Bouygues Telecom, présidé par Edward Bouygues, fête ses 30 ans avec un nouveau plan stratégique : Cap 2030

Edward Bouygues (40 ans), fils aîné de Martin Bouygues (72 ans) et président de Bouygues Telecom depuis avril 2022, supervise son premier « plan stratégique » – baptisé « Cap 2030 » – pour que l’opérateur télécoms déjà rentable le soit plus encore d’ici à 2030. Selon nos informations, il sera détaillé en novembre (initialement le 7).

(Actualisation : des réunions avec les syndicats ont été fixées les 5,14 et 20 novembre, mais elles concernent les emplois et la mobilité, pas encore le plan « Cap 2030 »)

Selon les informations de Edition Multimédi@, la direction générale de Bouygues Telecom fera le 7 novembre prochain une présentation en interne, et en visio, de son nouveau « plan stratégique » baptisé « Cap 2030 ». Depuis que le directeur général de Bouygues Telecom, Benoît Torloting, et son adjointe en charge de la stratégie (1), Chrystel Abadie Truchet, ont présenté le 1er octobre – lors d’un comité social et économique central (CSEC) extraordinaire – les grandes lignes de Cap 2030, les syndicats, les représentants du personnel et les quelques 10.500 salariés de l’opérateur télécoms sont inquiets voire dans l’incompréhension.
Ce CSEC, réuni à Meudon-la-Forêt (où se trouve le centre névralgique de Bouygues Telecom dans les Hauts-de-Seine) a fait l’effet d’une douche froide : gel des embauches, départs non remplacés, délocalisation dans les centres techniques de Porto au Portugal et de Rabat au Maroc, moindre recours aux prestataires externes, automatisation à tous les étages, et incitation à la mobilité. Pourtant, l’entreprise est en pleine forme. Créé il y a trente ans (2) par Martin Bouygues au sein du groupe familial de BTP, d’immobilier et de télévision (TF1), le troisième opérateur télécoms de France en termes de chiffre d’affaires – 7,73 milliards d’euros en 2023, en hausse de 3% – est une affaire de plus en plus profitable, avec l’an dernier une rentabilité opérationnelle de 1,97 milliard d’euros (3), en hausse de 11 %.

Encore meilleure rentabilité confirmée pour 2024
Ce bilan devrait pleinement satisfaire Edward Bouygues (photo), fils aîné du milliardaire Martin Bouygues (4) et président depuis deux ans et demi de la filiale Bouygues Telecom, où il est entré il y a dix ans. C’est même une poule aux oeufs d’or qui, au cours du dernier exercice, a fait remonter pas moins de 414 millions d’euros dans le bénéfice net du conglomérat familial coté en Bourse, soit presque la moitié du milliard de résultat net de la maison mère en 2023. Dans cette contribution à ce « résultat net part du groupe », Bouygues Telecom devance même largement toutes les autres filiales-soeurs que sont TF1 (87 millions seulement), Bouygues Construction (195 millions), Equans (305 millions) ou encore Colas (310 millions). Et l’année 2024 s’annonce encore meilleure, comme l’a annoncé l’été dernier le groupe Bouygues pour sa filiale télécoms, avec « un chiffre d’affaires facturé aux clients en hausse » et une rentabilité opérationnelle « supérieur à 2 milliards d’euros » (5). Bouygues Telecom maintient en outre son objectif – fixé en 2021 via son précédent plan stratégique « Ambition 2026 » (6) et réaffirmé début octobre 2024 – de générer un cash-flow libre de 600 millions d’euros en 2026.

Revenus en hausse mais investissements en baisse : les opérateurs télécoms en font-ils assez ?

