphone mobile et organisée sur quatre jours à Barcelone par l’association mondiale des opérateurs mobile GSMA – a fermé ses portes.
La 5G sort des labos pour entrer en phase de tests. Et commercialement ?

En clair. Pour l’instant, c’est l’arlésienne depuis de dix ans (1) : toujours annoncée, mais jamais commercialisée (2). Et il aura fallu attendre décembre 2017 pour que soit enfin publiée la première standardisation – appelée « Release 15 » – de la norme 5G par le 3GPP – The Third Generation Partnership Project, basé en France à Sophia Antipolis et chargé du développement technique des normes mobiles (GSM, GPRS, EDGE, UMTS, LTE et LTE Advanced). Alors que la première couche du standard
n’est pas encore sèche, la 5G du 3GPP est maintenant entre les mains de l’Union internationale des télécommunications (UIT) – qui dépend de l’ONU – pour être évaluée avant d’être estampillée « IMT-2020 » d’ici… un an et demi. Il faudra encore patienter.
« La soumission finale et aboutie de la norme 3GPP, englobant les “Release 15” et “Release 16”, est planifiée pour juillet 2019 », a précisé Kevin Flynn, directeur marketing et communication de l’organisme de standardisation le 24 janvier dernier. Initialement prévue pour 2020, la commercialisation de la 5G pourrait néanmoins démarrer dès l’an prochain. Il est même question que, aux Etats-Unis, AT&T et Verizon lancent leurs services mobiles de cinquième génération dès fin 2018. Mais cela, au risque d’être du « Canada Dry » de 5G : cela y ressemblera mais il s’agira plus de
« 4G++ », en attendant la disponibilité de terminaux compatibles et que tout le puzzle normatif soit constitué et estampillé « IMT-2020 » par l’UIT. Outre les Etats-Unis, d’autres pays comme le Japon et la Corée du Sud seront aux avant-postes des déploiements commerciaux. Tandis que l’Europe, pourtant pionnière de la 2G (GSM), reste en retrait comme en 4G – dont la couverture reste insatisfaisante. A moins que
le déclic ne se fasse avec la 5G grâce à sa promesse de débit très élevé (plus de 10
à 20 Gbits/s, contre 30 Mbits/s en 4G) et de temps de latence réduit (moins de
1 milliseconde, contre jusqu’à 40 ms en 4G).
En France, Orange et Bouygues Telecom ont été autorisés le 23 février par l’Arcep à tester « grandeur nature » de la 5G – respectivement du 1er juin 2018 au 1er juin 2019 (à Lille et Douai), et 1er mai au 30 septembre 2018 (Bordeaux, Lyon et Villeurbanne) – dans la bande des 3,6-3,8 Ghz. Cinq autres villes pourront accueillir d’autres tests : Montpellier, Nantes, Le Havre, Saint-Etienne et Grenoble. @

« Le livre numérique est un produit stupide » (Hachette)

En fait. Le 17 février, soit un mois avant le Salon du livre à Paris, Arnaud Nourry, le PDG d’Hachette (groupe Lagardère), a lancé dans une interview au site web d’actualités indépendant indien Scroll.in : « The ebook is a stupid product » !
Le numéro un français de l’édition ne croit pas au livre numérique…

