L’Hadopi met en garde contre son absorption par le CSA

En fait. Le 12 septembre, Marie-Françoise Marais, présidente de l’Hadopi, a été auditionnée par commission Culture, Education et Communication du Sénat.
Elle a mis en garde les « contradictions », « conflits d’intérêts » et « difficultés » d’une fusion CSA-Hadopi. Car Internet, ce n’est pas l’audiovisuel.

En clair. La question du transfert des compétences de l’Hadopi (1) vers le CSA (2) s’est invitée dans les débats sur le projet de loi sur l’indépendance de l’audiovisuel public.
« Notre expérience nous amène à mettre en évidence une dissymétrie majeure entre la régulation de l’audiovisuel et celle d’Internet : (…) les contenus ne sont pas les mêmes : l’Hadopi est compétente non seulement sur le film et la musique, mais aussi pour la photographie, le logiciel, le jeu vidéo et le livre numérique, secteurs confrontés à des problématiques spécifiques et appelant un traitement différencié », a déclaré Marie-Françoise Marais, tout en dénonçant avec Mireille Imbert-Quaretta (3) « un transfert précipité dont on ignore les contours : s’agirait-il de toutes les missions, comme l’envisage le rapporteur, ou la seule réponse graduée, comme a semblé l’affirmer la ministre – ce qui impliquerait que des emplois seraient détruits ? ».
MFM et MIQ ont-elles été entendues par le gouvernement ? Le fait est que le sénateur (PS) David Assouline, pris entre deux feux (les mises en garde des deux présidentes et l’hostilité des socialistes), n’a finalement pas déposé d’amendement pour inscrire la fusion Hadopi-CSA dans le projet de loi sur l’indépendance audiovisuelle qui sera débattu les
1er et 2 octobre prochains. Les députés (PS) Christian Paul et Patrick Bloche se sont exprimés le jour même de l’audition contre l’amendement Assouline.

Lescure : amende « très lourde » en cas de récidive

En fait. Le 19 août, le quotidien La Montagne publiait une interview de Pierre Lescure qui revient sur l’amende de 60 euros proposée en mai par la mission
« Acte II de l’exception culturelle » qu’il a présidée. Toujours sans avancer de montant en cas de récidive, il veut en revanche celle-ci « très lourde ».

En clair. « L’amende de 60 euros que nous proposons n’est pas symbolique. Et nous suggérons qu’elle soit très lourde pour la récidive », précise Pierre Lescure à La Montagne. Depuis la publication du rapport de la mission « Acte II de l’exception culturelle » en mai dernier, son discours se durcit donc concernant l’amende pour les récidivistes. D’une amende « éventuellement majorée » ou « aggravée » que suggère le rapport en
cas de récidive, il est question maintenant d’amende « très lourde » pour les récidivistes. Ce durcissement de la dialectique intervient quelques semaines après la publication au Journal Officiel du décret du 8 juillet supprimant la coupure d’Internet (1). Mais seule « la contravention de 5e classe » de 1.500 euros pourra désormais être prononcée pour l’infraction dite de « négligence caractérisée » prévue dans la réponse graduée de l’Hadopi. C’est cette sanction pécuniaire que le rapport Lescure a proposé de ramener à une somme forfaitaire de 60 euros pour rester dissuasive. Autrement dit, même si la peine complémentaire d’un mois de suspension de l’accès à Internet disparaît, le tribunal d’instance – en attendant que le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) ne prenne le relais de l’Hadopi – pourrait toujours aujourd’hui prononcer une amende de 1.500 euros d’amende. Est-ce à ce montant « très lourd » que pense Pierre Lescure en cas de récidive après une première amende de 60 euros ? Pour y voir plus clair, il faudra attendre le prochain débat parlementaire. En attendant, le Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) s’est inquiété en juillet dernier de « la reprise de la consommation illicite de musique en ligne » (sur la base des résultats
de la troisième vague du baromètre Ifop/Hadopi) et a appelé les pouvoirs publics à
« maintenir un cadre juridique protecteur des droits de propriété intellectuelle sur Internet, assortie d’amendes suffisamment dissuasives ».
Lors de la publication du rapport Lescure, le Snep avait estimé que « le faible montant proposé pour cette amende (60 euros) décrédibilise sérieusement la pertinence de l’ensemble de l’édifice » (2). Est-ce pour répondre à la critique du syndicat des majors de la musique (Universal Music, Warner Music, Sony Music) que Pierre Lescure se voudrait désormais encore plus sévère envers les récidivistes ? @

Les radios du Sirti ne lâcheront pas la RNT pour l’IP

En fait. Le 9 juillet, le Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (Sirti) a réaffirmé qu’il ne croyait pas à la radio sur IP. Les radios indépendantes veulent la RNT, dont l’avenir dépend maintenant d’un arrêté autorisant la norme DAB+ et du rapport du CSA au Parlement.

