A défaut de grande réforme du quinquennat, le paysage audiovisuel français (PAF) entame sa mue

Alors que plus de soixante sénateurs ont saisi le 30 septembre 2021 le Conseil constitutionnel sur le projet de loi « Anti-piratage », adopté définitivement la veille par l’Assemblée nationale, la grande réforme de l’audiovisuel du quinquennat n’a pas eu lieu. Mais le gouvernement y est allé par touches.

Par Charles Bouffier, avocat counsel, et Cen Zhang, avocat, August Debouzy*

Les plateformes de SVOD dominent le marché mondial des séries, la France étant à la traîne

Les pays asiatiques et américains sont les premiers donneurs d’ordres en termes de commandes de fictions. La France, pays de « l’exception culturelle », est moins demandeuse que le Royaume-Uni et l’Allemagne. Ce sont les plateformes de vidéo à la demande par abonnement (SVOD) qui donnent le la.

Quels acteurs mondiaux sont les plus importants en matière de commandes de programmes TV de fiction ? Quels pays de production sont les plus actifs ? La réponse n’est pas à aller chercher en France. Quels que soient les genres de programmes de télévision ou de plateforme (drame, thriller, comédie, science-fiction, jeunesse, aventure, horreur ou encore divertissement), ce sont la Chine et les Etats-Unis qui sont de loin les deux premiers pays en nombre de programmes de fiction commandés au cours des douze derniers mois.

Sortie des films en France : la chronologie des médias actuelle vit ses dernières semaines

Le 1er juillet, les organisations du cinéma français – le Blic, le Bloc et l’ARP (BBA) – ont proposé une nouvelle évolution de la chronologie des médias (organisant la sortie des films en salles, en VOD/SVOD et à la télévision). Elle fait suite à celle soumise par le CNC le 14 juin. L’été sera chaud…

Depuis le début de l’année, ce n’est pas moins de quatre propositions d’accord sur la chronologie des médias qui se sont succédées sans encore parvenir à faire consensus entre – au-delà des salles de cinéma arc-boutées sur leur monopole des quatre premiers mois de la sortie d’un film – les chaînes de télévision payantes (Canal+, OCS, …), les télévisions gratuites (France 2, TF1, M6, …) et les plateformes de vidéo à la demande par abonnement (Netflix, Amazon Prime Video, …).

L’audio payant prospère (streaming, podcasts, …), mais pas de radio hertzienne payante en vue

Spotify et Apple se lancent à leur tour dans les podcasts payants. Tandis que le streaming par abonnement payant a généré en France 74 % des revenus de la musique en ligne. La radio hertzienne (FM ou DAB+) reste, elle, à l’écart de cette monétisation malgré les tentatives sans lendemain d’il y a dix ans.

Il y a dix ans, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) lançait une consultation publique pour la diffusion de radios numériques sur des fréquences de la bande L (1) et dans la perspective d’autoriser un projet de radio hertzienne payante. Alors que la radio FM a toujours été historiquement gratuite pour les auditeurs, donner une place à un service de radio payante aurait été une petite révolution dans le PRF (paysage radiophonique français).

La date butoir du 31 mars a été franchie sans accord sur la chronologie des médias, et après ?

Comme prévu par un décret de janvier, les acteurs du cinéma, de l’audiovisuel et des plateformes vidéo avaient jusqu’au 31 mars pour se mettre d’accord sur une nouvelle chronologie des médias. En avril, il n’en est rien. Sauf rebondissement, le gouvernement a désormais la main.

La date du 31 mars 2021 fixée par le décret du 26 janvier dernier (1) restera symbolique dans les annales des négociations interminables entre les professionnels du cinéma, de l’audiovisuel et des plateformes vidéo autour d’une future chronologie des médias devenue arlésienne. A cette échéance, qui leur laissait deux mois de préavis, aucun compromis n’a finalement été trouvé. Sauf rebondissement de la filière cinématographique et audiovisuelle, la balle est maintenant dans le camp du gouvernement et de son actuelle ministre de la Culture, Roselyne Bachelot-Narquin.