Pourquoi WhatsApp a écopé en Europe d’une amende ré-évaluée à 225 millions d’euros

La « Cnil » irlandaise avait proposé fin 2020 à ses homologues européennes de mettre à l’amende WhatsApp et sa maison mère Facebook à hauteur de 30 à 50 millions d’euros. « Insuffisant ! », ont-elles estimé. Leur comité européen (CEPD) leur a donné raison et la note a plus que quadruplé.

La « Cnil » irlandaise, en l’occurrence la Data Protection Commission (DPC) dirigée par la commissaire Helen Dixon (photo de gauche), a annoncé le 2 septembre 2021 avoir infligé une amende de 225 millions d’euros à la société WhatsApp pour ne pas avoir respecté le règlement européen sur la protection des données personnelles (RGPD) – un record après la condamnation d’Amazon au Luxembourg à payer une sanction pécuniaire de 746 millions d’euros pour avoir aussi enfreint ce même RGPD.

Amende administrative insuffisante
WhatsApp devrait faire appel de cette décision. La filiale de Facebook, dont le siège européen est basé à Dublin (capitale de l’Irlande), a non seulement écopé d’une amende salée mais aussi reçu une « réprimande » – autrement dit un blâme – et une injonction de se mettre en conformité avec le RGPD (1), lequel est en vigueur depuis le 25 mai 2018. C’est d’ailleurs moins de six mois après cette date d’application que la « Cnil » irlandaise avait débuté son enquête (à partir du 10 décembre 2018) sur les pratiques de WhatsApp en termes de transparence des informations devant être fournies aux utilisateurs de cette messagerie instantanée comme aux non-utilisateurs du service.
« Cela comprend les informations fournies aux personnes concernées sur le traitement des données entre WhatsApp et d’autres entreprises Facebook [le réseau social Facebook, la plateforme de partage de photos et de vidéo Instagram, ou encore la messagerie Messenger, ndlr] », a précisé la DPC qui, conformément à l’article 60 du RGPD, s’est constituée en « chef de file » des autres autorités de contrôle (visà- vis donc des autres « Cnil » dans l’Union européenne) afin de « s’effor[cer] de parvenir à un consensus » entre elles. Après des mois d’enquête, la DPC avait soumis un projet de décision en décembre 2020 à toutes ses homologues européennes. Mais faut de consensus sur les objections de huit « Cnil » sur les vingt-sept, l’autorité irlandaise a déclenché le processus de règlement de différends le 3 juin dernier. Ce mécanisme de contrôle de la cohérence peu aboutir à ce que le Comité européen de la protection des données (CEPD) – ou European Data Protection Board (EDPB) – adopte une décision contraignante, comme ce fut le cas dans l’affaire « WhatsApp ». En effet, le 28 juillet 2021, cet organe européen indépendant présidé par Andrea Jelinek (photo de droite) – successeur du groupe de travail dit « Article 29 » sur la protection des données – a rendu sa décision. Notifiée à la « Cnil » irlandaise, celle-ci a été obligée « à réévaluer et à augmenter l’amende proposée sur la base d’un certain nombre de facteurs » détaillés dans la décision contraignante. C’est ainsi que la société WhatsApp Ireland Limited s’est vu imposer une amende de 225 millions d’euros. « Le CEPD charge la DPC de fixer un montant d’amende plus élevé pour les infractions constatées, par rapport à l’amende administrative envisagée dans le projet de décision, tout en restant conforme aux critères d’efficacité, la proportionnalité et la dissuasion », a notamment exigé le comité européen. Dans son projet de sanction établi en 2020, la « Cnil » irlandaise avait calculé son amende sur la base du chiffre d’affaires combiné du groupe Facebook (Inc.) et de sa filiale WhatsApp en Irlande pour l’année se terminant le 31 décembre 2019. Elle a cependant dû revoir à la hausse le montant, étant donné que sa décision finale allait intervenir cette année, donc devant se référer au chiffre d’affaires au 31 décembre 2020 – et en tenant compte de la hausse de 15 % environ de ces revenus annuels.
Quels sont les griefs faits à WhatsApp ? Plusieurs violations du RGPD ont été constatées non seulement pas la « Cnil » irlandaise mais aussi par ses homologues européennes qui ont obtenu auprès du CEPD un durcissement de la décision finale de la DPC sur certains points :
• Informations à fournir lorsque des données à caractère personnel sont collectées auprès de la personne concernée (article 13) : le CEPD charge la DPC de « constater dans sa décision finale qu’il y a eu infraction à [fournir les informations sur les intérêts légitimes poursuivis par le responsable du traitement ou par un tiers, ndlr (2)] » sur la base des insuffisances qu’elle a identifiées.

