Google dénonce «la violence» de l’exception culturelle

En fait. Le 2 décembre, Carlo d’Asaro Biondo, président de Google pour le Sud
et l’Est de l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique (Seemea), est intervenu au grand débat de la 6e édition annuelle de l’Assemblée des médias (soutenue notamment par la SACD et le CNC) pour dénoncer une certaine « violence ».

En clair. « L’importance de la diversité culturelle est fondamentale. Mais je n’aime pas le terme ‘’exception’’ car il a une connotation de violence. La diversité, c’est la représentation d’intégration et le respect des différentes manières de voir. Je préfère. On est exceptionnel par rapport à un autre, et on est différent avec plus l’idée d’intégration », a déclaré Carlo d’Asaro Biondo, président de Google pour les régions
« Seemea », une semaine avant l’ouverture à Paris du « Lab de l’Institut Culturel ». Il estime que la France brandit l’exception culturelle (1) (*) (**) et la fiscalité numérique avec violence.
« La seule solution n’est pas le fisc, mais de définir des règles claires sur la répartition des revenus et trouver des équilibres pour que cela fonctionne. Tout cela, il faut le voir dans les détails et y réfléchir en faisant deux changements fondamentaux en France. Premièrement : arrêter la violence ! L’escalade de violence que nous vivons depuis quelques mois, voire quelques années, est grave, violence que l’on voit, manière dont on s’exprime, … Au lieu de discuter des faits, on fait de la démagogie. (…) Je trouve que l’on est en France dans un pays qui devient violent… Ne faites pas de caricature de ce que je dis [en s’adressant à Pascal Rogard, DG de la SACD, lequel estime qu’il n’en est rien, ndlr] », s’est insurgé Carlo d’Asaro Biondo. Deuxièmement, la France doit parler cercle vertueux plutôt que fiscalité restrictive. « Qui protège-t-on ? Si ce sont les grands groupes parce qu’ils sont grands et établis, alors on fait un discours d’un certain genre. (…) Donc, nous sommes obligés de nous asseoir, de parler tranquillement et de réfléchir en évitant l’escalade de violence », a-t-il insisté sous les applaudissements de la salle.

Données personnelles : taxer les géants du Net ?

En fait. Le 24 septembre, Fleur Pellerin, ministre en charge de l’Economie numérique, a réuni à Bercy six de ses homologues européens (allemand, britannique, italien, espagnol, polonais, hongrois) pour préparer le Conseil des ministres de l’UE des 24 et 25 octobre prochains. Vers une fiscalité numérique européenne ?

En clair. C’est en s’inspirant du rapport du conseiller d’Etat Pierre Collin et de l’inspecteur des Finances Nicolas Colin rendu en janvier dernier (1) que le ministère de l’Economie et des Finances a imaginé une nouvelle taxe applicable notamment aux entreprises du Net qui échappent à l’impôt lorsqu’elles sont localisées à l’étranger. Il s’agit d’un projet de contribution fiscal calculée sur les volumes de transferts de données personnelles
hors d’Europe. Fleur Pellerin a présenté ce projet de fiscalité numérique à six de ses homologues européens lors du mini-sommet qui s’est tenu à Bercy, en présence de Neelie Kroes, vice-présidente de la Commission européenne chargée de la Stratégie numérique (lire p. 8 et 9). Sont principalement visées les entreprises américaines en position dominante sur Internet, les fameux « GAFA » (Google, Apple, Facebook et
autres Amazon), qui sont devenues les championnes de l’optimisation fiscale grâce
à la localisation de leurs ventes en ligne dans des pays à faibles taux d’imposition.
La ministre française propose de porter la question de la fiscalité numérique au niveau européen, comme pour répondre favorablement au Conseil national du numérique (CNNum) qui préconise dans son avis et rapport remis à Bercy le 10 septembre (2)
de ne pas instaurer de taxe à l’échelon national. La France suggère à la Commission européenne de réaliser une étude d’impact en vue de préparer un rapport sur la possibilité de soumettre à contribution les transferts de données hors d’Europe. Une telle taxe concernerait non seulement les GAFA mais aussi toutes entreprises dotées de systèmes d’information – autrement dit tous les secteurs de l’économie que le numérique « dévore » (écrit le rapport Collin & Colin). Pour peu que les entreprises transfèrent hors d’Europe ces données, opérations qui doivent préalablement être déclarées dans les pays européens concernés.

Il y a près de trois ans maintenant, Free lançait l’option TV à 1,99 euro

Malgré les critiques des politiques et des industries culturelles qui n’ont cessé d’accuser Iliad de contournement fiscal, l’option TV à 1,99 euro perdure.
Survivra-t-elle à la nouvelle TSTD ?

La Commission européenne devrait dire d’ici fin septembre si elle accepte ou pas la deuxième mouture, élargie à tous les abonnements fixe et mobile, de la taxe TSTD (pour taxe sur la distribution de services de télévision payée par les FAI) que lui a soumise cet été le gouvernement français.

La TST-D est morte, vive la taxe « culture numérique » ?

