La filière du livre en Europe s’acharne contre Amazon

En fait. Du 8 au 12 octobre, s’est déroulée la 65e édition du salon international du livre de Francfort – la Frankfurt Book Fair, organisé par l’association allemande des éditeurs et des libraires. « Amazon Publishing » était présent dans deux halls. Le géant du e-commerce est toujours montré du doigt.

En clair. Que cela soit au Salon du livre de Paris (en mars) ou au Salon du livre de Francfort (en octobre), Amazon fait désormais figure de loup dans la bergerie. Aux Etats-Unis, en revanche, le géant du e-commerce est perçu comme un levier de croissance pour le marché du livre – qu’il soit imprimé ou numérique. Sur le Vieux Continent, Amazon est attaqué sur plusieurs fronts. La fédération européenne et internationale des libraires, la EIBF (European and International Booksellers Federation), a demandé à la Commission européenne qu’une enquête soit lancée sur
le « monopole présumé » de la société que Jeff Bezos (50 ans cette année) – l’actuel PDG – a fondée il y a vingt ans maintenant. La requête est actuellement entre les mains de Destina Spanou, en charge des consommateurs au sein de la DG Consommation de l’exécutif européen. Elle complète une enquête européenne de
la DG Concurrence sur les pratiques du géant du e-commerce.

Après la neutralité du Net, l’interopérabilité des applis

En fait. Le 13 février, la Commission européenne a publié une étude commanditée à Gigaom et intitulée « Sizing the EU App Economy » : de 17,5 milliards d’euros en 2013, le marché européen des applications pour mobiles devrait bondir de 260 % d’ici cinq ans, à 63 milliards. Mais quid de l’interopérabilité ?

Neelie KroesEn clair. Les 94,4 milliards d’applis téléchargées dans le monde en 2013 présentent un problème majeur, tant pour les développeurs que pour les mobinautes : leur manque d’interopérabilité entre les principales plateformes que sont Android de Google, iOS d’Apple et celle de Facebook.
C’est ce qui ressort de l’étude confiée à la société américaine Gigaom par la Commission européenne. « Les développeurs d’applications mobiles, tant indépendants qu’en interne ont classé l’incompatibilité des plates-formes au premier rang des goulets d’étranglement technique », souligne l’étude.

Mozilla pose la question de la neutralité des App Store

En fait. Le 21 novembre, Tristan Nitot, président Mozilla Europe et porte-parole mondial de la fondation, est intervenu au DigiWorld Summit pour dénoncer « la face sombre des places de marché » de type App Store – Apple en tête. Il a plaidé pour que le Web soit « la plate-forme de marché universel ».

Tristan Nitot siteEn clair. Le fondateur de la Mozilla Foundation Europe, qui distribue depuis maintenant dix ans le navigateur Firefox (1),
n’y va pas avec le dos de la cuillère pour dénoncer les écosystèmes fermés tel que celui d’Apple. « Les places de marché comme l’App Store d’Apple ont une face sombre.
Les développeurs d’application sur ces plates-formes perdent
la relation avec les utilisateurs finaux. C’est un problème grave car ils ne peuvent plus se passer de ces intermédiaires. On est obligé de passer par Apple », a prévenu Tristan Nitot (photo), lors de son intervention incisive remarquée à Montpellier.

Interopérabilité : l’Europe et la France préoccupées

En fait. Le 15 juillet, un « Policy Officer » de la DG Connect a rappelé à EM@
que l’interopérabilité numérique restait une préoccupation de la Commission européenne, notamment dans la musique et le livre. En France, l’Autorité de
la concurrence a indiqué le 10 juillet enquêter sur l’App Store d’Apple.

En clair. Les écosystèmes verrouillés ou tous les « walled gardens » du monde numérique sont prévenus : l’Europe ne laissera pas faire. « Dans la mesure où les contenus tels que les livres numériques ou la musique en ligne sont concernés,
la Commission européenne soutient pleinement l’interopérabilité qui permet aux consommateurs d’y accéder facilement, y compris de manière transfrontalière »,
nous explique Nicolas Gyss, responsable des Affaires publiques à la DG Connect (réseaux de communications, contenu et technologie). Il précise que « la Commission européenne n’a pas de projet à ce stade d’intervention juridique pour garantir l’interopérabilité numérique, en dehors de l’application des règles concurrentielles
en cas de possibles cas d’abus de position dominante ». Mais il tient à rappeler que la directive européenne « Droits des consommateurs » du 25 octobre 2011, qui doit être transposée par les Etats membres d’ici juin 2014, « impose déjà au fournisseurs de services en ligne des obligations d’information, dont la fonctionnalité et l’interopérabilité des contenus numériques ». Plus largement, la Commission européenne entend stimuler l’interopérabilité dans par le développement de standards ouverts, tels que ceux utilisés pour accéder au Web et échanger. Dans le livre numérique, par exemple, les libraires européens réunis au sein de l’EIBF (1) tentent de convaincre la Commission européenne – via la DG Connect dirigée par Roberto Viola – d’intervenir pour imposer l’Epub 3 comme standard ouvert pour assurer l’interopérabilité. Les formats propriétaires d’Apple et d’Amazon sont dans le collimateur. Mais l’interopérabilité ne s’arrête pas aux formats ou aux DRM (2) : la question se pose en même temps pour les plates-formes de vente en ligne, App Stores en tête (3). « Le Parlement européen juge important que les consommateurs ne se heurtent pas à des obstacles lorsqu’ils souhaitent acquérir des livres électroniques sur des platesformes (…) ; juge important d’assurer l’interopérabilité entre les différents dispositifs et systèmes d’acquisition de livres électroniques », ont d’ailleurs déclaré les eurodéputés dans une résolution adoptée le 4 juillet dernier (4).
En France, l’Autorité de la concurrence a indiqué le 10 juillet avoir lancé une enquête sur les boutiques d’applis sur mobiles pour savoir s’il n’y a pas d’abus de position dominante. A suivre. @

iTunes Store fête ses 10 ans sous l’oeil de Bruxelles

Le porte-parole du commissaire européen Joaquín Almunia chargé de la Concurrence, nous a indiqué – en réponse à une question sur iTunes – que la Commission européenne est « consciente des inquiétudes soulevées par les pratiques commerciales de certaines grandes plates-formes mobiles ».

JAAlors que l’iTunes Store a fêté ses 10 ans le 28 avril dernier, la Commission européenne met sous surveillance la plate-forme mobile d’Apple. « Nous n’avons pas d’enquête en cours sur ce sujet. [Mais] nous suivons de près la situation sur ces marchés, qui sont en évolution rapide, et nous sommes prêts à agir au cas où nous arrivions à la conclusion que certaines pratiques restreignent la concurrence », nous a répondu Antoine Colombani, le porteparole de Joaquín Almunia (notre photo), chargé de la Concurrence (1). Si, aux yeux de Bruxelles, « ce n’est pas le choix d’un modèle économique ouvert ou fermé (walled garden) qui est en soi problématique », la question est de savoir si des écosystèmes tels que iTunes enfreignent les règles de la concurrence.