Musique : le streaming dépasse le téléchargement

En fait. Le 30 avril, le Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) a présenté les chiffres du marché français de la musique enregistrée pour le premier trimestre 2014 : – 7,1 % à 100,3 millions d’euros, dont 32,9 millions pour les ventes numériques (+ 6,6 %). Mais le streaming inquiète quand même.

En clair. Les revenus du streaming sur le marché de la musique en ligne bondit (+ 40 % à 16,5 millions d’euros) pour devenir – pour la première fois en France – le premier moyen d’écoute musicale sur Internet : un peu plus de la moitié (50,08 %) des revenus numériques proviennent en effet de ce mode d’écoute de flux audio, bien qu’il représente encore seulement 16,5 % du marché global. « Le streaming est à lui seul le moteur de la croissance des ventes de musique numérique », a souligné Guillaume Leblanc, DG du Snep. L’année 2013 avait amorcé le « fléchissement du téléchargement » (1). Cependant, cette migration des usages du téléchargement vers le streaming préoccupe les producteurs de musique du Snep (2) car la croissance se fait plus en faveur du streaming gratuit financé par la publicité (+ 43,8 %), mais moins rémunérateur pour l’industrie musicale, qu’au profit du streaming par abonnement (+ 38,3 %) aux revenus plus élevés. Bien que la France compte « entre 1,5 et 2 millions d’abonnés » à un service de streaming musical (y compris les abonnements inclus dans un forfait comme Deezer avec Orange), ce segment a de plus en plus de mal à attirer un public habitué à la gratuité.

Sport : match TV versus OTT

Une succession d’événements médias montrent bien que
le paysage audiovisuel mondial a bien changé. Une série,
un film et une comédie musicale occupent le devant de la scène en battant des records d’audience. Points communs : chacune de ces œuvres a pour thème une épopée sportive
et toutes ont comme producteur principal… une grande association sportive. Des ligues et quelques grands clubs
de football, de basket ou de baseball sont en effet devenus de véritables groupes
de médias disposant depuis longtemps de lieux de spectacles, puis de leurs propres moyens de diffusion et, désormais, de productions. Ce sont des empires sans équivalents, construits sur des contenus « premium ». Sachant que seuls la fiction (films et séries récents) et certains événements sportifs réunissent les conditions nécessaires pour bénéficier de ce qualificatif (forte attractivité, rareté et acceptation
des consommateurs à payer). Qu’on le déplore ou non, le sport est devenu le divertissement majeur du XXIe siècle. Cette ascension tient autant à l’attrait toujours croissant des compétitions qu’aux nouvelles mannes captées au fil du temps par les propriétaires des droits sportifs. Et ce, grâce à la diversification des modes de diffusion des matchs et aux débouchés offert par Internet.

« Des ligues et quelques grands clubs sportifs
sont devenus de véritables groupes de médias »

La fenêtre de Canal+ : un « monopole » en sursis

En fait. Le 26 mars, René Bonnell – producteur et auteur du rapport « Le financement de la production et de la distribution cinématographiques à l’heure
du numérique » – a réitéré devant le Club audiovisuel de Paris la nécessité
d’« arrêter de geler les droits » pendant la « fenêtre » de diffusion de Canal+.

En clair. « La stratégie de Canal+, de monopole à partir du 10e mois jusqu’au 22e interdisant toute exploitation à l’intérieur de sa fenêtre, s’explique par le niveau de ses obligations », a encore expliqué René Bonnell, cofondateur de Canal+ il y a 30 ans et aujourd’hui producteur (Octave Films). Mais ce « monopole » de Canal+ dans la chronologie des médias a vécu, selon lui : « Il faut arrêter de geler les droits pendant la période où une chaîne comme Canal+ a acheté les droits pour sa fenêtre de diffusion, à partir du 10e mois [après la sortie d’un film en salle de cinéma, ndlr] ». Ce gèle des droits au profit de la chaîne cryptée se fait au détriment de la vidéo à la demande (VOD) qui, après avoir ouvert sa fenêtre à 4 mois après la salle, doit obligatoirement la refermer au bout de six mois d’exploitation pour laisser place nette à Canal+.
Et le tunnel des droits exclusifs peut ainsi s’éterniser sur plusieurs années. « Et s’il y a en plus derrière Ciné+, cela peut geler les droits pendant 18 mois. La VOD butte là et ne peut pas se développer », dénonce René Bonnell. Selon GfK, le marché français de la VOD est en baisse de 3 % à 245 millions d’euros en 2013. Ceci explique peut-être cela. « Cette pratique du gel des droits peut même s’étendre jusqu’à 48 mois quand les maisons mères des chaînes historiques en clair regroupent leurs achats avec ceux de leurs filiales de la TNT », avait relevé le rapport Bonnell. Le pire est ce gèle des droits ne touche que la VOD. En effet, la vente des DVD et autres Blu-ray – eux aussi à 4 mois après la salle – peut continuer, de même que le téléchargement définitif où iTunes d’Apple s’arroge 95 % de parts de marché !

