Piratage des contenus sportifs : vers de nouveaux moyens d’une lutte efficace après le déconfinement ?

Comme par magie, le piratage sur Internet des retransmissions sportives en direct a disparu avec l’annulation de la plupart des rencontres et des épreuves, en raison de la pandémie de covid-19. Mais avec la sortie progressive du confinement à partir du 11 mai, le live streaming sportif illicite reprendra.

Par Richard Willemant*, avocat associé, cabinet Féral-Schuhl/Sainte-Marie

Selon une étude de l’Hadopi réalisée avec l’Ifop et publiée le 14 avril, 13 % des internautes interrogés regardaient encore fin mars des retransmissions sportives en direct durant le confinement – bien que beaucoup de rencontres ont été annulées depuis. Et tous biens culturels confondus, le piratage en ligne a légèrement diminué en un an pour représenter 21 % de leur consommation (1). En mai 2019, l’Hadopi publiait une autre étude avec l’Ifop où 45 % des consommateurs de contenus sportifs en live-streaming en France déclaraient s’être désabonnés d’une offre légale pour consommer le même contenu de manière illégale (2).

Le cadre juridique actuel inadapté
Les dommages causés aux entreprises titulaires d’une licence d’exploitation audiovisuelle des manifestations sportives (3) sont considérables. Le cadre juridique actuel pour lutter contre le streaming illégal est inadapté, tout particulièrement pour les contenus sportifs qui sont par nature éphémères et qui requièrent donc des mesures efficaces de prévention ou de cessation immédiate des atteintes. Hélas, les délais actuels d’obtention d’une mesure judiciaire de blocage ou de référencement d’un contenu illicite sont incompatibles avec la nécessité d’agir, dans un délai de seulement quelques heures, pour faire interrompre un flux pirate. Le contournement d’une mesure de blocage par la mise en ligne d’un site miroir permettant la poursuite des agissements illicites est également difficile à combattre, puisqu’en l’état du droit français une nouvelle action judiciaire est alors nécessaire. Les diffuseurs peuvent certes, en invoquant leurs droits voisins d’entreprise de communication audiovisuelle, agir en référé (4) ou par la procédure accélérée au fond (5) qui permet de solliciter toute mesure propre à faire cesser une atteinte à leurs droits, notamment un blocage ou un déréférencement du site litigieux. Mais les modalités pratiques de ces procédures nécessitent l’obtention d’une autorisation préalable et ne permettent pas d’obtenir une décision à très brefs délais, même par la voie d’une assignation « d’heure à heure ». La voie de la requête (6) – qui permettrait, elle, d’obtenir une décision dans un délai très court – est souvent déconseillée, en raison des risques élevés d’inexécution ou de remise en cause par les intermédiaires techniques, lesquels contestent généralement la réalité des circonstances qui justifieraient de déroger au principe du contradictoire. Le législateur semble avoir pris la mesure de la situation. Le projet de loi française relative à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l’ère numérique (7), qui transpose les directives européennes « Droit d’auteur » (8) et « Services de médias audiovisuels » (9), comprend une réforme du dispositif de lutte contre la contrefaçon sur Internet, en particulier en cas de retransmission illicite des manifestations et compétitions sportives. Le texte, dont l’examen a été déprogrammé fin mars en raison du covid-19 et sera présenté dans quelques semaines, poursuit le bon objectif, mais risque d’aboutir – en dépit des amendements adoptés à ce jour – à une solution inefficace ou trop complexe à mettre en œuvre.
Parmi les mesures-phares du projet de loi, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), issue de la fusion de l’Hadopi et du CSA, hérite des compétences de ces deux autorités, auxquelles sont ajoutées de nouvelles prérogatives. Parmi les moyens dévolus à l’Arcom, il est prévu l’intervention d’agents habilités et assermentés qui pourront enquêter sous pseudonyme et constater, par procès-verbal, les faits susceptibles de constituer des infractions. Un nouvel article L. 333-11 du Code du sport permettrait aux titulaires de droits d’exploitation des contenus sportifs de saisir l’Arcom afin que ses enquêteurs procèdent à des constatations. La nouvelle autorité aura aussi pour mission de créer une liste noire de sites web portant atteinte de « manière grave et répétée » aux droits d’auteurs. En outre, les prestataires de services publicitaires et les fournisseurs de moyens de paiement devront rendre publique l’existence de relations commerciales avec une personne inscrite sur cette liste noire. L’objectif est double : retracer les flux financiers pour les assécher, selon le principe du « Follow the Money », et inciter ces acteurs aux bonnes pratiques par la sanction d’une publicité négative dite « Name & Shame ».