Les revenus 2022 des opérateurs télécoms en France sont en hausse, à plus de 45,8 milliards d’euros HT (+1,6 %). En revanche, leurs investissements sont en baisse, à 14,6 milliards d’euros (-1,8 %). Ce qui semble paradoxal avant la prochaine fermeture du réseau de cuivre. Saviez-vous que les opérateurs télécoms en France ont dépassé en 2022 la barre des 45 milliards d’euros de chiffre d’affaires ? Soit une hausse globale annuelle de 1,6 %, à précisément plus de 45,8 milliards d’euros, selon les calculs de Edition Multimédi@. Ce montant comprend à la fois le marché auprès du client final (plus de 36,7 milliards d’euros) et le marché auprès des opérateurs (plus de 9 milliards d’euros). Tandis que, toujours l’an dernier, les investissements consentis par ces mêmes opérateurs télécoms en France ont reculé de 1,8 %, à 14,6 milliards d’euros (hors achats de fréquences). Plan France THD et New Deal mobile C’est à se demander si les « telcos » ne relâchent pas leurs efforts d’investissements dans les déploiements des réseaux très haut débit fixe (fibre) et mobile (4G/5G) qui sont pourtant indispensables à l’aménagement numérique des territoires et à la lutte contre la fracture numérique. D’autant que le plan France Très haut débit, qui aura coûté près de 35 milliards d’euros, dont 65 % pris en charge par le secteur privé, 25 % par les collectivités territoriales et 10 % par l’Etat (1), est dans la dernière ligne droite de son objectif gouvernemental qui est de « généraliser la fibre optique en 2025 » en termes de prises raccordables. Le temps presse d’autant plus que la fibre optique est censée remplacer le réseau de cuivre (les paires de cuivre téléphoniques sur lesquelles passent le haut débit ADSL et le très haut débit VDSL2). Car l’opérateur télécoms historique Orange a déjà annoncé à tous ses concurrents, Bouygues Telecom, Free et SFR en tête, que la fermeture commerciale nationale de ce réseau de cuivre interviendra le 31 janvier 2026, avec la fin du plan de fermeture prévue en 2030. Il y a déjà sept communes où le réseau de cuivre a été définitivement fermé. L’Arcep indique qu’une nouvelle expérimentation d’extinction en zone très dense vient d’être lancée à Vanves (dans les Hauts-de-Seine en région parisienne et dans le centre-ville de Rennes (Ille-et-Vilaine en Bretagne). Le compte-à-rebours se poursuit. Or, d’après les relevés de l’Arcep au 31 décembre 2022, il restait encore sur tout le territoire 23,2 % des locaux – particuliers et entreprises confondus – à rendre raccordables à la fibre optique comme le sont les 76,8 % (voir tableau ci-dessous) – dont 53,8 % de ces prises FTTH ont trouvé « preneur » au 31 mars dernier, à savoir un peu plus de 19 millions d’abonnés à la fibre de bout en bout sur près de 35,3 millions de fibres optiques raccordables. Les opérateurs télécoms parviendront-ils au « 100 % fibre » avant l’échéance de dans un an et demi ? « Les déploiements vont vite et bien, et surtout en zones rurales. On a quand même des points d’attention dans certaines villes moyennes, comme Les Sablesd’Olonne, La Roche-sur-Yon et d’autres communes qui sont en-dessous de la moyenne nationale. J’invite les opérateurs – en particulier Orange – à poursuivre vraiment les déploiements dans ces zones-là. Puisque les opérateurs ont souscrit des engagements, vis-à-vis du gouvernement, à couvrir ces zones. (…) Orange a choisi à partir de l’année dernière de ralentir ses déploiements de fibre optique dans les zones les plus rurales. Nous l’avons mis en demeure de finir ses déploiements dans ces zones. L’instruction est en cours (2) », a indiqué le 25 mai la présidente de l’Arcep, Laure de La Raudière (photo), sur BFM Business. Le lendemain, l’ancienne députée a fait un déplacement à Marseille et à Septèmes-les-Vallons (Bouches-du-Rhône) pour y constater les retards et dysfonctionnement dans les raccordements à la fibre jusque dans les zones très