Pour le livre, le dossier “Hadopi” est mis de côté

En fait. Le 8 novembre, Christine de Mazières, déléguée générale du Syndicat national de l’édition (SNE), nous a indiqué que le projet de déposer un dossier « Hadopi » auprès de la Cnil pour une « réponse graduée » contre le piratage de livres numériques n’était plus une priorité pour l’instant.

En clair. Après avoir auditionné les trois prestataires techniques que sont Trident Media Guard (TMG), Attributor (société américaine) et Hologram Industries (ex-Advestigo),
le Syndicat national de l’édition (SNE) n’a finalement rien décidé. « Nous avons mis le dossier “Hadopi” de côté car la question du piratage de livres numériques en France ne se pose pas vraiment encore. Le marché du livre numérique online, c’està- dire hors ouvrages sur CD-Rom, ne représente encore pas grand-chose – environ 1 % – sur le marché français », explique Christine de Mazières, déléguée générale du SNE, à Edition Multimédi@, lors des 3e Assises professionnelles du livre. C’est en janvier dernier que nous avions révélé l’intérêt de la filière du livre pour la « réponse graduée » de l’Hadopi (1) et se son projet de déposer un dossier de demande d’autorisation auprès de la Cnil pour pouvoir relever les adresses IP des internautes soupçonnés de piratage d’ebooks. En mars dernier, l’Observatoire du livre et de l’écrit en Ile-de-France (Motif) a publié son étude « EbookZ 2 » qui montrait que le piratage était encore marginal. « Pour les éditeurs, ce n’est pas la priorité du moment. Développer leur présence sur les liseuses et tablettes qui arrivent sur le marché français les occupent plus actuellement », ajoute Christine de Mazières.
Le développement d’offres légales (voir ci-dessus) est la priorité. Mais le SNE
continue d’explorer les solutions techniques en vue de mettre en place une « procédure automatisée de notification et retrait des contenus illicites », dès lors que l’éditeur est capable d’identifier techniquement l’hébergeur du site web pirate. En attendant, le syndicat présidé par Antoine Gallimard incite les maisons d’éditions à communiquer
les adresses de sites proposant des téléchargements illégaux. Et ce, afin de constituer une « liste [qui] permettra par recoupement d’identifier les sites et réseaux les plus actifs dans le domaine du piratage de livres », peut-on lire dans le rapport d’activité 2010-2011 du SNE publié le 30 juin dernier lors de l’assemblée générale (2). Une adresse mail – juridique@sne.fr – a été créée à cet effet, le SNE proposant en plus à ses membres une procédure et des courriers types. Mais, Christine de Mazières nous indique que ce point de signalement enregistre « très peu de remontées ». @

Pourquoi François Hollande est contre la Hadopi

En fait. Le 16 octobre, François Hollande a été élu à 56,6 % des suffrages
(2,86 millions de votants) candidat PS à la présidentielle de 2012. Il prône
un « pacte pour la création numérique », une loi et un régulateur « contre
les majors » pour remplacer la Hadopi.

En clair. François Hollande veut « dépénaliser » le téléchargement, comme il l’a expliqué le début octobre devant l’ARP, la société civile des auteurs-réalisateurs-producteurs.
Ce qui revient à abroger la loi Hadopi et, partant, à supprimer la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet, contrairement a ce qu’il avait laissé entendre aux cinéastes (1). Depuis juin dernier, il écrivait sur son site web de campagne présidentielle : « Notre responsabilité en 2012 sera de mettre un terme au plus vite au conflit entre créateurs et internautes en abrogeant le dispositif Hadopi
et en le remplaçant par ce nouveau mécanisme [une faible redevance couplée à la réorientation de la taxe sur les fournisseurs d’accès Internet (FAI), qui permettra de dégager jusqu’à 1 milliard d’euros annuels pour rémunérer les droits d’auteurs] ». Il était ainsi en ligne avec la position de la Sacem, prônant une « contribution compensatoire prélevée sur les FAI ». Mais depuis début octobre, François Hollande a changé d’avis en renonçant à sa « taxe sur les FAI » et en prenant le contre-pied de Martine Aury favorable, elle, à une « licence globale » (2).
Le conseiller en économie numérique du candidat PS, Vincent Feltesse, s’en est expliqué le 11 octobre sur son blog : « Nous ne sommes favorables ni à un big-bang
du droit d’auteur ni à l’instauration d’une taxe sur les ménages (ou sur les FAI, ce qui revient au même) venant financer une “licence globale” ou autre “contribution créative”. (…) En faisant prioritairement porter l’effort sur les ménages, la licence globale commet finalement la même injustice que Hadopi ». Or, le projet 2012 du PS prévoit le contraire à ce sujet : « De nouvelles sources de financement de la création numérique seront dégagées grâce à de nouvelles contributions partagées (opérateurs, FAI, etc.) ». En attendant d’être fixé sur ce point, François Hollande en appelle à un « pacte pour la création numérique » entre artistes et internautes, qui consistera non seulement à supprimer la coupure de l’accès à Internet mais aussi à « créer un régulateur sur les cendres de la Hadopi, doté d’un pouvoir de règlement des litiges et d’une “riposte graduée“ contre les majors allant de l’encadrement des pratiques commerciales – minimums garantis, avances, etc. – à la gestion collective obligatoire ». @