Vers des ordonnances « dynamiques »
Le projet de loi de réforme de l’audiovisuel prévoit un système d’exécution dynamique des décisions judiciaires, à l’image des « Dynamic Injunctions » obtenues en Angleterre (10) et aux Pays-Bas (11) par la Premier League (le championnat d’Angleterre de football, plus importante compétition britannique du ballon rond), afin de lutter plus efficacement contre les sites miroirs. Dès lors qu’une décision sera passée en force de chose jugée, un titulaire de droit pourra saisir l’Arcom qui aura le pouvoir de « demander à toute personne susceptible d’y contribuer, et pour une durée ne pouvant excéder celle restant à courir pour les mesures ordonnées par le juge, d’empêcher l’accès à tout service de communication au public en ligne reprenant en totalité ou de manière substantielle le contenu » litigieux. Par ailleurs, le titulaire de droits pourra saisir l’autorité de régulation, afin qu’elle demande un déréférencement du contenu.

Sports : mesures difficiles à mettre en œuvre
Pour faciliter l’exécution de ces décisions, l’Arcom adoptera des modèles-types d’accord avec les intermédiaires techniques. En cas d’échec, le titulaire de droits pourra saisir l’autorité judiciaire en référé ou sur requête. Ce nouveau régime serait une avancée, mais il est étonnant qu’il ne soit pas conçu comme un dispositif d’injonction stricto sensu. Le nouvel article L. 333-10 du Code du sport permettra au titulaire des droits d’exploitation audiovisuelle d’une manifestation ou d’une compétition sportive et à la ligue sportive de « saisir le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond ou en référé, aux fins d’obtenir toutes mesures proportionnées propres à prévenir ou à faire cesser cette atteinte, à l’encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier ». Le texte prévoit néanmoins trois conditions : l’atteinte doit être « grave et répétée » ; « l’objectif principal ou l’un des objectifs principaux » du site web doit être « la diffusion sans autorisation de compétitions ou manifestations sportives » ; la mesure doit avoir pour but de « prévenir ou de remédier à une nouvelle atteinte grave et irrémédiable » aux droits d’exploitation. Ces trois conditions cumulatives sont très restrictives et pourraient vider le nouveau dispositif de tout son intérêt. Par ailleurs, il est permis de douter de la conformité de cette disposition aux textes européens et aux engagements internationaux de la France en matière de respect des droits de propriété intellectuelle, car elle ajoute des conditions actuellement non prévues. Enfin, notons que le dispositif est prévu « afin de prévenir ou de remédier à une nouvelle atteinte grave et irrémédiable » dont la charge de la preuve pèse sur le demandeur. Ce nouveau dispositif pourrait hélas se révéler moins utile et efficace que le droit actuel incluant l’action spéciale prévue par l’article L. 336-2 du Code de la propriété intellectuelle (procédure accélérée au fond déjà évoquée plus haut). La suite du texte offre des exemples de ce que le juge pourra ordonner aux fins de faire cesser les atteintes : « au besoin sous astreinte, la mise en œuvre, pour chacune des journées figurant au calendrier officiel de la compétition ou de la manifestation sportive, dans la limite d’une durée de douze mois, de toutes mesures proportionnées, telles que des mesures de blocage, de retrait ou de déréférencement, propres à empêcher l’accès à partir du territoire français, à tout service de communication au public en ligne identifié ou qui n’a pas été identifié à la date de ladite ordonnance diffusant illicitement la compétition ou manifestation sportive, ou dont l’objectif principal ou l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de compétitions ou manifestations sportives ».
Les députés ont aussi étendu le délai initial de mise en œuvre des mesures pour une durée de 12 mois, au lieu des 2 mois prévus initialement, afin de prendre en compte les manifestations sportives de courte durée, comme le tournoi de Roland-Garros, qui pourront être protégées à titre préventif, et de rendre le dispositif plus robuste pour lutter contre les sites miroirs sur Internet. Poursuivant ce même objectif, le texte précise que les mesures peuvent être prises à l’encontre de tout site web contrefaisant, ceci incluant des sites Internet qui n’ont pas été visés par l’ordonnance initiale. Il s’agit d’un dispositif d’exécution dynamique des ordonnances prévu spécialement pour les retransmissions illicites de manifestations sportives. Sous les réserves qui concernent particulièrement l’article L. 333-10 I. du Code du sport, ce texte de loi pourrait constituer une avancée majeure pour endiguer le piratage des contenus sportifs en ligne. Il n’est pas encore trop tard pour que les parlementaires assouplissent les conditions de mise en œuvre pour atteindre un niveau de protection équivalent à celui résultant des décisions de jurisprudence obtenues par la Premier League. Dans une étude conjointe, l’Hadopi et le CSA soutiennent que la voie d’endiguement du piratage « sportif » sur Internet et du live streaming illicites passera par le développement de l’offre Over-the-Top (OTT) et par une offre légale moins fragmentée, première cause de piratage. En effet, les internautes qui visionnent du contenu sur des sites Internet illicites ont un profil proche du consommateur de l’offre légale OTT, susceptible, par son développement, de les ramener dans le sérail.

