Le Bureau européen de l’IA forme son bataillon

En fait. Le 27 mars à midi est la date limite pour se porter candidat à l’une des offres d’emploi du « Bureau de l’IA » (AI Office) créé au sein de la Commission européenne par l’AI Act dont la version finale sera soumise le 22 avril au vote du Parlement européen. Sont recrutés des techniciens et des administratifs.

En clair. « Postulez dès maintenant en tant que spécialiste technologique ou assistant administratif pour une occasion unique de façonner une IA digne de confiance. […] Le Bureau européen de l’IA jouera un rôle-clé dans la mise en œuvre du règlement sur l’intelligence artificielle – en particulier pour l’IA générale [ou AGI pour Artificial General Intelligence, aux capacités humaines, ndlr] – en favorisant le développement et l’utilisation d’une IA fiable, et la coopération internationale. […] La date limite de manifestation d’intérêt est le 27 mars 2024 à 12h00 CET », indique la Commission européenne (1).
Avant même l’adoption définitivement de l’AI Act (2) par le Parlement européen, prévue en séance plénière le 22 avril (pour entrer en vigueur l’été prochain), la DG Connect, alias DG Cnect (3), embauche déjà pour son Bureau de l’IA nouvellement créé. Les entretiens auront lieu à la fin du printemps et les prises de fonction à partir de l’automne 2024. Sont recherchés : chercheurs scientifiques, informaticiens, ingénieurs logiciels, data scientists ou encore spécialistes matériels, avec « une expérience technique avérée en IA » (marchine learning, deep learning, éthique et vie privée, cybersécurité, …).

Cybermenaces : bombe électronique à retardement

En fait. Le 14 octobre se terminent à Monaco les 23e Assises de la cybersécurité qui se sont tenues sur quatre jours. Les cyber-risques n’augurent rien de bon, tant les cyberattaques n’ont jamais été aussi redoutables avec le renfort de l’intelligence artificielle et maintenant de l’informatique quantique.

En clair. Sauve qui peut. Les responsables de la sécurité des systèmes d’information (RSSI) des entreprises et administrations, et leurs dirigeants, ont du souci à se faire. Jamais les cybermenaces et les cyberattaques n’ont été aussi fortes et nombreuses dans le monde. Internet devient le premier théâtre des opérations de la criminalité, de la guerre et de l’ingérence étrangère, tant économique que géopolitique. Cybersécurité et cyberdéfense n’y suffiront pas.
Aux 23es Assises de la cybersécurité (1), à Monaco, les quelque 5.000 visiteurs – Chief Information Security Officer (Ciso) en tête – auraient préféré ne pas verser dans le catastrophisme ni dans les théories du cybercomplot. Hélas, les prévisions sont plus que jamais alarmistes. Steve Morgan, fondateur de la société d’études américaine Cybersecurity Ventures, le confirme à Edition Multimédi@ : « Depuis trois ans, nos prévisions n’ont pas changé. Les coûts mondiaux des dommages liés à la cybercriminalité augmentent de 15 % par an et atteindront 10.500 milliards de dollars en 2025, contre 8.000 milliards de dollars en 2023. C’était 3.000 milliards de dollars en 2015 » (2).

Cybersécurité et cybercensure pourraient accélérer la balkanisation du Net et marginaliser l’Icann

L’avenir de l’Internet est hypothéqué par le cybersécuritaire et le cyberpolitiquement correct. Les remèdes contre les ransomware et les fake news pourraient s’avérer pire que les maux. Les lignes Maginot du Net et sa surveillance généralisée risquent d’accélérer son éclatement.