En clair. Arnaud Nourry (57 ans) a beau avoir débuté sa carrière il y a plus de trente ans en tant qu’ingénieur-conseil en informatique, il n’est pas technophile pour autant. Installé par Arnaud Lagardère depuis 15 ans maintenant au poste de PDG d’Hachette Livre, le patron du premier groupe français de l’édition de livre – et troisième des Big Five de l’édition mondiale en anglais (1) – est attaché au papier. Entré il y a près de trente ans chez Hachette Livre, ses interventions médiatiques se font rares. Mais lorsqu’il s’exprime, comme le 17 février dans Scroll.in lors d’un déplacement en Inde pour les dix ans de sa filiale locale, c’est pour tirer à boulets rouges sur le livre numérique. « Je pense que la stabilisation en plateau, ou plutôt le déclin [du marché
de l’ebook], que nous observons aux Etats-Unis et au Royaume-Uni ne s’inversera pas. C’est la limite du format ebook. Le livre numérique est un produit stupide. C’est exactement la même chose que le papier, à part son côté électronique. Il n’y a aucune créativité, pas d’enrichissement, pas de véritable expérience numérique », a lancé Arnaud Nourry. A un mois du Salon du livre de Paris, organisé du 16 au 19 mars par le Syndicat national de l’édition (SNE), dont Hachette Livre est l’un des cofondateurs, la sortie défaitiste voire technophobe de son patron en dit long sur l’état d’esprit rétif des maisons d’édition traditionnelles visà- vis de la dématérialisation des livres – les ebooks représentant pourtant déjà 20 % du marché de l’édition aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne. La France, elle, se contente d’à peine 10 %. « Nous, en tant qu’éditeur, nous n’avons pas fait du grand boulot en allant dans le digital [(2)]. Nous avons essayé – d’améliorer ou d’enrichir les ebooks. Cela ne marche pas. Nous avons essayé des applis, des sites web de nos contenus – nous avons un ou deux succès parmi des centaines d’échecs », a décrié le « Monsieur Livre » d’Arnaud Lagardère. En outre,
il assure qu’il ne voulait pas faire les deux erreurs commises par la musique et la vidéo, voire la presse. A savoir : tarder à numériser les contenus, « ce qui a favorisé l’émergence du piratage », mais surtout ne pas garder le contrôle sur le prix de vente,
« ce qui les a empêchés de protéger leur chiffre d’affaire ». Et après avoir dénigré le livre numérique, le PDG d’Hachette Livre ose dire : « Ce n’est pas que nous sommes contre les ebooks »… @

La BD se cherche toujours dans le livre numérique

En fait. Le 25 janvier, l’Hadopi a animé au 45e Festival international de la BD d’Angoulême une table ronde sur la bande dessinée numérique. Une première.
Le 15 décembre dernier, la même Hadopi publiait un rapport sur la diffusion de
la BD. Constat : la BD reste le parent pauvre du livre numérique en France.

En clair. « Le marché du numérique de la bande dessinée est encore peu développé », nous indique une porte-parole de l’institut d’études GfK qui a publié le 23 janvier des chiffres record pour le marché français de la BD : 500 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2017 pour 43 millions d’exemplaires vendus, soit le plus haut niveau depuis dix ans. La BD numérique, elle, reste marginale. Si le marché du livre numérique se situe en 2017 tout juste autour des 10 % du marché français de l’édition, soit à moins de 300 millions d’euros de chiffre d’affaires (1), le 9e Art digital n’y a toujours pas trouvé sa place.
Et si le livre en général est toujours le parent pauvre en France de la dématérialisation des biens culturels – à l’opposé de la musique et des films –, la bande dessinée reste
la grande absente de cette révolution numérique. En sera-t-il question au sein de la mission sur la BD que la ministre de la Culture a confiée le 25 janvier à Pierre Lungheretti ?
Le 45e Festival international de la bande dessinée (FIBD) d’Angoulême tente bien d’intégrer cette dématérialisation, avec notamment le « Challenge digital », mais le marché ne suit pas vraiment. Et ce n’est pas le prochain Salon du livre de Paris – organisé du 16 au 19 mars prochains par le Syndicat national de l’édition (SNE),
lequel boude d’ailleurs Angoulême sur fond de désaccord avec la société 9eART+ organisatrice du FIBD (2) – qui devrait changer la donne. « La lecture de BD numériques peine à décoller ; elle concerne moins de 5% des internautes », constate l’Hadopi dans son étude sur « la diffusion dématérialisée des bandes dessinées et mangas » publiée en décembre (3). La France reste très timorée, contrairement au Japon et aux Etats-Unis. Les éditeurs français, voire franco-belges, sont attentistes
vis-à-vis du digital, tandis que les auteurs sont peu convaincus.
Les BD seraient difficilement numérisables et les liseuses pas vraiment adaptées, tandis que les DRM (4) poseraient un problème d’interopérabilité. Les plateformes telles que Izneo (Média Participations/Fnac Darty) ou Sequencity (E.Leclerc) sont trop peu nombreuses. La faiblesse de l’offre légale de BD numériques et le frein que constitue le prix unique du livre ouvrent la voie au piratage. @

La SVOD dépasse pour la première fois la VOD

En fait. Le 23 janvier, le cabinet d’études NPA Conseil confirme à Edition Multimédi@ que la vidéo à la demande par abonnement (SVOD) a dépassé pour la première fois en 2017 la VOD (location et achat). Selon les « chiffres définitifs », le marché français de la vidéo numérique frôle le demi-milliard d’euros.

