E-réputation, intelligence média, veille sociale, … : réseaux sociaux et sites web sous surveillance

Internet est sous surveillance non seulement pour lutter contre le piratage, les fake news ou la cybercriminalité, mais aussi pour traquer tout ce que les internautes disent sur les marques et leurs entreprises. Ce « monitoring » généralisé est méconnu du grand public qui se retrouve ainsi pisté.

Le groupe Meltwater, qui se présente comme la « première société de veille des médias en ligne au monde » (1), ou tout du moins comme « l’un des leaders mondiaux de l’intelligence médiatique et de l’analyse sociale », a publié le 9 décembre son rapport sur « l’état des médias sociaux ». Ils sont désormais incontournables pour les entreprises, les organisations et, en général, « les marques ». Meltwater a été fondé il y a vingt ans par le Norvégien d’origine sud-coréenne Jørn Lyseggen (photo), qui en est le président exécutif auprès du directeur général John Box et qui détient 46.2 % du capital (2).

L’intelligence artificielle s’immisce dans l’industrie du livre, assise sur un tas d’or : ses données

La 22e édition des Assises du livre numérique, organisées le 6 décembre par le Syndicat national de l’édition (SNE), a pour thème « l’application de l’intelligence artificielle (IA) dans l’édition de livres ». Avec comme « invité inaugural » : Tom Lebrun, co-auteur en 2020 d’un livre blanc sur l’IA.

Ce n’est pas la première fois que les Assises du livre numérique (1) traitent de la question de l’intelligence artificielle (IA) dans l’industrie du livre. Déjà en 2017, lors de l’édition de 2017, une table-ronde avait été consacrés à ce sujet et avait fait l’objet d’une synthèse (2). Celle-ci relevait plus d’un défrichage de la part de la commission numérique que préside depuis plus de sept ans Virginie Clayssen (photo) au sein du Syndicat national de l’édition (SNE), elle-même étant par ailleurs directrice du patrimoine et de la numérisation chez Editis (groupe Vivendi).

A 75 ans, l’Unesco – dirigée par Audrey Azoulay – prend des airs de régulateur mondial de l’Internet

C’est en novembre 1946 qu’est formellement créée l’organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture. Soixante-quinze ans après, son onzième directeur général et deuxième femme – Audrey Azoulay – a été réélue pour un second mandate de quatre ans. Parmi ses priorités : le numérique.

Comme en octobre 2017, la Française Audrey Azoulay (photo) a été élue en novembre 2021 – cette fois pour un second mandat de quatre ans – à la direction générale de l’Unesco, lors de la 41e conférence générale de celle-ci, avec à nouveau le soutien de « la République française » qui a proposé une seconde fois sa candidature. Entre le précédent locataire de l’Elysée, François Hollande, et l’actuel, Emmanuel Macron – lequel, faut-il le rappeler, y a été le secrétaire général adjoint du premier puis « son » ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique (avant de devenir son rival) –, il y a un point commun : celui d’avoir été à l’origine de la nomination d’Audrey Azoulay à la tête de cette organisation onusienne basée à Paris. Autant son accession à ce poste international n’avait pas été évidente il y a quatre ans, autant sa réélection est passée comme une lettre à la poste : sur 193 Etats membres de l’Unesco, 169 ont voté le 9 novembre, dont 155 voix se sont portées sur l’ancienne ministre de la Culture et de la Communication (après avoir été conseillère dans ces domaines auprès de François Hollande à l’Elysée). Il faut dire que l’énarque était seule en lice pour ce mandat 2021-2025, alors que pour remporter son premier mandat (après une candidature déposée in extremis) elle avait dû battre le Qatari Hamad bin Abdulaziz al-Kawari.

Deepfake : les vidéos truquées à l’intelligence artificielle sous l’œil du Parlement européen

Le création « deepfake » – consistant à manipuler des contenus vidéo, des images et/ou de l’audio – permet d’obtenir des résultats ultra-réalistes grâce à l’intelligence artificielle. Parodies ou désinformations, ces « hypertruquages » seront encadrés par le futur règlement européen AIA.

