Licence légale : les webradios s’impatientent

En fait. Le 6 décembre, Edition Multimédi@ a recontré Xavier Filliol, directeur
des contenus chez Baracoda Media, agrégateur de webradios et régie publicitaire et par ailleurs président de la commission « Musique en ligne » du Geste. Il a évoqué le sort des radios sur Internet et de la licence légale.

E-commerce à revendre

Acheter, vendre, échanger, troquer, remiser, comparer, marchander, enchérir… à l’heure du e-commerce triomphant, toutes les formes d’échanges ont été, à un moment ou à un autre, touchées et transformées, allant jusqu’à lentement éroder et rendre obsolète le modèle longtemps dominant de l’hypermarché. Les structures du commerce n’évoluent que lentement, et sur plusieurs générations. La forte croissance du chiffre d’affaires de la vente en ligne, de plus de 20 % par an autour de 2010, ne doit pas occulter le fait qu’elle ne représentait alors que moins de 5 % du total du commerce de détail. Actuellement, dix ans après, cette part dépasse les 20 %. Si les formes classiques du commerce ont donc encore de beaux jours devant elles, il est désormais assuré que la transformation en profondeur du commerce est en marche. Les conditions de cette évolution sont pourtant anciennes.

« Des sites de e-commerce rendent accessibles des pratiques autrefois réservées aux seuls initiés : ventes privées, cashback, achats groupés… »

La vente par correspondance est aussi vieille que l’invention de l’imprimerie : dès la fin
du XVe siècle, des imprimeurs dressaient déjà des listes d’ouvrages disponibles en les distribuant dans les foires, ouvrant ainsi la voie, deux siècles plus tard, à l’utilisation de catalogues comme outils de promotion. Mais c’est en 1870, avec le catalogue du Printemps édité en 12 langues, qu’apparaît le modèle de ce qui pendant plus d’un siècle restera le symbole du grand magasin disponible à domicile – dont les lettres de noblesse furent écrites par des industriels du textile. Touchés par la crise économique après la Première guerre mondiale, et forcés de réagir ces derniers créèrent les 3 Suisses et La Redoute. Il y eut ensuite l’essor irrésistible du commerce électronique à partir de 1979, date de l’invention du « online shopping » par le Britannique Michael Aldrich, et son envol véritable à partir de l’apparition de l’Internet au début des années 90. La puissance du réseau a véritablement ouvert la boîte de Pandore d’où ne cesse depuis de jaillir un flot continu d’innovations.
L’une des première conséquence de cette évolution a été une substitution de la VPC classique par des ventes en ligne : dès 2010, La Redoute réalisait plus de 70 % de ses ventes sur le Net en s’offrant le luxe de passer, cette même année, en tête des sites les plus visités – devant les champions historiques eBay ou Amazon – avec près de 12 millions de visiteurs uniques. Pour ces acteurs, l’e-commerce a été un réel défi mais surtout une évolution naturelle autant qu’une condition de survie et l’opportunité de renouveler leur modèle économique tout en élargissant encore leur base de clientèle. Au-delà, ce sont tous les commerçants qui ont dû intégrer Internet comme nouveau canal de ventes et de relation directe avec leurs clients. Mais, bien sûr, la nouveauté est venue des très nombreux « pure players » qui se sont tout d’abord attaqués à quelques catégories ciblées de biens et de services. Ce sont d’ailleurs ces secteurs qui basculent aujourd’hui, leurs ventes étant désormais supérieures à celles réalisées en points de vente: livres, biens électroniques, vêtements, chaussures, produits de santé et de beauté…
En outre, une effervescence permanente vient sans cesse enrichir l’expérience des consommateurs. En exploitant toutes les facettes des relations commerciales grâce à
la puissance de nouveaux outils, des sites rendent accessibles des pratiques autrefois réservées aux seuls initiés : ventes privées, cashback (Deenero.com, Fabuleos.fr), achats groupés (Clubdeal, Groupon). Sans oublier les réseaux sociaux qui savent désormais intégrer l’e-commerce en utilisant la puissance de leur base d’utilisateurs.
Des innovations viennent en plus enrichir concrètement le traditionnel site de vente en ligne : la visualisation de sa nouvelle cuisine en 3D, l’essayage d’une nouvelle robe en réalité augmentée devant un miroir, sans parler de l’ensemble des services disponibles
en temps réel sur son mobile. Finalement, les formes et les nouvelles frontières du commerce à l’heure de la révolution numérique semblent devoir évoluer sans cesse, conférant au e-commerce le pouvoir d’absorber toute activité. A tel point qu’il m’arrive de souhaiter, avec Pierre Dac, d’un jour pouvoir « travailler dans un magasin de rêve où l’on ne vendrait que des choses imaginaires ». @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » : La Médiathèque
* Jean-Dominique Séval est directeur général adjoint
de l’Idate. Rapport sur le sujet : « E-commerce :
Innovations et Business Models », par Sophie Lubrano

Le Geste veut être le fédérateur des éditeurs de services de musique en ligne

Le Groupement des éditeurs de services en ligne (Geste) se pose en rassembleur des plateformes de musique en ligne. Edition Multimédi@ révèle les propositions qu’il a formulées à la mission Hoog pour une gestion collective des droits musicaux sur Internet.