Anonymisation des données personnelles
En outre, le CEPD exige que la DPC inclue dans sa décision finale une constatation de violation – « au lieu de formuler une simple recommandation » – de l’obligation pour WhatsApp de fournir aux personnes concernées les informations complémentaires, notamment « sur la question de savoir si l’exigence de fourniture de données à caractère personnel a un caractère réglementaire ou contractuel ou si elle conditionne la conclusion d’un contrat et si la personne concernée est tenue de fournir les données à caractère personnel, ainsi que sur les conséquences éventuelles de la non-fourniture de ces données » (3) .
• Risques pour les libertés et droits fondamentaux des personnes concernées (article 4) : le CEPD conclut que le « tableau des hachures avec perte » (dans le cadre de la procédure dite de Lossy Hashing censée anonymiser les données personnelles), ainsi que les numéros de téléphone des utilisateurs associés en tant que liste de non-utilisateurs, constituent des données personnelles, et demande à la DPC de modifier son projet de décision en conséquence pour éviter un risques pour les libertés et droits fondamentaux des personnes concernées (4).

Objections et griefs des autres « Cnil »
De plus, le CEPD exige de la DPC qu’elle modifie son projet de décision « de manière à ce que le délai de six mois pour la conformité soit réduit à une période de trois mois » – à savoir a priori jusqu’au 2 décembre 2021 par rapport au 2 septembre de la décision finale.
• Principes relatifs au traitement des données à caractère personnel (article 5) : Compte tenu de la gravité, de la nature générale et de l’impact des infractions, la DPC est tenue d’inclure dans sa décision finale une constatation de violation du principe de transparence (5) selon lequel « les données à caractère personnel doivent être traitées de manière licite, loyale et transparente au regard de la personne concernée (licéité, loyauté, transparence) ».
• Informations à fournir lorsque les données à caractère personnel n’ont pas été collectées auprès de la personne concernée (article 14) : La DPC est tenue, là aussi, de modifier son projet de décision pour tenir compte du fait que la violation de l’obligation d’informations à fournir sur le traitement des données des non-utilisateurs sous la forme de listes de non-utilisateurs après la procédure d’anonymisation des données personnelles (Lossy Hashing).
• Concernant l’amende administrative : le CEPD charge la DPC de modifier son projet de décision afin de tenir compte du chiffre d’affaires total de toutes les sociétés composant l’entreprise unique Facebook (WhatsApp, Instagram inclus) pour calculer le montant de l’amende elle-même, et considérer la date de la décision finale (2021) à partir de laquelle les revenus de l’exercice précédent (2020) devrait être considéré.
• Concernant l’amende administrative (article 83) : la DPC a été contrainte d’amender son projet de décision afin de prendre également en compte les autres infractions – en plus de l’infraction la plus grave – dans le calcul de l’amende (6), sous réserve des critères d’efficacité, de proportionnalité et de dissuasion (7). Compte tenu du chiffre d’affaires annuel global de Facebook, ainsi que des infractions constatées et des facteurs aggravants correctement identifiés par la DPC, le CEPD a estimé que l’amende administrative initiale envisagée par la « Cnil » irlandaise – à savoir entre 30 et 50 millions d’euros – n’était pas suffisante et lui a demandé de la réévaluer. Pour autant, bien que les 225 millions d’euros représentent plus de quatre fois l’amende initialement envisagée par l’Irlande et qu’elle soit la deuxième plus élevée dans les sanctions pécuniaires sur les données personnelles en Europe, la somme à payer par Facebook ne représente que… 0,08 % de son chiffre d’affaires concerné. Mais pour la firme de Mark Zuckerberg, qui avait tenté en vain de bloquer l’enquête de la « Cnil » irlandaise devant la Haute cour de justice du pays, la sanction est jugée disproportionnée. « Le RGPD prévoit des amendes allant jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires. Cela montre à quel point la DPC est encore extrêmement dysfonctionnelle », a taclé le 2 septembre l’Autrichien Max Schrems (photo ci-dessous), président de l’organisation à but non lucratif Noyb dont il est le fondateur (8).
Cette décision contraignante (9) adoptée par le CEPD dans la torpeur de l’été (le 28 juillet 2021 donc) a non seulement été adressée à la « Cnil » irlandaise mais aussi à ses homologues de l’Union européenne. La DPC a ainsi durci et annoncé sa décision finale rectifiée début septembre (10). La DPC avait un délai d’un mois à compter de la réception de la décision contraignante pour transmettre sa décision finale corrigée à la présidente du CEPD, actuellement Andrea Jelinek. La décision contraignante et la décision finale (11) qui en découle ont été rendues publiques (12).
Ce verdict à l’encontre de Facebook-WhatsApp fera date, en Europe mais aussi dans le monde. Cela restera un cas d’école pour tous les praticiens et les garants de la vie privée. Bien d’autre plaintes sont déjà sur le bureau de la DPC. Mais Facebook n’est pas au bout de ses peines, notamment depuis que WhatsApp a annoncé en début d’année à ses 2milliards d’utilisateurs de nouvelles conditions d’utilisation permettant – depuis mi-mai (13) – des transferts de données personnelles vers le réseau social.