Le futur « Artificial Intelligence Act » que le Parlement européen examine actuellement en commissions aura un droit de regard sur les vidéos truquées et les contenus manipulés relevant de la pratique très en vogue du « deepfake » (1) – nom composé à partir de deep learning et de fake news. La commission « marché intérieur et protection des consommateurs » (Imco), tête de file dans le processus législatif de ce projet de règlement européen (2), a comme rapporteur l’eurodéputé italien Brando Benifei (photo). Selon nos informations, « un échange de vues avec les représentants de la Commission européenne » a eu lieu avec lui le 27 octobre dernier.

Création d’une œuvre ou d’une invention par une IA : la justice commence à faire bouger les lignes

C’est un peu le paradoxe de l’oeuf et de la poule : qui est apparu le premier ? Dans le cas d’une création ou d’une invention par une intelligence artificielle, qui est l’auteur : la personne humaine ou la technologie créatrice ? Cette question existentielle commence à trouver des réponses, en justice.

Par Boriana Guimberteau (photo), avocatE associéE, cabinet Stephenson Harwood

L’intelligence artificielle (IA) fait l’objet de développements exponentiels dans des domaines aussi variés que les voitures autonomes (et les données générées par celle-ci), la rédaction d’articles ou la création de musiques. Au-delà de la compréhension de son fonctionnement, l’intelligence artificielle soulève la question de la paternité et de la titularité des œuvres créées ou des inventions générées par elle.

Vers un « Artificial Intelligence Act »
Avant d’explorer plus en amont cette question, il convient de fournir une définition de l’intelligence artificielle. Selon l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), l’intelligence artificielle désigne une branche de l’informatique qui a pour objet de concevoir des machines et des systèmes à même d’accomplir des tâches faisant appel à l’intelligence humaine, avec un intervention humaine limitée ou nulle. Cette notion équivaut généralement à l’intelligence artificielle spécialisée, c’est-à-dire aux techniques et applications programmées pour exécuter des tâches individuelles. L’apprentissage automatique (machine learning) et l’apprentissage profond (deep learning) font tous deux parties des applications de l’intelligence artificielle (1).
L’IA peut ainsi produire différents résultats dont certains pourraient être qualifiés de créations ou d’inventions, les premières protégeables par le droit d’auteur et les secondes par le droit des brevets d’invention. La question est alors de savoir qui sera titulaire des créations ou des inventions générées par l’IA, et si l’IA pourrait être qualifiée d’auteur ou d’inventeur par le droit positif français.
En matière de droit d’auteur tout d’abord, de nombreux auteurs se sont penchés sur la question de savoir si l’intelligence artificielle pouvait bénéficier de la qualité d’auteur. La majorité d’entre eux reconnaissent la conception personnaliste et humaniste du droit français qui considère comme auteur la personne qui crée une œuvre. Par définition, un fait créatif est un fait matériellement imputable à une personne humaine. Cette conception s’impose également par le seul critère d’admission à la protection des œuvres de l’esprit qu’est l’originalité, laquelle se caractérise par l’empreinte de la personnalité de l’auteur (2). Eu égard à la personne de l’auteur, le professeur Christophe Caron a pu affirmer que « le duo formé par la notion de création et de personne physique est indissociable » et donc que « le créateur est forcément une personne physique ». Si la définition de l’auteur est absente du code de propriété intellectuelle (CPI), on y retrouve néanmoins diverses références : « Est dite de collaboration l’œuvre à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques » (3) ; « Ont la qualité d’auteur d’une œuvre audiovisuelle la ou les personnes physiques qui réalisent la création intellectuelle de cette œuvre » (4). Dans le cadre de l’œuvre radiophonique, « ont la qualité d’auteur d’une œuvre radiophonique la ou les personnes physiques qui assurent la création intellectuelle de cette œuvre » (5). La seule exception à la naissance ab initio du droit d’auteur sur la tête d’une personne physique : l’œuvre collective (6).
De plus, la nécessité d’une intervention consciente de l’homme implique qu’un animal ou une machine ne peuvent être considérés comme auteurs. L’intelligence artificielle ne peut alors être qu’un outil de création supplémentaire.