Rejet du projet d’accord Canal+/BeIn Sportspar l’Autorité de la concurrence : rendez-vous dans… cinq ans

L’Autorité de la concurrence a rejeté la demande du groupe Canal Plus de lever l’injonction imposée en 2012 qui l’empêche de distribuer en exclusivité des chaînes sportives premium. Imposer des mesures sur cinq ans à l’heure d’une économie numérique à l’évolution fulgurante est-elle pertinente ?

1 – A savoir les groupes intégrés autour de NBC Universal, Sony
Pictures, 20th Century Fox, Walt Disney, Warner Bros. et
Paramount/CBS et leurs filiales, qui représentent 80 % de la
production de films et séries américaines.
• 2 – Injonction 1 (a).
• 3 – Engagement 2.1 de la décision 14-DCC-50.
• 4 – Injonction 1 (b) de la décision 12-DCC-100.
• 5 – Injonction 1 (d).
• 6 – Injonction 7 (a).
• 7 – Vidéo à la demande à l’acte (VOD) et par abonnement(SVOD).
• 8 – Injonction 7 (c).
• 9 – Engagement 2.2.1 de la décision 14-DCC-50.
• 10 – Engagement 2.6.
• 11 – Engagement 2.4.
• 12 – Engagement 2.3.
• 13 – Injonction 9 (a) de la décision 12-DCC-100.
• 14 – Injonctions 3 (a) et (b).
• 15 – Injonction 5 (a).
• 16 – Injonction 6 (a).
• 17 – Injonction 10 de la décision 12-DCC-100 et engagement 4 de la décision 14-DCC-50.

A quand l’éclatement de la bulle « Spotify » ?

En fait. Le 30 mars, Spotify a confirmé l’information du Wall Street Journal
qui révélait sa levé de fonds de 1 milliard de dollars – via des obligations convertibles en actions lorsque la société suédoise sera introduite en Bourse.
Sa valorisation dépasse 8 milliards de dollars : pour quelle rentabilité ?

Les industriels financent la presse française, engagée dans une course à l’audience et à l’instantanéité

La presse française, cas unique dans le monde, est détenue en partie par des industriels. Sa course à l’audience sur Internet et à l’actualité instantanée nécessite des capitaux. Mais l’argent des Bernard Arnault, Bergé-Niel-Pigasse
et autres Patrick Drahi soulève des questions sur l’indépendance.

C’est la course à l’échalote. Les hommes de pouvoir et d’argent ont, depuis l’après-Seconde Guerre mondiale, trouvé dans la presse française leur « danseuse », à l’image de feu Marcel Dassault et son Jours de France dans les années 1950, suivi aujourd’hui de son fils Serge avec Le Figaro qu’il possède depuis dix ans (1).

