La décision « Allostreaming » ne fait pas l’unanimité

En fait. Le 2 décembre, la FFTélécoms a dénoncé « les risques de surblocage ou d’incitation au développement du ‘’dark web’’ » que pourrait provoquer le décision « Allostreaming » du TGI de Paris. Le Parti Pirate et La Quadratude du Net, eux, mettent en garde contre « la censure privée au nom du droit d’auteur ».

En clair. L’Association des producteurs de cinéma (APC), la Fédération nationale des distributeurs de films (FNDF), le Syndicat de l’édition vidéo numérique (SEVN), l’Union des producteurs de films (UPF), le Syndicat des producteurs indépendants (SPI) ont
beau se féliciter de la décision du TGI de Paris rendue le 28 novembre dernier dans l’affaire « Allostreaming », ce jugement ne fait pas l’unanimité. Loin de là.
En permettant au juge d’enjoindre les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) Orange, Bouygues Telecom, Numericable, Free, SFR et Darty Télécom de bloquer seize sites de streaming (1), et aux moteurs de recherche Google, Microsoft, Yahoo et le portail Orange de les déréférencer, la lutte contre la contrefaçon vient de franchir une étape importante – bien que limitée (lire Juridique p 8 et 9).
Les FAI et moteurs doivent obtempérer « au plus tard dans les quinze jours à la compter de la signification de la présente décision et pendant une durée de douze
mois ». Et même si des acteurs du Net font appelle – « ce qui est fort probable d’ici février 2014 », confie à EM@ un ayant droit –, il y a exécution provisoire. Bien que la Fédération française des télécoms (FFTélécoms) relève que les coûts de mise en place des mesures de blocage seront à la charge des demandeurs, elle réaffirme néanmoins « son opposition de principe à l’égard de ce type de mesures » qui présentent « des risques de surblocage ou d’incitation au développement du ‘’dark web’’ ».

TST-D et TST-E : la musique veut une part du gâteau

En fait. Le 2 décembre, l’Union des producteurs phonographiques français indépendants (UPFI) a demandé à Aurélie Filippetti, ministre de la Culture et
de la Communication, « d’élaborer une politique de soutien en faveur de la filière musicale à la suite de la sécurisation de la TST-D par Bruxelles ».

En clair. La revendication n’est pas nouvelle mais elle est réaffirmée après que la Commission européenne ait annoncé, le 23 novembre dernier, avoir validé la taxe
TST-D (1) payable par les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) distributeurs de services de télévision. « Les œuvres et enregistrements musicaux sont également fortement présents sur les chaînes de télévision, dont le signal est repris par les FAI. Nous souhaitons donc qu’une quote part de la TST-D fasse l’objet d’une dérivation vers la filière musicale », nous a expliqué Jérôme Roger, directeur général de l’UPFI et de la SPPF (2).
La TST-D, créée en 2007, a rapporté en 2012 au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) pas moins de 279 millions d’euros versés par les FAI au Cosip (compte de soutien à l’audiovisuel et au cinéma). Et en 2013, les FAI devraient payer un montant équivalent. Puis, à partir du 1er janvier 2014, le nouveau mode de calcul validé par Bruxelles – indexé sur une assiette plus que large que sont les abonnements fixe et mobile – sera appliqué. Les FAI comme Free et SFR, qui ont créé une « option TV » à 1,99 euro par mois pour cotiser « à la marge » au Cosip (EM@86, p. 2), devraient rentrer dans le rang. La TST-D devrait donc rapporter plus au CNC l’an prochain et continuer à abonder son « trésor de guerre ». Le gâteau sera aussi amené à grossir avec l’adoption dans le projet de loi de Finances rectificatif pour 2013 de la TST-E, laquelle est l’extension de la taxe aux recettes de publicité et de parrainage générées par les services de TV de rattrapage.

Accord Orange-sociétés d’auteurs étendu aux mobiles

En fait. Le 18 novembre, Orange et les sociétés d’auteurs ADAGP, SACD, Sacem
et Scam ont annoncé un accord sur « la distribution des programmes de télévision et l’exploitation des œuvres des répertoires des sociétés d’auteurs par ADSL, fibre optique, satellite mais également sur mobile ». Et les autres FAI ?