denses. « Marseille a une couverture globale de 79 % du nombre de locaux, inférieure à la moyenne nationale (91 %). Les opérateurs privés ne déploient pas suffisamment », a-t-elle pointé dans son interview à La Provence parue le jour même. Laure de La Raudière (« LDLR »), qui a fait de la qualité des réseaux fibre une de ses premières priorités, rappelle d’ailleurs régulièrement, et à nouveau le 25 mai dernier, qu’« [elle a] du mal à dire que le plan France Très haut débit est une vraie réussite, étant donné ces problèmes de qualité de service sur les réseaux fibre » (3). Il y a aussi parallèlement la finalisation des engagements de Bouygues Telecom, Free Mobile, Orange et SFR dans le « New Deal mobile » pour atteindre 100 % du territoire en 4G, y compris pour résorber les « zones blanches centres-bourgs » dont il reste encore plus de 4 % à couvrir (4). Sans parler du déploiement de la 5G dans les zones un peu plus denses pour désaturer les réseaux 4G. Investissements : fixe en recul, mobile en hausse A l’heure où des retards dans les déploiements des infrastructures numériques et des dysfonctionnements voire des malfaçons dans les raccordements à la fibre préoccupent les élus locaux et leurs administrés, le recul des investissements des opérateurs télécoms semble pour le moins malvenu. Et ce, au moment où la proposition de loi « Assurer la qualité et la pérennité des raccordements aux réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique » (5) a été adoptée à l’unanimité au Sénat le 2 mai et va être débattue à l’Assemblée nationale. Même si ce reflux a été léger l’an dernier (- 1,8 %, à 14,6 milliards d’euros hors achats de fréquences, – 6,4 % avec), il s’avère plus prononcé (- 9,8 %) par rapport à 2020 (avec achats de fréquences), pourtant la première année impactée par la crise sanitaire. D’autant que si les investissements dans les réseaux mobiles (hors redevances pour fréquences mobiles) ont, eux, augmenté de 5,5 %, à 3,8milliards d’euros en 2022, il n’en va pas de même pour les réseaux fixe qui accusent pour leur part une baisse de 4,4 %, à 10,8 milliards d’euros, toujours l’an dernier (voir tableau ci-dessous). L’après-covid 19 n’a donc pas renversé la tendance baissière, bien que légère, les investissements restant « à un niveau élevé » ou « massifs » (dixit LDLR). Alors que dans le même temps, le chiffre d’affaires global des opérateurs télécoms a augmenté en 2022 de 1,6 %, à précisément plus de 45,8 milliards d’euros hors taxes. Revenus mobiles : hausse de 4,6 % en un an Le marché de détail (pour le client final) a contribué à ces revenus pour plus de 36,7 milliards d’euros, en hausse de 1,8 % sur un an. Tandis que le marché entre opérateurs (interconnexion, accès et itinérance) a contribué pour sa part à plus de 9 milliards d’euros, en hausse de 0,8 %. La plus grosse source de revenus l’an dernier pour les opérateurs télécoms réside dans les services mobiles aux clients finaux (marché de détail, y compris les recettes MtoM), à hauteur de 14,7 milliards d’euros (+ 4,5 % sur un an), auxquels s’ajoutent les revenus liés à la vente de terminaux mobiles, à hauteur de près de 3,5 milliards d’euros (+ 5,1 %). Au total, selon les calculs de Edition Multimédi@, le chiffre d’affaires mobile des opérateurs télécoms en France dépasse les 18,2 milliards d’euros en 2022, en belle hausse de 4,6 % sur un an. Quant aux services fixes, cette fois, ils constituent toutes catégories confondues la toute première source de revenu des opérateurs télécoms, à hauteur de plus de 16,5 milliards d’euros en 2022, quasiment stables (- 0,3 %). Le FTTH et la 5G permettent d’ores et déjà aux « telcos » d’accroître leurs revenus fixe et mobile (6). Sans parler du projet des opérateurs de réseaux de faire payer les GAFAM une taxe – une « compensation directe » ou fair share (7) – pour pouvoir utiliser leurs réseaux. Mais là, c’est une tout autre histoire. @

