La licence légale ne discrimine plus les webradios

En fait. Le 4 février, Xavier Filliol a précisé à EM@ que le contrat-type de licence légale pour les webradios commerciales sur lequel se sont mis d’accord la Sacem et le Geste, où il est co-président de la commission « Audio Digital », s’applique « à l’ensemble de la filière ». Quinze ans de négociations !

Licence légale : les webradios attendent le barème

En fait. Le 30 mai, le Conseil d’Etat a rejeté le recours des producteurs de musique – représentés par la SCPP et la SPPF – contre l’extension de la « rémunération équitable » (licence légale) aux webradios. De leur côté, les artistes-interprètes – représentés par la Spedidam et l’Adami – s’en réjouissent.

Pourquoi l’extension de la licence légale aux webradios n’a pas été jugée anti-constitutionnelle

Maintenant que le Conseil constitutionnel a validé le 4 août l’extension de la licence légale aux services de radio sur Internet – du moins ceux non interactifs ni dédiés à un artiste –, il ne reste plus qu’à la commission « rémunération équitable » de publier les modalités d’application et le barème.

La Société civile des producteurs phonographiques (SCPP), bras armé du Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) représentant les majors de la musique (Universal Music, Sony Music, Warner Music), et la Société civile des producteurs de phonogrammes en France (SPPF) n’ont pas convaincu le Conseil constitutionnel. Ce dernier a donc rendu le 4 août une décision validant l’extension de la licence légale aux webradios, telle que prévue par la loi « Création » (1) promulguée il y a plus d’un an, le 8 juillet 2016.

Le Spré n’attend plus que le barème
Selon nos informations auprès de Loïc Challier (photo), directeur général de la Société de perception de la rémunération équitable (Spré), il faut encore attente une décision réglementaire de la commission dite « rémunération équitable » – présidée par la conseillère d’Etat Célia Vérot – pour connaître les modalités d’application et le barème de rémunération des ayants droits au titre de la licence légale applicable au webcasting.« Tant que ladite commission (2) n’a pas pris de décision, la Spré est dans l’incapacité de s’organiser pour prendre en compte l’extension de la licence légale aux webradios », nous précise Loïc Challier. La commission « rémunération équitable » s’est, elle, récemment dotée d’une« formation spécialisée des services de radio sur Internet » (3) où sont représentés les « bénéficiaires du droit à rémunération » (SCPP, SPPF, Spedidam, Adami) et les « représentants des utilisateurs de phonogrammes » (Geste, Sirti, SNRL, SRN).
Jusqu’alors, et depuis plus de trente ans que la loi « Lang » du 3 juillet 1985 sur les droits d’auteur existe, seules les radios diffusées par voie hertzienne (FM notamment) ou par câble bénéficiaient de la licence légale qui leur permet de diffuser de la musique, gratuitement pour les auditeurs, sans autorisation préalable des ayants droits mais moyennant une redevance annuelle d’environ 4 % à 7 % de leur chiffre d’affaires versée à la Spré. L’article 13 de la loi « Création » de 2016 a modifié le fameux article L.214-1 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) dans lequel il est désormais ajouté que « lorsqu’un [morceau de musique] a été publié à des fins de commerce, l’artiste-interprète et le producteur ne peuvent s’opposer public à (…) sa communication au public par un service de radio (4) ». Mais cette disposition et l’arrêté correspondant
du 13 février 2017 étaient contestés par la SCPP et la SPPF, qui avaient demandé les 10 mars et 20 avril derniers au Conseil d’Etat de les annuler et de renvoyer au Conseil constitutionnel une « question prioritaire de constitutionnalité » (QPC) sur la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution, comme ils menaçaient de le faire depuis plus d’un an (5) (*) (**).
Pour la SCPP, les dispositions d’extension de la licence légale aux webradios « privent les producteurs et les artistes-interprètes de la possibilité de s’opposer à la diffusion d’un phonogramme sur certains services de radio par Internet, entraîneraient une privation du droit de propriété ou, à tout le moins, y porteraient une atteinte disproportionnée ». De plus, les producteurs de musique dénoncent « des atteintes
à la liberté contractuelle et à la liberté d’entreprendre, dès lors que les producteurs
de phonogrammes et les artistes-interprètes seraient empêchés de déterminer et de négocier le montant de leur rémunération ». Ils estiment en outre « une méconnaissance du droit de propriété » consacré par la Déclaration des droits de l’homme de 1789 (articles 2 et 17) et étendu à la propriété intellectuelle, les atteintes portées à ce droit devant être justifiées par un motif d’intérêt général et proportionnées à l’objectif poursuivi. Ils rappellent que les artistes-interprètes disposent du « droit exclusif d’autoriser l’exploitation de sa prestation et, le cas échéant, d’en percevoir une rémunération définie par voie contractuelle ». Mais le Conseil constitutionnel s’appuie, lui, sur les dérogations au droit d’auteur comme le prévoir notamment l’article L.214-1 du CPI qui était contesté.
« Les dérogations (…) ne s’appliquent qu’à certains modes de communication au public de phonogrammes dont les artistes-interprètes et les producteurs ont déjà accepté la commercialisation ».

