Bataille mondiale du « bitcoin » entre les Etats et les nouveaux émetteurs de monnaies numériques

La Banque centrale européenne (BCE) dira l’été prochain si elle compte créer ou pas l’euro numérique. La Chine, elle, teste déjà grandeur nature l’e-yuan, avant sa généralisation en 2022. De leur côté, les Bahamas sont pionniers du « bitcoin » souverain avec leur « dollar de sable ».

La république populaire de Chine, présidée depuis mars 2013 par le très technophile Xi Jinping (photo), pourrait être l’an prochain la première puissance mondiale à lancer sa monnaie numérique. Cet e-yuan souverain, testé depuis le début de l’année et notamment à Shanghai et Shenzhen, est attendu avec fébrilité par les pays occidentaux qui craignent la fin de l’hégémonie monétaire américaine de l’« US dollar » – monnaie de réserve mondiale. De Washington à Francfort-sur-le-Main en Allemagne, où les banques centrales des Etats-Unis (la Fed) et de l’Union européenne (la BCE) ont respectivement leur siège social, c’est le branle-bas de combat.

Souveraineté numérique : Microsoft se dit compatible

En fait. Le 19 mai, se sont tenues les 5e Assises de la souveraineté numérique, organisées par l’agence Aromates sur le thème cette année de « Quelle stratégie pour une 3e voie européenne ? ». Parmi les intervenants extra-européens : l’américain Microsoft, qui, par la voix de Marc Mossé, se dit euro compatible.

En clair. Le directeur des affaires publiques et juridique de Microsoft – fonction qu’il a exercée pour la filiale française entre février 2006 et mai 2016 avant de passer à l’échelon européen (1) tout en restant basé à Paris et non au siège de Microsoft Europe à Dublin en Irlande –, était attendu au tournant. Lors de ces 5e Assises de la souveraineté numérique, le «M» de GAFAM a voulu montrer pattes blanches et démontrer que l’on pouvait être une « entreprise étrangère américaine » et être compatible avec la « souveraineté numérique européenne ».
Antinomique ? Non. Marc Mossé, lui, parle de « ligne de crête » en rappelant les propos tenus par quatre femmes au pouvoir en Europe, Angela Merkel (chancelière d’Allemagne), Mette Frederiksen (Première ministre du Danemark), Sanna Marin (Première ministre de Finlande) et Kaja Kallas (Première ministre d’Estonie), dans une lettre adressée le 1er mars dernier à une cinquième femme de pouvoir, Ursula von der Leyen (présidente de la Commission européenne) : « La souveraineté numérique, c’est miser sur nos forces et réduire nos faiblesses stratégiques, et non pas exclure les autres ou adopter une approche protectionniste. Nous faisons partie d’un monde mondial avec des chaînes d’approvisionnement mondiales que nous voulons développer dans l’intérêt de tous. Nous sommes déterminés à ouvrir les marchés et à favoriser un commerce libre, équitable et fondé sur des règles » (2). Tout est dit.
Et le directeur juridique de Microsoft Europe d’approuver : « C’est cette ligne de crête sur laquelle il faut être, qui renvoie à l’essentiel lorsque l’on parle de la souveraineté. C’est aussi la question de la règle de droit. La souveraineté, c’est la garantie par le droit de fonctions essentielles comme les valeurs européennes [auxquelles] les acteurs qui opèrent en Europe (et donc en France) doivent le plein respect ».
Marc Mossé a aussi rappelé l’annonce faite le 6 mai par Microsoft qui s’engage à stocker et à traiter dans ses data centers en Europe – au nombre de treize dont trois en France – les données de ses clients, entreprises ou organismes publics, à ses services de cloud (Azure, Office 365 et Dynamics 365). Marc Mossé – par ailleurs président en France de l’AFJE (3) – assure que ce plan appelé « Frontière des données de l’UE » (4) est conforme à la « stratégie nationale pour le cloud » présentée le 17 mai par le gouvernement français. @

Les satellites font de l’ombre à la fibre et à la 5G

En fait. Le 27 avril, le français Eutelsat a annoncé l’acquisition d’environ 24 % du capital de OneWeb, constellation de satellites conçus pour fournir l’Internet haut débit sur la planète. Le même jour, l’américain SpaceX a obtenu l’autorisation de la FCC pour positionner des satellites Internet sur une orbite plus basse.