Charles de Laubier

Le FTTH et la 5G vont permettre aux opérateurs télécoms d’accroître leurs revenus fixe et mobile

La France est en train de tourner la page des télécoms par chères. Les opérateurs télécoms commencent à encaisser des revenus à la hausse, notamment sur les forfaits grâce aux abonnements à la fibre optique et à ceux de la 5G. Les consommateurs voient déjà leurs factures augmenter. Cela fera vingt ans cette année que le concept de triple play débarquait en France (à l’initiative de Free avec le lancement de la « box » en novembre 2002) pour 29,99 euros par mois. Ce forfait – comprenant la téléphonie, l’accès à Internet et la réception de chaînes de télévision – a défié la concurrence qui s’est alignée sur cette offre avantageuse pour les abonnés. Six ans auparavant, c’était Bouygues Telecom qui inventait en France le premier forfait mobile dont le principe fut adopté par tous ses rivaux, avec parfois des offres agressives à 9,99 euros par mois voire à des prix bien en-dessous. Fixe et mobile : factures en hausse Cette période de deux décennies avec des forfaits fixe (à moins de 30 euros par mois) et mobile (à moins de 10 euros par mois) est en passe d’être révolue. Autrement dit, les télécoms commencent à peser plus lourd dans le budget des foyers français. Orange, SFR ou encore Bouygues Telecom font déjà des augmentations « par défaut » du prix de certains forfaits (mobile ou fixe), bien que cette pratique discrète soit controversée. La généralisation de la fibre et de la 5G vont contribuer à augmenter encore plus les factures mensuelles des consommateurs. C’est déjà le cas des 14,4 millions d’abonnés à un forfait de fibre optique de bout en bout dit FTTH (1), ainsi que des 3millions d’abonnés à une offre 5G (au 31 décembre 2021). Si la facture mensuelle moyenne par abonné avait tendance à être plus ou moins stable depuis plusieurs années, elle s’est installée au dernier trimestre 2021 dans la fourchette haute : à 33,5 euros par mois en moyenne pour les abonnements fixe et 14,9 euros par mois en moyenne pour les clients mobile (voir tableau ci-dessous). « Pour l’utilisation d’accès Internet à haut ou très haut débit et les services associés, un abonné dépense en moyenne 33,5 euros HT par mois, une facture qui augmente légèrement depuis le début de l’année 2020 (+ 30 centimes en un an ce trimestre) après deux années de recul continu », constate l’Arcep dans son observatoire du marché des télécoms publié le 7 avril. Et côté mobile : « La facture mensuelle moyenne par carte [SIM] augmente de 3,2 % en un an, et s’élève à 14,9 euros HT. Elle progresse de 50 centimes en un an, et atteint un niveau supérieur à celle observée avant la crise sanitaire ». Ces haussent des montants payés par les abonnés se traduisent par l’augmentation des revenus des opérateurs télécoms, lesquels souhaitent depuis des années une revalorisation de leurs forfaits fixe et mobile soumis depuis des années à une pression des prix (vers le bas) en raison de la bataille tarifaire – notamment entre les quatre principaux opérateurs fixe et mobile que sont Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free. Les deux premiers appellent d’ailleurs depuis des mois à un passage de quatre à trois opérateurs télécoms en France, « pour être plus forts » et « cesser la bataille tarifaire » (2). Pour l’heure, en 2021, les opérateurs télécoms enregistrent – malgré la crise sanitaire – une hausse de leur chiffre d’affaires total au rythme de 2% à 4% sur un an chaque trimestre, pour atteindre 9,4 milliards d’euros au quatrième trimestre 2021 et totaliser 36,1 milliards en 2021. Selon les calculs de Edition Multimédi@ sur l’année calendaire, cela correspond à une hausse annuelle de 2,5 % entre 2020 (35,238 millions d’euros) et 2021 (36,118 millions d’euros). « Cette progression, qui contraste après plusieurs années (de 2011 à 2020) de recul, est tirée par à la fois les revenus des services mobile et ceux des services fixe », relève l’Arcep. En y regardant de plus près, ce sont