En clair. « Cet accord de renouvellement Orange comprend un accord pour le mobile, d’une part, un autre pour le satellite et l’Internet fixe, d’autre part, selon des règles classiques du droit d’auteur, c’est-à-dire un mécanisme de rémunération proportionnelle
à des recettes et non un forfait », nous a précisé Hervé Rony, directeur général de la Scam. Mais cet accord comportant une clause confidentialité, n’est pas divulgué. Et d’ajouter : « Par ailleurs, nous poursuivons nos négociations avec tous les autres opérateurs ADSL ». Aucun autre renouvellement d’accord n’a donc été signé à ce jour avec SFR, Bouygues Telecom, Numericable ou encore Free. Ce dernier avait été le tout premier fournisseur d’accès à Internet (FAI) à signer – en mars 2005 – un accord avec
la Sacem (musique), la SACD (arts dramatiques), la Scam (multimédia) et l’ADAGP (arts graphiques et plastiques), aux termes duquel il doit reverser un pourcentage des recettes de la Freebox TV aux ayants droits. Les renégociations avec les FAI ne sont pas passées comme une lettre à la poste : il a fallu « de longs mois de discussion » avec Orange, selon Marie- Anne Ferry-Fall, directrice générale de l’ADAGP, pour arriver un cet accord. D’autant que le premier accord signé avec France Télécom jusqu’au 31 décembre 2010 avait dû être âprement rediscuté sur de nouvelles bases, à la suite de la disparition du taux de TVA à 5,5 % sur la part télévision des offres triple play (1) et le passage de l’abonnement en totalité à un taux de 19,6 %.

« Exception culturelle » : circulez, il y a tout à voir !

En fait. Le 29 novembre, s’est tenu le 18e colloque NPA-Le Figaro (avec Edition Multimédi@ parmi les partenaires médias) sur le thème « Les défis de l’univers multi-écrans ». La première table ronde intitulée « Quel cadre pour quels équilibres pour l’Acte II de l’exception culturelle ? » a donné le ton.

En clair. Entre le rapport Phéline, post-Lescure, portant sur la rémunération des créateurs, et le rapport Vallet (1) sur les relations entre producteurs et diffuseurs (2),
la question de la circulation des films et séries à l’ère du numérique se retrouve au cœur du débat. Les producteurs freinent-ils leur circulation à l’heure de la dé-linéarisation ? En tout cas, les chaînes de l’ancien monde analogique de l’audiovisuel et les plates-formes vidéo du nouveau monde numérique se retrouvent à demander ensemble plus d’accès aux œuvres pour tous les réseaux et écrans. « Je vois notre capacité à avoir une partie de ces droits comme un élément central de la capacité demain à négocier dans le monde du numérique (…) avec ceux qui demain seront les acteurs principaux – dont mon voisin de droite [YouTube] – et avec un rapport de force suffisant », a déclaré Rémy Pflimlin, PDG de France Télévisions.

L’interopérabilité des ebooks pose un vrai problème

En fait. Le 15 novembre, à l’Assemblée nationale (PLF 2014), le gouvernement
a fait supprimer tard le soir en « seconde délibération » (sans aucun débat) l’amendement de la députée Isabelle Attard – pourtant adopté peu avant pour réserver la TVA réduite aux seuls ebooks à « formats ouverts ».

En clair. On aurait pu en rester là après cet enterrement de première classe si la détermination de l’auteur de l’amendement, la députée écologique Isabelle Attard, n’était pas restée intacte. « Même si mon amendement est rejeté aujourd’hui, mes collègues
du groupe écologiste au Sénat le déposeront lors du passage du projet de loi de finances 2014 », a-t-elle prévenu sur son blog. Kindle d’Amazon, iBook d’Apple ou encore Play Livres de Google sont dans le collimateur de parlementaires écologiques. Il est reproché
à ces géants du Net leurs formats verrouillés respectifs, lesquels ne favorisent pas l’interopérabilité des livres numériques. Pour y remédier, Isabelle Attard (1), a proposé
« que seuls les livres électroniques vendus en format électronique ouvert puissent bénéficier de la TVA à taux réduit » (2). Bien qu’elle n’ait pu être présente à l’Assemblée nationale pour défendre son texte le 14 novembre, la députée avait confié à son collègue Eric Alauzet le soin de le soutenir. « Alors que la majorité des acteurs concernés (auteurs, éditeurs, bibliothécaires, responsables politiques) appellent à un plus grand respect des droits des lecteurs, notamment en essayant de promouvoir l’interopérabilité des livres en format électronique, il nous paraît important de favoriser les vendeurs qui respectent ce principe », explique l’amendement.