Cumuler les titres et les audiences
Dernier rebondissement en date dans la presse « industrielle » : Bernard Arnault, l’homme le plus riche de France et d’Europe, a confirmé – via son groupe LVMH, déjà propriétaire du quotidien Les Echos (racheté pour 240 millions d’euros en 2007) – être entré en négociations exclusives avec le groupe Amaury pour racheter Le Parisien et son édition nationale Aujourd’hui en France. Les discussions, portant sur un montant d’acquisition d’environ 50 millions d’euros, devraient aboutir en septembre ou octobre. Ce mouvement de concentration de la presse est aussi marqué par les investissements du milliardaire Patrick Drahi, propriétaire de Numericable-SFR via sa holding Altice :
il a sauvé l’été dernier Libération en en devenant coactionnaire après y avoir injecté
18 millions d’euros, suivis de 10 millions d’euros supplémentaires (2) ; il a en outre racheté en février dernier L’Express et l’Expansion au groupe belge Roularta (3). Ainsi est né Altice Media Group, qui intègre par ailleurs la chaîne d’information en continu israélienne i24 News. Auparavant, en janvier 2014, c’est Le Nouvel Observateur qui passait sous le contrôle du trio « BNP » – comprenez le milliardaire Pierre Bergé, l’industriel Xavier Niel (fondateur de Free et patron d’Iliad) et le banquier Matthieu Pigasse (banque Lazard). Ensemble, ils l’ont acheté 13,4 millions d’euros à son fondateur Claude Perdriel qui en conserve 35 %. Outre Le Nouvel Obs rebpatisé
depuis L’Obs, l’acquisition inclut le site de presse en ligne Rue89. Ces titres vont rejoindre ceux du groupe Le Monde (Le Monde, Télérama, Courrier International,
La Vie Catholique), que le trio « BNP » avait acquis en 2010 pour 100 millions d’euros. Le tout est placé au sein du nouveau groupe de presse « Le Monde Libre », lequel aura son futur siège près de la Gare d’Austerlitz à Paris : déménagements prévus au cours de l’été 2017. Citons encore le milliardaire François Pinault (fils de François-Henri) qui détient Le Point depuis 1997 via sa holding Artemis, ou encore le Crédit Mutuel qui possède le groupe de presse régional Ebra (L’Est Républicain, Les Dernières Nouvelles d’Alsace, Le Progrès, Le Dauphiné Libéré, …). Sans oublier Bernard Tapie qui est devenu le propriétaire de La Provence, rachetée en janvier 2014 à la famille Hersant, puis de Corse- Matin, tout en étant par ailleurs le soutien financier de la coopérative Nice-Matin. Le paysage « industriel » de la presse français ne serait pas quasi complet sans Valeurs Actuelles qui est passé depuis les années 1990 entre les mains du milliardaire Marc Ladreit de Lacharrière, de l’industriel Serge Dassault (4) et de Pierre Fabre (du groupe pharmaceutique éponyme).

Le mouvement de concentration de la presse en France, sur fond de crise publicitaire historique et de concurrence de l’Internet, suscite ainsi – plus que jamais – l’appétit de milliardaires et d’industriels. Ces derniers sont en quête d’influence, tandis que les éditeurs sont en quête d’audience. Face à l’érosion de la diffusion du journal imprimé,
le numérique apparaît comme un relais de croissance : à la baisse du lectorat papier,
la course à l’audience en ligne. « Une combinaison du quotidien d’infos générales et
du journal de l’économie afficherait une diffusion d’environ 500.000 exemplaires et près de 10 millions de lecteurs numériques », a justifié Francis Morel, PDG du groupe Les Echos. LVMH va davantage sur le digital, notamment sur Le Parisien qui est en retard sur ce terrain-là (5). Comme milliardaires et industriels ne sont pas philanthropes, l’objectif de ces mouvements de concentrations est de constituer des groupes de médias de taille critique – tant papier que web – pour « vendre » aux annonceurs des audiences cumulées conséquentes. A l’heure de l’audience de masse sur Internet et de la publicité programmatique sur les sites web ou les mobiles en Real Time Bidding (6), l’agrégation des inventaires publicitaires est de mise. La concentration des titres peut aussi aboutir à la mutualisation des rédactions papier-web, afin de réduire les coûts.

Capitaux et conflits d’intérêt
Mais la digitalisation demande des capitaux, que les chiffres d’affaires des ventes,
des abonnements et de la publicité ne suffisent pas à fournir. Contrairement à la presse anglo-saxonne, le recours aux « business angels » industriels – avec le risque de conflits d’intérêts évidents – ne fait pas débat en France depuis bien longtemps… @

Charles de Laubier

Le financement de la création française face au Net

En fait. Le 23 janvier, la ministre de la Culture et de la Communication, Fleur Pellerin, a réaffirmé son soutien (financier) à la création audiovisuelle (fictions, animations, documentaires) lors du 28e édition du Festival international de programmes audiovisuels (Fipa) à Biarritz. Contre les géants du Net ?