Les « amis » consommateurs se rebiffent
C’est sur ces nouvelles règles controversées de WhatsApp que le Bureau européen des unions de consommateurs (Beuc) et huit de ses membres – dont l’association UFC-Que Choisir en France – ont déposé plainte contre la filiale de Facebook le 12 juillet dernier auprès de la Commission européenne et du CPC, réseau européen des autorités de consommateurs (14). Le Beuc accuse le numéro un mondial des réseaux sociaux de « violations multiples des droits des consommateurs de l’UE » et de « pressions indues sur ses utilisateurs pour qu’ils acceptent ses nouvelles conditions d’utilisation et sa politique de confidentialité » (15), alors qu’elles ne sont ni transparentes ni compréhensibles pour les internautes. @

Charles de Laubier

Données personnelles : après avoir fait plier Facebook, Max Schrems s’attaque à Appleet bientôt à Google

L’organisation Noyb, cofondée par l’Autrichien Max Schrems (33 ans) qui a tenu tête à Facebook en 2015 et en 2020, a déposé plainte le 16 novembre contre Apple et son « cookie » IDFA, auprès des « Cnil » allemande et espagnole – en attendant d’autres autorités dont la France. Prochaine cible : Google.

Il est libre Max… « Il met de la magie, mine de rien, dans tout ce qu’il fait. Il a l’sourire facile, même pour les imbéciles. Il s’amuse bien, il [ne] tombe jamais dans les pièges. Il s’laisse pas étourdir par les néons des manèges. Il vit sa vie sans s’occuper des grimaces. Que font autour de lui les poissons dans la nasse. Il est libre Max, il est libre Max… », chantait Hervé Cristiani dans les années 1980 (1). Libre, c’est le cas de Max Schrems (photo) né durant cette décennie-là, en octobre 1987. Cet Autrichien a maintenant 33 ans et il est depuis deux ans et demi président d’honneur de Noyb.

Vers une affaire « Schrems 3 » avec Apple
L’organisation non gouvernementale Noyb – pour « None of Your Business » (« Ma vie privée n’est pas votre affaire ») – est née le jour même que l’entrée en vigueur en Europe du Règlement général sur la protection des données (RGPD), à savoir le 25 mai 2018. L’action de cette ONG professionnelle pour le respect à la vie privée (numérique) se veut similaire aux organisations de défense des droits des consommateurs et a vocation à engager des poursuites contre des sociétés – GAFA en tête – au nom de leurs utilisateurs. Noyb s’appuie sur les succès de son cofondateur Max Schrems, qui se présente comme « avocat et militant pour la vie privée », épaulé au sein du conseil d’administration par Christof Tschohl, avocat et spécialiste de la protection de la vie privée, et de Petra Leupold, avocate et spécialiste des droits des consommateurs.
Avant de créer Noyb, Maximilian Schrems (2) s’est fait connaître en portant plainte, en tant que citoyen autrichien, contre Facebook accusé de transférer les données personnelles de ses utilisateurs européens vers les Etats- Unis. Ce qui a amené la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) à invalider en 2015 le « Safe Harbor », lequel autorisait depuis l’année 2000 le transfert des données personnelles des citoyens européens vers les Etats-Unis sous certaines conditions. C’est l’affaire dite « Schrems 1 » (3) qui a propulsé Max Schrems au-devant de la scène médiatique face à Facebook. Le « Safe Harbor » annulé (4), il a été remplacé en 2016 par le « Privacy Shield » malgré un avis mitigé à l’époque du groupement des « Cnil » européennes (5), dit « Article 29 » ou G29 – devenu le Comité européen de la protection des données (CEPD). Fort de son premier succès à l’encontre du « Safe Harbor », Max Schrems a encore porté plainte, contre cette fois le « Privacy Shield », ce « bouclier de la vie privée » ou « bouclier des données » qui permettait aux Etats-Unis d’être considérés comme un pays ayant un niveau de « protection adéquate » par la Commission européenne pour les transferts de données à caractère personnel vers des organisations américaines auto-certifiées. Là aussi la CJUE a eu à se prononcer et, le 16 juillet 2020, à l’invalider à son tour au regard cette fois des exigences découlant du RGPD et à la lumière des dispositions de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne garantissant le respect de la vie privée et familiale, de la protection des données personnelles et du droit à une protection juridictionnelle effective (6). C’est l’affaire dite « Schrems 2 » (7) qui a renforcé la légitimité de Max Schrems (8) face à la firme de Mark Zuckerberg.
La plainte déposée le 16 novembre dernier à l’encontre d’Apple – à la fois devant la « Cnil » allemande, le BfDI (9), et devant la « Cnil » espagnole, la AEPD (10) –, s’inscrit dans le prolongement des deux actions précédentes et pourraient bien constituer l’affaire « Schrems 3 ». Contacté par Edition Multimédi@, un autre avocat de Noyb, Stefano Rossetti, spécialisé lui aussi dans la protection de la vie privée, nous indique que la même plainte contre la firme de Cupertino pourrait être déposée auprès d’autres autorités de protection des données personnelles dont la Cnil en France : « Oui, nous considérons la France comme une option ».
Et une porte-parole de l’organisation, Phoebe Baumann, nous a expliqué : « Nous avons décidé d’aller d’abord en Allemagne et en Espagne, car nous y avions des personnes concernées et un cadre juridique établi, y compris une jurisprudence qui appuyait notre point de vue ». Après ces cookies-maison d’Apple, le système similaire chez Google sur terminaux Android sera à son tour contesté, comme Noyb nous l’a confirmé : « Nous étudions également Android et Google. En fin de compte, nous voulons voir ces traqueurs hors de nos téléphones. ».