les abonnements et forfaits mobile (donc hors cartes prépayées) qui rapportent le plus aux opérateurs télécoms depuis plusieurs années : 3,5 milliards d’euros au quatrième trimestre de 2021 pour un total de 13,5 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année, soit une hausse de 5,1% sur un an. Le deuxième poste de recettes le plus élevé pour les opérateurs télécoms réside dans les abonnements d’accès haut et très haut débit à Internet et à la téléphonie (hors autres services Internet comme publicité en ligne ou commerce en ligne) : 2,6 milliards d’euros au quatrième trimestre de 2021 pour un total de 10,2 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année, soit une hausse de 5,1 % sur un an. Le fait que ces deux premières sources de revenus des opérateurs télécoms (forfaits et abonnements mobile et fixe) affichent le même taux de croissance l’an dernier (5,1 %) n’est que pure coïncidence, mais cette hausse significative prouve que les consommateurs paient plus cher leurs accès télécoms. Il faut s’attendre à ce que ces hausses tarifaires pour le client final se poursuivent voire s’amplifient avec la généralisation de la fibre et de la 5G aux forfaits plus coûteux. Les terminaux mobiles rapportent Quant à la troisième source de revenu des opérateurs télécoms, elle correspond à location ou à la vente de terminaux mobiles tels que les smartphones (n’étant pas comptabilisée ici la vente de terminaux de téléphonie et Internet fixes plus marginale et en déclin) pour un total de 1,1 milliard d’euros au quatrième trimestre de 2021 et un total de 3,3 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année, soit une hausse là aussi non négligeable de 7,1 % sur un an. Non seulement ce poste a franchi l’an dernier la barre du milliard d’euros de chiffre d’affaires, mais aussi affiche une hausse supérieure à celles des accès fixe ou mobile. Pour la hausse des ventes d’accès fixe à Internet, par exemple, l’Arcep souligne que « cet accroissement s’explique en partie par l’accélération de la transition du cuivre vers la fibre optique ». D’autant que, pour la première fois, le nombre d’abonnements FTTH (14,4 millions au 31 décembre 2021) dépasse celui des abonnements ADSL/VDSL (12,4 millions). Et le terrain est favorable à la poursuite voire à l’accélération des hausses tarifaires fixes, puisque la fibre est orientée à la hausse et le cuivre à la baisse. « Au total, au 31 décembre 2021, 58 % du nombre total d’abonnements à Internet sont à très haut débit, dont près de 80 % en fibre optique de bout en bout. Parallèlement, le nombre de locaux raccordables au réseau FTTH progresse également fortement chaque année : 29,7millions de locaux le sont ce trimestre, soit + 5,5 millions en un an », détaille l’Arcep. Baisse du cuivre, hausse des prix Mais un peu plus de la moitié de ces prises « optiques » raccordables ne font pas encore l’objet d’un abonnement (voir tableau ci-dessus), alors que le raccordement technique lui-même peut poser de sérieux problèmes (3). L’opérateur télécoms historique Orange a d’ailleurs commencé à basculer vers la fibre, avec l’extinction du réseau de cuivre « à partir de 2023 » et sa disparition totale d’ici à 2030 (4). Avec l’explosion de la vidéo en (ultra) haute définition, de la musique en qualité hi-fi (5), des visioconférences ou encore des métavers qui déferlent (lire p. 8 et 9), les usages dévoreurs de bande passante ne manqueront pas de tirer vers le haut les forfaits et abonnements. C’est notamment sensible sur les mobiles. Rien que sur la 4G encore largement dominante en France, la consommation de données a progressé l’an dernier de 22 % sur un an, à 2,2 exaoctet (Eo) sur le quatrième trimestre de 2021 – soit 8,6 Eo sur l’année. Ce qui correspond à 12,3 gigaoctets (Go) et par abonné 4G sur le quatrième trimestre de 2021 – soit 47,3 Go sur l’ensemble de l’an dernier. La cinquième génération de mobiles, elle, promet de faire exploser ces volumes de données consommées. Il en coûtera plus cher aux consommateurs. @

