Musique : volontés politiques et prochain quinquennat

En fait. Le 11 avril, une vingtaine d’organisations de la filière musicale ont mis en sourdine leurs divergences le temps d’un débat sans précédent avec quatre représentants de candidats à la présidentielle (François Hollande, Nicolas Sarkozy, Jean-Luc Mélenchon et Eva Joly). Internet était omniprésent.

En clair. L’association professionnelle Tous pour la Musique (TPLM), qui regroupe depuis juin 2009 l’ensemble des organisations de la filière musique (1), était venue avec ses sept priorités et enjeux pour 2012. Elle est repartie avec de nombreuses questions, idées et projets égrenés au cours du débat par des représentants de candidats et des professionnels du secteur. Christophe Girard, adjoint au maire de Paris chargé de la Culture et représentant François Hollande (PS), a insisté pour que le ministère de la Culture et de la Communication soit élargi au numérique – « lequel ne doit plus dépendre uniquement du ministère de l’Industrie ». Dans la foulée, Christophe Girard prône « une éducation numérique dès la maternelle » pour « ne pas se contenter de verbaliser ou de sanctionner comme l’a fait la Hadopi ». Quant à la loi Hadopi, « elle ne sera pas abrogée avant qu’une réponse équivalente sera mise en oeuvre en trois volets : éducation, prévention, sanction ».
Franck Riester, député de Seine-et-Marne et secrétaire national de l’UMP, représentant
de Nicolas Sarkozy – rapporteur en 2009 de l’Hadopi à l’Assemblée nationale, également coauteur en 2011 du rapport gouvernemental « Création musicale et diversité à l’heure du numérique » – a, au contraire, défendu le volet pédagoqique de l’Hadopi « qui fait un bon travail de sensibilisation et met en avant les offres légales labellisées ». Et de mettre en garde : « Abroger l’Hadopi enverra un message ravageur d’impunité des usages illicites ». A l’instar de Laurent Petitgirard, compositeur-chef d’orchestre et président du conseil d’adminisation de la Sacem (2), Franck Riester s’est inquiété de la volonté du PS de
« légaliser totalement les échanges non marchands » : « C’est une promesse que les opposants de l’Hadopi exigeront si François Hollande était élu ». Pour Laurent Petitgirard, cela reviendrait à« autoriser le téléchargement illicite à but non lucratif ! ». De son côté, Jean-Michel Gremillet, directeur de la Scène nationale de Cavaillon et chargé de l’art et
de la culture au Front de gauche, représentant de Jean-Luc Mélenchon, estime « qu’avec 22 millions [d’infractions constatées par les ayants droits, ndlr] et 20 dossiers transmis
au Parquet, la loi Hadopi n’est pas applicable » et qu’il faut donc « créer une plate-forme publique de téléchargement », une sorte de « iTunes d’Etat » français… @

Lutte contre le piratage : la Cour de justice de l’Union européenne devra dire si l’ACTA est illégal

Initiative des pays développés considérant insuffisants les minima imposés par l’accord de l’OMC sur les droits de propriété intellectuelle (ADPIC), l’Accord commercial anti-contrefaçon (ACTA) inquiète jusqu’à la Commission européenne.
A la justice d’arbitrer entre pour et contre.

Par Rémy Fekete (photo), avocat associé, Gide Loyrette Nouel.

Signé le 26 janvier dernier par l’Union Européenne et vingt-deux de ses Etats membres, dont la France (1), l’Accord commercial anti-contrefaçon (ACTA) est en discussion depuis 2007 et peine aujourd’hui à se voir ratifier par un nombre suffisant de pays pour pouvoir entrer en vigueur. Une mobilisation sans précédent de la société civile
(16 000 personnes défilaient notamment contre le traité
le 11 février à Munich) et la récente annonce par la Commission européenne de son intention de soumettre
le traité à l’avis de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) – pour vérifier sa conformité aux droits fondamentaux européens (2) – ont porté un sérieux coup d’arrêt
à la progression de ce texte.

La fibre pourrait accélérer le « contournement » des opérateurs télécoms, dissuadés d’investir

Les régulateurs (CSA, Arcep, Hadopi,) et le gouvernement (DGMIC, DGCIS, CNC) voudraient décourager les opérateurs télécoms d’investir massivement dans la fibre optique qu’ils ne s’y prendraient pas autrement : une étude sur le très haut débit semble les en dissuader !