La cherté des offres légales pousse au piratage
Les consommateurs sont souvent repoussés par l’envolée du coût d’accès au sport par la multiplication de l’offre légale. En 2019, pour être sûr de voir jouer Neymar et ses coéquipiers en championnat de France de football de Ligue 1 et au niveau européen en Ligue des Champions, il fallait débourser plus de 50 euros par mois (12). Trop cher, d’autant que ce tarif « contenus » vient s’ajouter à l’abonnement « accès » qui a augmenté avec la fibre optique. Les conditions ne sont pas réunies pour que la consommation audiovisuelle illicite – qui peut prendre plusieurs formes – disparaisse. @

* Richard Willemant, associé du cabinet
Féral-Schuhl/Sainte-Marie, est avocat aux barreaux de Paris et
du Québec, agent de marques de commerce, médiateur
accrédité par le barreau du Québec, délégué à la protection des
données, et cofondateur de la Compliance League.

Affaire Schrems : probable non-invalidation des clauses contractuelles types, fausse bonne nouvelle ?

Alors que le scandale « Cambridge Analytica » continue depuis deux ans de ternir l’image de Facebook, une autre affaire dite « Schrems » suit son cours devant la Cour de justice européenne et fait trembler les GAFAM. Retour sur les conclusions de l’avocat général rendues le 19 décembre 2019.

Cookies : l’écosystème de la publicité ciblée s’organise en attendant la recommandation finale de la Cnil

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Pour la reconnaissance faciale à distance ou locale, les enjeux éthiques ne sont pas les mêmes

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A la demande des industries créatives, les Etats-Unis déclarent la guerre à la contrefaçon et au piratage

La peur va-t-elle changer de camp aux Etats-Unis ? Le président Donald Trump entend donner des gages aux industries créatives en déclarant la guerre à la contrefaçon et au piratage de produits, y compris en ligne. Les plateformes de e-commerce devront coopérer. Mais le risque liberticide existe.

Fabrice Lorvo*, avocat associé, FTPA.

Au commencement de la révolution numérique, les acteurs de l’Internet, par philosophie ou par appât du gain, se sont opposés à toute régulation au nom de la liberté. Cependant, se pose avec persistance l’éternelle question : « Peut-il y avoir de liberté sans contrainte ? ». Dans les faits, le cyberespace est devenu un terreau fertile sur lequel a pu prospérer tant la contrefaçon que la piraterie.