Absence de consentement préalable
Dans cette affaire « Schrems 3 », il ne s’agit pas cette fois de transfert de données personnelles de l’Europe vers les Etats-Unis, mais de traçage des utilisateurs sur leurs smartphones et tablettes – en l’occurrence les iPhone voire les iPad d’Apple. La firme de Cupertino utilise un cookiemaison appelé IDFA, pour « Identifier for Advertisers ». Autrement dit, il s’agit d’un code de suivi unique généré par défaut – et donc sans le consentement préalable du mobinaute – par le système d’exploitation iOS des smartphones et des tablettes de la marque à la pomme. Chaque utilisateur ne peut qu’accepter la licence logiciel (Apple iOS and iPad OS Software License Agreement) s’il veut utiliser son iPhone et/ou son iPad. Or, sans qu’il le sache ni y consente, l’utilisateur des terminaux à la pomme se retrouve pisté à son insu par IDFA, « cette chaîne unique de chiffres et de caractères » qui permet à Apple et à d’autres tiers – comme les annonceurs publicitaires – d’identifier les utilisateurs à travers les applications et même de relier les comportements en ligne (cross device tracking).

La directive « ePrivacy » à la rescousse
Grâce à l’IDFA, Apple et des entreprises tierces partenaires telles que les éditeurs d’applications et les annonceurs peuvent « suivre le comportement des utilisateurs, élaborer des préférences de consommation et fournir des publicités personnalisées ». C’est là que le bât blesse : ce code de traçage suppose le consentement préalable des utilisateurs, conformément à la législation européenne : non seulement le RGPD mais aussi, et surtout, la directive dite « ePrivacy » de 2002 sur le « traitement des données à caractère personnel et protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques » (11). Apple enfreint l’article 5 (paragraphe 3) de cette directive qui impose aux Etats membres de « veille[r] à ce que le stockage des informations ou l’accès aux informations déjà stockées dans ces dispositifs ne soient autorisés qu’avec le consentement préalable de l’utilisateur ». en n’obtenant pas le consentement éclairé et sans ambiguïté de ses utilisateurs pour pouvoir déposer son logiciel espion, Apple viole cette loi européenne sur les cookies. Dans ses deux plaintes quasi identiques déposé en Allemagne et en Espagne, l’organisation Noyb précise qu’« étant donné que l’IDFA est stocké et récupéré sans équivoque à partir du dispositif utilisateur, l’article 5 (3) de la directive “ePrivacy”, en tant que lex specialis, s’applique au lieu de la disposition plus générale de l’article 6 du RGPD (Apple ne peut donc prétendre à aucun intérêt légitime pour son traitement) ». Juridiquement, Noyb souligne que la directive sur la protection des données électroniques prévaut sur le RGPD (12).
La firme de Cupertino joue en outre un double-jeu, comme le souligne Stefano Rossetti : « Alors qu’Apple a introduit des fonctions dans son navigateur pour bloquer les cookies, elle place des codes similaires dans ses téléphones, sans aucun consentement de l’utilisateur. Il s’agit là d’une violation flagrante de la législation européenne sur la protection de la vie privée ». Contrairement à la plainte déposée en Espagne par l’Espagne contre Apple, celle d’Allemagne l’a été notamment par un Berlinois de 45 ans, qui a échangé plusieurs messages avec le fabricant d’iPhone au cours du mois de février dernier. Dans une première réponse, l’équipe de protection des renseignements personnels d’Apple n’a pas répondu à la demande du plaignant qui demandait pourquoi l’IDFA avait été activé sur son terminaux et « pour essayer de comprendre pourquoi il n’était pas désactivé par défaut » (ou « comment le suivi des publicités n’est pas limité par défaut »), tout en exprimant auprès de l’équipe « des doutes sur la légalité de ce traitement » et sur le risque pour ses données personnelles. Le 20 février 2020, le quadragénaire obtient d’Apple une tentative de clarification : « L’identi-ficateur publicitaire dont nous avons parlé précédemment n’est pas associé à votre identifiant Apple [Apple ID, ndlr]. Il est généré aléatoirement sur votre appareil. Les renseignements recueillis en association avec un identificateur de publicité ne sont pas personnellement identifiables et, par conséquent, le consentement ne découle pas du RGPD ». Ce à quoi le plaignant a répondu : « Je crois que ce n’est pas vrai. Par exemple, ma page “off-Facebook” montre plusieurs applications qui partageaient ces informations [l’IDFA, par ex.] avec Facebook, et cela est lié à mes informations privées. Je crois que cet identifiant pseudo-anonyme est des données privées en vertu du RGPD précisément parce qu’il peut être lié à moi personnellement ». Le 21 février, Apple s’est contenté de répondre, en bottant en touche : « Nous ne sommes pas en mesure de formuler des commentaires sur la façon dont un tiers peut traiter de telles questions ». L’entreprise à la pomme n’a ensuite plus jamais répondu au Berlinois qui souhaitait approfondir sur ce différend touchant à sa vie privée. Gageons que la firme de Cupertino sera plus claire dans ses réponses aux autorités européennes de protection des données.