« Les opérateurs pourraient en être réduits à de simples transporteurs de contenus, contournés (ou « désintermédiés ») par les services en accès direct (ou services ‘’over-the-top’’). Cette menace peut freiner les opérateurs dans leurs déploiements des réseaux très haut débit », met en garde l’étude de Analysys Mason, commanditée par l’Arcep (1), le CSA (2), l’Hadopi (3), le CNC (4), la DGMIC (5) et la DGCIS (6), lesquels ont « décidé de rendre public l’essentiel ».

Présidentielle : ce que François Hollande promet sur l’économie numérique et Internet

Depuis que Nicolas Sarkozy s’est déclaré, le 15 février dernier, candidat à la présidentielle de 2012, le duel entre les deux favoris bat son plein. A deux mois
des deux tours de cette élection quinquennale, Edition Multimédi@ fait le point
sur les positions de François Hollande sur l’économie numérique.

Dernière prise de position en date pour le premier challenger
de l’actuel président de la République : un appel au « refus de la ratification par le Parlement européen » de l’Accord commercial anti-contrefaçon (ACTA) (1), lequel est contesté en Europe malgré la signature de plusieurs pays intervenue le 26 janvier (2). Par les voix de Fleur Pellerin (3), sa chargée de l’économie numérique, et de la députée socialiste Aurélie Filippetti, en charge de la culture, de l’audiovisuel et des médias, François Hollande a en effet dénoncé clairement ce texte international sur lequel le Parlement européen doit se prononcer d’ici juin prochain. « Originellement destiné à combattre la contrefaçon commerciale, ce texte a été progressivement détourné de son objectif, dans la plus grande discrétion et en dehors de tout processus démocratique », ont expliqué le 10 février dernier ses deux porte-parole sur le site web du candidat socialiste à l’élection présidentielle, lequel se dit « scandalisé par le manque de transparence qui caractérise les négociations, auxquelles les sociétés civiles n’ont nullement été associées ». Quant à la Commission européenne, elle a annoncé le 22 février son intention de saisir la Cour de justice de l’Union européenne.

Le traité ACTA en Europe : entre vote et justice

En fait. Le 26 janvier, l’Union européenne et 22 de ses Etats membres – France comprise – ont officiellement signé au Japon l’Accord commercial anti-contrefaçon (ACTA). Et ce, malgré l’opposition à ce traité international controversé qui devra maintenant être ratifié – ou rejeté – par les eurodéputés.
A moins que…

En clair. C’est enfin la dernière ligne droite pour le traité international ACTA (Anti-Counterfeiting Trade Agreement), dont les négociations laborieuses s’étaient achevées le 15 novembre 2010 (1). Maintenant que les ministres européens de… l’Agriculture et de la Pêche (sic) l’ont adopté le 16 décembre dernier lors d’une réunion du Conseil de l’Union, les eurodéputés sont « autorisés » à signer ce texte avec l’Australie, le Canada, le Japon, la République de Corée, le Mexique, le Maroc, la Nouvelle-Zélande, Singapour, la Suisse et les Etats-Unis (2). L’ACTA vise à établir un cadre international pour renforcer les droits de propriété intellectuelle et notamment protéger les œuvres (musiques, films, …) contre le piratage sur Internet.
Il s’agit donc de « promouvoir la coopération entre fournisseurs de services [réseau Internet et contenus Web, ndlr] et détenteurs de droits [culturels et audiovisuels, ndlr]
afin de s’attaquer aux atteintes relatives aux droits dans l’environnement numérique », précise le texte, qui prévoit « des procédures pénales et des peines », ainsi qu’une
« responsabilité pénale au titre de la complicité » des intermédiaires. Et ce, pour « les actes délibérés de contrefaçon (…) commis à une échelle commerciale ».
Non seulement les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) mais aussi tous « fournisseur
de services en ligne » (des Google aux Dailymotion, en passant par les BitTorrent ou les Megaupload) pourront être obligés – par « une autorité compétente chargée du respect des droits de propriété intellectuelle » (sur le modèle de la Hadopi ?) – de
« divulguer rapidement au détenteur du droit des renseignements suffisants pour lui permettre d’identifier un abonné » pris en flagrant délit de piratage. Ce sont ces mesures pénales dans un accord commercial que fustigent les opposants à ce texte comme la Quadrature du Net (3) ou les eurodéputés du parti politique Europe Ecologie Les Verts. Ces derniers ont déclaré le 21 décembre dernier qu’ils avaient déposé un recours devant la Cour européenne de Justice pour lui demander d’évaluer la légalité du traité ACTA. Et de, « avant que le Parlement européen ne soit amené à ratifier cet accord ». La justice devra donc dire si l’ACTA contesté est ou non contraire aux dispositions de la Charte européenne des droits fondamentaux et de la Convention européenne des Droits de l’Homme. @