Contrefaçon : plus de 1.000 milliards de $
Le contrefacteur est celui qui vend au public une copie de produits originaux copiés ou imités, alors que le pirate met à la disposition du public, sans autorisation du titulaire des droits, une œuvre ou un événement protégé et en tire un revenu ou un avantage direct de son activité, par exemple par abonnement ou par la publicité. D’un point de vue général, la vente de produits contrefaits et piratés – via des plateformes de commerce électronique et des marchés tiers en ligne – est une entreprise très rentable. En 2018, d’après une étude publiée par Bascap (1) et Frontier Economics (2), le montant des ventes mondiales des produits de contrefaçon était estimé en 2013 entre 710 et 917 milliards de dollars (3), et il est prévu qu’il atteindra 1.000 à 1.220 milliards de dollars d’ici 2022.
Pour les contrefacteurs, les coûts de production sont faibles. Internet permet d’accéder à des millions de clients potentiels. Le processus transactionnel est simple et le référencement sur des plateformes de notoriété internationale confère une apparence de légalité. De plus, les risques sont faibles car les contrefacteurs peuvent être résidents de pays dans lesquels cette activité illégale est peu poursuivie ou peu sanctionnée, que ce soit sur le plan civil ou pénal.
L’industrie numérique est aussi directement touchée. L’étude démontre que le montant des ventes mondiales des produits numériques piratés en 2015 était de 213 milliards de dollars (dont 160 milliards pour les films, 29 milliards pour la musique et 24 milliards pour les logiciels). Il est prévu qu’il atteindra d’ici 2022 entre 384 et 856 milliards de dollars (dont entre 289 et 644 milliards pour les films, entre 42 et 94 milliards pour la musique, et entre 42 et 95 milliards pour les logiciels).
Les réseaux sociaux sont eux-aussi concernés par la prolifération des contrefaçons. Selon un rapport de Ghost Data paru en 2019, près de 20 % des articles analysés sur les produits de mode sur Instagram comportaient des produits contrefaits ou illicites (4). Plus de 50.000 comptes Instagram ont été identifiés comme faisant la promotion et la vente de contrefaçons, une augmentation de 171 % par rapport à 2016. Ce phénomène est notamment justifié par les fonctionnalités proposées par les réseaux sociaux. Sur Instagram, par exemple, la recherche de certains biens est facilitée par l’utilisation des noms des marques de luxe dans les hashtags, les fameux mots-dièse. Les résultats de ces recherches mêlent cependant, à l’insu des utilisateurs, des produits contrefaits et des produits authentiques. Il est donc difficile de les différencier. De plus, la fonctionnalité « Story » d’Instagram est très utilisée par les vendeurs de contrefaçons car le contenu publié disparaît en vingt-quatre heures, ce qui permet de vendre rapidement et de disparaître.
Le 3 avril 2019, le président des Etats-Unis a publié un « Memorandum sur la lutte contre le trafic de marchandises contrefaites et piratées » (5) dans lequel il demandait un rapport faisant des recommandations pour lutter plus efficacement contre le trafic de marchandises contrefaites et piratées, y compris en ligne. Le 10 juillet 2019, le département du Commerce américain (DoC) a publié un appel à contribution (6) pour obtenir du secteur privé – détenteurs de droits de propriété intellectuelle, des plateformes de marchés en ligne et autres parties prenantes – leurs commentaires sur l’état de la contrefaçon et de la piraterie et leurs recommandations pour freiner ledit trafic.

Les exigences des industries culturelles
En août 2019, plusieurs associations professionnelles américaines de l’industrie créatrice – à savoir la MPAA (7), l’IFTA (8), CreativeFuture (9), et le Sag-Aftra (10), ont répondu à cet appel en demandant à l’administration :
• de continuer d’exhorter les plateformes de contenus et les intermédiaires Internet à collaborer avec la communauté créative sur les meilleures pratiques volontaires pour lutter contre la violation du droit d’auteur ;
• d’encourager le département de la Justice (DoJ) à engager des poursuites pénales contre les entités impliquées dans une violation du droit d’auteur en ligne ;
• de persister à faire pression sur l’Icann (11) pour rétablir l’accès aux données « Whois » (12), accès qui serait entravé par une application excessive du RGPD européen, et d’adopter une loi si l’Icann ne parvient pas à le faire rapidement ;
• et d’élever le niveau de protection des droits d’auteur à l’étranger par le biais de négociations commerciales.