En clair. C’est au cours de cette année 2018, tout juste commencée, que le marché français de la vidéo à la demande – VOD (en location ou à l’achat), SVOD (par abonnement) et EST (vente définitive par téléchargement (1)) – franchira allègrement
la barre des 500 millions d’euros de chiffre d’affaires grâce à une croissance annuelle
à deux chiffres. Pour 2017, ce seuil symbolique a été frôlé avec 485 millions d’euros selon les premiers « chiffres définitifs » issus de NPA Conseil, du CNC (2) et de GfK. Finalement, le marché français de la vidéo numérique aura été un peu moins élevé que les prévisions – 492 millions d’euros – publiées par le CNC le 14 décembre dernier (voir EM@181, p. 10). « La différence de 7 millions d’euros s’explique par des estimations CNC à 167 millions pour la location, alors que GfK arrête l’année à 162 millions – en recul finalement de 3%», nous explique Gilles Pezet, responsable du pôle Economie des médias numériques de NPA Conseil. En 2017, la SVOD dépasse pour la première fois la VOD. « Le boom de la SVOD est due au développement des usages OTT, à la reprise de Netflix dans les “box”, à l’explosion des contenus originaux, ou encore à l’arrivée d’Amazon [lire page 5, ndlr]. La France était en retard quant au décollage de la SVOD par rapport à d’autres marchés européens, mais la dynamique semble enclenchée », indique Gilles Pezet. Si l’on prend cette fois la vidéo physique et la vidéo numérique (voir graphique ci-dessous), le marché a franchi l’an dernier la barre du milliard d’euros. Ce qui n’était pas arrivé depuis 2014. @

Devenu géant de la Silicon Valley, Nvidia a 25 ans

En fait. Le 7 janvier au soir à Las Vegas, ce fut « Sunday Night Fever » pour Nvidia, la plus en vue des sociétés de la Silicon Valley. Après être devenue une icône du jeu vidéo (puces et cartes graphiques, consoles, Cloud Gaming, …), la voici qui se diversifie. En un an, son action en Bourse a bondi de plus de 100 %.

En clair. La société américaine Nvidia, installée depuis avril 1993 à Santa Clara mais enregistrée fiscalement dans l’Etat attractif du Delaware depuis avril 1998, commence très bien l’année de ses 25 ans d’existence. Cofondé par l’Américano- Taïwanais Jensen Huang, actuellement son PDG, avec les Américains Chris Malachowsky, vice-président en charge de la technologie, et Curtis Priem, ingénieur et designer de puces graphiques (parti en 2003), le numéro un mondial des microprocesseurs graphiques s’est retrouvé sous le feu des projecteurs de Las Vegas avec ses annonces pour le CES.
Ayant forgé sa réputation avec de puissantes puces graphiques depuis l’invention en 1999 de la Graphics Processing Unit (GPU) et en étant le premier fabricant à franchir en 2008 – il y a dix ans – 1 milliard de transistors sur une même puce (1), Nvidia a fait de l’industrie du jeu vidéo ce qu’elle est devenue. Mais depuis cinq ans maintenant,
la rivale d’Intel, d’AMD et de Qualcomm – tous touchés par la faille de sécurité – se diversifie à tour de bras. En plus de ses puces « GeForce » allant jusqu’à 10 milliards de transistors pour des affichages exigeants sur les écrans à destination des gamers, des teenagers et des designers, ses activités se sont étendues à partir de 2013 à la fabrication de consoles de jeux et de « box » multimédias : Shield Portable, Shield Tablet et Shield Android TV, sans oublier sa plateforme GeForce Now de Cloud Gaming en streaming lancée en 2012 sous le nom de GeForce Grid. Sa conquête de nouveaux horizons se poursuit avec sa plateforme Drive IX (ex- Drive PX2) et ses nouvelles puces Xavier pour la voiture autonome avec de nombreux partenariats (Tesla, Volkswagen, Uber, Baidu, Volvo Cars/Autoliv, ZF Friedrichshafen, …) ainsi que dans l’intelligence artificielle et l’apprentissage profond (deep learning) où Nvidia s’est engouffré avec succès il y a dix ans. Et avec un grand écran 4K de 65 pouces BFGD, Nvidia s’affirme de plus en plus sur le marché TV.
En un an, son cours de Bourse a bondi de plus de 100 % et sa capitalisation au Nasdaq atteint plus de 134 milliards de dollars. Selon les prévisions des analystes financiers, son exercice fiscal « 2018 » en cours – en fait 2017/2018, car clos le 28 janvier prochain – devrait tutoyer les 10 milliards de dollars avec un résultat net record
de 2,6 milliards (2). Où l’on comprend que l’action ait doublé en un an. @