Restriction aux tiers en 2021, pas pour Apple
En septembre dernier, Apple avait annoncé une « amélioration » de l’IDFA dans le sens d’une « restriction d’accès » par les développeurs et les annonceurs. Mais cette nouvelle disposition – via la fonction App Tracking Transparency (ATT) – ne sera en place qu’en 2021 avec l’iOS version 14, qui devrait donner aux utilisateurs le choix de permettre ou non aux applications – dont Facebook qui se brouille à ce sujet avec la pomme – de les suivre à des fins publicitaires et de transmettre leurs données personnelles à des tiers. « Ces changements semblent restreindre l’utilisation de l’IDFA pour les tiers (…). Toutefois, le stockage initial de l’IDFA et l’utilisation qu’en fera Apple se feront toujours sans le consentement des utilisateurs et donc en violation du droit communautaire », déplore encore Noyb. @

Charles de Laubier

Rémunérer les internautes – pour l’utilisation de leurs données personnelles – fait son chemin

Si c’est gratuit, c’est vous le produit ! Mais les internautes ne sont plus dupes : leurs données personnelles sont « l’or noir du XXIe siècle » et ils comptent bien se faire rémunérer pour leur exploitation ou pour visualiser de la publicité. Les start-up de la monétisation des données se multiplient.

La start-up française Tadata va avoir deux ans en fin d’année. Cet été, la Cnil (1) a clôturé l’enquête qu’elle avait lancée au printemps à son encontre après avoir été « alertée » par l’Internet Society France (Isoc France) en février dernier. Cette association qui représente les internautes dans les instances de la gouvernance de l’Internet en France et dans le monde, a décrété un postulat : les données personnelles procèdent d’un droit fondamental et, à ce titre, elles ne peuvent être vendues ou faire l’objet d’une monétisation.