Les recommandations du « Homeland Security »
Le 24 janvier 2020, le département de la Sécurité intérieure des Etats-Unis – le « Homeland Security » (DHS) – a remis au président américain Donald Trump un rapport intitulé « Combattre le trafic de produits contrefaits et piratés » (13). Il conclut qu’il est essentiel, pour l’intégrité du commerce électronique et pour la protection des consommateurs et des titulaires de droits, que les plateformes de e-commerce et autres intermédiaires tiers assument un plus grand rôle, et donc une plus grande responsabilité dans la lutte contre le trafic de marchandises contrefaites et piratées. Ce rapport préconise de prendre immédiatement les mesures suivantes :
• S’assurer que les entités ayant des intérêts financiers dans les importations aux Etats-Unis assument une responsabilité. Elles devront apporter un soin raisonnable dans la lutte contre la piraterie. De plus, les entrepôts et les centres de distribution situés aux Etats-Unis seront considérés comme les destinataires finaux pour tout bien qui n’a pas été vendu à un consommateur spécifique au moment de son importation.
• Accroître l’examen du périmètre de l’article 321 (texte qui permet l’admission de produits en franchise de droits si sa valeur n’excède pas 800 dollars) pour obtenir plus d‘informations sur l’identité des tiers vendeurs. A défaut d’information, la responsabilité pèsera sur l’entrepôts ou le centre de distribution présent sur le sol américain.
• Lutter contre les acteurs de la fraude. Pour les acteurs directs, en excluant les récidivistes de la piraterie de toute participation aux marchés publics américains et/ou de pouvoir obtenir un numéro d’importateur pour les Etats-Unis. Pour les acteurs indirects, en adoptant des mesures de non-conformité dans l’utilisation du courrier international et en agissant contre les postes internationales qui ne les respecteraient pas.
• Renforcer la responsabilité des intermédiaires, dont les plateformes Internet, en appliquant des sanctions (amendes civiles, pénalités et injonctions), dès lors qu’il est prouvé qu’ils ont illégalement participé à l’importation de produits contrefaits.
• Améliorer la collecte des données concernant l’arrivée des produits contrefaits aux Etats-Unis par l’intermédiaire du courrier international.
• Créer un « Consortium anti-contrefaçon pour identifier les acteurs en ligne néfastes », et ce, en collectant les données auprès des acteurs tiers (plateformes, intermédiaires tiers ainsi que les transporteurs, expéditeurs, moteurs de recherche et centres de paiement en ligne). Ces données permettront de créer une technique d’automatisation des risques pour surveiller les plateformes et ainsi identifier les produits contrefaits.
• Augmenter les ressources de l’administration pour surveiller les envois (estimés 500 millions annuellement) par courrier international. Cela permettra, d’une part, de détecter les produits contrefaits, et, d’autre part, d’accroître la collecte des données sur ce type de transaction pour en améliorer la détection.
• Créer un cadre effectif moderne pour le commerce électronique qui pourrait prévoir des immunités pour les plateformes en échange d’un contrôle interne suffisant et de la communication d’informations aux autorités américaines.
• Evaluer, notamment avec le secteur privé, le cadre de la responsabilité des plateformes de e-commerce en cas de contrefaçon par fourniture de moyens.
• Réexaminer le cadre légal entourant les importateurs non-résidents (et notamment leurs agents résidents aux Etats-Unis).
• Etablir une campagne nationale de sensibilisation des consommateurs concernant les risques de contrefaçon (risques directs en cas de produits dangereux et risques indirects en cas, par exemple, de financement du terrorisme), ainsi que les différentes façons dont ils peuvent repérer les produits contrefaits.

En conclusion, le gouvernement américain déclare la guerre à la contrefaçon et à la piraterie et appelle à la mobilisation générale, tant des institutions politiques américaines, des acteurs tiers – dont les plateformes Internet – que des consommateurs situés aux Etats-Unis. Il conviendra de suivre la manière dont ces recommandations vont trouver une transcription dans la législation américaine.

L’Europe devrait avoir son mot à dire
Deux dangers doivent être conservés à l’esprit. D’une part, que la législation américaine devienne le standard international auquel devront se soumettre directement ou indirectement les opérateurs européens : dans cette perspective, une contribution de l’Europe à ce débat s’impose. D’autre part, qu’au nom de la protection du commerce et des consommateurs un vaste plan de collecte de données et de surveillance va probablement être mis en place. Il faudra garder à l’esprit que les modalités techniques de protection de la liberté peuvent aboutir, si l’on y prend garde, à l’anéantissement des libertés fondamentales. @

* Fabrice Lorvo est l’auteur du livre « Numérique : de la
révolution au naufrage ? », paru en 2016 chez Fauves Editions.