En fait. Le 24 mai, l’hebdomadaire « Le Film Français » a publié une interview
du président du CNC, Eric Garandeau, dans laquelle il plaide en faveur du
« financement de la création par l’ensemble des plateformes de diffusion des œuvres », comme le préconise le rapport Lescure qui a repris ses propositions.

En clair. « Nos propositions ont été reprises par le rapport Lescure et sont aussi discutées au sein d’un groupe de travail lancé à Cannes par le CNC sur le financement
de la création à l’heure numérique, dans le cadre des EFAD [European Film Agency Directors, c’est-à-dire les directeurs des ‘CNC’ européens, ndlr] : neuf CNC européens
y participeront. Les premières proposition seront présentées cet automne au Forum d’Avignon », a indiqué le président du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). Constitué lors du Festival de Cannes, le 20 mai dernier, ce groupe de travail consacré au financement des films à l’ère digitale, a été présenté par Eric Garandeau comme « l’extension de la mission Lescure aux 28 Etats membres » (1). Pas moins.
Le sujet numéro un sera de porter au niveau européen l’idée d’une nouvelle taxe qui remplacerait, du moins en France, la fameuse taxe sur les services de télévision payée par les distributeurs – la fameuse TST-D – dont l’« assiette élargie » à l’ensemble des abonnements à Internet et à la téléphonie mobile par la loi de Finance 2012, n’a toujours pas été validée par la Commission européenne. La France souhaite, en effet, élargir l’assiette de la TST-D à tous les abonnements fixe et mobile, quel que soit le mode de commercialisation des services de télévision, pour ne pas limiter cette taxe aux offres triple play et afin d’empêcher des pratiques d’« optimisation fiscale » de la part de FAI (Free, SFR). « Ce qui est important, c’est de préserver la cohérence des systèmes fiscaux et l’intégrité des principes de financement de la création par l’ensemble des plateformes de diffusion des œuvres. Il faut aussi d’urgence fiscaliser les offres de rattrapage télé et des opérateurs de vidéo à la demande, financés par la publicité ou par abonnement », a expliqué Eric Garandeau.
Autrement dit, tous les acteurs du numérique donnant accès aux œuvres culturelles doivent être, selon le CNC, mis à contribution. Si le rapport Lescure suggère de
« maintenir constant le niveau de pression fiscale pesant, au titre de la TST-D, sur les opérateurs de télécommunications » (2), il propose d’« élargir la notion de distribution »
au-delà des « services gérés » (IPTV) pour taxer tous les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et opérateurs mobile qui donnent, par exemple, accès aux sites et appli des chaînes. @

Taxer la bande passante pourrait rapporter très gros

En fait. Le 22 avril, « Numerama » indique avoir obtenu la confirmation que le ministère en charge de l’Economie numérique considère l’hypothèse d’instaurer une taxe sur la bande passante comme était « la voie la plus sérieuse » parmi
les pistes fiscales en matière de numérique.

En clair. Taxer la bande passante tient la corde. « Nous devons veiller à assurer l’équité entre les différents acteurs, quelle que soit leur nationalité. Plusieurs pistes fiscales sont envisagées, comme une taxe au clic ou une taxe sur la bande passante », avait expliqué la ministre en charge de l’Economie numérique, devant les sénateurs lors de l’examen de la proposition « Fiscalité numérique neutre et équitable » de Philippe Marini (renvoyée finalement à la prochaine loi de Finances). Fleure Pellerin n’a donc pas mentionné la proposition-phare du rapport Collin & Colin sur la fiscalité numérique (1), à savoir la taxation sur l’exploitation des données personnelles.
D’autant que, comme l’a démontré l’avocat Winston Maxwell dans Edition Multimédi@ (n°73 p. 8 et 9), cette mesure serait difficile à mettre en oeuvre sans recourir à des techniques de Deep Packet Inspection (DPI). La taxe sur la bande passante apparaît ainsi comme possible. L’idée ne date pas d’hier. Le rapport sur la télévision connectée
de novembre 2011 suggère une « contribution perçue sur les échanges générés par les services en ligne », ces échanges transitant vers les opérateurs télécoms en provenance soit d’un autre opérateur, soit d’un acteur en interconnexion directe comme Google. «Un tel dispositif (…) permet d’assujettir, par ce biais, l’ensemble des acteurs, y compris ceux qui ont déterritorialisé leurs activités et leurs revenus », expliquent les cinq co-auteurs (2). Cette idée de considérer les accords d’interconnexion comme des bases d’imposition potentielle est reprise par le rapport Collin & Colin qui y met cependant un bémol : « Une taxe sur la bande passante présente toutefois un inconvénient majeur, qui tient à l’absence de relation entre la bande passante consommée et le caractère profitable du service ».
A cela s’ajoute le fait que les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) se transforment en
« percepteurs » des impôts ! Orange et Free, favorable au « peering payant » seraient favorables à la taxe sur la bande passante. Le rapport Collin & Colin suggère de s’appuyer non pas sur les flux entrants, mais sur les flux sortants du territoire français au niveau des points d’interconnexion. « Ces flux incluent en effet l’ensemble des données collectées par les entreprises étrangères auprès des internautes français utilisant des application telles que Google, YouTube ou Facebook ». @