Cnil pour, gouvernement et CNNum contre
L’Isoc France, présidée par Nicolas Chagny depuis cinq ans, a reproché à la jeune pousse parisienne, fondée fin 2018 par Alexandre Vanadia et Laurent Pomies, de justement proposer à un public de jeunes internautes de gagner de l’argent contre le partage de leurs données personnelles. Et l’association de « regretter l’approche simpliste et opaque du gain d’argent facile et rapide (…) ciblant un public vulnérable ». Tadata se présente comme « la première plateforme de monétisation des données personnelles ». Le sang de l’Isoc France n’avait fait qu’un tour, tout en affirmant constater « des non-conformités » au regard notamment du règlement européen sur la protection des données personnelles (RGPD), avait donc « alerté immédiatement la Cnil selon un principe de précaution, avant la montée en puissance d’un tel service » (2). Mais après quelques mois d’investigation, la Cnil a informé en juillet dernier la société qu’elle avait finalement classé sans suite cette affaire, en clôturant la procédure sans aucune sanction (3), la société s’étant mise en conformité avec le RGPD entre autres aspects juridiques. « La Cnil nous a même invité à participer à des échanges et débats sur la thématique de la monétisation des données personnelles avec ses équipes », indique Christel Monge (photo de gauche), présidente de Tadata, à Edition Multimédi@. Le gendarme des données valide donc un nouveau modèle économique des données, là où le gouvernement est plutôt contre la vente des données personnelles. En mars 2018, à la suite d’un rapport « Mes data sont à moi » du think tank libéral Génération Libre prônant la « patrimonialité des données numériques » et leur rémunération (4), Mounir Mahjoubi, alors secrétaire d’Etat au Numérique, avait déclaré lors d’un débat du Syntec Informatique : « Je suis contre toute propriété et vente des données personnelles ». Quant au Conseil national du numérique (CNNum), dans un rapport de 2017, il avait déjà jugé ce « système patrimonial pour les données à caractère personnel » comme « une proposition dangereuse » (5). Avec ce feu vert explicite de la Cnil, la plateforme Tadata met désormais les bouchées double : elle propose donc aux 15- 25 ans de lui faire part d’informations personnelles de leur choix : centres d’intérêt, habitudes de consommation, besoins actuels, … L’internaute est invité à remplir des formulaires. Ensuite, les annonceurs auxquels sont transmis ces données pourront retenir des profils pour utiliser leurs données, contre de l’argent. L’internaute consentant accepte ainsi de « céder l’exploitation » de ses données personnelles « pour une durée de deux ans, dans le cadre d’une licence d’utilisation concédée aux annonceurs ». L’utilisateur a le choix entre être payé par virement sur un compte bancaire (Iban à renseigner à l’inscription), soit par carte cadeau où seront crédités chaque mois les gains obtenus. Tadata a passé un partenariat avec la société Wedoogift, qui permet aux bénéficiaires de dépenser leurs « cartes cadeaux » – valables chacun un an – dans plus de 500 enseignes physiques, dont des cinémas, et plus de 150 sites Internet. Tadata se positionne implicitement comme un anti- GAFAM qui s’arrogent des droits d’exploitation massive de données en échange de la gratuité de leurs services souvent incontournables et en position dominante. « Tous les jours, les acteurs d’Internet utilisent tes données personnelles à ton insu et se font de l’argent sur ton dos ! Avec Tadata, dis “Stop” : reprends le contrôle de tes données perso et gagne de l’argent avec ! », lance la plateforme de monétisation.

Start-up Tadata, My Data, Polymate, …
En contrepartie de son autorisation, le jeune internaute perçoit une quote-part de la redevance perçue par Tadata en vertu des licences d’utilisation conclues auprès de clients (dont les annonceurs), quote-part qui sera comprise « entre 3 et 5 euros » à chaque licence concédée pour l’utilisation par le client d’une base de données contenant des données à caractère personnel (DCP) du jeune concerné. Tadata n’est pas la seule jeune pousse, loin de là, à vouloir monétiser les données personnelles. Toujours en France, à La Rochelle cette fois, My Data – alias « My Data is Rich » (MDiR) – propose de « transformer vos données en royalties » en se présentant comme un tiers de confiance « pour la collecte, la gestion, la protection et la valorisation de données personnelles », indépendant des GAFAM, qui fait le lien entre les « auteurs de données » (essentiellement les particuliers) et les « consommateurs de données personnelles », à savoir les entreprises et tout organisme. MDiR, qui compte « plusieurs milliers de personnes », redistribue à ces « contributeurs » 50 % des gains engendrés par la valorisation de leurs données. « Nous ne sommes pas vendeur de données mais tiers de confiance. Les données sont pseudonymisées et ne sont identifiées auprès d’une entreprise tierce qu’après un droit d’usage accordé par la personne concernée », explique son président Eric Zeyl à Edition Multimédi@. Il l’assure : cette approche permet à chacun d’être « enfin un acteur éclairé et consentant de l’utilisation de ses données », tandis que les entreprises disposent ainsi de solutions « RGPD by design » pour développer des parcours clients ou prospects « data responsables ». La jeune pousse rocheloise a annoncé miseptembre son rapprochement avec le groupe Doxsa (6).