En clair. La radio numérique terrestre (RNT) n’en finit pas de s’enliser. « On ne lancera pas Paris, Marseille et Nice, avec les coûts que cela implique et le pari industriel que cela représente, sans une perspective de déploiement multirégional relativement rapide si ce n’est national », a prévenu Philippe Gault, président du Sirti. Or, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) n’a pas du tout respecté le calendrier du 10 mai 2012, pourtant présenté devant le Conseil d’Etat, pour de nouveaux appels à candidatures RNT dans 20 zones régionales (68 % de la population), qui devaient être lancés de juin 2012 à avril 2013. Il n’y a que Paris, Marseille et Nice. Depuis le 15 mars dernier, 14 multiplex sur 19 ont été soumis au CSA : soit 6 multiplex à Paris (54 radios, dont 23 nouvelles), 4 multiplex à Marseille (36 radios, dont 18 nouvelles) et 4multiplex à Nice (36 radios, dont 18 nouvelles).
Le régulateur avait dit lors du colloque du Sirti 10 avril dernier qu’il annoncerait six mois
à l’avance le début des émissions. A ce jour, silence radio : ce qui reporte à début 2014
le lancement de la RNT.Le CSA attend en fait, à l’instar des radios autorisées concernées, la publication de l’arrêté permettant d’utiliser la norme DAB+ (testée à Nantes et à Saint-Nazaire jusqu’au 31 juillet) moins coûteuse que le T-DMB. « Le process “Paris, Marseille et Nice” est en panne », déplore Philippe Gault. A ce changement de technologie s’ajoute l’incertitude sur le sort que le nouveau président du CSA réservera à la RNT (1).
Olivier Schrameck doit en effet remettre au Parlement son rapport sur la RNT (2). Cela devrait coïncider avec les Assises de la radio annoncées pour l’automne par Aurélie Filippetti. La volonté politique en faveur de la RNT sera-t-elle au rendezvous de la prochaine grande loi sur l’audiovisuel en 2014 ? « C’est au Parlement de définir avec
le gouvernement la route à suivre par le régulateur. Le rapport du CSA ne sera qu’une étape », insiste Mathieu Quétel, vice-président du Sirti et DG de Sud Radio Groupe. Et d’ajoute : « On ne se contentera pas de la radio sur IP. Nous avons besoin de ce relais
de croissance qu’est la RNT, à défaut d’avoir obtenu suffisamment de fréquences dans
le plan FM+ ». Pas sûr que des initiatives comme l’IP broadcast (Pierre Bellanger) ou R+ (Philippe Levrier), présentés comme des « plans B » pour la RNT (3), aillent dans son sens. @

Réforme de l’audiovisuel : plus de pouvoirs pour le CSAmais plus de fréquences pour l’Arcep

Le président de la République va continuer à nommer le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) mais le projet de loi débattu cet été renforcera l’indépendance de l’audiovisuel public et le pouvoir de sanction du CSA. En attendant 2014 pour tenter de réguler Internet.

Par Rémy Fekete, avocat associé, Gide Loyrette Nouel

« Moi, président de la République, je n’aurai pas la prétention de nommer les présidents des chaînes publiques, je laisserai ça à des instances indépendantes », déclarait le 2 mai 2012 le candidat François Hollande dans sa désormais célèbre anaphore de l’entre-deux tours. Voilà qui sera bientôt chose faite. Les contours du premier texte de réforme de l’audiovisuel – sur les deux voire trois qui sont au total attendus – ont été confirmés en Conseil des ministres du 5 juin 2013 (1). Ce projet de loi sera soumis en première lecture à l’Assemblée nationale le 24 juillet, soit avant la fin de la session parlementaire.

Droits de diffusion, chronologie des médias, statut d’hébergeur, conventionnement : les SMAd en question

Malgré une législation aménagée par rapport à celle applicable aux services linéaires, les services de médias audiovisuels à la demande (SMAd) peinent
à trouver leur place. Le CSA et la Commission européenne veulent favoriser
leur développement, le rapport Lescure livrant quelques pistes.

Par Christophe Clarenc (photo), associé, et Renaud Christol, counsel, August & Debouzy

Depuis l’adoption de la directive européenne sur les services de médias audiovisuels (1) (SMA) en 2007, dont les dispositions ont été transposées en droit français par une loi de 2009 (2) et complétées par le décret de 2010
sur les services de médias audiovisuels à la demande (3) (SMAd), les éditeurs de ces services en ligne – principalement vidéo à la demande (VOD) et télévision
de rattrapage (catch up TV) – bénéficient d’une réglementation propre. Leur développement est d’ailleurs présenté comme la réponse la plus appropriée au problème du téléchargement illégal, depuis que « l’échec de l’Hadopi » est – à tort ou à raison – une opinion généralement répandue.