Depuis que le projet de syndicat des plateformes de musique sur Internet – initié par le cofondateur de Deezer, Jonathan Benassaya – a été abandonné, le Geste (1) entend plus que jamais fédérer les éditeurs de musique en ligne. Via sa commission « Musique en ligne », il a représenté plusieurs d’entre eux auprès de la mission Hoog chargée de mettre en place, en France, la gestion collective des droits musicaux pour les services de musique en ligne. Dans un document de 33 pages (que Edition Multimédi@ s’est procuré) cosigné le 25 octobre par huit acteurs – Orange, Deezer (détenu à 11 % par France Télécom), Beezik, Starzik, VirginMega, NRJ et le Syrol (2) –, le Geste a fait ses propositions.

Marge opérationnelle de 50 %
Pour le groupement professionnel, les minima garantis ou les avances « exhorbitantes doivent cesser ». Il propose pour les ayants droits une « rémunération proportionnelle »
et des « garanties de revenus » différentes de celles pratiquées par les producteurs de musique à l’origine d’« anomalies », de « distorsions » ou de « blocage du marché »
au détriment des éditeurs de services en ligne. Pour la rémunération proportionnelle,
le Geste demande que le taux de redevance soit de « 50 % du chiffre d’affaires net hors taxes du service musical » (3). Objectif : « préserver au service [en ligne] une marge opérationnelle indispensable à sa survie ». Selon nos informations, les majors de
la musique réunis au sein du Snep (4) estiment qu’il s’agit là d’une « proposition irréaliste » car présentant « un écart important entre les marges physiques [20 % à 25 %, ndlr] et numériques ». Pour garantir les revenus des ayants droits, le Geste propose un mécanisme: un minimum garanti (5) la première année « allant de 10.000 euros à 60.000 » euros par éditeur de musique en ligne (en sont exonérées les smartradios), des minima garantis de rémunération de 0,017 euro HT par visiteur unique pour un service musical financé par la publicité (exception faite encore des smartradios), de 1,65 euro HT par abonné dans un modèle d’abonnements payants, et de 0,32 euro HT par titre vendu pour la vente à l’acte. Les cosignataires tablent sur une mise en oeuvre « avant le 31 mars 2011 » de la gestion collective volontaire « rétroactive au 1er janvier 2011 » et « pour une durée minimum de cinq années ». Cette période délimitée permettra, selon l’organisation professionnelle, d’expérimenter ce nouveau régime de persception des droits et de redistribution.
« Expérimentée sur cette période de cinq ans, elle constituera un instrument temporaire de régulation et de développement du marché de la musique en ligne », plaident-ils.
Pour garantir une offre de musique en ligne « de haute qualité et d’exhaustivité »,
le Geste estime que « la disponibilité du répertoire international [des majors du disque qui ont menacé lors des réunions de la mission Hoog de les retirer du marché français, ndlr] est une condition sine qua non du fonctionnement d’une gestion collective volontaire ».
De plus, le groupement demande à ce que « tous les usages de la musique en ligne » puissent bénéficier de la gestion collective. En clair, il ne veut pas que « tel ou tel usage (par exemple le téléchargement » soient « exclu[s] du périmètre de la gestion collective » et propose donc de faire bénéficier de ce nouveau régime : « tout service de communication au public en ligne, exploitant un ou plusieurs services de musique numérique interactifs ou semi-interactifs, en BtoC et/ou en BtoB (distributeurs, marques blanches et grises, etc), quel que soit le mode d’exploitation (le streaming et le téléchargement, en gratuit et en payant, à l’acte et par abonnement) ». Il s’agit aussi de permettre aux éditeurs de services en ligne de nouer des partenariats de distribution auprès d’opérateurs télécoms, de banques ou d’assurances, dont la clientèle et la médiatisation constituent de forts effets de levier.

Guichet unique et observatoire
L’objectif est aussi que les producteurs tiennent compte du mixte des usages, qui consiste pour un service musical en ligne de mélanger les modèles (streaming, téléchargement, gratuit, payant, paiement à l’acte, abonnement, linéaire, semi ou full interactif). Alors qu’aujourd’hui « chaque comportement nécessite la négociation d’une cinquantaine d’accords avec les producteurs ». Le Geste souhaite en outre qu’une société de perception et de répartition des droits existente soit désignée comme
« guichet unique » (6) et se dit aussi favorable pour participer à la mise en place d’un
« comité professionnel tel que proposé par l’Observatoire de la musique » pour suivre objectivement le marché de la musique enregistrée. @

Charles de Laubier