Charles de Laubier

Très haut débit : une séparation structurelle pour faire émerger un champion européen ?

L’effondrement récent de l’action Altice en Bourse semble illustrer la difficulté de mise en oeuvre de la convergence contenus-réseaux, chère à M. Messier. De quoi relancer les débats sur la concentration des opérateurs télécoms en Europe et sur la séparation structurelle des « telcos » historiques.

Par Rémy Fekete, associé Jones Day

Certains débats sont récurrents, comme celui de la nécessaire concentration des opérateurs européens de télécommunications, ou à l’inverse la nécessaire séparation structurelle des opérateurs (encore dits) historiques. Alors que ces débats peuvent paraître bien vains face à l a « déterritorialisation » des nouveaux réseaux (satellites, ballons, drones, …) déployés par des OTT (Over-The- Top tels que Google ou Facebook) et les tentatives de monopolisation des infrastructures passives par
des « Tower Co » (1).

Sébastien Soriano, président de l’Arcep : « Les opérateurs télécoms peuvent investir encore plus »

Le président de l’Arcep, Sébastien Soriano, arrive à mi-chemin de son mandat
et préside en 2017 l’Organe des régulateurs européens des communications électroniques (Berec). Alors que l’investissement des opérateurs télécoms en France franchit cette année – et pour la première fois – les 10 milliards d’euros,
il répond à Edition Multimédi@.

Edition Multimédi@ : L’investissement des opérateurs télécoms en France a progressé pour la seconde année consécutive à presque 9 milliards d’euros en 2016, soit
une hausse de 14 % en un an : à ce rythme, la barre des
10 milliards sera franchie en 2017 [lire page 3], ce qui, hors fréquences, serait sans précédent depuis la libéralisation
des télécoms en France ?

Sébastien Soriano : Nous ne faisons pas de fétichisme des chiffres… Il n’y a pas d’objectif de franchir les 10 milliards et l’investissement ne se compte pas qu’en euros. Pour autant, le cœur de notre régulation est de pousser les opérateurs télécoms à investir fortement. Nous nous réjouissons du réveil de l’investissement que nous constatons. Nos projections vont bien dans le sens d’une confirmation – encore en 2017 – d’un effort d’investissement important de la part des opérateurs télécoms. On va avoir besoin de cette ambition forte encore pendant plusieurs années. Il ne faut pas s’endormir sur ses lauriers : ce sont des encouragements mais pas les félicitations du jury ! Nous voulons être d’abord dans l’incitation à investir des opérateurs télécoms, plutôt que dans une logique d’obligation. Cependant, pour satisfaire l’impératif d’aménagement du territoire, les réseaux doivent arriver jusque dans les zones rurales ou non rentables, selon des calendriers précis et contrôlables. Cela nécessite des instruments d’une autre nature, avec des subventions publiques possibles sur les réseaux fixe ou des contreparties avec les fréquences sur les réseaux mobile. Un cadre juridiquement contraignant est la bonne solution dans le fixe [très haut débit], cadre contraignant que l’on a déjà dans le mobile avec les fréquences.
Dans certaines zones, non rentables et où il y a des enjeux de couverture du territoire
– dont une partie des zones Amii (1) les moins rentables –, cela nous paraît tout à fait souhaitable qu’il y ait un régime juridiquement contraignant.