Brave rémunère en cryptomonnaie
Autre start-up française du « données contre royalties » : Polymate, basée à Bailly Romainvilliers (en région parisienne) et présidée par Armel Satchivi (photo de droite), qui revendique être le « premier réseau social géolocalisé qui rémunère ses utilisateurs ». Alors que YouTube (Google) ou, plus récemment, TikTok (ByteDance) sont des mégaplateformes qui rémunèrent leurs créateurs et influenceurs en fonction d’un grand nombre d’abonnés à « leur chaîne » ou de volume d’heures diffusées sur le réseau social, Polymate monnaye la data géolocalisée de ses utilisateurs devenus d’office « influenceurs ». « Un tag est une vidéo, une image ou un texte, qui a pour particularité d’être géolocalisé et de n’être visible que dans un rayon de 100 mètres autour de son emplacement. Seuls les autres “Polymaters” situés à proximité pourront ainsi voir, commenter et partager les tags, et contacter leurs auteurs », explique Armel Satchivi à Edition Multimédi@. Seuls les autres Polymaters situés à proximité pourront ainsi voir, commenter et partager les tags, et contacter leurs auteurs. Du côté des navigateurs web cette fois, Brave permet aux utilisateurs de récupérer les tokens – des jetons – générés en l’utilisant et d’obtenir ainsi une rémunération pour les publicités dont ils autorisent l’affichage. La start-up Brave Software a été créée il y a cinq ans maintenant par Brendan Eich, qui fut cofondateur de Mozilla (Firefox) et créateur du JavaScript. Aujourd’hui, le navigateur Brave revendique près de 20 millions de « braves » par mois dans le monde (19 millions en octobre précisément, contre 12 millions en mai dernier). « Votre attention est précieuse. Gagnez de l’argent en visualisant des publicités qui respectent la vie privée, puis donnez à votre tour pour soutenir les créateurs de contenu que vous aimez », explique l’éditeur de ce navigateur open source construit à partir de Chromium de Google. Fini les publicités envahissantes en naviguant sur le Web et fini la vente des données confidentielles à des annonceurs, la plupart du temps sans le consentement explicite de l’internaute. « Avec votre ancien navigateur, vous payiez pour naviguer sur le Web de la manière suivante : votre attention était utilisée pour visualiser des publicités », rappelle la start-up californienne (basée à San Francisco). Avec le système «Brave Rewards », l’attention de l’internaute – « le temps de cerveau disponible », diraient certains – est valorisée sous la forme de jetons baptisés « Basic Attention Token » (BAT), « une nouvelle façon de valoriser l’attention en unissant les utilisateurs, les créateurs de contenu et les annonceurs ». Les jetons BAT constituent une cryptomonnaie qui s’appuie sur une plateforme décentralisée publicitaire – Ad Exchange – basée, elle, sur la blockchain open source Ethereum. Une fois inscrit, le navigateur commence à comptabilité « la quantité d’attention » accordée par l’internaute aux sites web qu’il visite. Explication du mode de fonctionnement : « Vous pouvez supprimer les sites (web) que vous ne souhaitez pas soutenir et offrir des pourboires directement à des créateurs. Toutes ces opérations sont anonymes : personne (pas même l’équipe de Brave) ne peut voir qui soutient quel site (web) », assure la plateforme.
En octobre, Brave Software a indiqué avoir reversé à ce jour quelque 12 millions de dollars à des créateurs de contenus (7) et compte plus d’un demi-million de sites web référents certifiés. Et de préciser : « Des publicités privées sont activées par défaut dans Brave Rewards, et cela vous permet de gagner des jetons BAT à chaque fois que vous visualisez une publicité. (…) Vous pouvez contrôler le nombre de publicités privées que vous souhaitez voir et gagner 70 % du revenu de la publicité que nous recevons de nos annonceurs ». C’est un peu comme accumuler des miles aériens, mais au lieu de voler l’utilisateur navigue ! « En échange de votre attention, vous accumulez des jetons pendant votre navigation. (…) Vous pouvez choisir de visualiser des publicités privées une à cinq fois par heure. Vous pouvez bien sûr aussi désactiver les publicités privées à tout moment ».

La Californie prône la « Data Dividend Tax »
En février 2019, le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, a proposé « un “dividende de données” pour partager la richesse générée par les données personnelles avec les utilisateurs qui y ont contribué » (8). Ce projet prône une taxe numérique baptisée Data Dividend Tax (DDT), dont le modèle est présenté dans un rapport écrit par un groupe de travail indépendant. Ce document de 42 pages a été mis à jour le 6 Août dernier (9). Le fait que cet appel soit lancé par l’Etat américain des GAFAM et des Big Tech de la Silicon Valley donne une portée particulière à cette initiative. @

Charles de Laubier

Anonymisation des données personnelles : un enjeu de taille, notamment en matière de santé

Alors qu’une deuxième vague de coronavirus menace, le gouvernement croit en l’utilité des données « pseudonymisées » de son application mobile StopCovid malgré le peu d’utilisateurs. Mais le respect de la vie privée ne suppose-t-il pas une « anonymisation » ? Le dilemme se pose dans la santé.

Aucune enquête coordonnée en Europe n’a été menée sur le scandale « Cambridge Analytica »

Plus de deux ans après l’éclatement de l’affaire « Cambridge Analytica » sur l’exploitation massive et illégale des données personnelles de dizaines de millions d’utilisateurs de Facebook à des fins de ciblages politico-publicitaires, aucune enquête n’a été menée en France par la Cnil. Surprenant.

Aux Etats-Unis, Facebook a écopé l’été dernier d’une amende record de 5 milliards de dollars infligée par la FTC (1) pour n’avoir pas géré ni protégé correctement les données personnelles de ses utilisateurs. En Grande-Bretagne, la « Cnil » britannique – ICO (2) – l’a condamné en octobre 2019 au maximum que lui permettait la loi du pays pour violation sur la protection des données, soit 500.000 livres (plus de 565.000 euros). Ces données ont notamment été exploitées en 2016 pour influencer respectivement l’élection présidentielle américaine et le référendum britannique sur le Brexit.