Nicolas Seydoux, président du Forum d’Avignon : « Chacun doit protéger la culture »

Le président des Rencontres internationales de la culture, de l’économie et des médias – organisées à Avignon du 17 au 19 novembre – explique à EM@ les enjeux de cet événement. Le patron de Gaumont, président de l’Alpa, en appelle aussi aux FAI pour lutter contre le piratage sur Internet et financer la création.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@ : Le Forum d’Avignon, que vous présidez, a pour thème cette année « Investir la culture ». Pourquoi ? Nicolas Seydoux : L’ambition du Forum d’Avignon est non seulement d’apporter des messages, des idées ou des opinions au monde de la culture, mais aussi à l’ensemble de la collectivité des décideurs, économiques ou politiques. Le monde est à la recherche de repères. La culture, quelle qu’en soit la définition ou l’absence
de définition, représente fondamentalement des valeurs éthiques
et esthétiques, qui plongent leurs racines dans le temps. Dans le monde moderne, tout doit être réglé dans l’instant, alors qu’il faut savoir donner du temps au temps, pour reprendre l’expression de François Mitterrand. La crise ne peut se régler qu’en rappelant les éléments fondamentaux de chacune de nos sociétés, à commencer par la culture. Le Forum d’Avignon veut avant tout éviter de recréer un ghetto culturel culturel français. Il est international – 40 nationalités représentées – et trans-sectoriel avec plus de 50 activités différentes, des journalistes aux artistes et personnalités politiques, en passant par des entrepreneurs de groupes de médias ou d’entreprises de la nouvelle économie. Certains, comme Vivendi (France) ou Reliance (Inde), sont présents à la fois dans le contenu et dans le contenant. Ces mondes, qui trop souvent sont coupés les uns des autres, doivent regarder ensemble les problèmes de notre temps. « Investir la culture », c’est s’investir au sens humain (réfléchir) et investir
au sens financier.

Hadopi : premiers résultats rendus publics et nouvelles difficultés en vue

La Hadopi vient de publier un bilan de son activité et de boucler sa première année de réponse graduée. Mais c’est maintenant l’heure de vérité, face à la justice (peut-être les premières condamnations d’internautes) et face aux nouveaux défis (streaming).

Par Christiane Féral-Schuhl*, avocate associée, cabinet Féral-Schuhl/Sainte-Marie.

Trident Media Guard (TMG) est prêt pour le streaming et se déploie à l’international

La société nantaise TMG va fêter ses dix ans en mars 2012. Même si la surveillance des réseaux peer-to-peer l’a fait connaître, elle revendique aussi
une expertise sur le streaming. Mais ses ambitions ne se limitent pas à la France. Il y a aussi les Etats-Unis et la Grande Bretagne.

Même si elle fait surtout parler d’elle en France dans
le cadre de la réponse graduée de l’Hadopi, la société nantaise Trident Media Guard (TMG) a aussi de grandes ambitions internationales. Contacté par Edition Multimédi@, le PDG cofondateur Alain Guislain (notre photo) joue la discrétion : « TMG est présent à l’internationale mais nous ne souhaitons pas communiquer sur notre expansion à l’étranger ». TMG, qui fournit aux cinq organisations de la musique (Sacem (1)/SDRM (2), SCPP (3) et SPPF (4)) et du cinéma (Alpa (5)) les adresses IP des internautes présumés pirates, reste ainsi fidèle aux engagements de confidentialité qui la lie à ses clients.