« Un objectif d’intérêt général »
Ainsi, les webradios sont dispensées d’obtenir l’autorisation préalable des artistes-interprètes et des producteurs sauf si elles sont interactives (quand l’utilisateur peut en modifier le contenu) ou si elles sont dédiées « majoritairement » à un même artiste ou d’un même album. Les sages de la rue de Montpensier relèvent en outre que « le législateur a entendu faciliter l’accès des services de radio par Internet aux catalogues des producteurs de phonogrammes et ainsi favoriser la diversification de l’offre culturelle proposée au public [et donc] il a poursuivi un objectif d’intérêt général ». @

Charles de Laubier

Licence légale applicable aux webradios : tensions avec la SCPP et la SPPF, discussions avec la Sacem

Les webradios veulent bénéficier au plus vite de la licence légale, plus avantageuse. Mais les producteurs de musique (SCPP et SPPF) refusent
ce mode de rémunération pourtant prévu par la loi « Création ». La commission
« rémunération équitable » doit fixer le barème.

Selon nos informations, les groupes NRJ (NRJ/Chérie FM/Rire & Chansons/Nostalgie) et Lagardère Active (Europe1/Europe 2/ RFM/Virgin Radio) ainsi que La Grosse Radio sont parmi les radios qui ont refusé de
signer avec la Société civile des producteurs phonographiques (SCPP) et la Société civile des producteurs de phonogrammes en France (SPPF) un accord de droit pour leurs webradios. Et pour cause : depuis la promulgation de la loi « Création » le 8 juillet 2016 (1), ces radios sur Internet bénéficient désormais de la licence légale jusqu’alors réservée aux radios de la FM.

Barème de rémunération à fixer
Cette licence légale, créée il y a une trentaine d’années par la loi « Lang » du 3 juillet 1985 sur les droits d’auteur, dite loi « Lang », permet depuis aux radios hertziennes (de la bande FM notamment) de payer une redevance annuelle de 4 % à 7 % de leur chiffre d’affaires – versée à la Spré (2) – pour avoir le droit de diffuser, gratuitement pour les auditeurs, de la musique. Avec la loi « Création », les webradios peuvent à leur tour bénéficier de cette licence légale au lieu d’avoir à négocier un accord avec chaque société de gestion collective des droits d’auteurs (non seulement la SCPP et la SPPF, mais aussi l’Adami (3) et la Spedidam (4)). L’article 13 de la loi « Création » modifie
le fameux article L. 214 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) dans lequel il est désormais ajouté que « lorsqu’un [morceau de musique]a été publié à des fins de commerce, l’artiste-interprète et le producteur ne peuvent s’opposer public… à sa communication au public par un service de radio » – et non plus seulement en radiodiffusion (hertzien) et par câble.
Mais cette extension n’est pas du goût de la SCPP ni de la SPPF qui contestent
cette disposition et affirment que leurs contrats avec les éditeurs de webradios sont
à renouveler, d’où des relations quelque peu tendues. La SCPP – le bras armé du Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) représentant les majors de la musique (Universal Music, Sony Music et Warner Music) – menace même d’utiliser
la voie judiciaire de la « question prioritaire de constitutionnalité » (QPC) pour obtenir du Conseil Constitutionnel la censure de l’article qu’elle conteste plus que jamais (5). Maintenant que des éditeurs de webradios tels que NRJ, Lagardère Active ou La Grosse Radio ont refusé de signer un contrat, le conflit est maintenant ouvert. D’autant que le barème de rémunération des ayants droits au titre de la licence légale applicable au webcasting n’est pas encore établi. « Dans l’attente de cette entrée en vigueur, le régime juridique des droits exclusifs continue de s’appliquer », estime par exemple la SCPP qui entend dans les prochains mois continuer à autoriser et percevoir auprès
des webradios les redevances – aux conditions qu’elle accordait jusqu’à présent dans le cadre de ses contrats de droits exclusifs. Or ce barème de rémunération et les modalités de versement de cette rémunération sont arrêtés par une commission présidée par un représentant de l’Etat. Cette commission dite de « rémunération équitable » (6), qui est présidée depuis le 13 février dernier par Célia Vérot (photo), conseillère d’Etat (7), s’est récemment dotée d’une « formation spécialisée des services de radio sur Internet » (8) où sont représenté les « bénéficiaires du droit à rémunération » (SCPP, SPPF, Spedidam, Adami) et les « représentants des utilisateurs de phonogrammes » (Geste, Sirti, SNRL, SRN).
Une première réunion s’est tenue au mois de mars pour entamer les discussions ou débuter les hostilités, c’est selon. « Il s’agit d’éviter d’avoir des tarifs qui explosent et
de mettre en place l’ensemble des dispositifs de remise qui existent en FM pour les calquer sur les différentes activités, sachant que de plus en plus de webradios proposent des contenus qui ne sont pas seulement musicaux », a expliqué Xavier
Filliol devant des membres du Groupement des éditeurs de contenus et de services
en ligne (Geste), où il est co-président de la commission « audio digital ». Au sein de
la commission « rémunération équitable », il est cette fois suppléant de Cécile Durand (Lagardère Active) pour le Geste.

Contrat-type avec la Sacem
Par ailleurs, les éditeurs de webradios négocient avec la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) un contrat-type pour les webradios commerciales. Ces dernières tentent d’obtenir des taux de rémunération du droit d’auteur inférieurs à ceux pratiqués – actuellement 12 % du chiffre d’affaires pour les webradios, alors que c’est moitié moins pour les radios FM. Cette différence de traitement entre radios sur la FM et radios sur Internet apparaît injustifiée. Les discussions se poursuivent. @

Charles de Laubier

Licence légale étendue aux webradios : bras de fer

En fait. Le 12 janvier, la Société civile des producteurs phonographiques (SCPP) faisait un point en présence de son président Pascal Nègre (Universal Music).
A l’instar du Snep (majors de la musique) et de l’UPFI/SPPF (producteurs indépendants), elle fustige l’extension de la licence légale aux webradios.