La Cnil n’a pas jugé bon d’enquêter
Mais bien d’autres pays ont eux-aussi enquêté sur ce siphonnage de données personnelles opéré illégalement par la société londonienne Cambridge Analytica (devenue Emerdata) sur près de 100 millions d’utilisateurs de Facebook : 50 millions aux Etats-Unis, 87 millions si l’on y ajoute d’autres pays dans le monde. Mais connaîtra-t-on jamais l’ampleur de la manipulation à portée planétaire ? En Australie, la « Cnil » australienne – OAIC (3) – a lancé en mars dernier une action judiciaire contre Facebook pour avoir transmis Cambridge Analytica les données personnelles de 311.127 Australiens (4). Au Canada, la « Cnil » canadienne – OPC (5) – a saisi en février la justice contre Facebook accusé là aussi d’avoir transmis des données privées sans autorisation à Cambridge Analytica (6).
En Europe, en dehors de la Grande-Bretagne où Cambridge Analytica avait son siège social, l’Italie – via son gendarme de la concurrence AGCM – a rappelé à l’ordre la firme de Mark Zuckerberg accusée de continuer à collecter de façon non transparente des données personnelles en violation de ses engagements pris en novembre 2018 – assortis à l’époque de deux amendes pour un total de 10 millions d’euros (7). En Espagne, comme par ailleurs au Brésil, Facebook a dû aussi mettre la main au portefeuille à la suite du scandale « Cambridge Analytica ». Et en France ? Quatre jours après ce samedi 17 mars 2018 où l’affaire « Cambridge Analytica » a éclaté au grand jour (8), la Cnil (9) publiait un communiqué disant que « l’ICO, la Cnil du Royaume-Uni, enquêtait sur le sujet » (10). Contacté par Edition Multimédi@ pour savoir auprès de sa présidente Marie-Laure Denis (photo de gauche) si la Cnil avait mené une enquête en France pour y connaître l’impact de ce scandale retentissant, un porte-parole nous a répondu que non : « Tant au regard du nombre de ressortissants français concernés, que des cas d’usage des données en cause (Brexit et élections américaines), la France était peu concernée et la Cnil a ainsi préféré suivre le dossier dans le cadre de la coopération européenne en lien avec l’ICO plutôt que de porter sa propre procédure ». On connaît la suite : la « Cnil » britannique a donc mis à l’amende Facebook. Mais aucun rapport d’enquête n’a été fourni sur la France, où a tout de même eu lieu la campagne présidentielle de 2017 avec son lot de fake news (compte bancaire aux Bahamas d’Emmanuel Macron) et d’ingérences étrangères en ligne (présumées d’origine russes). Cambridge Analytica a-t-elle de Londres tiré les ficelles des réseaux sociaux pour orienter l’électorat français ?
Facebook a-t-il facilité l’exploitation des données de ses utilisateurs, au nombre de plus de 35 millions en France ? Faute d’en savoir plus, Edition Multimédi@ s’est tournée vers la « Cnil » irlandaise – la DPC (11) – puisque Facebook a son siège européen à Dublin, capitale d’Irlande. Mais là aussi, pas d’enquête sur le scandale « Cambridge Analytica », alors que l’on aurait pu penser que le DPC soit le « chef de file » de ses homologues européens – dont la Cnil en France – pour mener des investigations. Graham Doyle, adjoint à la DPC de la commissaire Helen Dixon (photo de droite), a justifié l’absence d’enquête de la « Cnil » irlandaise sur ce scandale : « Nous n’avons pas ouvert d’enquête sur Facebook concernant le problème de Cambridge Analytica, car il s’est produit avant l’introduction du RGPD et du mécanisme du guichet unique. La DPC irlandaise est devenue l’autorité de contrôle chef de file de Facebook avec l’introduction du RGPD le 25 mai 2018. Avant cette date, il n’y avait pas de chef de file européen ».

Pas d’« autorité chef de file » avant mai 2018
Le règlement général sur la protection des données (RGPD) prévoit en effet, dans son article 56, que la « Cnil » du pays européen où est basé le siège du responsable du traitement des données à caractère personnel (ou du sous-traitant) – en l’occurrence Facebook en Irlande – est compétente pour agir en tant qu’« autorité de contrôle chef de file » (12). « C’est l’autorité irlandaise qui est chef de file sur cette affaire », nous a répondu la Cnil. Faute d’enquête coordonnée en Europe sur le scandale « Cambridge Analytica », le numéro un mondial des réseaux sociaux s’en tire à bon compte. @

Charles de Laubier