Homo-Sapiens contre Homo-Technicus

Pour me lever le matin, plus besoin de réveil : une petite impulsion envoyée par ma puce cérébrale s’en charge. Pour mieux entendre une musique, je ne monte plus le
son d’un appareil : mon oreille s’occupe directement du réglage. Pour voir un détail lointain qui m’intrigue : une simple requête mentale adapte la vision de mes lentilles connectées. D’autres gestes simples et quotidiens sont
en passe d’être à leur tour contaminés par cette fièvre technologique. Ils sont les symptômes d’une confrontation majeure qui se joue au XXIe siècle entre Homo-Sapiens et Homo-Technicus, comme
un rappel d’un très lointain passé qui vit s’affronter deux types d’humanité – Néandertal finissant par se fondre dans Cro-magnon. Un surhomme semble en passe de devenir le nouvel horizon de l’humanité. Très tôt annoncé par les auteurs de fiction, en littérature (BD comprise) ou au cinéma, l’Homme augmenté a été théorisée dès 1960 par Manfred Clynes, musicien et scientifique, qui créa le terme composite à succès de « cyborg » (pour cybernetic organism). Mais une nouvelle étape s’ouvre en 2002 avec la publication du rapport « Technologies convergentes pour l’amélioration de la performance humaine » de la National Science Foundation (NSF), laquelle nous a familiarisé avec l’acronyme NBIC (nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives). Ce cocktail technologique change tout et n’arrête pas de produire de surprenantes évolutions qui nous émerveillent toujours autant qu’elles nous inquiètent. Le champ d’applications semble sans limite.

« Le transhumanisme annonce une post-humanité
aux capacités physiques et psychiques illimitées. »

Il s’est d’abord agit de réparer l’Etre humain en lui faisant bénéficier de solutions de plus en plus nombreuses : prothèses sophistiquées capables de transformer des infirmes en champions olympiques ; exosquelettes robotisés commandés par la pensée permettant à un adolescent paraplégique de donner le coup d’envoi du Mondial de foot de 2014 ; neuro-prothèses soignant des dépressions graves ou transférant des morceaux de mémoires d’un endroit à un autre du cerveau ; oreille bionique réalisée
en impression 3D par une équipe de Princetown pour une audition retrouvée pouvant aller au-delà des fréquences habituelles, … Chaque semaine, de nouvelles avancées repoussent les limites du possible. A tel point que les miracles des Livres Saints, qui ont émerveillé tant de générations, sont aujourd’hui en passe de devenir notre lot quotidien ! Très vite, on est passé à l’Homme augmenté en apportant d’abord une aide précieuse à des professions difficiles : les applications militaires sont en ce domaine aux avants postes, comme il se doit, et servent même de laboratoires permanent ; les bras articulés ont envahi les chantiers ; les micro-capteurs sous-cutanés donnent l’alerte dans les environnements hostiles ; les stimulants cérébraux relancent une attention défaillante, … Le grand public commence à avoir accès à ces technologies en passe
de se banaliser, même si on n’est encore loin de mettre en pratique les expériences lancées dès les années 2000 par Kevin Warwick, professeur de cybernétique, visant à implanter des puces RFID dans le cerveau pour passer outre le langage ! Certains y voient une nouvelle Renaissance : un nouvel âge des lumières porté, non plus par un humanisme qui considérait que l’Homme est en possession de capacités intellectuelles potentiellement illimitées, mais par un transhumanisme qui annonce une posthumanité aux capacités physiques et psychiques illimitées. Cette posture fut affichée très tôt par des mouvements revendiquant la liberté individuelle de se transformer, certains ayant
à leur tête de véritables gourous, d’autres des performeurs mais également des scientifiques visionnaires. Parmi ces derniers, Ray Kurzweil, fondateur en 2008 de la Singularity University financée par Google, annonce l’avènement – vers 2060 – d’une intelligence artificielle supérieure à celle de l’Homme. De quoi renouveler les débats légitimes sur les limites éthiques et philosophiques de ces mutations.
Espérons que cet Homme augmenté, qui nous effraie autant qu’il nous fascine, sera indulgent avec son ancêtre non transformé. Un Homme « naturel » qui, apparaissantîtrait à ce surhomme comme « diminué », pourrait écrire telun Villon des temps modernes : « Frères transhumains qui après nous vivez, n’ayez les cœurs contre nous endurcis, … ». @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2025 » : Le livre
* Directeur général adjoint de l’IDATE, auteur du livre
« Vous êtes déjà en 2025 » (http://lc.cx/Broché2025).