Zelnik, Lescure, Phéline : gestion collective oblige

En fait. Le 18 décembre, Aurélie Filippetti a publié le rapport « Musique en ligne et partage de la valeur – Etat des lieux, voies de négociation et rôles de la loi » que lui a remis Christian Phéline. Il y préconise une meilleure rémunération des artistes à l’ère du numérique, grâce à la gestion collective.

En clair. La ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, a de nouveau de quoi remplir un peu plus la loi Création qu’elle a promis de présenter en Conseil des ministres en février 2014. Elle a déjà accueilli comme « très prometteuses et pertinentes pour assurer une juste rémunération des artistes-interprètes dans l’univers numérique et pour soutenir la diversité de l’offre légale » les propositions du rapport Phéline (1) sur le partage de la valeur dans la musique en ligne. Le conseiller à la Cour des comptes propose notamment que le futur projet de loi d’orientation sur la création puisse « inciter à une négociation conventionnelle entre partenaires sociaux tendant, au vu des évolutions du marché de la musique en ligne, à encadrer les conditions de rémunération des artistes-interprètes de ces exploitations et prévoir, à défaut d’aboutissement de cette négociation dans un délai raisonnable, un régime de gestion collective obligatoire de ces mêmes rémunérations ». Ce délai raisonnable pourrait être de « 8 mois, prolongeable de quelques mois ». Autrement dit, « le législateur pourrait donc assigner aux parties une date butoir ne dépassant pas un
an après la publication de la loi [Création]» (2).

Google dénonce «la violence» de l’exception culturelle

En fait. Le 2 décembre, Carlo d’Asaro Biondo, président de Google pour le Sud
et l’Est de l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique (Seemea), est intervenu au grand débat de la 6e édition annuelle de l’Assemblée des médias (soutenue notamment par la SACD et le CNC) pour dénoncer une certaine « violence ».

En clair. « L’importance de la diversité culturelle est fondamentale. Mais je n’aime pas le terme ‘’exception’’ car il a une connotation de violence. La diversité, c’est la représentation d’intégration et le respect des différentes manières de voir. Je préfère. On est exceptionnel par rapport à un autre, et on est différent avec plus l’idée d’intégration », a déclaré Carlo d’Asaro Biondo, président de Google pour les régions
« Seemea », une semaine avant l’ouverture à Paris du « Lab de l’Institut Culturel ». Il estime que la France brandit l’exception culturelle (1) (*) (**) et la fiscalité numérique avec violence.
« La seule solution n’est pas le fisc, mais de définir des règles claires sur la répartition des revenus et trouver des équilibres pour que cela fonctionne. Tout cela, il faut le voir dans les détails et y réfléchir en faisant deux changements fondamentaux en France. Premièrement : arrêter la violence ! L’escalade de violence que nous vivons depuis quelques mois, voire quelques années, est grave, violence que l’on voit, manière dont on s’exprime, … Au lieu de discuter des faits, on fait de la démagogie. (…) Je trouve que l’on est en France dans un pays qui devient violent… Ne faites pas de caricature de ce que je dis [en s’adressant à Pascal Rogard, DG de la SACD, lequel estime qu’il n’en est rien, ndlr] », s’est insurgé Carlo d’Asaro Biondo. Deuxièmement, la France doit parler cercle vertueux plutôt que fiscalité restrictive. « Qui protège-t-on ? Si ce sont les grands groupes parce qu’ils sont grands et établis, alors on fait un discours d’un certain genre. (…) Donc, nous sommes obligés de nous asseoir, de parler tranquillement et de réfléchir en évitant l’escalade de violence », a-t-il insisté sous les applaudissements de la salle.