Pendant que les acteurs de l’Internet et les start-up de l’économie numérique font la fête à Lisbonne au Portugal, à l’occasion de la grand-messe du Web Summit du 1er au 4 novembre 2021 au Portugal (1), le « réseau des réseaux », lui, est de plus en plus pris à partie par les politiques de lutte contre la cybercriminalité et les cybermenaces, d’une part, et la traque aux fausses informations et aux contenus illicites, d’autre part. La pression des Etats, dont certains appellent à la « coopération internationale » contre ces « fléaux », réels ou pas, va peser sur le fonctionnement du Web et la gouvernance du Net.

Sécurité numérique : le Premier ministre plus que jamais en première ligne

Le Premier ministre est le régulateur de la sécurité numérique nationale. Le Conseil constitutionnel a confirmé en février dernier l’étendue de ses prérogatives et des garanties nécessaires en la matière. L’affaire « SolarWinds » appelle de telles garanties du côté des fournisseurs d’informatique en nuage.

Par Christophe Clarenc (photo), avocat, cabinet DTMV & Associés

La « transition numérique » de l’économie et des entreprises s’accompagne d’une démultiplication pandémique des violations et compromissions de sécurité des systèmes d’information (1), avec un flot continu de « fuites » massives de données, une industrialisation (à l’état de l’art) de l’exploitation des « failles » de sécurité, et une explosion des cyberattaques critiques.

L’Europe appelle la France à garder son sang-froid

En fait. Le 23 octobre, le Premier ministre français, Jean Castex, s’est rendu à Bruxelles pour y rencontrer la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Après l’assassinat à Conflans-Sainte-Honorine, le gouvernement est poussé à lutter contre la haine sur les réseaux sociaux – mais sans menacer la liberté d’expression.

En clair. Lutter contre la haine en ligne, oui. Porter atteinte à la liberté d’expression sur Internet, non. C’est en substance la mise en garde qu’a lancée la Commission européenne au gouvernement français, dont le Premier ministre – en déplacement à Bruxelles le 23 octobre – appelle à durcir la lutte contre la cyberhaine. Et ce, après les messages haineux ou appelant au crime lancés sur les réseaux sociaux en France, à l’encontre du professeur d’histoire et de géographie Samuel Paty, au cours des quelques jours précédant son assassinat le 16 octobre à Conflans Saint-Honorine (Yvelines) par un individu russe-tchétchène radicalisé (1). L’enseignant a été décapité dans la rue à proximité de son collège pour avoir montré en classe – dans le cadre d’un cours sur la liberté d’expression et par rapport à l’attentat de Charlie Hebdo – des caricatures représentant le prophète Mahomet. Avant de les montrer, il aurait « invité les élèves musulmans à sortir de la classe », d’après un représentant de parents d’élèves (2). La cyberhaine qui s’était propagée sur les réseaux sociaux, dont Facebook, à l’encontre de cet enseignant avant qu’il ne soit tué, a été unanimement condamnée. « Ceux qui sont derrière des messages inacceptables appelant ou justifiant des meurtres doivent répondre en justice », a assuré le 19 octobre la commissaire européenne Véra Jourová, en charge des valeurs et de la transparence (3). Mais elle met en garde le gouvernement français – poussé par sa droite et l’extrême-droite à mettre au pas les réseaux sociaux – contre une loi répressive envers Internet qui « pourrait miner la liberté d’expression, alors que nous essayons précisément de la protéger ».
La Commission européenne prépare justement un paquet législatif, le Digital Services Act (DSA), qui prévoit en l’occurrence, rappelle la commissaire tchèque, de « garantir que les contenus illégaux soient retirés avec les garde-fous nécessaires pour protéger la liberté d’expression ». Et Véra Jourová d’insister : « La haine ne connaît pas de frontières. Nous devons y répondre ensemble, d’une façon européenne ». Le Premier ministre français, lui, a dit le 21 octobre au Sénat vouloir « attaquer plus fortement encore à ceux qui manipulent et à ceux qui transmettent la haine », quitte à remettre sur le métier le projet de loi Avia qui avait été retoqué par le Conseil constitutionnel pour cause d’atteinte à la liberté d’expression. @