En clair. La bataille de l’Internet des étoiles bat son plein pour fournir du haut débit voire du très haut débit satellitaire à toute la planète. Deux milliardaires américains, Elon Musk, patron fondateur de Tesla, et Jeff Bezos, son homologue d’Amazon, financent chacun leur constellation – respectivement Starlink de la société SpaceX et Kuiper de la société Blue Origin – sur des orbites basses, à 580 kilomètres pour le premier et à 590 km pour le second.
Le régulateur fédéral américain, la FCC (1), vient de régler un différend entre les deux opérateurs de satellites Internet : SpaceX demandant à placer Starlink sur une orbite plus basse que prévu, Blue Origin contestant ce changement de position spatiale susceptible de gêner Kuiper. Finalement, le 27 avril, la FCC a autorisé SpaceX à condition d’éviter toutes interférences. Elon Musk et Jeff Bezos, par ailleurs rivaux pour être le plus riche du monde, investissent chacun 10 milliards de dollars dans leur constellation. Alors que Kuiper n’a pas encore été lancé par Blue Origin, Starlink est bien plus avancé car SpaceX dispose déjà de 1.400 satellites en orbite. « Le service est actuellement en phase bêta auprès de certains utilisateurs qui obtiennent des débits de 50 Mbits/s à 150 Mbits/s, avec des temps de latence de 20 à 40 millisecondes (ms) », indique la société d’Elon Musk (2). Autant dire que l’Internet spatial n’a rien à envier à la fibre optique ni à la 5G. Cette concurrence tombée du ciel pourrait bénéficier aux internautes en termes de résorption des zones blanches et de tarifs compétitifs. Starlink est déjà autorisé aux Etats-Unis, au Canada et en Nouvelle-Zélande, ainsi que dans une douzaine de pays.
En France, l’Arcep l’a autorisé le 18 février dernier mais, dans le Nord, le maire de Gravelines s’oppose à la pose d’antennes Starlink. Quant au français Eutelsat, qui rêvait il y a dix ans de passer de Ka-Sat à Mega-Sat (3), il a annoncé le 27 avril une prise de participation de 24 % dans OneWeb, qui, repris par l’Etat britannique et l’opérateur indien Bharti Global, a commencé à déployer sa constellation de 648 satellites (dont 182 déjà en orbite). La commercialisation des accès Internet débutera en fin d’année puis globalement en 2022. De son côté, le luxembourgeois SES opère la constellation O3b mPower en orbite moyenne (8.000 kms). Elle sera opérationnelle en 2022, avec Orange parmi ses utilisateurs. @

La gouvernance d’Iliad, maison mère de Free, pourrait mieux refléter sa stratégie européenne

Cela fait plus d’un an que Xavier Niel a été renommé président du conseil d’administration d’Iliad, dont il est fondateur et premier actionnaire. Son mandat devrait être renouvelé le 2 juin prochain, pour quatre ans cette fois. La gouvernance du groupe, elle, gagnerait à être plus internationale.

Comme le mandat de Xavier Niel (photo) – redevenu le 16 mars 2020 président du conseil d’administration du groupe Iliad qu’il contrôle – arrive à échéance à la prochaine assemblée générale des actionnaires, prévue le 2 juin prochain, le conseil d’administration du 15 mars dernier a proposé « le renouvellement du mandat de M. Xavier Niel pour une durée de quatre ans », soit jusqu’à mi-2025 (résolution n°7 de la prochaine AG).

Pourquoi Matthieu Pigasse fait de Combat Médias – créé il y a 5 ans – son enseigne à la place de LNEI

La holding LNEI, fondée en juillet 2009 par Matthieu Pigasse (copropriétaire du Monde et coactionnaire de Mediawan), va être rebaptisée Combat Médias. C’est en fait la dénomination d’une holding que le banquier d’affaires a créée en octobre 2016. Celle-ci devient Combat Holding.

Les Nouvelles éditions indépendantes (LNEI), que le banquier d’affaires Matthieu Pigasse (photo) avait créées en juillet 2009 pour chapeauter ses différentes participations dans des entreprises médiatiques ou culturelles, a annoncé le 24 mars – après l’avoir révélé la veille en interne – s’être rebaptisées « Combat ». Rien à voir avec le mouvement de résistance Combat né en France durant la Second-Guerre mondiale et son quotidien clandestin éponyme, mais l’ex-LNEI n’hésite pas à y faire référence.